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05/10/2010 | FRANCE | N°08VE01578

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 05 octobre 2010, 08VE01578


Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société SFR dont le siège est 42, avenue de Friedland à Paris (75008), par Mes Geneste et Spy, avocats à la Cour ; la société SFR demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0603420 en date du 17 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe sur certaines dépenses de publicité à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 pour un montant de 28

695,40 euros ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;

3°...

Vu la requête, enregistrée le 29 mai 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société SFR dont le siège est 42, avenue de Friedland à Paris (75008), par Mes Geneste et Spy, avocats à la Cour ; la société SFR demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 0603420 en date du 17 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe sur certaines dépenses de publicité à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1998 pour un montant de 28 695,40 euros ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée ;

3°) à titre subsidiaire, qu'il soit sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne, saisie par la Cour de céans, à titre préjudiciel, se soit prononcée sur la question de savoir si la décision juridictionnelle mentionnée à l'article L. 190 du livre des procédures fiscales doit être devenue définitive ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, dès lors que la non-conformité de la taxe sur certaines dépenses de publicité, fondée sur l'article 302 bis MA du code général des impôts, avec l'article 88, alinéa 3, du traité instituant les Communautés européennes, a été révélée par les décisions juridictionnelles - entendues au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige - rendues par les Tribunaux administratifs de Caen et de Lille intervenues, respectivement, les 16 septembre 2003 et 27 mai 2004, lesquelles constituent des événements motivant sa réclamation au sens du c) de l'article R. 196-1 du même livre, elle est recevable à demander la décharge de cette taxe ; qu'en estimant que ces décisions ne pouvaient constituer un tel événement, en ce qu'elles n'étaient pas devenues définitives, les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur de droit ; qu'en effet, la décision juridictionnelle mentionnée à l'article L. 190 ne comporte aucune restriction de cette sorte ; que les jugements des tribunaux administratifs, y compris lorsqu'ils sont frappés d'appel, sont revêtus de l'autorité de la chose jugée ; que la modification de l'article L. 190 par la loi de finances pour 2006, qui restreint les décisions juridictionnelles admises à celles du Conseil d'Etat, de la Cour de cassation, du Tribunal des conflits et de la Cour de justice des Communautés européennes, rapporte la preuve que l'article L. 190, dans sa version applicable en l'espèce, ne comportait aucune restriction de cette nature ; que cette dernière interprétation, si elle devait être retenue, priverait de tout effet utile les dispositions de l'article L. 190 en raison de la longueur des délais de jugement nationaux nécessaire à l'obtention d'une décision juridictionnelle définitive ainsi que de l'intérêt, pour l'administration, d'interjeter appel des jugements des tribunaux ou de se pourvoir en cassation contre les arrêts de cour révélant la non-conformité d'une norme à une règle de droit supérieure ; qu'une interprétation restrictive de l'article L. 190 ne permet pas davantage d'assurer, en pratique, la pleine effectivité du droit communautaire alors qu'il est constant qu'une disposition de droit national ne doit pas en rendre l'application moins favorable, impossible ou excessivement difficile ; que si, dans son arrêt Roquette Frères, la Cour de justice des Communautés européennes a jugé que la règle de forclusion prévue à l'article L. 190, d'un maximum de cinq années en arrière à compter du prononcé de la décision juridictionnelle, ne méconnaît pas les principes d'équivalence et d'effectivité du droit communautaire, elle n'a pas entendu exclure du champ de ces décisions celles qui ne seraient pas devenues définitives et, ainsi, neutraliser la période ouverte pour la restitution d'un impôt indu par une décision juridictionnelle de premier ressort dont le juge n'aurait pas pris soin, avant de se prononcer, de poser une question préjudicielle à la Cour, seule la décision rendue par cette dernière à titre préjudiciel étant alors regardée comme constitutive d'un événement au sens du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2010 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure (...) 3°) Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la quatrième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue ; qu'une décision révélant la non-conformité d'une règle de droit à une règle de droit supérieure s'entend, pour l'application de ces dispositions, des décisions de justice qui ne sont pas, ou ne sont plus, susceptibles de recours ; qu'alors même que le délai de quatre années institué au même article ne court qu'à compter d'une décision de justice qui n'est pas ou n'est plus susceptible de recours, il conserve le caractère d'un délai raisonnable de forclusion, compatible avec les principes de sécurité juridique, d'équivalence et d'effectivité du droit communautaire, dès lors que, s'appliquant indifféremment aux recours fondés sur la violation du droit communautaire et à ceux fondés sur la méconnaissance du droit interne, il ne rend pas impossible en pratique, ni excessivement difficile, l'exercice par les particuliers de droits conférés par l'ordre juridique communautaire ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt doit d'abord adresser une réclamation au service (...) dont dépend le lieu de l'imposition ; qu'aux termes de l'article R. 196-1 du même livre : Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation ; qu'il résulte de ces dispositions que le délai pour réclamer la restitution d'une imposition versée spontanément court, en l'absence d'émission d'un avis de mise en recouvrement ou de l'établissement d'un rôle, à compter de ce versement, sauf à ce que la réalisation d'un événement, au sens du c) précité de l'article R. 196-1, rouvre le délai de réclamation ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que la société SFR s'est spontanément acquittée, en 1999, des droits de la taxe sur certaines dépenses de publicité au titre de l'année 1998, lesquels n'avaient donné lieu ni à l'établissement d'un rôle, ni à l'émission d'un avis de mise en recouvrement ; que la réclamation tendant à la restitution de cette taxe adressée par elle à l'administration, le 14 octobre 2005, était tardive au regard du délai prescrit au b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, pour faire échec à cette tardiveté, la société SFR a motivé sa réclamation, tant au regard de sa recevabilité, sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales et du c) de l'article R. 196-1 du même livre, que de son bien-fondé, en se prévalant de l'intervention du jugement en date du 16 septembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Caen avait notamment jugé que les dispositions de l'article 302 bis MA du code général des impôts issues de l'article 23 de la loi du 30 décembre 1997 portant loi de finances pour 1998, alors en vigueur, contrevenaient aux stipulations des articles 87 et 88 du traité de Rome en ce que l'allocation du produit de cette taxe à certaines entreprises de presse concourait à l'attribution d'aides susceptibles d'affecter les échanges entre les Etats membres alors que le projet de l'instituer n'avait pas été notifié par l'Etat français à la Commission européenne en méconnaissance de l'obligation qui lui incombait en vertu de l'article 88, alinéa 3, dudit traité ; que le jugement du Tribunal administratif de Caen était cependant frappé d'appel à la date de la réclamation et qu'il n'était pas, dans cette mesure, de nature à constituer un événement motivant la réclamation au sens du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que le Tribunal administratif de Versailles a estimé que la réclamation tendant à la restitution des droits acquittés était tardive et que, par suite, les conclusions de la requête tendant à la décharge de ces droits étaient irrecevables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que la société SFR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits de taxe sur certaines dépenses de publicité dont elle s'est acquittée en 1999 au titre de l'année 1998 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la société SFR et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société SFR est rejetée.

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N° 08VE01578 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE01578
Date de la décision : 05/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : GENESTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-10-05;08ve01578 ?
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