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09/11/2010 | FRANCE | N°10VE00253

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 09 novembre 2010, 10VE00253


Vu la requête, enregistrée le 22 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Changdi A, demeurant ..., par Me Chavais, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement no 0806618 en date du 23 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mai 2008 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé de lui retirer sa carte de résident ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) qu'il soit enjo

int au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer, sous astreinte, une carte de r...

Vu la requête, enregistrée le 22 janvier 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Changdi A, demeurant ..., par Me Chavais, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement no 0806618 en date du 23 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mai 2008 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé de lui retirer sa carte de résident ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer, sous astreinte, une carte de résident dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou de réexaminer sa situation, dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article l. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues dès lors qu'il réside en France depuis dix-huit ans, qu'il est marié et père de trois enfants qu'il a élevés et qu'il n'a plus aucune attache en Chine ; que la circonstance qu'il ait fait l'objet d'une condamnation pénale ne peut le priver de tout droit au séjour en France ; qu'en retirant sa carte de séjour, le préfet l'a privé de toute possibilité de poursuivre une activité professionnelle et que, par suite, les stipulations de la Charte sociale européenne de 1961 ont été méconnues ; qu'il a également été porté atteinte au principe de la liberté du travail ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte sociale européenne ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2010 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant chinois né le 26 octobre 1952, relève régulièrement appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mai 2008 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé de lui retirer sa carte de résident ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; que si M. A, qui a fait l'objet d'une condamnation pénale de six mois d'emprisonnement avec sursis assortie d'une amende délictuelle de 1 600 euros pour travail dissimulé et emploi d'étrangers en situation irrégulière, pouvait faire l'objet de la sanction de retrait de la carte de résident prévue à l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'est pas contesté que l'intéressé vit en France depuis 1992 avec son épouse et ses trois enfants, dont deux étaient titulaires d'une carte de résident à la date de l'arrêté attaqué ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M. A en France, la mesure de retrait de sa carte de résident a porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts dans lesquels elle a été prise, nonobstant la gravité des faits qui lui étaient reprochés et pour lesquels il a été condamné ; que, dès lors, l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis restitue à M. A sa carte de résident, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0806618 en date du 23 décembre 2009 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté en date du 14 mai 2008 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de restituer à M. A sa carte de résident dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 10VE00253 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 10VE00253
Date de la décision : 09/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : CHEVAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-11-09;10ve00253 ?
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