Vu la requête, enregistrée le 5 mai 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. et Mme Jean-François A, demeurant ..., par Me de la Villeguerin ; M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0808635 en date du 25 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge de ces cotisations ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent :
- que le tribunal ne s'est prononcé ni sur la situation de Magali B pour l'année 2005 ni sur celle de M. et Mme Franck C pour les années 2004 et 2005 ;
- que la doctrine administrative admet que lorsque l'enfant majeur vit sous le toit de ses parents, ces derniers peuvent déduire de leur revenu imposable les dépenses de nourriture et d'hébergement pour un montant forfaitaire sans que le contribuable n'ait à fournir de justificatif ;
- qu'en 2004, ils ont hébergé leurs trois enfants et en 2005, deux ;
- qu'outre cette pension alimentaire en nature, ils justifient par des attestations de leurs enfants du versement d'une somme d'argent déductible ;
- que, par suite, ils sont fondés à demander la déduction des pensions alimentaires versées à Magali B et à Nicolas B pour un montant de 4 410 euros en 2004 ;
- que Magali B justifie de son état de besoin en 2004, n'ayant perçu aucun revenu et en 2005, son revenu étant inférieur au SMIC ;
- qu'eu égard à leurs revenus inférieurs au SMIC en 2004 et 2005, la situation de besoin de M. et Mme Franck C et de leurs deux enfants nés en 1999 et 2003 est avéré pour les deux années en litige ;
- qu'en application de l'article 156 II 2° alinéa 3 du code général des impôts, ils sont en droit de déduire la pension alimentaire en nature à M. et Mme Franck C, aucune aide n'étant apportée par les beaux-parents ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2012 :
- le rapport de M. Bigard, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Soyez, rapporteur public ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort de ses énonciations que le jugement attaqué s'est prononcé sur la situation de Magali B en 2005 et sur celle de M. et Mme Franck C en 2004 et en 2005 ; qu'il n'est, par suite, pas entaché d'omission à statuer ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu des personnes physiques est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque contribuable. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction (...) II. Des charges ci-après (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 et 367 et 767 du code civil ; (...) La déduction est limitée, par enfant majeur, au montant fixé pour l'abattement prévu par l'article 196 B. Lorsque l'enfant est marié, cette limite est doublée au profit du parent qui justifie qu'il participe seul à l'entretien du ménage (...) " ; qu'aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin " et qu'aux termes de l'article 207 du même code : " Les obligations résultant de ces dispositions sont réciproques " ; qu'enfin aux termes de l'article 208 du code civil : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, si les contribuables sont autorisés à déduire du montant total de leurs revenus, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, les aides qu'ils font à leurs enfants majeurs privés de ressources, il leur incombe de justifier, devant le juge de l'impôt, de l'importance des aliments dont le paiement a été rendu nécessaire par le défaut de ressources suffisantes de leurs enfants ; qu'il résulte, par ailleurs, des dispositions de l'article 196 B que le montant des sommes admises en déduction pour une pension alimentaire a été limité pour les années 2004 et 2005, respectivement à 4 410 euros et 4 489 euros ; que, toutefois, la déduction ainsi prévue ne peut être admise que si le contribuable justifie de la réalité des aides qu'il prétend avoir effectuées à titre de pension alimentaire ;
S'agissant de la déduction des pensions alimentaires versées à Magali B et à Nicolas B :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, pour l'année 2004, l'administration a limité les déductions au titre des pensions alimentaires versées par M. et Mme A à leurs enfants majeurs, Magali B et Nicolas B vivant sous leur toit, pour chacun à la somme de 3 051 euros correspondant à celle retenue pour l'évaluation des frais d'accueil des personnes âgées de plus de 75 ans au titre de l'année 2004 ; que les attestations établies par les deux enfants concernés indiquent que les pensions alimentaires ont été acquittées en nature ; que si les requérants ne produisent aucun justificatif des sommes qu'ils allèguent avoir versées à leur fils Nicolas, ils produisent devant la Cour quatre bordereaux de remise de chèques d'un montant total de 1 450 euros et les relevés bancaires correspondant de leur fille Magali ; que, toutefois, pour la somme de 150 euros créditée sur le compte bancaire de cette dernière le 7 janvier 2004, ni le bordereau de chèque ni le relevé bancaire ne font apparaître le nom de l'auteur du chèque ; que, par