La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2011 | FRANCE | N°10VE01100

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 03 mai 2011, 10VE01100


Vu le recours, enregistré le 9 avril 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0806809-0911110 en date du 7 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la société Doux tendant à la restitution d'une créance à l'impôt sur les sociétés, d'un montant global de 4 917 750 euros, à raison du report en arrière de déficits afférents aux exercices clos en 1998 et 1999 ;


2°) de juger que la société Doux ne dispose pas d'une créance de 4 917 75...

Vu le recours, enregistré le 9 avril 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0806809-0911110 en date du 7 janvier 2010 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande de la société Doux tendant à la restitution d'une créance à l'impôt sur les sociétés, d'un montant global de 4 917 750 euros, à raison du report en arrière de déficits afférents aux exercices clos en 1998 et 1999 ;

2°) de juger que la société Doux ne dispose pas d'une créance de 4 917 750 euros sur le Trésor, résultant de l'imputation desdits déficits et de prononcer, par voie de conséquence, le remboursement, par la société Doux, d'une somme de 1 500 euros mise à sa charge par le tribunal en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la naissance d'un déficit reportable au titre d'un exercice doit être imputé sur le plus prochain exercice bénéficiaire en application du troisième alinéa du I. de l'article 209 du code général des impôts, sauf à ce que le contribuable opte pour l'exercice du report en arrière des déficits, en application de l'article 220 quinquies du code général des impôts ; que, dans le cas où existe une pluralité de déficits reportables, l'article 209 doit être lu en ce sens qu'il implique une imputation, par priorité, des déficits les plus anciens sur les plus récents ; que le contribuable ne peut donc choisir d'imputer prioritairement un déficit plus récent par rapport à un déficit plus ancien ; que la règle d'imputation des déficits par ordre d'ancienneté s'applique y compris pour les amortissements réputés différés soumis au droit commun des reports déficitaires à compter des exercices ouverts depuis le 1er janvier 2004 ; qu'en l'espèce, l'encours des amortissements réputés différés de la société Doux en instance de report au 31 décembre 2003 s'élevait, pour l'année 1998, à la somme de 2 083 647 euros et, pour l'année 1999, à la somme de 14 910 232 euros ; que ceux-ci devaient s'imputer comme les déficits ordinaires sur les résultats des plus prochains exercices bénéficiaires, soit, pour le déficit reportable né en 1998, sur l'exercice bénéficiaire de l'année 2005 ; que, dès lors que ce bénéfice était d'un montant supérieur au déficit à imputer, la société Doux ne disposait plus d'aucun déficit reportable au titre de l'année 1998 à la date de sa décision d'opter, en 2008, pour le report en arrière de celui-ci ; que le montant de déficit encore reportable de l'année 1999 était égal à la différence entre, d'une part, le montant du déficit reportable compte tenu d'une rectification en base due au rehaussement du bénéfice de la société Galina Industrie et, d'autre part, le solde du bénéfice encore disponible de l'année 2005 après imputation du déficit reportable de l'année 1998, soit la somme de 2 240 629 euros ; que, dans ces conditions, la société pouvait seulement prétendre à l'existence d'une créance sur le trésor, au titre du report en arrière partiel du déficit de l'année 1999, d'un montant au plus égal à 746 876 euros ; que, par suite, en faisant droit à l'intégralité de la demande de la société Doux, le Tribunal administratif de Montreuil a commis une erreur de droit ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2011 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Arnaud-Donguy pour la société Doux ;

