Vu la requête, enregistrée le 2 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA GALERIES LAFAYETTE, dont le siège social est 40, boulevard Haussmann à Paris (75009), par Me Fasquel, avocat à la Cour ; la SA GALERIES LAFAYETTE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0702116 en date du 24 juin 2010 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que, par ce jugement, le Tribunal a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt prévues aux articles 235 ter ZA et 235 ter ZC du code général des impôts, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2000 et 2001 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;
Elle soutient que le tribunal a fait droit à sa demande relative, d'une part, au rattachement des droits d'entrée perçus par la SA Sogefin au cours des exercices 2000 et 2001 en exécution des contrats de bail conclus, aux exercices d'exigibilité de leur montant et à la réintégration dans le résultat de l'exercice 2000, de la fraction restant à répartir au 1er janvier 2000, des droits d'entrée encaissés au cours des exercices 1997, 1998 et 1999, d'autre part, au rattachement à l'exercice d'exigibilité du montant du droit d'entrée perçu au cours de l'exercice 2000 en exécution du bail commercial conclu avec la société Bouchara ; que, toutefois, le dispositif du jugement est en contradiction avec ses motifs en ce que le tribunal ne prononce pas la décharge des impositions correspondantes mais uniquement le rétablissement corrélatif de la compensation accordée par l'administration au titre de l'exercice 2001 ; que, s'agissant des plus-values à long terme réalisées lors de la cession des titres Monoprix et Casino Guichard Perrachon, les opérations d'absorption des sociétés Société centrale d'achats, SA des Monoprix et société Magasins Monoprix ont été placées sous le régime de faveur des fusions prévu par l'article 210 A du code général des impôts ; qu'ont ensuite été apportés à la SA Société française des magasins Uniprix devenue SA Monoprix, des actifs Magasins populaires détenus par les trois sociétés absorbées susmentionnées ; que ces apports partiels d'actifs étaient également placés sous le régime de faveur des fusions prévu aux articles 210 A et 210 B du code général des impôts ; qu'elle a ensuite effectué, dans le cadre de l'offre publique d'échange ou d'achat des actions de la SA Monoprix, initiée par la SA Casino Guichard Perrachon, la cession des actions de la SA Monoprix et remis des actions de celle-ci en échange des actions de la seconde société ; que l'opération d'échange était placée sous le régime du sursis d'imposition prévu à l'article 38-7 du code général des impôts ; qu'elle a, enfin, cédé des actions de la SA Casino Guichard Perrachon ; que la plus-value de cession de l'ensemble de ces actions correspond au montant des actions de la SA Monoprix qu'elle a reçues en rémunération de l'apport partiel d'actifs susmentionné ; que, si la SA Monoprix entrait dans le champ des c) et d) du 3 de l'article 210 A du code général des impôts, en sa qualité de société bénéficiaire des apports partiels qu'elle a effectués, elle-même était contrainte, en vertu du b) du I de l'article 210 B du même code, de calculer la plus-value de cession des titres rémunérant cet apport, aboutissant ainsi à une double imposition au niveau de la société apporteuse et de la société bénéficiaire des apports, incompatible avec les stipulations de la directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990 ; que les articles 4, 5 et 6 de cette directive posent le principe de la neutralité fiscale des apports partiels d'actifs par voie de transfert de la matière imposable de la société apporteuse à la société bénéficiaire des apports et que ces stipulations sont, en vertu de l'article 9 de ladite directive, applicables aux apports partiels d'actifs ; qu'aucune stipulation de la directive ne subordonne l'application des articles 4, 5 et 6 aux apports partiels d'actifs, à des conditions particulières, ni n'autorise un Etat membre à subordonner l'application de son dispositif à des conditions qu'elle ne prévoit pas ; qu'ainsi, les dispositions du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts sont incompatibles avec les stipulations de l'article 9 de la directive susmentionnée ; qu'il résulte des termes mêmes de l'article 25 de la loi n° 91-1323 du 30 décembre 1991 portant adaptation de la législation interne à cette directive que le législateur n'a opéré aucune distinction entre les opérations de restructuration affectant des entreprises d'Etats membres différents et celles impliquant exclusivement des entreprises françaises ; que, sauf à introduire une discrimination entre les entreprises françaises et les entreprises des autres Etats membres, la conformité du régime fiscal interne avec la directive ne peut s'apprécier pour ces entreprises que dans des conditions identiques ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 90/435/CEE du 23 juillet 1990 du Conseil concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d'Etats membres différents ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2012 :
- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;
Sur le désistement partiel des conclusions :
Considérant que, dans son mémoire enregistré au greffe de la Cour le 11 avril 2012, la SA GALERIES LAFAYETTE déclare se désister de ses conclusions relatives à l'imposition des produits constitués par des droits d'entrée perçus par les sociétés Sogefin et Bouchara ; que ce désistement partiel est pur et simple ; que rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte ;
Sur le surplus des conclusions :
Considérant que la SA GALERIES LAFAYETTE, société mère du groupe fiscal intégré Galeries Lafayette, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité à l'issue desquelles des rehaussements lui ont été notifiés en sa qualité de redevable de l'impôt sur les sociétés, au titre des années 2000 et 2001, concernant des plus-values de cession de titres qu'elle détenait dans le capital de la SA Monoprix ; que la société requérante fait valoir que les plus-values constatées lors de l'apport partiel des actifs " Magasins populaires " qu'elle a consenti à la SA Monoprix, initialement détenus par les sociétés SA Société centrale d'achats, la SA Monoprix et la société Magasins Monoprix, qu'elle avait absorbées en 1994, ont été soumises au régime spécial de l'article 210 B du code général des impôts, aboutissant par l'effet des dispositions du b) du I de l'article 210 B à une double imposition de la société apporteuse et de la société bénéficiaire de l'apport, contraire à la directive 90/434 CEE du Conseil, du 23 juillet 1990 ; qu'elle conteste également la détermination de la plus-value réalisée lors de la cession de titres de la société Casino-Guichard Perrachon reçus en échange d'actions de la société Monoprix dans le cadre d'une offre publique d'échange ou d'achat des actions de cette société, opération placée sous le régime du sursis d'imposition prévu par les dispositions de l'article 38-7 du code général des impôts ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la directive 90/434 du Conseil du 23 juillet 1990 susvisée : " Chaque Etat membre applique la présente directive aux opérations de fusion, de scission, d'apport d'actifs et d'échange d'actions qui concernent des sociétés de deux ou de plusieurs Etats membre " et qu'aux termes de l'article 2 de cette directive : "Aux fins de l'application de la présente directive, on entend par (...) c) apport d'actifs : l'opération par laquelle une société apporte, sans être dissoute, l'ensemble ou une ou plusieurs branches de son activité à une autre société, moyennant la remise de titres représentatifs du capital social de la société bénéficiaire de l'apport " ; qu'aux termes de l'article 210 A du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Les plus-values nettes et les profits dégagés sur l'ensemble des éléments d'actif apportés du fait d'une fusion ne sont pas soumises à l'impôt sur les sociétés (...) " et qu'aux termes de l'article 210 B du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " 1. Les dispositions de l'article 210 A s'appliquent à l'apport partiel d'actif d'une branche complète d'activité ou d'éléments assimilés lorsque la société apporteuse prend l'engagement dans l'acte d'apport : (...) b) De calculer ultérieurement les plus-values de cession afférentes à ces mêmes titres par référence à la valeur que les biens apportés avaient, du point de vue fiscal, dans ses propres écritures (...) " ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, dans le cadre de l'apport partiel d'actif, par la SA GALERIES LAFAYETTE à la société Monoprix, des actifs des " Magasins populaires ", la société requérante s'est engagée à calculer les plus-values de cession des actions de la société Monoprix reçues en rémunération de l'apport d'après la valeur des biens apportés inscrite dans ses propres écritures, conformément aux dispositions précitées du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts ; que, dans ces conditions, la société requérante devait calculer la plus-value de cession de ces titres selon la valeur fiscale des biens qui avaient fait l'objet du premier apport et non pas selon la valeur comptables des titres reçus de la société Monoprix en rémunération de l'apport ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article 1er précité de la directive du 23 juillet 1990 susvisée, concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents, qu'elle ne crée d'obligation à l'égard des Etats membres qu'au regard des opérations qui concernent des sociétés de deux ou plusieurs Etats membres ; qu'il est constant que l'opération en litige ne concerne que des sociétés françaises et n'entre dès lors pas dans le champ d'application de la directive susvisée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts seraient incompatibles avec les stipulations combinées des articles 4, 5, 6 et 9 de la directive susmentionnée est inopérant ;
