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06/02/2014 | FRANCE | N°12VE03664

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 06 février 2014, 12VE03664


Vu I, sous le n° 12VE03664, le recours enregistré le 8 novembre 2012, présenté par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1201673 en date du 9 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 20 février 2012 par lequel il a refusé de délivrer à Mlle D...B...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée, et lui a enjoint de délivrer à cette dernière un titre de séjour portant la menti

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Vu I, sous le n° 12VE03664, le recours enregistré le 8 novembre 2012, présenté par le PREFET DE L'ESSONNE ; le PREFET DE L'ESSONNE demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1201673 en date du 9 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 20 février 2012 par lequel il a refusé de délivrer à Mlle D...B...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée, et lui a enjoint de délivrer à cette dernière un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par Mlle B...;

Il soutient que :

- son arrêté est suffisamment motivé, et a été signé par une autorité qui avait dûment reçu compétence à cet effet ;

- il ne viole pas les dispositions des articles L. 313-11-7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est justifiée dès lors que le refus de titre de séjour l'est également ;

..........................................................................................................

Vu II, sous le n° 12VE04362, le recours enregistré le 8 novembre 2012, présenté par le PREFET DE L'ESSONNE, qui demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement par lequel le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 20 février 2012 par lequel il a refusé de délivrer à Mlle B...un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée, et lui a enjoint de délivrer à cette dernière un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

Le PREFET DE L'ESSONNE soutient qu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation du jugement attaqué et que les conditions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative pour l'octroi d'un sursis sont remplies ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2014 :

- le rapport de Mlle Rudeaux, premier conseiller,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., substituant MeA..., pour MlleB... ;

1. Considérant que, par un recours enregistré sous le n° 12VE03664, le PREFET DE L'ESSONNE relève appel du jugement n° 1201673 en date du 9 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a d'une part annulé son arrêté en date du 20 février 2012 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mlle D...B..., ressortissante ivoirienne, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle serait renvoyée et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à cette dernière un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ; que, par un recours distinct enregistré sous le n° 12VE04362, le PREFET DE L'ESSONNE demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution de ce même jugement ; que ces deux recours sont dirigés contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'ils fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur le recours n°12VE03664 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par MlleB... ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle B...est entrée en France le 16 novembre 2001, sous couvert d'un visa D portant la mention " étudiant ", à l'âge de 17 ans, et a été mise en possession de titres de séjour en qualité d'étudiante, renouvelés jusqu'au 4 octobre 2011 ; que, le 26 septembre 2011, avant l'expiration de son titre de séjour, elle a présenté, par le biais de son avocat conseil, une demande de changement de statut pour solliciter la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si, parallèlement à ses études, elle a exercé plusieurs emplois et était très bien intégrée professionnellement, elle était en concubinage à la date de l'arrêté depuis moins de deux ans seulement et n'était pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où vivent toujours ses parents ; que, dans ces circonstances, l'arrêté du PREFET DE L'ESSONNE en date du 20 février 2012 porte certes une atteinte au droit de Mlle B... de mener une vie privée et familiale normale, mais qui n'est pas disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que le PREFET DE L'ESSONNE est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges se sont fondés sur la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler son arrêté ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mlle B...devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 27 de la loi du 16 juin 2011 : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle B...séjournait en France de manière régulière depuis dix ans à la date à laquelle elle a formé sa demande ; que, tout en réussissant plusieurs examens et obtenant plusieurs diplômes, elle a fait preuve parallèlement à ses études d'une très bonne insertion professionnelle ; qu'elle a ainsi exercé successivement des emplois d'agent administratif au sein de l'Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Paris du 1er avril au 28 mai 2009, puis en qualité d'agent hautement qualifié à Pôle emploi et d'agent administratif à la Maison départementale des personnes handicapées de Paris en 2010 et 2011, avant d'être recrutée en contrat à durée déterminée pour la période du 12 septembre 2011 au 11 juillet 2012 au poste d'adjoint administratif au rectorat de l'Académie de Paris ; qu'en outre, à la date de l'arrêté en litige, elle vivait en concubinage depuis deux ans avec un ressortissant congolais et était enceinte de ses oeuvres depuis six mois ; que ce dernier séjournait en France depuis 2005, était muni d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade depuis plusieurs années, invalide à plus de 80 %, de nationalité différente de celle de la requérante, et exerçait un emploi salarié depuis juillet 2009 ; que, dans ces conditions, en refusant de délivrer à Mlle B...un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le PREFET DE L'ESSONNE a commis une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il suit de là qu'il n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 9 octobre 2012 ;

Sur le recours n° 12VE04362 :

7. Considérant que le présent arrêt statuant sur le recours du PREFET DE L'ESSONNE à fin d'annulation du jugement dont il est demandé le sursis à exécution, le recours à fin de sursis à exécution de ce même jugement est devenu sans objet ;

Sur les conclusions de Mlle B...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mlle B...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur le recours n° 12VE04362.

Article 2 : Le recours n° 12VE03664 du PREFET DE L'ESSONNE est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera à Mlle B...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°s 12VE03664 - 12VE04362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03664
Date de la décision : 06/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: Melle Sandrine RUDEAUX
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : ROCQUES ; ROCQUES ; ROCQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-02-06;12ve03664 ?
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