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03/05/2011 | FRANCE | N°09VE03140

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 03 mai 2011, 09VE03140


Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA FRANCE TELECOM, dont le siège social est 6, place d'Alleray à Paris (75015), venant aux droits de la SA WANADOO INTERACTIVE, par Me Quentin et Me Lefebvre, avocats à la Cour ; la SA FRANCE TELECOM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500801 en date du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui

ont été assignés au titre des années 1998 et 1999 ;

2°) de prononce...

Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA FRANCE TELECOM, dont le siège social est 6, place d'Alleray à Paris (75015), venant aux droits de la SA WANADOO INTERACTIVE, par Me Quentin et Me Lefebvre, avocats à la Cour ; la SA FRANCE TELECOM demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500801 en date du 31 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 1998 et 1999 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses d'acquisition de biens, engagées dans le cadre d'opérations de promotions publicitaires, est déductible en application des dispositions de l'article 271 du code général des impôts ; qu'elle justifie que les biens dont s'agit ont été remis aux vendeurs de la société dans le cadre d'une opération promotionnelle liée au lancement et à la commercialisation d'Internet en France par le groupe, durant les années 1998 et 1999 ; que la jurisprudence communautaire admet qu'une prestation de publicité soit fournie par une entreprise ne s'occupant pas exclusivement ni même principalement de publicité, dès lors que cette prestation comporte la transmission d'un message destiné à informer les consommateurs sur un produit ou un service ou fait indissociablement partie d'une campagne publicitaire concourant à cette transmission ; que la doctrine administrative 3 A-2143, point n° 10, du 20 octobre 1999 reprend les critères de cette jurisprudence ; qu'en l'espèce, l'achat de biens remis gratuitement aux meilleurs vendeurs des agences s'est inscrit dans le cadre d'une opération promotionnelle de nature publicitaire et que les sommes litigieuses constituaient des dépenses de publicité ouvrant droit à déduction, ou à tout le moins des frais généraux, également déductibles ; que ces biens, quand bien même ils avaient été remis gratuitement, présentaient un lien direct et immédiat avec l'ensemble de l'activité économique de l'entreprise en ce qu'ils ont contribué à augmenter le chiffre d'affaires de celle-ci et étaient présumés constituer des éléments constitutifs du prix des biens ou services commercialisés ; que la charge de la preuve contraire incombe à l'administration ; que la qualification des biens litigieux de cadeaux, au sens de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts, ne peut être retenue dès lors que ces biens ont été remis aux meilleurs vendeurs, compte tenu de leurs résultats par rapport à leurs objectifs ; que ces biens devaient être regardés comme une contrepartie réelle constitutive d'une rémunération ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2011 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de M. de Basquiat, représentant la SA FRANCE TELECOM ;

Considérant que la SA WANADOO INTERACTIVE, qui a pour activité la fourniture d'accès à l'Internet, aux droits de laquelle vient la SA FRANCE TELECOM, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999, à l'issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été assignés, motivés par la remise en cause, sur le fondement de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts, des déductions de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait opérées sur les achats d'appareils photographiques, d'équipements haute-fidélité, d'un téléviseur et d'un ordinateur réalisés sur la période en litige et destinés à être remis gratuitement aux vendeurs de certaines agences France Télécom à l'occasion d'opérations de motivation desdits vendeurs ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) ; que l'article 230 de l'annexe II au même code, applicable à la période d'imposition en litige, précise : 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation (...) ;