suite, M. et Mme DEGLI- ESPOSTI justifient uniquement que la somme de 1 300 euros qu'ils ont versée à leur fille en 2004 a le caractère d'une pension alimentaire répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du code civil ; que, dès lors, cette somme est déductible de leur revenu imposable au titre de 2004 ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que Magali B, célibataire et sans enfant à charge, a perçu 11 323 euros de revenus en 2005 ; que, dans ces conditions, elle doit être regardée comme ayant été au cours de cette année 2005 en situation de besoin au sens des dispositions susvisées des articles 205 à 208 du code civil ; que les requérants établissent par les pièces qu'ils produisent qu'ils ont pris en charge le loyer et la provision pour charges mensuels du logement de leur fille ; que, dans ces conditions, la somme de 4 489 euros est déductible de leur revenu imposable au titre de 2005 ; que si dans son dernier mémoire l'administration fiscale fait valoir qu'elle a prononcé un dégrèvement du surplus d'imposition plafonné à 4 489 euros, ce dégrèvement ne ressort pas des pièces du dossier ; que, par suite les conclusions du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat tendant à ce que la Cour prononce un non lieu à statuer à hauteur de la somme de 4 489 euros pour l'année 2005 ne peuvent qu'être rejetées ;
S'agissant de la déduction des pensions alimentaires versées à M. et Mme Franck C :
Considérant que M. et Mme A demandent la déduction de leur revenu imposable au titre des années 2004 et 2005 du montant des pensions alimentaires servies à leur fille et à son époux, M. et Mme Franck C, sous forme d'un hébergement à leur domicile et de versements d'argent ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme Franck C qui avaient deux enfants mineurs à charge, ont disposé d'un revenu net imposable de 15 990 euros en 2004 et de 27 276 euros en 2005 ; que, dans ces conditions, M. et Mme Franck C doivent être regardés comme justifiant de leur état de besoin pour les deux années en cause ; que, toutefois, la seule production de copies de bordereaux de remise de chèques ne mentionnant pas le nom de leur bénéficiaire, ne suffit pas à justifier de la réalité des versements d'argent allégués ; que, par ailleurs, s'il est constant et non contesté que M. et Mme Franck C étaient hébergés en 2004 et 2005, avec leurs deux enfants mineurs, sous le toit de M. et Mme A, les requérants ne fournissent aucune justification du montant de cet avantage en nature ; que, par suite, sur le terrain de la loi fiscale, M. et Mme A n'étaient pas fondés à soutenir qu'ils étaient en droit de déduire de leur revenu global les sommes de 8 820 euros pour l'année 2004 et de 8 978 euros pour l'année 2005 ;
En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :
Considérant que M. et Mme A invoquent la doctrine administrative qui admet la possibilité pour les contribuables qui s'acquittent de l'obligation alimentaire en recueillant durant toute l'année civile sous leur toit leurs enfants majeurs, de déduire sans avoir à fournir de justifications, une somme par enfant aidé durant toute l'année, d'un montant de 3 000 euros en 2003 revalorisé chaque année ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il est constant et non contesté que M. et Mme Franck C et leurs deux enfants étaient hébergés sous le toit de M. et Mme A en 2004 et en 2005 ; qu'il suit de là que les requérants peuvent se prévaloir de cette doctrine administrative ; qu'il résulte, par ailleurs, de l'instruction que la belle-famille de leur fille n'a pas participé à l'entretien du ménage de M. et Mme Franck C ; que, dans ces conditions, M. et Mme A sont fondés à demander sur le fondement de la doctrine administrative, la déduction de la somme de 6 102 euros de leur revenu imposable au titre de l'année 2004 et de celle de 6 212 euros au titre de l'année 2005 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A sont seulement fondés à demander une réduction des impositions litigieuses correspondant à une diminution des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de 7 402 euros pour 2004 et de 10 701 euros pour 2005 ainsi que la réformation en ce sens du jugement attaqué ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais que M. et Mme A ont exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Les bases d'imposition de M. et Mme A à l'impôt sur le revenu sont réduites de 7 402 euros pour l'année 2004 et de 10 701 euros pour l'année 2005.
Article 2 : M. et Mme A sont déchargés des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement n° 0808635 en date du 25 février 2010 du Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. et Mme A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A et les conclusions du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat tendant au prononcé d'un non-lieu sont rejetés.
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N° 10VE01392 2