Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Mlle Sonia A, demeurant ..., par Me Shebabo, avocat à la Cour ; Mlle A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement no 0907588 en date du 24 novembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 juillet 2009 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays dans lequel elle serait renvoyée ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé dès lors que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier et qu'il n'est pas justifié des raisons pour lesquelles il ne serait pas porté atteinte aux articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en outre, elle n'a pas eu connaissance des pièces sur lesquelles le préfet s'était fondé pour prendre sa décision et que sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen particulier ; qu'une erreur de fait a été commise par le préfet dès lors qu'elle justifie, d'une part, d'une présence habituelle en France depuis cinq ans ainsi que de la réalité de sa vie familiale, sa soeur résidant régulièrement en France, et, d'autre part, de sa vie professionnelle, en produisant un contrat de travail ; qu'une erreur de droit a été commise dès lors que l'accord franco-tunisien modifié, entré en vigueur le 1er juillet 2009, lui était applicable ; qu'en vertu de la circulaire du 7 janvier 2008, le préfet pouvait régulariser sa situation compte tenu de la nature de son emploi ; qu'elle peut également se prévaloir de la circulaire du 12 mai 1998 ; qu'une erreur manifeste d'appréciation a été commise dès lors que, célibataire sans enfant, le centre de ses intérêts personnels et familiaux se trouve désormais en France ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien en date du 17 mars 1988 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu le décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2011 :
- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,
- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,
- et les observations de Mlle A ;
Considérant que Mlle A, ressortissante tunisienne née le 9 avril 1978, relève régulièrement appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 juillet 2009 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays dans lequel elle serait renvoyée ;
Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement ; que l'arrêté contesté vise les textes dont il fait application et mentionne les faits qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressée et que certaines de leurs mentions sont rédigées à l'aide d'une formule stéréotypée, notamment en ce qui concerne l'absence d'atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée à sa vie familiale ou la circonstance que celle-ci n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ledit arrêté répond aux exigences de motivation posées par la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;
Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort des mentions portées dans cet arrêté, ni qu'il serait entaché d'erreur de fait, ni que la situation personnelle de Mlle A n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier ;
Sur la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien susvisé : Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation et qu'aux termes de l'article 3 du même accord : Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié / Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants tunisiens visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er sont applicables pour le renouvellement du titre de séjour après dix ans / Les autres ressortissants tunisiens ne relevant pas de l'article 1er du présent Accord et titulaires d'un titre de séjour peuvent également obtenir un titre de séjour d'une durée de dix ans s'ils justifient d'une résidence régulière en France de trois années. Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence professionnels ou non, dont ils peuvent faire état et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. / Ces titres de séjour confèrent à leurs titulaires le droit d'exercer en France la profession de leur choix. Ils sont renouvelables de plein droit ; qu'aux termes de l'article 2 du protocole relatif à la gestion concertée des migrations entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République tunisienne signé à Tunis le 28 avril 2008 et publié par décret du 24 juillet 2009, applicable à compter du 1er juillet 2009 : (...) 2.3 : Migration pour motifs professionnels (...) 2.3.3. Le titre de séjour portant la mention salarié , prévu par le premier alinéa de l'article 3 de l'Accord du 17 mars 1988 modifié, est délivré à un ressortissant tunisien en vue de l'exercice, sur l'ensemble du territoire français, de l'un des métiers énumérés sur la liste figurant à l'Annexe I du présent Protocole, sur présentation d'un contrat de travail visé par l'autorité française compétente sans que soit prise en compte la situation de l'emploi (...) ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;
Considérant que l'arrêté attaqué est notamment fondé sur le fait que Mlle A ne pouvait solliciter son admission au séjour, à titre exceptionnel, sur le fondement des dispositions de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007 codifiées à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que ces dispositions ne lui auraient pas été applicables dès lors que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié régit complètement la situation des ressortissants tunisiens au regard de leur droit au travail ; que, si Mlle A fait valoir, à bon droit, que l'accord-cadre franco-tunisien et ses deux protocoles, signés à Tunis le 28 avril 2008, et entrés en vigueur le 1er juillet 2009, étaient applicables à la date à laquelle l'arrêté attaqué a été pris, soit le 16 juillet 2009, les articles 3 de cet accord et 2.3.3 du protocole prévoient les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants tunisiens un titre de séjour en qualité de salarié ; que ces stipulations font dès lors obstacle à l'application aux ressortissants tunisiens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ont le même objet ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'en n'examinant pas la demande de titre de séjour présentée par Mlle A sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'attribution, à titre exceptionnel, d'une carte de séjour temporaire portant la mention salarié , le préfet des Hauts-de-Seine aurait commis une erreur de droit, doit être écarté ; que, toutefois, les stipulations de l'accord franco-tunisien ne font pas obstacle à ce que le préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, puisse apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mlle A, entrée en France en 2005, fait valoir que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se trouve désormais sur le territoire français dès lors qu'elle est intégrée, socialement et professionnellement, à la société française, et qu'elle est hébergée chez sa soeur qui y réside régulièrement ; que, toutefois, la requérante, célibataire sans enfant, n'établit pas être dépourvue de toutes attaches familiales en Tunisie, où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-sept ans ; que, dans ces conditions, l'arrêté préfectoral contesté n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris ; que, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ; que, compte tenu de ces éléments, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet dans l'examen de la situation personnelle de l'intéressée ne peut être davantage accueilli ;
Considérant, en troisième lieu, que Mlle A ne peut utilement se prévaloir, ni de la circulaire du 12 mai 1998, ni de celle du 7 janvier 2008 relative à l'application de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, au demeurant annulée par le Conseil d'Etat le 23 octobre 2009, dont les dispositions ne revêtent pas de caractère réglementaire ;
Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que Mlle A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 16 juillet 2009 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par Mlle A et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mlle A est rejetée.
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N° 09VE04069 2