La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2011 | FRANCE | N°11VE00478

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 08 novembre 2011, 11VE00478


Vu la requête, enregistrée le 7 février 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE, dont le siège est 14 rue du Ballon ZI des Richardets à Noisy-le-Grand (93160), par les conseils et avocats associés Henault-Lassieur ; la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0713590 en date du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête tendant à l'annulation la décision en date du 18 octobre 2007 par laqu

elle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité ...

Vu la requête, enregistrée le 7 février 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE, dont le siège est 14 rue du Ballon ZI des Richardets à Noisy-le-Grand (93160), par les conseils et avocats associés Henault-Lassieur ; la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0713590 en date du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa requête tendant à l'annulation la décision en date du 18 octobre 2007 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a confirmé la décision du 24 mai 2007 de l'inspecteur du travail de la Seine-Saint-Denis refusant l'autorisation de licencier M. Rui Jorge A pour faute ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée du 18 octobre 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'il n'est pas démontré l'existence de la publication de la délégation de signature du ministre du travail au profit de M. Vilboeuf, signataire de la décision litigieuse ; que la décision de l'inspection du travail et celle du ministre du travail ne relèvent pas le lien existant entre la mesure envisagée et le mandat brigué par M. Jorge A ; qu'aucune des deux décisions ne relève le caractère discriminatoire de la mesure envisagée ; qu'il ressort clairement des pièces du dossier que l'intéressé a sollicité l'organisation des élections des délégués du personnel uniquement pour se prémunir du licenciement envisagé ; qu'il n'y a pas de lien entre la mesure envisagée et le mandat brigué ; que le ministre a méconnu l'étendue de son contrôle en ne se prononçant pas sur l'absence de lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat brigué par le salarié ; que M. Jorge A exerçait une activité clandestine de réparation automobile en méconnaissance de l'engagement d'exclusivité prévu à l'article 8 de son contrat de travail ; que l'intéressé a commis de nombreuses erreurs d'ordre mécanique ayant fortement préjudicié à l'entreprise ; qu'il a fait l'objet de deux avertissements ; que les fautes commises justifient l'autorisation de procéder au licenciement ; que M. Jorge A a tenu des propos injurieux et de dénigrement et des accusations fallacieuses, à l'égard de l'entreprise, de son dirigeant et de ses collègues de travail ; que le ministre s'est estimé à tort incompétent en raison de l'expiration de la période de protection ; que le ministre doit apprécier la demande de licenciement au moment où elle a été formulée par l'inspection du travail ;

...........................................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2011 :

- le rapport de Mme Rollet-Perraud, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Ribeiro-Mengoli, rapporteur public ;

Considérant que M. Jorge A a été engagé par la SARL MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE en qualité de monteur/accessoiriste par un contrat à durée indéterminée à compter du 1er mars 2004 ; qu'il a demandé le 13 novembre 2006 l'organisation d'une élection de délégués du personnel à son employeur ; que l'inspecteur du travail de la Seine-Saint-Denis a, par une décision en date du 24 mai 2007, refusé l'autorisation de procéder au licenciement de M. Jorge A sollicitée par la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE ; que cette décision a été confirmée par une décision du 18 octobre 2007 du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité sur recours hiérarchique formé par M. Jorge A ; que la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre ;

Considérant que M. Vilboeuf, directeur départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle à l'administration centrale, chef du département soutien et appui au contrôle, qui a signé la décision litigieuse, bénéficiait d'une délégation de signature du 5 juillet 2007 à l'effet de signer dans la limite des attributions de son département, et au nom du ministre chargé du travail, tous actes, arrêtés, décisions ou conventions, à l'exclusion des décrets ; que cette décision a été publiée au JORF n° 166 du 20 juillet 2007 ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 425-1 du code du travail dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. Lorsqu'il n'existe pas de comité d'entreprise dans l'établissement, l'inspecteur du travail est saisi directement. (...) Afin de faciliter la mise en place de l'institution des délégués, les salariés qui ont demandé à l'employeur d'organiser les élections de délégués du personnel, ou d'accepter d'organiser ces élections, bénéficient de la procédure prévue aux alinéas ci-dessus pendant une durée de six mois qui court à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation a, la première, demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections. (...) ;

Considérant que lorsque le licenciement d'un salarié qui a demandé à son employeur d'organiser les élections de délégués du personnel est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi de la demande d'autorisation du licenciement et, en cas de recours hiérarchique, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier la mesure projetée compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution du mandat ou des fonctions dont il est investi ;

