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04/12/2013 | FRANCE | N°12VE02673

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 04 décembre 2013, 12VE02673


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 23 juillet 2012, sur renvoi du Conseil d'Etat à la Cour de céans, présentés pour la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL, dont le siège est au Chemin de la Tuilerie à Chambourcy (78240), par Me A... de la Varde, avocat ; la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n°0810701 du 16 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre

de l'année 2003 à raison de l'ensemble immobilier sis chemin de la Tuile...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés le 23 juillet 2012, sur renvoi du Conseil d'Etat à la Cour de céans, présentés pour la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL, dont le siège est au Chemin de la Tuilerie à Chambourcy (78240), par Me A... de la Varde, avocat ; la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n°0810701 du 16 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003 à raison de l'ensemble immobilier sis chemin de la Tuilerie à Chambourcy ;

2° de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, le tribunal n'ayant pas indiqué pour quelle raison les locaux des golfs proposés à titre de comparaison n'avaient pas été évalués conformément aux dispositions du 2° b de l'article 1498 du code général des impôts ; le tribunal a entaché son jugement d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit en ne recherchant pas s'il ne résultait pas de l'instruction qu'une partie au moins des terrains ne pouvait pas être considérée comme exclue de la destination à usage commercial et ne pouvait dès lors pas être taxée au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties ni, par conséquence, au titre de la taxe professionnelle ;

- le tribunal a inversé la charge de la preuve et ainsi commis une erreur de droit en écartant les éléments de comparaison au motif que la requérante n'apportait pas de précision suffisante pour apprécier leur caractère comparable alors qu'il revenait à l'administration qui entendait les contester de justifier des éléments interdisant de les regarder comme comparables ;

- en jugeant qu'elle ne critiquait pas utilement le taux d'intérêt de 8%, le tribunal a entaché son jugement d'insuffisance de ses motifs ;

- au fond, il convient de prononcer la décharge de l'imposition ou, à défaut, d'ordonner une mesure d'instruction aux fins de demander à l'administration de procéder à une évaluation visant à exclure de l'assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties et donc de la taxe professionnelle les terrains qui ne peuvent être regardés comme partie intégrante du golf ni, par suite, comme étant à vocation commerciale ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :

- le rapport de M. Delage, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;

1. Considérant que la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL, propriétaire des terrains du golf et des locaux du château de Joyenval sis à Chambourcy, a assuré l'exploitation jusqu'au 31 décembre 2003 des terrains du golf, d'un restaurant et d'un commerce d'articles de sport ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle la valeur locative des immobilisations prises en compte dans ses bases d'imposition à la taxe professionnelle au titre de l'année 2003 a été rehaussée ; que la société a saisi le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie pour 2003 et résultant de ce redressement ; qu'elle relève appel du jugement du 16 mai 2011 par lequel le tribunal a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, que la circonstance, à la supposer établie, que les motifs retenus par les premiers juges seraient entachés d'erreurs de droit est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué ;

3. Considérant, en second lieu, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments de la société requérante, ont répondu de manière circonstanciée aux moyens invoqués ; qu'ainsi le jugement attaqué est suffisamment motivé et n'est entaché d'aucune omission à statuer ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que les titulaires de bénéfices non commerciaux (...) : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence ... " ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : " La valeur locative est déterminée comme suit : 1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe ... " ; qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, la valeur locative des immeubles commerciaux " est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; 2° a) Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; b) La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision, lorsque l'immeuble était loué normalement à cette date, soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. " ;

En ce qui concerne la charge de la preuve :

5. Considérant que la société soutient qu'en écartant les termes de comparaison qu'elle proposait au motif qu'elle n'apportait pas de précisions suffisantes pour apprécier leur caractère comparable, alors qu'il appartenait à l'administration de justifier des éléments interdisant de les regarder comme tels, le tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit au regard de la charge de la preuve ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les premiers juges, après avoir constaté que la société n'apportait pas de précisions suffisantes permettant d'apprécier le caractère comparable des termes de comparaison qu'elle proposait, notamment le golf de Périgueux ou ceux du Médoc, de Bordeaux-Lac, et de Rouen, a considéré qu'il résultait des éléments descriptifs invoqués par l'administration que l'ensemble immobilier en litige présentait un caractère particulier ne permettant pas de retenir les termes de comparaison proposés par la requérante ; qu'en procédant ainsi, le tribunal, qui a statué au vu de l'instruction, n'a pas fait peser sur la société la charge de la preuve et n'a, dès lors, pas méconnu les règles gouvernant sa dévolution ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de la détermination de l'assiette :

6. Considérant qu'en vertu du 5° de l'article 1381 du code général des impôts sont soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel ; qu'il résulte de cette disposition que les terrains de golf à usage commercial sont soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ; que la société ne conteste pas que les terrains limitrophes, qui ne sont pas séparés du parcours de golf, sont librement accessibles aux joueurs et concourent à l'harmonie du site, doivent être inclus dans l'assiette de l'imposition ; qu'elle soutient cependant que le golf ne représentant que 13 hectares sur les 205 hectares du domaine, certains terrains ont été à tort regardés comme étant limitrophes et présentant les caractéristiques susdécrites ; qu'elle en déduit qu'une partie des terrains devrait, dès lors, être exclue de l'assiette de la taxe ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la superficie du parcours de golf ne s'élève pas à 13 hectares, comme l'a mentionné par erreur le tribunal, mais à 130 hectares ; que, dans ces circonstances, le moyen de la requérante doit être écarté ;

S'agissant de la méthode par comparaison :

