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29/03/2012 | FRANCE | N°10VE02521

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 29 mars 2012, 10VE02521


Vu la requête, enregistrée le 3 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société ABCD INTERNATIONAL, dont le siège est au 4-6 rue des Carriers ZAC du Centre Ville à Grigny (91350), par Me Guez-Mamane, avocat ; la société ABCD INTERNATIONAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712576 du 3 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 117 009 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'entrée en vigueur de

l'article 87 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 ;

2°) de mettre à...

Vu la requête, enregistrée le 3 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société ABCD INTERNATIONAL, dont le siège est au 4-6 rue des Carriers ZAC du Centre Ville à Grigny (91350), par Me Guez-Mamane, avocat ; la société ABCD INTERNATIONAL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0712576 du 3 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 117 009 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'entrée en vigueur de l'article 87 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la responsabilité de l'Etat doit être engagée du fait de l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 solidarité et renouvellement urbain, fixant à 50 % les exonérations de charges patronales pour les entreprises qui ont transféré leur activité en zone franche urbaine, alors qu'elle escomptait bénéficier de 100 % d'exonération de ces charges en application de la loi de 1996, lui causant un préjudice de 117 009 euros ;

- la responsabilité de l'Etat pour faute doit être engagée en ce que la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 solidarité et renouvellement urbain méconnaît le principe général du droit de sécurité juridique dégagé par le Conseil d'Etat ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville ;

Vu la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain, et notamment son article 87 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mars 2012 :

- le rapport de Mme Agier-Cabanes, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public,

- et les observations de Me Guez-Mamane pour la société ABCD INTERNATIONAL ;

Considérant que la société ABCD INTERNATIONAL, anciennement ABCD PROFILS, a décidé du transfert de son siège de la commune d'Ivry-sur-Seine à la zone franche urbaine de Grigny afin de bénéficier des avantages sociaux et fiscaux que prévoyaient les dispositions de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996susvisée ; que, pour ce faire, elle a signé le 29 septembre 1998 une convention valant promesse de cession et d'acquisition d'un terrain destiné à l'implantation d'un bâtiment à usage de bureaux-activités situé dans le périmètre de la zone franche urbaine de Grigny, et a obtenu son permis de construire le 4 mai 1999 ; que l'installation définitive de la société dans ses nouveaux locaux n'a eu lieu qu'en août 2001, du fait notamment de l'annulation par le Conseil d'Etat de l'annexe du décret n°96-1154 délimitant le périmètre de la zone franche urbaine de Grigny, par un arrêt du 19 mai 1999 ; que les exonérations de 100% des charges patronales dont la société ABCD INTERNATIONAL escomptait bénéficier en application des dispositions de la loi de 1996, ont été fixées à 50% du montant de ces charges, par l'effet de l'entrée en vigueur de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 solidarité et renouvellement urbain, lui causant un préjudice financier qu'elle évalue à 117 009 euros ; que la société requérante demande à la Cour de condamner l'Etat à l'indemniser de ce préjudice ;

Sur la responsabilité sans faute de l'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 14 novembre 1996 : " -I.- les gains et rémunérations, au sens de l'article L. 242-1 du code de sécurité sociale ou de l'article 1031 du code rural, versés au cours d'un mois civil aux salariés employés dans les zones franches urbaines mentionnées au B du 3 de l'article 42 de la loi n°95-115 du 4 février 1995 précitée sont, dans les conditions fixées aux II,III, et IV, exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales, des accidents de travail ainsi que du versement de transport et des contributions et cotisations au Fond national d'aide au logement, dans la limite du produit du nombre d'heures rémunérées par le montant du salaire minimum de croissance majoré de 50%. (...) III . - L'exonération prévue au I est également applicable : (...) - aux gains et rémunérations des salariés des entreprises exerçant les activités visées au deuxième alinéa du I de l'article 44 octies du code général des impôts qui s'implantent ou qui sont créées dans une zone franche urbaine ou y créent un établissement postérieurement à la date de sa délimitation, si leur effectif total, déterminé selon les modalités prévues à l'article L. 421-3 du code du travail, n'excède pas cinquante salariés à la date de l'implantation ou de la création. (...) V. - L'exonération prévue au I est applicable pendant une durée de cinq ans à compter de la délimitation de la zone franche urbaine dans laquelle sont employés les salariés visés au IV ou de la date de l'implantation ou de la création dans le cas visé au troisième alinéa du III. " ;

Considérant qu'aux termes de l'article 87 de la loi du 13 décembre 2000 : " II. - L'article 12 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville est ainsi modifié : " 1° Le III est complété par un alinéa ainsi rédigé : " Sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent et du III bis, lorsque le salarié a été employé dans la même entreprise dans les douze mois précédant son emploi dans une zone franche urbaine, le taux d'exonération mentionné au I est fixé à 50 % du montant des cotisations, versements et contributions précités. Cette disposition est applicable à partir du 1er janvier 2001. " ;