Considérant, d'une part, que des prestations de publicité comportent nécessairement la diffusion d'un message destiné à informer les consommateurs de l'existence et des qualités d'un produit ou d'un service dans le but d'augmenter les ventes, et consistent en toute opération qui fait indissociablement partie d'une campagne publicitaire et qui concourt, de ce fait, à la transmission du message publicitaire ; que la société requérante fait valoir que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les dépenses d'acquisition des biens remis gratuitement à certains vendeurs est déductible, en application des dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts, dès lors que ces dépenses ont été exposées dans le cadre d'opérations de promotions publicitaires liées au lancement et à la commercialisation de l'Internet en France par le groupe, durant les années litigieuses ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que les équipements ainsi remis aux vendeurs auraient constitué le support d'un message publicitaire destiné aux consommateurs ; qu'il ne s'agit pas davantage de cadeaux publicitaires destinés à des clients fidèles ; qu'en outre, l'administration fiscale a soutenu, sans être sérieusement contredite, que le coût de ces équipements n'avait pas été répercuté dans le prix des opérations taxées ; que, dans ces conditions, les biens remis gratuitement à certains vendeurs par la SA WANADOO INTERACTIVE ne peuvent être regardés comme faisant indissociablement partie d'une opération de publicité ni davantage comme des cadeaux publicitaires ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 271 du code général des impôts, interprétées à la lumière des paragraphes 1 et 2, 3 et 5 de l'article 17 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977, que l'existence d'un lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est, en principe, nécessaire pour qu'un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée en amont soit reconnu à l'assujetti et pour déterminer l'étendue d'un tel droit ; que le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'acquisition de biens ou de services en amont suppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction ; qu'en l'absence d'un tel lien, un assujetti est toutefois fondé à déduire l'intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des biens et services en amont, lorsque les dépenses liées à l'acquisition de ces biens et services font partie de ses frais généraux et sont, en tant que telles, des éléments constitutifs du prix des biens produits ou des services fournis par cet assujetti ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit plus haut, que les biens remis gratuitement à certains vendeurs par la SA WANADOO INTERACTIVE ne peuvent être regardés comme faisant indissociablement partie d'une opération de publicité ni davantage comme des cadeaux publicitaires ; que la société requérante n'apporte aucun élément de preuve, qu'elle est seule en mesure de détenir, de ce que les frais ainsi exposés se rattacheraient aux éléments constitutifs du prix des opérations relevant de son activité économique ; qu'en l'absence de tout lien direct et immédiat entre la remise gratuite des biens dont s'agit et le prix des prestations commercialisées par la société, l'administration était fondée à remettre en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé ces dépenses ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts, aux termes duquel : N'est pas déductible la taxe ayant grevé : 1° des biens cédés sans rémunération ou moyennant une rémunération très inférieure à leur prix normal, notamment à titre de commission, salaire, gratification, rabais, bonification, cadeau, quelle que soit la qualité du bénéficiaire ou la forme de la distribution, sauf quand il s'agit de biens de très faible valeur (...) ; que ces dispositions, ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, ont pour objet d'exclure la déduction de la taxe qui a grevé des biens dont la cession a été consentie par l'assujetti dans l'intérêt de son exploitation, mais sans la contrepartie directe d'une rémunération notable ; qu'en l'espèce, si les biens dont s'agit ont été remis gratuitement par la société à ses vendeurs les plus performants, ceux-ci ne peuvent pour autant être regardés comme ayant fourni à la société la contrepartie des prestations de services constitutives d'une rémunération ; qu'en outre, les biens remis gratuitement par la société à ses vendeurs, d'une valeur unitaire d'environ 381,12 euros (2 500 F) ne pouvaient être regardés comme étant de faible valeur au sens des dispositions précitées de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'administration fiscale était fondée à remettre en cause le droit de la SA WANADOO INTERACTIVE de déduire la taxe sur la valeur ajoutée qui avait grevé les biens acquis par elle aux fins de remise gratuite à ses vendeurs, sur le fondement des dispositions de l'article 238 de l'annexe II au code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit plus haut, la charge finale de la taxe sur la valeur ajoutée dont s'agit devait reposer sur la SA WANADOO INTERACTIVE, en sa qualité de consommateur final ; que, par suite, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance du principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, en quatrième lieu, que la SA FRANCE TELECOM ne peut utilement se prévaloir de l'instruction référencée 3 A-2143 du 20 octobre 1999 dans les prévisions de laquelle elle n'entre pas ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA FRANCE TELECOM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante à l'instance, au titre des frais exposés par la SA FRANCE TELECOM et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA FRANCE TELECOM est rejetée.

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N° 09VE03140 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09VE03140
Date de la décision : 03/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Biens ou services ouvrant droit à déduction.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : ERIC QUENTIN ET CHRISTOPHE LEFEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-05-03;09ve03140 ?
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