Considérant que pour rejeter le recours hiérarchique présenté par la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE, le ministre s'est fondé sur la circonstance que ni la mauvaise qualité du travail de M. Jorge A, ni son insubordination, ni le fait qu'il se livrerait à une activité rémunérée pendant sa pause ne sont établis et que la teneur des courriers adressés par M. Jorge A à son employeur n'était pas injurieuse ; que, par suite, le ministre n'était pas tenu, pour rejeter ce recours, de rechercher si ce licenciement était ou non en rapport avec le mandat brigué par l'intéressé ;

Considérant que si l'expiration du délai de protection spéciale instituée par les dispositions précitées de l'article L. 425-1 du code du travail ne saurait avoir pour effet de priver le ministre du travail du pouvoir qui lui appartient, en vertu des dispositions de l'article R. 436-6 du code du travail, dans sa rédaction applicable, et en qualité de supérieur hiérarchique de l'inspecteur du travail, de contrôler une autorisation de licenciement accordée par ce dernier avant l'expiration dudit délai de protection, elle le prive toutefois du pouvoir d'autoriser le licenciement qui n'est dès lors plus subordonné à autorisation ; que, par suite, la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE n'est pas fondée à soutenir que le ministre s'est estimé à tort incompétent, en raison de l'expiration de la période de protection, pour se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement ;

Considérant qu'aux termes des stipulations du contrat de travail de M. Jorge A, celui-ci s'est engagé à travailler exclusivement pour le compte de la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE et à y consacrer tout son temps ; que ladite société a fait réaliser une enquête par une société de surveillance qui a révélé que M. Jorge A avait pour habitude de se rendre pendant sa pause méridienne de 12h30 à 13h30 environ et au cours du congé de fin de semaine dans un hangar situé à Champigny et d'y effectuer des travaux sur des véhicules ; que toutefois, aux termes de l'article L. 121-8 du code du travail alors applicable : Aucune information concernant personnellement un salarié ou un candidat à un emploi ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à la connaissance du salarié ou du candidat à un emploi. ; que, par suite, la réalité des faits reprochés à M. Jorge A, dont l'employeur a eu connaissance par le biais d'une enquête réalisée à l'insu de l'intéressé, ne peut être regardée comme établie ;

Considérant que la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE soutient que M. Jorge A a tenu des propos injurieux et de dénigrement et des accusations fallacieuses, à l'égard de l'entreprise, de son dirigeant et de ses collègues de travail ; que, toutefois, la société ne produit à l'instance aucune pièce de nature à établir la réalité de ses allégations ; qu'en effet, les lettres adressées par l'intéressé à son employeur ne contiennent pas de tels propos et en outre n'ont pas été rendues publiques ; que, par suite, les faits susmentionnés reprochés à M. Jorge A ne sont pas établis ;

Considérant que la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE reproche à M. Jorge A d'avoir quitté son poste avant la fin de son service le 5 juin 2006 sans justification, ce qu'il ne contredit pas, et d'avoir commis plusieurs erreurs graves dans l'accomplissement de son travail ; que certains des faits reprochés ne sont pas contestés par l'intéressé, tels que le montage à l'envers du joint de culasse sur une Peugeot 306 et le retour le 25 octobre 2006 d'un véhicule Peugeot 806 après remplacement de la boîte de vitesse ; que toutefois, les autres faits imputés au salarié ne sont pas matériellement établis par les pièces du dossier ; qu'ainsi, s'agissant du bouchon moteur non remis après une vidange d'une Renault Scenic et du flexible de frein mal serré sur une Citroën ZX, les pièces produites ne permettent pas d'imputer les fautes à M. Jorge A, s'agissant de l'erreur de montage simultané sur deux culasses de la marque Fiat, du défaut de montage de la courroie accessoire sur une Peugeot 806 et de la destruction d'un roulement de roue neuf, l'intéressé soutient, sans être sérieusement contredit, que les erreurs commises résultent de matériels et d'équipements défectueux, inadaptés ou insuffisants ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société aurait signalé à l'inspecteur du travail les faits qui se seraient produits en avril 2007 ; qu'en outre, les faits qui se seraient produits en juin 2007 sont postérieurs à la décision litigieuse ; que, par suite, les seuls faits reprochés à M. Jorge A dont la réalité est établie ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier la mesure projetée de licenciement de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 octobre 2007 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité a confirmé la décision du 24 mai 2007 de l'inspecteur du travail de la Seine-Saint-Denis refusant l'autorisation de licencier M. Jorge A pour faute ; que, par voie de conséquence, les conclusions présentées par la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application des dispositions susmentionnées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE la somme demandée par M. Jorge A à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société MICHEL MARGOT ABC DE L'AUTOMOBILE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. Jorge A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

''

''

''

''

N° 11VE00478 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00478
Date de la décision : 08/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute. Absence de faute d'une gravité suffisante.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Claire ROLLET-PERRAUD
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : JERONIMO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-11-08;11ve00478 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award