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30/12/2013 | FRANCE | N°12VE03286

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 30 décembre 2013, 12VE03286


Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2012, présentée pour la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS, dont le siège social est situé au centre commercial Domus, 16 rue de Lisbonne à Rosny-Sous-Bois (93110), par Me Gastebois, avocat ; la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS, venant aux droits et obligations de la société Saturn Domus Rosny-sous-Bois France, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0912656-1110208 en date du 10 juillet 2012 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a annulé l'arrêté du 22 octobre 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis

a autorisé son établissement de Rosny-sous-Bois à déroger au repos domini...

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2012, présentée pour la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS, dont le siège social est situé au centre commercial Domus, 16 rue de Lisbonne à Rosny-Sous-Bois (93110), par Me Gastebois, avocat ; la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS, venant aux droits et obligations de la société Saturn Domus Rosny-sous-Bois France, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0912656-1110208 en date du 10 juillet 2012 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a annulé l'arrêté du 22 octobre 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a autorisé son établissement de Rosny-sous-Bois à déroger au repos dominical ;

2° de rejeter la demande présentée par la société Codirep devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

3° à titre subsidiaire, en cas d'annulation de l'arrêté du 22 octobre 2009 de limiter les effets de l'annulation en ce qu'ils ne se produiront qu'à compter de la date de notification à intervenir ;

4° de mettre à la charge de la société Codirep la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la société Codirep n'a pas d'intérêt à agir contre l'arrêté contesté ;

- à titre subsidiaire, un non-lieu à statuer doit être prononcé dès lors que par arrêté du 26 janvier 2010 devenu définitif, le préfet de la Seine-Saint-Denis a abrogé son arrêté du 22 octobre 2009 ;

- à titre encore plus subsidiaire, le tribunal a commis une erreur en estimant que les organisations syndicales intéressées n'ont pas été consultées ;

- l'absence de consultation de la chambre des métiers ne saurait à elle-seule entachée d'illégalité l'arrêté ;

- la distorsion de concurrence qu'entraînerait une fermeture dominicale sur le fonctionnement normal de son magasin justifie la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

- à titre infiniment subsidiaire, une annulation sans limitation de ses effets, aurait des conséquences manifestement excessives pour elle en ce qu'elle la contraindrait à s'acquitter rétroactivement du paiement d'une astreinte ;

...............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :

- le rapport de M. Bigard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public,

- les observations de Me Gastebois pour la société requérante,

- et les observations de Me A...pour la société Codirep ;

1. Considérant que la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS, venant aux droits et obligations de la société Saturn Domus Rosny-sous-Bois France, relève appel du jugement en date du 10 juillet 2012 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il a annulé l'arrêté du 22 octobre 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a autorisé son établissement de Rosny-sous-Bois à déroger au repos dominical ;

Sur la fin de non-recevoir opposée en appel par la société Codirep :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requête de la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS comporte un timbre fiscal de trente cinq euros, conformément à ce que requièrent les dispositions de l'article 1635 bis Q du code général des impôts ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Codirep à la requête de la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS ne peut être accueillie ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, qu'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif ; que si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le bien-fondé des conclusions dont il était saisi ; qu'il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution ; que, dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le recours formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive ;

4. Considérant que, si par arrêté en date du 26 janvier 2010, postérieur à l'introduction de la demande, le préfet de la Seine-Saint-Denis a abrogé l'arrêté précité du 22 octobre 2009, cet arrêté a produit des effets juridiques, qui n'ont pas disparu, en permettant à la société concernée de déroger légalement au repos dominical jusqu'à la date d'enregistrement de la demande de la société Codirep ; que, par suite, en ne prononçant pas un non-lieu à statuer, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de nature à entacher la régularité de leur jugement ;

