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17/10/2013 | FRANCE | N°11VE00792

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 17 octobre 2013, 11VE00792


Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2011, présentée pour le

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, ayant son siège social 64 rue Defrance à Vincennes (94682), représenté par son directeur général en exercice, par Me Cassel, avocat ; le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 0700734 en date du 27 janvier 2011 en tant qu'il a limité à 9 200 euros l'indemnisation qu'il estimait lui être due par l'E

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2° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 832 euros avec in...

Vu la requête, enregistrée le 2 mars 2011, présentée pour le

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, ayant son siège social 64 rue Defrance à Vincennes (94682), représenté par son directeur général en exercice, par Me Cassel, avocat ; le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 0700734 en date du 27 janvier 2011 en tant qu'il a limité à 9 200 euros l'indemnisation qu'il estimait lui être due par l'Etat ;

2° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 15 832 euros avec intérêts de droit à compter du 25 janvier 2007, date de réception de sa demande indemnitaire préalable ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les premiers juges ont procédé à une interprétation restrictive des dispositions applicables, en considérant qu'il convenait de distinguer les chefs de préjudice relatifs à l'atteinte à l'intégrité physique de ceux à caractère personnel ; cette appréciation, privilégiée par le tribunal administratif, découle des jurisprudences Moya-Caville et Brugnot du Conseil d'Etat, qui ne sont pas applicables à des hypothèses d'agression en service, comme c'est le cas en l'espèce, mais uniquement à des hypothèses d'accidents de service ; il ressort des dispositions législatives spécifiques aux hypothèses d'agressions en service qu'un fonctionnaire de police agressé ou attaqué en service a droit à l'indemnisation de la totalité des conséquences préjudiciables de cette agression, que ces dispositions ne distinguent pas entre les différents chefs de préjudice et que la jurisprudence est constante à cet égard ;

- le montant des indemnités qu'il réclame n'est pas excessif au regard des sommes habituellement allouées par les juridictions administratives ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 ;

Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :

- le rapport de M. Luben, président assesseur,

- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS ;

1. Considérant qu'à la suite d'une agression dont il a été victime en mai 2001 dans l'exercice de ses fonctions, M.B..., gardien de la paix, a, par requête du 27 avril 2004, saisi la commission d'indemnisation des victimes d'infractions afin d'obtenir la désignation d'un expert pour déterminer l'étendue de son préjudice ainsi que le versement d'une indemnité provisionnelle ; qu'après remise du rapport de l'expert en octobre 2004, la commission d'indemnisation des victimes d'infractions a proposé d'allouer à M. B...la somme totale de 15 832 euros au titre de l'ensemble de son préjudice par décision

du 25 juillet 2006 ; que ladite somme a été versée à M. B...par le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS, au plus tard le 26 septembre 2006 ; que ce dernier relève appel du jugement en date du 27 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'a que partiellement fait droit à sa demande en limitant à 9 200 euros l'indemnisation qu'il alléguait lui être due par l'Etat, en remboursement de la somme précitée versée à M.B... ;

Sur les droits indemnitaires du FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS :

2. Considérant, d'une part, qu'en vertu des articles 706-3 et 706-4 du code de procédure pénale, toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d'une infraction peut, lorsque certaines conditions sont réunies, obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne auprès d'une commission d'indemnisation des victimes d'infractions, juridiction civile instituée dans le ressort de chaque tribunal de grande instance, qui peut rendre sa décision avant qu'il soit statué sur l'action publique ou sur les intérêts civils ; que l'indemnité accordée par la commission est versée par le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS ; qu'aux termes de l'article 706-11 du code de procédure pénale : " Le fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction ou tenues à un titre quelconque d'en assurer la réparation totale ou partielle le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui, dans la limite du montant des réparations à la charge desdites personnes (...) " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause (...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / (...) La collectivité publique est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé. Elle dispose, en outre, aux mêmes fins, d'une action directe qu'elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale (...) " ; qu'aux termes de l'article 112 de la loi du 18 mars 2003 susvisée : " I. La protection dont bénéficient les membres (...) du cadre national des préfectures (...) en vertu de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires couvre les préjudices qu'ils subissent à l'occasion ou du fait de leurs fonctions (...) " ; que, si ces dispositions ne substituent pas la collectivité publique à l'auteur des attaques pour le paiement des dommages et intérêts mis à sa charge par une décision de justice, elles lui imposent d'assurer la juste réparation du préjudice subi par son agent ;

4. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que la collectivité publique dont dépend un agent victime de violences dans le cadre de ses fonctions, dès lors qu'elle est tenue, au titre de la protection instituée par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, de réparer le préjudice résultant de ces violences, est au nombre des personnes à qui le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS peut réclamer le remboursement de l'indemnité ou de la provision qu'il a versée à cet agent à raison des mêmes violences, dans la limite du montant à la charge de cette collectivité ; qu'en conditionnant le remboursement de l'indemnisation de la totalité du préjudice subi par M. B...à l'existence d'une faute de nature à entraîner la responsabilité de l'administration et en limitant pour ce motif à 9 200 euros l'indemnisation qu'ils ont décidé d'allouer au fonds, les premiers juges ont méconnu les dispositions précitées ;

5. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur la demande présentée par le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. B...ait reçu de l'Etat, en raison des conséquences matérielles de son agression et de ses effets sur son intégrité physique, une allocation temporaire, pension ou rente d'invalidité ; qu'ainsi, le ministre de l'intérieur ne peut valablement opposer aux prétentions du fonds requérant la règle du forfait de pension ;

7. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné dans le cadre de la procédure judiciaire portée devant la commission d'indemnisation des victimes d'infractions près le Tribunal de grande instance de Bobigny, que M. B...a enduré, en conséquence de l'agression en service dont il a été victime, des souffrances, non contestées par l'administration, évaluées à 3,5 sur une échelle de 7 niveaux ; qu'il a subi une incapacité temporaire totale de travail de 177 jours, du 7 mai au 15 septembre 2001 puis du 26 novembre 2002 au 5 janvier 2003 et la gêne dans la vie quotidienne y afférente, ainsi qu'une incapacité permanente partielle évaluée à 2 %, un préjudice esthétique évalué à 1,5 sur 7 ainsi qu'un préjudice d'agrément ; que son état a été considéré comme consolidé à la date du 6 janvier 2003 ; que le ministre de l'intérieur établit devant la Cour de céans qu'une somme de 10 736,70 euros a été versée au fonds requérant le 17 février 2011, en exécution du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 27 janvier 2011 ; que cette somme correspond au remboursement au fonds requérant de l'indemnisation versée à M. B...en réparation de son préjudice personnel, des frais irrépétibles de première instance, ainsi que des intérêts au taux légal sur ces sommes à compter du 25 janvier 2007, date de réception par le ministre de la demande indemnitaire préalable du fonds requérant ; qu'il sera fait une juste évaluation des différents préjudices cités en fixant, au cas d'espèce, à 6 632 euros l'indemnité destinée à les réparer, ce qui porte à 15 832 euros l'indemnité totale que l'Etat devra verser au FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS ; qu'il y a lieu de réformer en conséquence le jugement susvisé du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Sur les intérêts :

8. Considérant que le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS a droit aux intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2007, date de réception de sa demande indemnitaire préalable ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 9 200 euros que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'Etat à verser au FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS est portée à 15 832 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 25 janvier 2007.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 27 janvier 2011 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera au FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D'ACTES DE TERRORISME ET D'AUTRES INFRACTIONS une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11VE00792


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00792
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-03 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Services de police.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SOYEZ
Avocat(s) : S.E.L.A.F.A. CABINET CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-10-17;11ve00792 ?
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