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa du I. de l'article 209 du code général des impôts, relatif à la détermination des bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés : Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté sur les exercices suivants. ; qu'aux termes de l'article 220 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux déficits constatés au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 1989 : I. Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa du I. de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ces bénéfices et à l'exclusion des bénéfices exonérés en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 undecies et 207 à 208 sexies ou qui ont bénéficié des dispositions du premier alinéa du f du I. de l'article 219 ou qui ont ouvert droit au crédit d'impôt prévu aux articles 220 quater et 220 quater A ou qui ont donné lieu à un impôt payé au moyen de crédits d'impôts. Cette option porte, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1985, sur les déficits reportables à la clôture d'un exercice en application du troisième alinéa du I. de l'article 209. / Le déficit imputé dans les conditions prévues au premier alinéa cesse d'être reportable sur les résultats des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté. / L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance d'égal montant (...) / La créance est remboursée au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option visée au premier alinéa a été exercée. Toutefois, l'entreprise peut utiliser la créance pour le paiement de l'impôt sur les sociétés dû au titre des exercices clos au cours de ces cinq années. Dans ce cas, la créance n'est remboursée qu'à hauteur de la fraction qui n'a pas été utilisée dans ces conditions (...) / IV. Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives des entreprises (...) ; que le I. de l'article 46 quater-0 W de l'annexe III au code général des impôts, pris pour l'application de ces dispositions, précise que : L'entreprise qui exerce l'option prévue au premier alinéa du I. de l'article 220 quinquies du code général des impôts doit joindre au relevé de solde de l'exercice au titre duquel cette option est exercée, une déclaration conforme au modèle fixé par l'administration (...) ; que l'article L. 171 A du livre des procédures fiscales dispose que, pour l'application de l'article 220 quinquies du code général des impôts, l'administration est fondée à vérifier l'existence et la quotité de la créance et à en rectifier le montant (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Doux a souscrit, le 20 février 2008, dans les formes, conditions et délais fixés par les dispositions précitées de l'article 46-0 W de l'annexe III au code général des impôts, deux déclarations d'option pour le report en arrière , prévu par l'article 220 quinquies du même code, sur les bénéfices des exercices clos en 1995 et 1996, des déficits constatés au titre des exercices clos en 1998 et 1999, s'élevant respectivement aux sommes de 2 083 647 euros et 15 045 035 euros ; qu'ayant procédé à la vérification des créances résultant de ces reports dont, par ces déclarations valant réclamation au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, la société entendait solliciter le remboursement, l'administration n'a pas admis la créance en ce qui concerne l'exercice 1998 et ne l'a admise qu'à concurrence d'un déficit constaté de 2 240 629 euros au titre de l'exercice clos en 1999 ; que le litige fiscal né du rejet de l'option de la société Doux pour le report en arrière du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1998 et de l'admission partielle de son option pour le report en arrière du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 1999, a été porté par la société devant le Tribunal administratif de Montreuil ; que, par jugement en date du 7 janvier 2010, dont le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève régulièrement appel, le tribunal administratif a fait partiellement droit à la demande de la société et reconnu sa créance sur le Trésor pour un montant de 4 917 750 euros, résultant du report en arrière d'une somme globale de 16 993 879 euros, correspondant au montant des déficits constatés au titre des exercices clos en 1998 et 1999, correction faite d'un rehaussement d'imposition à l'impôt sur les sociétés pour un montant, non contesté, de 134 873 euros, au titre du second exercice ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du I. de l'article 220 quinquies du code général des impôts que les déficits sur lesquels peut porter l'option de report en arrière prévue par ce texte s'entendent, non seulement du déficit né au cours de l'exercice au titre duquel cette option est exercée, mais aussi des déficits des exercices antérieurs qui sont reportables à la clôture de cet exercice en vertu du troisième alinéa précité du I. de l'article 209 du même code ; qu'à cet égard, aucune disposition de l'article 220 quinquies, ni d'ailleurs aucune autre disposition législative ou réglementaire, n'impose à une société de faire porter son option sur l'ensemble des déficits encore reportables à la clôture de l'exercice à l'issue duquel elle l'exerce, ni ne lui fait obligation de les imputer dans un sens, et selon un ordre d'imputation, particuliers ; que, dès lors, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ne pouvait, sans ajouter à la loi, estimer que l'option de report en arrière , par la société Doux, de ses déficits encore reportables au titre des exercices clos en 1998 et 1999 dans les conditions ci-dessus mentionnées ne pouvait porter que sur le déficit de l'exercice clos en 1999 dans la limite d'une somme de 2 240 629 euros, au motif que le montant du déficit reportable de l'exercice clos en 1998 devait s'imputer prioritairement sur le bénéfice de l'exercice clos en 2005 et que celui de l'exercice clos en 1999 aurait dû subir un sort identique à concurrence d'une somme de 12 669 603 euros, correspondant au solde bénéficiaire encore disponible de cet exercice ;

Considérant, toutefois, que, s'il résulte de ce qui vient d'être dit que la société Doux était en droit, comme elle l'a fait, d'imputer sur le bénéfice de l'antépénultième et, le cas échéant, de l'avant-dernier puis du précédent exercices, l'intégralité du déficit reportable dont elle était titulaire au titre des exercices clos en 1998 et 1999 sur le fondement des dispositions du I. de l'article 220 quinquies, en revanche, elle ne pouvait en obtenir la restitution dès lors qu'en application du quatrième alinéa desdites dispositions la créance née de l'imputation en arrière de déficits est remboursée au terme des cinq années suivant celle de la clôture de l'exercice au titre duquel l'option de report en arrière a été exercée, savoir, s'agissant des exercices clos en 1998 et 1999, en 2004 et 2005 ; que, dans ces conditions, la créance admise à bon droit par le premier juge, pour un montant de 4 917 750 euros, ne pouvait plus faire l'objet, en 2008, de la restitution demandée par la société Doux en première instance ;

Considérant que, dans son jugement du 7 janvier 2010, le Tribunal administratif de Montreuil s'est borné à constater dans son dispositif l'existence d'une créance de la société Doux sur le Trésor d'un montant de 4 917 750 euros sans en décider la restitution ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ; que son recours ne peut qu'être rejeté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Doux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Doux la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

''

''

''

''

N° 10VE01100 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE01100
Date de la décision : 03/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-10 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net. Report déficitaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : ARNAUD DONGUY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-05-03;10ve01100 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award