5. Considérant, en second lieu, que, comme l'a estimé le Tribunal administratif de Montreuil la société Codirep qui exploite, dans un centre commercial situé à moins d'un kilomètre du magasin de Rosny-sous-Bois de la société requérante, un magasin, fermé le dimanche, commercialisant des produits concurrents de ceux de ce magasin, justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour attaquer l'arrêté du 22 octobre 2009, alors même qu'elle n'aurait pas présenté elle-même une demande de dérogation à la règle du repos dominical ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier ;

Sur le bien fondé du jugement :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3132-3 du code du travail : " Le repos hebdomadaire est donné le dimanche. " ; que l'article L. 3132-20 du même code dispose : " Lorsqu'il est établi que le repos simultané, le dimanche, de tous les salariés d'un établissement serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement, le repos peut être autorisé par le préfet, soit toute l'année, soit à certaines époques de l'année seulement suivant l'une des modalités suivantes : 1° Un autre jour que le dimanche à tous les salariés de l'établissement ; 2° Du dimanche midi au lundi midi ; 3° Le dimanche après-midi avec un repos compensateur d'une journée par roulement et par quinzaine ; 4° Par roulement à tout ou partie des salariés. " ; qu'enfin aux termes de l'article L. 3132-25-4 de ce code : " Les autorisations prévues aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 sont accordées pour une durée limitée, après avis du conseil municipal, de la chambre de commerce et d'industrie, de la chambre des métiers et des syndicats d'employeurs et de salariés intéressés de la commune " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de la lettre en date du 15 octobre 2009 du directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de la Seine-Saint-Denis que les organisations patronales et syndicales de la commune ont été saisis d'une demande d'avis sur la dérogation sollicitée le 24 septembre 2009 ; que, par suite, la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS est fondée à soutenir qu'en retenant le moyen tiré de l'absence de consultation des organisations syndicales pour annuler l'arrêté préfectoral du 22 octobre 2009, le Tribunal administratif de Montreuil a entaché son jugement d'une erreur de fait ;

9. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le Tribunal administratif de Montreuil par la société Codirep ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande devant le tribunal administratif ;

10. Considérant que l'article 70 de la loi du 17 mai 2011 dispose que : " Lorsque l'autorité administrative, avant de prendre une décision, procède à la consultation d'un organisme, seules les irrégularités susceptibles d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision prise au vu de l'avis rendu peuvent, le cas échéant, être invoquées à l'encontre de la décision. " ;

11. Considérant que ces dispositions énoncent, s'agissant des irrégularités commises lors de la consultation d'un organisme, une règle qui s'inspire du principe selon lequel, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; que l'application de ce principe n'est pas exclue en cas d'omission d'une procédure obligatoire, à condition qu'une telle omission n'ait pas pour effet d'affecter la compétence de l'auteur de l'acte ;

12. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la chambre des métiers n'a pas été consultée ; que cette irrégularité ne peut être regardée comme insusceptible d'avoir eu une incidence sur le sens de l'arrêté pris ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, la société Codirep est fondée à en demander l'annulation ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté en date du 22 octobre 2009 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

Sur les conséquences de l'illégalité de l'arrêté attaqué :

14. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'annulation de l'arrêté attaqué soit de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison des effets que cet acte a produits ou des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur, alors surtout qu'il a été abrogé par arrêté en date du 26 janvier 2010 et que conformément aux dispositions de l'article L. 3132-24 du code du travail, le recours enregistré au greffe du Tribunal administratif de Montreuil le 30 octobre 2009 a eu pour effet de suspendre la dérogation accordée ; qu'ainsi, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de limiter les effets de cette annulation ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Codirep ; qu'il y a lieu, par contre, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS le versement à la société Codirep d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS est rejetée.

Article 2 : La société DOMUS ROSNY-SOUS-BOIS versera à la société Codirep la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N°12VE03286 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03286
Date de la décision : 30/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-03-02-01 Travail et emploi. Conditions de travail. Repos hebdomadaire. Modalités d`octroi du repos hebdomadaire du personnel.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Eric BIGARD
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : GASTEBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-12-30;12ve03286 ?
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