7. Considérant que la société requérante demande l'application de la méthode de comparaison prévue au 2° de l'article 1498 ; que le golf dont s'agit comporte deux terrains de 18 trous chacun sur un espace de près de 205 hectares de forêts, de taillis et de bâtiments, correspondant à une surface de jeux de près de 130 hectares jouxtant le désert de Retz, jardin anglo-chinois classé monument historique depuis 1941 ; qu'il résulte des éléments produits par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qu'aucun terrain de golf existant au 1er janvier 1970 n'a été évalué par la méthode prévue à l'article 1498 pour les locaux susceptibles de servir de terme de comparaison ; que les terrains évalués l'ont été par la voie de l'évaluation directe ; que, par suite, aucun d'entre eux n'est susceptible de permettre l'évaluation par comparaison du terrain de golf litigieux conformément aux dispositions de l'article 1498 susmentionné ; que si, à la suite du supplément d'instruction ordonné par le tribunal, la société a mentionné des golfs situés en province, il ne résulte pas de l'instruction qu'ils pourraient constituer des termes de comparaison permettant d'évaluer les installations du golf de Joyenval ; qu'ainsi le recours à la méthode d'évaluation par voie d'appréciation directe prévue au 3° de l'article 1498 du code général des impôts précité est justifié ;

En ce qui concerne la méthode par voie d'appréciation directe proposée par le service :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 324 AB de l'annexe III au code général des impôts : " Lorsque les autres moyens font défaut, il est procédé à l'évaluation directe de l'immeuble en appliquant un taux d'intérêt à sa valeur vénale, telle qu'elle serait constatée à la date de référence si l'immeuble était libre de toute location ou occupation. Le taux d'intérêt susvisé est fixé en fonction du taux des placements immobiliers constatés dans la région à la date de référence pour des immeubles similaires " ; qu'aux termes de l'article 324 AC de cette même annexe : " En l'absence d'acte et de toute autre donnée récente faisant apparaître une estimation de l'immeuble à évaluer susceptible d'être retenue, sa valeur vénale à la date de référence est appréciée d'après la valeur vénale d'autres immeubles d'une nature comparable ayant fait l'objet de transactions récentes, situés dans la commune même ou dans une localité présentant du point de vue économique une situation analogue à celle de la commune en cause. La valeur vénale d'un immeuble peut également être obtenue en ajoutant à la valeur vénale du terrain, estimé par comparaison avec celle qui ressort de transactions récentes relatives à des terrains à bâtir situés dans une commune comparable, la valeur de reconstruction au 1er janvier 1970 dudit immeuble, réduite pour tenir compte, d'une part, de la dépréciation immédiate et, d'autre part, du degré de vétusté de l'immeuble et de son état d'entretien, ainsi que de la nature, de l'importance, de l'affectation et de la situation de ce bien. " ; qu'en vertu des articles précités de l'annexe III au code général des impôts, la valeur vénale des immeubles évalués par voie d'appréciation directe doit d'abord être déterminée en utilisant les données figurant dans les différents actes constituant l'origine de la propriété de l'immeuble si ces données, qui peuvent résulter notamment d'actes de cession, de déclarations de succession, d'apport en société ou, s'agissant d'immeubles qui n'étaient pas construits en 1970, de leur valeur lors de leur première inscription au bilan, ont une date la plus proche possible de la date de référence du 1er janvier 1970 ; que, si ces données ne peuvent être regardées comme pertinentes du fait qu'elles présenteraient une trop grande antériorité ou postériorité par rapport à cette date, il incombe à l'administration fiscale de proposer des évaluations fondées sur les deux autres méthodes comparatives prévues à l'article 324 AC de la même annexe, en retenant des transactions qui peuvent être postérieures ou antérieures aux actes ou au bilan mentionnés ci-dessus dès lors qu'elles ont été conclues à une date plus proche du 1er janvier 1970 ; que ce n'est que si l'administration n'est pas à même de proposer des éléments de calcul fondés sur l'une ou l'autre de ces méthodes et si le contribuable n'est pas davantage en mesure de fournir ces éléments de comparaison qu'il y a lieu de retenir, pour le calcul de la valeur locative, les données figurant dans les actes constituant l'origine de la propriété du bien ou, le cas échéant, dans son bilan ;

9. Considérant que pour calculer la valeur locative de l'immeuble par la méthode d'évaluation directe, l'administration fiscale a proposé de se fonder sur les éléments figurant au bilan de la société requérante au 31 décembre 2003 selon lesquels les valeurs brutes des terrains et des constructions, d'un montant total de 27 765 999 euros, rapportées à l'indice de construction au 1er janvier 1970, s'élèvent à 5 008 858 euros, et d'appliquer un abattement de dépréciation de 50 % ainsi qu'un taux d'intérêt de 8 %, représentatif du taux des placements immobiliers constatés dans la région Ile-de-France à la date de référence ; que pour demander l'application d'un abattement de 65% pour dépréciation immédiate et spécialisation au lieu de celui de 50 % retenu par les premiers juges, la société se prévaut de ce que la superficie du golf ne s'élèverait qu'à 13 hectares ; qu'il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que la superficie ainsi invoquée par la requérante est erronée et s'élève à 130 hectares ; qu'il ne résulte donc pas de l'instruction que l'abattement de 50 % serait insuffisant ; qu'en outre, si la société fait valoir que le golf de Feucherolle s'est vu appliquer un taux d'intérêt de 4 %, il résulte de l'instruction que le taux retenu de 8 % correspond aux biens de même nature à proximité des grandes agglomérations, des voies de communication et de Paris, et a d'ailleurs été appliqué aux golfs de Plaisir et de Chatou ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE FONCIERE DE JOYENVAL est rejetée.

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N°12VE02673 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02673
Date de la décision : 04/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-04-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Assiette.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Philippe DELAGE
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : POTIER DE LA VARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-12-04;12ve02673 ?
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