Vu la requête, enregistrée le 13 janvier 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SAS GARAGE JEAN JAURES, ayant son siège social au 174 avenue Jean Jaurès à Aubervilliers (93300), par la SELARL Peisse Dupichot Zirah Bothorel et associés, avocats ; la société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0510493 en date du 16 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 741 798,32 euros assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter du 5 décembre 2000 en réparation du préjudice subi du fait de la non indemnisation des prestations d'enlèvement et de garde en fourrière de voitures abandonnées qu'elle a effectuées entre le 1er janvier 1996 et le 27 mai 1998 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme résiduelle de 1 558 984,36 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 décembre 2000 avec capitalisation annuelle ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'avant l'entrée en vigueur du décret du 3 mai 1996, les sociétés de fourrière pouvaient également exercer une activité de destruction et de retraitement des véhicules ; qu'aucun dispositif légal n'était prévu pour l'indemnisation des gardiens de fourrière au titre des frais engagés pour des véhicules abandonnés par leur propriétaire ; qu'ils tiraient une rémunération grâce aux activités de destruction et de retraitement des véhicules ; que le décret susmentionné a accordé un délai de deux ans aux sociétés pour se conformer aux nouvelles dispositions ; que contrairement à ce qu'à prétendu l'Etat, aucune obligation de continuer le système d'indemnisation antérieur n'existait ; que la société a légalement fait le choix de se conformer immédiatement au nouveau régime et devait donc être indemnisée dès 1996 des frais d'enlèvement et de garde relatifs aux véhicules abandonnés ; que les pièces du dossier démontrent que la société a fait ce choix sous l'impulsion de la préfecture elle-même qui a sollicité de sa part la production de listes relatives aux véhicules sans valeur marchande ou d'une valeur marchande négligeable devant être détruits ; que lorsque le gardien de fourrière remet un véhicule épave à un destructeur agréé, celui-ci lui verse le coût de la ferraille ; que la somme ainsi obtenue ne constitue pas une juste rémunération pour le travail effectué par la fourrière ; que le préfet n'a jamais contesté le quantum des demandes formulées par la société ;
.......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le décret n° 96-476 du 23 mai 1996 modifiant le code de la route et relatif à l'immobilisation, à la mise en fourrière et à la destruction des véhicules terrestres ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2012 :
- le rapport de Mme Rollet-Perraud, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public,
- et les observations de Me de Montauzan substituant Me Dupichot pour la SAS GARAGE JEAN JAURES ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 février 2012, présentée pour la SAS GARAGE JEAN JAURES ;
Considérant que la SAS GARAGE JEAN JAURES est une fourrière agréée par la préfecture de la Seine-Saint-Denis ; qu'en 2000, elle a demandé à la préfecture de l'indemniser des frais d'enlèvement et de garde en fourrière des véhicules d'une valeur inférieure à 765 euros abandonnés par leurs propriétaires et enlevés par ses soins pendant la période 1996-2000 ; qu'un protocole d'accord est intervenu entre les parties pour la période du 27 mai 1998 au 31 décembre 2000 ; qu'en l'absence d'accord intervenu pour la période antérieure, la société a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise la condamnation de l'Etat à lui verser les frais d'enlèvement et de garde engagés ; que sa demande a été rejetée par un jugement du 16 novembre 2010 ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 286 de l'ancien code de la route modifié par le décret n°96-476 du 23 mai 1996 : Chaque fourrière relève d'une autorité publique unique. Cette autorité publique est l'une de celles qui sont prévues aux articles R. 286-1 et R. 286-2. Cette autorité publique désigne le gardien de la fourrière sur la liste des gardiens de fourrière agréés par le préfet du département ou, à Paris, par le préfet de police conformément aux dispositions de l'article R. 286-5. ; qu'aux termes de l'article R. 286-5 du même code et créé par le décret susmentionné : Le préfet du département ou, à Paris, le préfet de police, agrée les gardiens de fourrière et les installations de celle-ci, après consultation de la commission départementale de sécurité routière. Nul ne peut être agréé comme gardien de fourrière s'il exerce également une activité de destruction ou de retraitement de véhicules usagés. La fourrière doit être clôturée. Ses installations doivent notamment satisfaire aux dispositions législatives et réglementaires relatives à la protection de l'environnement. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 289-1 du même code et également créé par le décret du 23 mai 1996 : (...) Les taux maxima des frais d'opérations préalables à la mise en fourrière, des frais d'enlèvement, de garde en fourrière, d'expertise et de destruction des véhicules sont fixés par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur et du ministre de l'économie et des finances, compte tenu des catégories de véhicules. (...) Il appartient à l'autorité dont relève la fourrière d'assurer la rémunération, forfaitaire le cas échéant, des professionnels du secteur privé auxquels cette autorité fait appel dans le cadre de la procédure de mise en fourrière. Cette autorité peut conclure avec ces professionnels une convention tarifaire, respectant les taux maxima fixés par l'arrêté interministériel mentionné précédemment. ; qu'enfin, aux termes de l'article 7 du décret du 23 mai 1996 : Les fourrières en activité à la date de publication du présent décret pourront poursuivre cette activité sans être soumises aux obligations fixées aux articles R. 286 et R. 286-5 pendant une période maximum de deux années. A l'issue de cette période, ces fourrières devront avoir été mises en conformité avec les dispositions des articles précités ou cesser leur activité. ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que les sociétés de fourrière avaient le choix, pendant la période de transition prévue par l'article 7 du décret du 23 mai 1996, soit de continuer leur activité telle qu'elles l'exerçaient auparavant en compensant les frais d'enlèvement et de garde en fourrière des véhicules d'une valeur inférieure à 765 euros abandonnés par leurs propriétaires et enlevés par leur soins par une rémunération tirée d'une activité de destruction ou de retraitement de véhicules usagés, soit de se mettre en conformité avec l'ensemble des nouvelles obligations fixées par le décret du 23 mai 1996 (clôture de la fourrière, respect des dispositions législatives et réglementaires relatives à la protection de l'environnement, abandon des activités de destruction ou de retraitement et obtention de l'agrément préfectoral délivré en application desdites dispositions) et obtenir une indemnisation de l'Etat pour les frais d'enlèvement et de garde en fourrière des véhicules concernés ;
Considérant qu'en l'espèce, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pris l'arrêté portant agrément de la SAS GARAGE JEAN JAURES et de ses installations le 27 mai 1998 ; que, par suite, ce n'est qu'à cette date que ladite société doit être regardée comme s'étant conformée intégralement aux obligations matérielles et administratives fixées par les dispositions du code de la route introduites ou modifiées par le décret du 23 mai 1996, et par suite, qu'elle pouvait obtenir une indemnisation de l'Etat pour les frais d'enlèvement et de garde en fourrière des véhicules de faible valeur ; qu'en outre et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que la société aurait cessé d'exercer toute activité de destruction ou de retraitement de véhicules usagés pendant la période litigieuse ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice subi du fait de la non indemnisation des prestations d'enlèvement et de garde en fourrière de voitures en cause qu'elle a effectuées entre le 1er janvier 1996 et le 27 mai 1998 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS GARAGE JEAN JAURES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS GARAGE JEAN JAURES est rejetée.
''
''
''
''
N° 11VE00147 2