Considérant, en troisième lieu, que la société requérante fait valoir, d'une part, que la Cour de justice de l'Union européenne est néanmoins compétente pour interpréter le droit communautaire lorsque celui-ci ne régit pas directement la situation en cause mais que le législateur a décidé, lors de la transposition en droit national des dispositions d'une directive, d'appliquer le même traitement aux situations purement internes et à celles régies par la directive, en sorte qu'il a aligné sa législation interne sur le droit communautaire ; que, d'autre part, à l'occasion d'un litige purement interne, le juge national doit retenir la même interprétation des dispositions prises pour la transposition d'une directive ;
Considérant qu'il ressort des travaux préparatoires de l'article 25 de la loi du 30 décembre 1991 portant loi de finances rectificative pour 1991, dont sont issues les dispositions de l'article 210 A précité du code général des impôts, que celles-ci avaient pour objet de transposer la directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990 ; que si l'article 210 B du code général des impôts relatif aux scissions et aux apports partiels d'actif est, pour l'essentiel, comme le fait valoir le ministre, issu des dispositions de l'article 62-II de la loi n° 75-1278 du 30 décembre 1975, il prévoit néanmoins que les dispositions de l'article 210 A modifié sont applicables aux opérations d'apport partiel d'actif et qu'il a lui-même été complété par l'article 25 de la loi du 30 décembre 1991 afin de préciser la notion de branche complète d'activité au regard de l'article 2 de la directive ainsi qu'il ressort des travaux préparatoires ; que, dans ces conditions, les dispositions de l'article 210 B doivent être regardées comme ayant eu pour objet, au moins pour partie, de transposer la directive du 23 juillet 1990 ; que, toutefois, le législateur a, à cette occasion, maintenu en vigueur les dispositions en litige du b) du I de l'article 210 B lesquelles sont clairement contraires aux articles 4, 5, 6 et 9 de cette directive et entendu ainsi déroger à celle-ci pour les opérations purement internes d'apports partiels d'actifs ; que, dans ces conditions, l'article 210 B et plus particulièrement le b) du I de celui-ci n'a ainsi pas à être interprété à la lumière de la directive, s'agissant d'opérations concernant des sociétés ayant leur siège dans un même pays ;
Considérant, qu'en conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, en l'espèce, que le juge national n'avait pas à se prononcer sur la conformité du b) du I de l'article 210 B du code général des impôts avec les dispositions de la directive, dès lors que la situation en cause n'entrait pas dans son champ d'application, et n'avait pas davantage à interpréter ces dispositions au regard de la directive ;
Considérant que l'administration fiscale, contrairement à ce que soutient la requérante, a entendu taxer la plus-value en report d'imposition réalisée à la suite de la cession des titres Casino découlant de l'opération d'échange de titres et non cette opération en tant que telle sur le fondement de l'article 210 B du code général des impôts ; qu'ainsi, la société requérante ne saurait soutenir que l'administration a opéré une confusion entre ces deux opérations de nature distincte ou encore que les dispositions de l'article 210 B ne seraient pas applicables à l'opération d'échange d'actifs ;
Considérant que, dès lors, la SA GALERIES LAFAYETTE ne peut faire valoir utilement que le redressement qui lui a été notifié aboutit à une double taxation entre ses mains et entre les mains de la société apporteuse ; qu'elle ne peut davantage, compte tenu de ce qui a été dit plus haut, utilement soutenir que l'administration ne peut utilement se prévaloir de sa propre interprétation de la loi fiscale pour fonder l'imposition, laquelle découle de l'application de la loi fiscale elle-même ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA GALERIES LAFAYETTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en tant qu'elle porte sur les plus-values à long terme réalisées lors des cessions de titres dont s'agit, au titre des années 2000 et 2001 ;
DECIDE :
Article 1er : Il est donné acte à la SA GALERIES LAFAYETTE du désistement de ses conclusions dirigées contre l'imposition des produits constitués par des droits d'entrée perçus par les sociétés Sogefin et Bouchara.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA GALERIES LAFAYETTE est rejeté.
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N° 10VE02578 2