Considérant qu'il est de jurisprudence constante en matière d'engagement de la responsabilité sans faute de l'Etat, que le silence d'une loi sur les conséquences que sa mise en oeuvre peut comporter ne saurait être interprété comme excluant, par principe, tout droit à réparation des préjudices que son application est susceptible de provoquer si le dommage subi de son fait, excédant les aléas que comporte nécessairement l'exploitation de la société requérante, revêt un caractère grave et spécial et ne saurait, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement à l'intéressée ; qu'ainsi, la seule circonstance que l'article 87 de la loi du 13 décembre 2000 n'a pas précisé de conditions d'indemnisation ne saurait justifier le rejet de la requête ;

Considérant que la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 a pour objectif principal de créer des emplois en zones franches urbaines et de différencier les exonérations accordées aux entreprises créant de nouveaux emplois de celles accordées aux entreprises procédant au simple transfert de leurs salariés vers cette zone, en réduisant à 50 % l'exonération des charges sociales patronales pour les seuls emplois transférés en zone franche urbaine entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2001, mettant ainsi fin à l'effet d'aubaine des dispositions antérieures ; qu'il est constant que le société ABCD INTERNATIONAL a décidé de transférer son activité vers la zone franche urbaine de Grigny afin de bénéficier de l'exonération de 100% des charges patronales prévues par les dispositions de la loi de 1996 ; que, toutefois, malgré la signature d'une convention valant promesse de cession et d'acquisition d'un terrain dans cette zone le 29 septembre 1998, son implantation définitive, au sens des dispositions de l'article 87 de la loi du 13 décembre précitée, a eu lieu au mois d'août 2001 ; que dès lors, par l'effet de l'entrée en vigueur de cette loi, le taux d'exonération des emplois que la société a transféré en zone franche urbaine était fixé à 50 % des charges patronales ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dispositions la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 se sont appliquées dans des conditions identiques à celles opposées à la société ABCD INTERNATIONAL aux sociétés qui ont transféré leur activité en zone franche urbaine, qui représentent 23 à 30% des entreprises qui y sont implantées chaque année, de sorte que la spécialité du préjudice dont celle-ci se prévaut n'est pas établi ; que les retards subis par la société requérante dans la mise en oeuvre de son projet d'implantation, bien que faisant apparaître une situation spécifique, ne peuvent pas justifier de la spécialité de son dommage, cette situation étant le fait principal de l'annulation du périmètre de la zone franche urbaine par le Conseil d'Etat et ne résultant pas de la mise en oeuvre de la loi litigieuse ; que, par ailleurs, si la société ABCD INTERNATIONAL fait valoir un préjudice de 117 009 euros correspondant à une fraction des 644 000 euros d'économies évaluées en 1999, résultant du régime d'exonération à 100% des charges patronales prévu par la loi de 1996, avant sa modification par la loi solidarité et renouvellement urbains ; qu'en tout état de cause, celle-ci a continué à faire des économies sur la base du nouveau régime d'exonération à 50% issu de la loi litigieuse, et ce pour plus de quatre cinquième des économies qu'elle escomptait, de sorte que l'anormalité du préjudice dont elle se prévaut n'est pas établie ; que la circonstance selon laquelle la société requérante a déposé son bilan en janvier 2004 n'est pas de nature à justifier de l'anormalité de son dommage dans la mesure où elle ne résulte pas de la mise en oeuvre de la loi litigieuse ; que par suite, la société ABCD INTERNATIONAL ne justifie pas d'un préjudice anormal et spécial de nature à engager la responsabilité de l'Etat du fait de l'entrée en vigueur de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000, solidarité et renouvellement urbains ;

Sur la responsabilité pour faute de l'Etat :

Considérant que la société ABCD INTERNATIONAL soutient que la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 solidarité et renouvellement urbain méconnaît le principe général du droit de sécurité juridique reconnu par le Conseil d'Etat ; que toutefois, il n'appartient pas à la juridiction administrative de juger de la conformité de la loi aux principes généraux du droit ; que par suite, ce moyen doit être écarté ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société ABCD INTERNATIONAL doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ABCD INTERNATIONAL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 117 009 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'entrée en vigueur de l'article 87 de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête la société ABCD INTERNATIONAL est rejetée.

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N° 10VE02521


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02521
Date de la décision : 29/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Isabelle AGIER-CABANES
Rapporteur public ?: Mme KERMORGANT
Avocat(s) : GUEZ-MAMANE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-03-29;10ve02521 ?
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