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03/05/2011 | FRANCE | N°10VE00744

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 03 mai 2011, 10VE00744


Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Me SOUCHON et Me AVEZOU pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, dont le siège est 1, rue des Mazières à Evry (91000), par Me Obadia, avocat à la Cour ;

Me SOUCHON et Me AVEZOU, pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605461 en date du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant au remboursement d'une créance à l'impôt sur les sociétés, d

'un montant de 2 131 576 euros, dont la société GENERAL TRAILERS FRANCE est titul...

Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour Me SOUCHON et Me AVEZOU pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, dont le siège est 1, rue des Mazières à Evry (91000), par Me Obadia, avocat à la Cour ;

Me SOUCHON et Me AVEZOU, pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605461 en date du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant au remboursement d'une créance à l'impôt sur les sociétés, d'un montant de 2 131 576 euros, dont la société GENERAL TRAILERS FRANCE est titulaire à raison du report en arrière du déficit de l'exercice clos en 2000 ;

2°) de prononcer la restitution de la créance sur le Trésor demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent qu'en vertu de la décision du Conseil d'Etat Kaufman et Broad Participations du 4 août 2006, l'administration n'est pas fondée à soutenir que la déclaration d'option du report en arrière doit être, à peine d'irrecevabilité, jointe à la déclaration de résultats de l'exercice au titre duquel l'option est exercée, dans les formes, conditions et délais fixés à l'article 46 quater-0 W de l'annexe III au code général des impôts ; que l'administration commet une erreur de droit lorsqu'elle estime que l'absence de demande de report en arrière d'un déficit reportable dûment comptabilisé et déclaré par l'entreprise est assimilable à une renonciation, par cette même entreprise, de reporter en arrière ledit déficit au profit de la règle de droit commun de report en avant des déficits ; qu'à la différence d'une demande d'option de report en arrière, qui constitue une décision de gestion opposable, l'absence d'exercice d'une telle option n'est pas assimilable à une décision de gestion ; que, dans ses dernières écritures présentées en première instance, l'administration a admis la recevabilité de sa demande ; que, ni la loi, ni la jurisprudence ne fixent de limite autre que le délai de réclamation ouvert notamment à l'article R. 196-3 du livre des procédures fiscales à une entreprise pour demander le report en arrière d'un déficit sur un bénéfice qui a été l'objet d'un rehaussement d'imposition à la suite d'une vérification de comptabilité ; que, par suite, le droit de réclamation spécial ouvert à l'article R. 196-3 trouve pleinement à s'appliquer dès lors que l'option de report en arrière concerne des résultats déficitaires encore reportables ou rendus reportables par l'exercice du droit de reprise, sans que l'administration puisse opposer un exercice tardif au droit d'option au motif qu'il devrait, pour être effectif, encore être subordonné à une augmentation du bénéfice d'imputation ou à une augmentation du déficit de référence ; que l'option s'étend, dans le cadre du droit de reprise, non seulement aux bases d'imposition primitives mais aussi supplémentaires, alors même que l'administration abandonnerait les rehaussements en cause ; qu'elle est en droit d'opter pour le report en arrière du déficit né au cours de l'année de la fusion, en 2000, dès lors qu'il est admis, par la doctrine administrative référencée 4 H-2222 du 30 octobre 1996, que l'entreprise absorbante ou bénéficiaire de l'apport peut reporter le déficit constaté au titre de l'exercice au cours duquel l'opération est intervenue, à l'exception, bien entendu, de ceux éventuellement transférés en application de l'article 209-II. du code général des impôts ; qu'en l'espèce, l'administration a, en 2003, reconnu à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur l'exercice clos en 2000, un déficit d'un montant de 6 472 772 euros ; que ce déficit constaté par l'administration n'a pu faire l'objet d'un report en avant et que, par suite, la demande de report en arrière est fondée ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2011 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Obadia pour les requérants ;

Considérant qu'il est constant que Me SOUCHON et Me AVEZOU, co-commissaires à l'exécution du plan de continuation de la société GENERAL TRAILERS FRANCE, ont, le 25 mai 2005, souscrit pour cette société une déclaration d'option, rectifiée le 19 décembre suivant, pour le report en arrière , prévue par l'article 220 quinquies, sur l'année 1999, du déficit constaté au titre de l'exercice clos en 2000 ; qu'ayant procédé à la vérification de la créance sur le Trésor née de ce report, dont, par cette déclaration valant réclamation au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, les requérants entendaient solliciter le remboursement pour un montant de 2 131 576 euros, l'administration ne l'a pas admise ; que le litige fiscal né du rejet de cette option a été porté par Me SOUCHON et Me AVEZOU, pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, devant le Tribunal administratif de Versailles, lequel, par jugement du 15 décembre 2009, dont les intéressés relèvent régulièrement appel, a rejeté leur demande ;

