Vu la requête, enregistrée le 22 janvier 2013, présentée pour la société SODIVO, dont le siège est 71 boulevard du Maréchal Joffre à Bourg-la-Reine (92340), représentée par son représentant légal, par Me Zamour, avocat ; la société SODIVO demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 0812117 du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des intérêts de retard y afférents auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 ;
2° de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- elle était fondée à constituer une provision pour créance douteuse sur la société Finkelsztajn à la clôture de l'exercice 2004 ;
- cette créance qui a été inscrite au prix d'une erreur comptable dans les comptes de l'exercice clos en 2004, doit être annulée ;
- l'administration n'a pas respecté la règle de l'annualité de l'impôt, en ne réintégrant pas les sommes facturées à la société Finkelsztajn de 1999 à 2003 au résultat du premier exercice vérifié et en ne pratiquant pas la correction symétrique des bilans pour compenser le rejet de la déduction de la provision constituée sur la société Finkelsztajn ;
- elle oppose un principe d'intangibilité du premier exercice non prescrit, jugé pourtant inconstitutionnel ;
- elle méconnaît la doctrine administrative 4-A-215 du 9 mars 2001 ;
- elle a refusé à tort le report en arrière du déficit né en 2007 de la transformation de provision litigieuse en provision pour créance irrecouvrable ;
..................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2014 :
- le rapport de M. Soyez, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Delage, rapporteur public ;
1. Considérant que la société SODIVO qui exerce l'activité de traiteur, relève appel du jugement du 22 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des intérêts de retard y afférents auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2004 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie et des finances ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions du livre des procédures fiscales relatives tant à la procédure de redressement contradictoire qu'aux procédures d'imposition d'office, et, en particulier de celles des articles L. 57 et suivants et de l'article L. 75 de ce livre, qu'après avoir prononcé le dégrèvement d'une imposition, l'administration ne peut établir, sur les mêmes bases, une nouvelle imposition sans avoir, préalablement, informé le contribuable de la persistance de son intention de l'imposer ; que la société SODIVO expose que, par lettre du 7 avril 2008, le directeur des services fiscaux des Hauts-de-Seine Sud lui a accordé un dégrèvement d'un montant de 154 782 euros sans l'avoir avertie de son intention de remettre à sa charge cette imposition pour l'exercice clos en 2003, ce qui est advenu par avis de mise en recouvrement le 7 mai 2008 ; que, toutefois, la méconnaissance ainsi alléguée des dispositions sus-rappelées du livre des procédures fiscales est sans incidence sur la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés relative à l'exercice clos en 2004, laquelle est seule en litige ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment (...) 5º Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire du bénéfice imposable d'un exercice des sommes correspondant à des pertes et charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que la dépense correspondante soit elle-même déductible des résultats de l'entreprise et que ces pertes et charges soient nettement précisé quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent en outre probables eu égard aux circonstances déjà constatées à la date de clôture de l'exercice, qu'elles se rattachent aux opérations de toutes nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'entreprise de boulangerie-pâtisserie Finkelsztajn était le principal client de la société SODIVO ; que pour se justifier d'avoir constitué, à la clôture de l'exercice 2004, une provision pour créance douteuse d'un montant de 452 361 euros sur cette entreprise, la requérante se prévaut des impayés auxquels aurait été alors confrontée la société Dondolight, qui avait le même gérant que l'entreprise Finkelsztajn, et de la mise en redressement judiciaire de cette dernière en février 2005 ; que, pour autant, elle n'allègue pas avoir essuyé de refus de la part de son client pour obtenir paiement de sa propre créance au cours de cet exercice clos en 2004, ni même avoir alors fait des diligences dans ce but ; que, par suite, la perte de la créance alléguée n'avait pas acquis un caractère probable à la clôture de cet exercice et la déduction de la provision correspondante ne pouvait qu'être rejetée par l'administration ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts : " Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services " ; qu'il résulte de l'instruction que la société SODIVO n'avait facturé, pour ses prestations fournies à l'entreprise Finkelsztajn au cours des exercices clos de 1999 à 2003, que des acomptes ; qu'elle a régularisé dans l'exercice suivant sa facturation et a inscrit dans ses produits en octobre 2004 une créance de 462 844 euros sur cette entreprise ; qu'elle soutient avoir alors commis une erreur comptable, au regard des dispositions précitées de la loi fiscale, qu'il incombait à l'administration de rectifier, d'une part, en rattachant la créance en cause à l'exercice clos en 2003 et, d'autre part, en compensant, par voie de conséquence, le supplément d'imposition résultant du rejet de la déduction de la provision constituée sur cette créance au cours de l'exercice clos en 2004 ;
6. Mais considérant que la créance en cause se rapportait à des prestations fournies entre 1999 et 2003 ; que, dès lors, l'administration ne pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées, la rattacher au seul exercice clos en 2003 ; que, d'autre part, l'écriture rattachant à l'exercice 2004 la créance relative à des prestations pour lesquelles n'avaient été perçus que des acomptes révèle la connaissance que la société avait du principe selon lequel les créances doivent être inscrites en produits lorsqu'elles sont certaines dans leur principe et déterminées dans leur montant ; que, dès lors, l'omission constatée de cette créance au fur et à mesure de la fourniture des prestations entre 1999 et 2003, et qui a eu pour effet de minorer les bénéfices imposables réalisés au cours des exercice précédents, n'a pu être involontaire ; qu'enfin, la réparation de cette prétendue omission est intervenue à la fin de l'exercice 2004, soit au moment où la société SODIVO a constitué la provision mentionnée au point 4 et ce, afin de donner un fondement à cette provision, constitution au demeurant injustifiée, comme il a été dit à ce même point 4 ; qu'il suit de là que la créance née à l'exercice clos en 2004 ne présente pas le caractère d'une simple erreur comptable mais d'une méconnaissance délibérée des dispositions dont se prévaut la requérante ; que la doctrine administrative 4-A-215 du 9 mars 2001 ne comporte pas une interprétation différente de la notion d'erreur comptable ; que la requérante ne saurait donc se prévaloir utilement du principe de correction des écritures du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit et des exercices antérieurs ;
7. Considérant, enfin, qu'à la suite de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 15 mai 2007, refusant l'inscription de cette créance au passif de l'entreprise Finkelsztajn, la société SODIVO a constitué une provision pour créance irrecouvrable au cours de l'exercice clos en 2007, dont elle demande le report en arrière à l'exercice clos en 2004 ; mais qu'à supposer que la requérante puisse utilement se prévaloir de cet arrêt qui n'est pas revêtu de l'autorité de la chose jugée devant le juge de l'impôt, elle ne peut valablement invoquer une décision de justice, qui estime cette créance incertaine dans son principe et imprécise dans son montant, à l'appui d'une demande de compensation de l'imposition supplémentaire née du rejet par l'administration de la déduction de la provision constituée sur cette même créance ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société SODIVO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société SODIVO est rejetée.
''
''
''
''
N° 13VE00182 2