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 220 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux déficits constatés au titre des exercices clos à compter du 31 décembre 1989 : I. Par dérogation aux dispositions du troisième alinéa du I. de l'article 209, le déficit constaté au titre d'un exercice ouvert à compter du 1er janvier 1984 par une entreprise soumise à l'impôt sur les sociétés peut, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice de l'antépénultième exercice et, le cas échéant, de celui de l'avant-dernier exercice puis de celui de l'exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribuée de ces bénéfices et à l'exclusion des bénéfices exonérés en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 undecies et 207 à 208 sexies ou qui ont bénéficié des dispositions du premier alinéa du f du I de l'article 219 ou qui ont ouvert droit au crédit d'impôt prévu aux articles 220 quater et 220 quater A ou qui ont donné lieu à un impôt payé au moyen de crédits d'impôts. Cette option porte, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1985, sur les déficits reportables à la clôture d'un exercice en application du troisième alinéa du I de l'article 209. / Le déficit imputé dans les conditions prévues au premier alinéa cesse d'être reportable sur les résultats des exercices suivant celui au titre duquel il a été constaté. / L'excédent d'impôt sur les sociétés résultant de l'application du premier alinéa fait naître au profit de l'entreprise une créance d'égal montant (...) II. L'option visée au I. ne peut pas être exercée au titre d'un exercice au cours duquel intervient une cession ou une cessation totale d'entreprise, une fusion de sociétés ou une opération assimilée, ou un jugement prononçant la liquidation des biens ou la liquidation judiciaire de la société (...) IV. Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives des entreprises (...) ; que le I. de l'article 46 quater-0 W de l'annexe III au code général des impôts, pris pour l'application de ces dispositions, précise que : L'entreprise qui exerce l'option prévue au premier alinéa du I. de l'article 220 quinquies du code général des impôts doit joindre au relevé de solde de l'exercice au titre duquel cette option est exercée, une déclaration conforme au modèle fixé par l'administration (...) ; que l'article L. 171 A du livre des procédures fiscales dispose que : pour l'application de l'article 220 quinquies du code général des impôts, l'administration est fondée à vérifier l'existence et la quotité de la créance et à en rectifier le montant (...) ; qu'il résulte, en particulier, de la combinaison des dispositions des I. et II. précitées de l'article 220 quinquies du code général des impôts qu'une société est fondée à opter pour le report en arrière des déficits qui portent, non seulement sur celui né au cours de l'exercice au titre duquel l'option est exercée, mais également sur ceux des exercices antérieurs qui sont encore reportables à la clôture de cet exercice, sous réserve, toutefois, que l'option ne porte pas sur un exercice au cours duquel, notamment, une fusion de sociétés ou une opération assimilée est intervenue ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de l'exercice clos en 2000 au titre duquel Me SOUCHON et Me AVEZOU ont sollicité, pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, le report en arrière de son déficit sur le bénéfice de l'exercice précédent, cette société, alors tête de groupe d'un groupe fiscalement intégré, a absorbé les sociétés General Trailers International et Bénalu appartenant au même groupe ; que, dès lors, si Me SOUCHON et Me AVEZOU étaient, en principe, recevables à opter, à la clôture de l'exercice 2004 précédant la demande d'option, pour le report en arrière des déficits encore reportables de la société GENERAL TRAILERS FRANCE à la clôture de l'exercice 2000, l'intervention d'une opération de fusion-absorption, au cours de l'exercice 2000 au titre duquel l'option est demandée, a suffi, à elle seule, à priver la société GENERAL TRAILERS FRANCE de la faculté d'obtenir le report en arrière dudit déficit sur le bénéfice de l'exercice précédent, par application des dispositions précitées du II. de l'article 220 quinquies du code général des impôts ;

Sur le bénéfice de la doctrine administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; que si ces dispositions instituent une garantie contre les changements de doctrine de l'administration, qui permet aux contribuables de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, qui ajoutent à la loi ou la contredisent, c'est à la condition que les intéressés entrent dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ces énonciations ;

Considérant que les requérants se prévalent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe n° 9 de la documentation administrative de base référencée 4 H-2222 du 30 octobre 1996 relative aux modalités du report en arrière des déficits ; que cette doctrine, qui rappelle que le déficit constaté au titre d'un exercice ne peut être reporté en arrière que sur option de l'entreprise, précise en son paragraphe n° 8 que l'option ne peut pas être exercée au titre d'un exercice au cours duquel l'entreprise a procédé à une opération de fusion, de scission ou d'apport partiel d'activité et que cette règle s'applique aussi bien à l'entreprise absorbante ou bénéficiaire de l'apport qu'à l'entreprise absorbée ou apporteuse ; que toutefois, selon le paragraphe n° 9 de cette même doctrine : (...) il est admis que l'entreprise absorbante (...) puisse reporter le déficit constaté au titre de l'exercice au cours duquel l'opération est intervenue, à l'exception, bien entendu, de ceux éventuellement transférés en application de l'article 209-II du code général des impôts. Ce déficit doit alors remplir les conditions prévues normalement pour le report en arrière des déficits ;

Considérant qu'il ne résulte d'aucune de ses énonciations que la doctrine 4 H-2222 du 30 octobre 1996 ait entendu s'appliquer aux sociétés ayant cessé toute activité à la clôture de l'exercice précédant l'option de report en arrière ; qu'en l'espèce, il est constant que la société GENERAL TRAILERS FRANCE, qui a opté en 2005 pour un report en arrière d'un déficit constaté en 2000, a souscrit, pour la dernière fois en 2003, une déclaration à l'impôt sur les sociétés des résultats de l'exercice clos en 2002 dès lors qu'elle avait cessé toute activité postérieurement à la clôture de cet exercice ; que, dans ces conditions, Me SOUCHON et Me AVEZOU ne peuvent utilement se prévaloir, pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, du paragraphe n° 9 de la documentation administrative de base référencée 4 H-2222 du 30 octobre 1996, dans les prévisions desquelles cette société n'entrait plus postérieurement à la clôture de l'exercice 2002 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant au remboursement d'une créance à l'impôt sur les sociétés qu'aurait détenue la société GENERAL TRAILERS FRANCE sur le Trésor, à raison du report en arrière du déficit de l'exercice clos en 2000 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Me SOUCHON et Me AVEZOU demandent pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Me SOUCHON et Me AVEZOU, pour la société GENERAL TRAILERS FRANCE, est rejetée.

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N° 10VE00744 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00744
Date de la décision : 03/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Textes fiscaux - Opposabilité des interprétations administratives (art - L - 80 A du livre des procédures fiscales).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Report déficitaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : SELARL OBADIA et TONDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-05-03;10ve00744 ?
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