Vu la requête, enregistrée le 12 août 2008, présentée pour Mlle Amélie A représentée par M. Patrick A, son administrateur légal, demeurant ..., par Me Becam ; Mlle A demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0201164 du 19 juin 2008 par lequel le Tribunal administratif de Versailles n'a que partiellement accueilli sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier d'Arpajon et de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à réparer les conséquences dommageables résultant des soins et traitements qu'elle a reçus dans ces deux établissements en 1999 et en 2001 ;
2°) de condamner le centre hospitalier d'Arpajon et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à verser Mlle A les sommes suivantes, majorées des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2002, avec capitalisation :
- 70 375,90 euros et, subsidiairement, 50 000 euros au titre du préjudice professionnel ; - 500 000 euros au titre de la perte de chance d'exercer une profession rémunérée ;
- 257 842,17 euros au titre des frais de l'auxiliaire de vie ;
- 2 819 684,39 euros au titre du coût de l'assistance d'une tierce personne ;
- 115 820,01 euros au titre des frais à couvrir à domicile dans l'hypothèse où Mlle A renoncerait à séjourner en centre d'accueil médicalisé ;
- 128 909,20 euros au titre des frais d'aménagement d'habitation ;
- 32 000 euros, 800 000 euros, 60 000 euros, 50 000 euros et 100 000 euros au titre, respectivement, du déficit fonctionnel temporaire, de l'incapacité permanente partielle, du pretium doloris, du préjudice esthétique et du préjudice d'agrément ;
- 150 000 euros au titre du préjudice sexuel, du préjudice d'établissement et du préjudice résultant de l'impossibilité de procréation ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Arpajon et de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris une somme de 25 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que c'est à bon droit que le tribunal administratif a retenu la responsabilité du centre hospitalier d'Arpajon et de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, qui n'ont pas diagnostiqué l'anomalie cardiaque congénitale dénommée syndrome de QT long congénital, dont souffrait l'intéressée ; qu'elle subit un très lourd préjudice, résultant de l'arrêt cardio-circulatoire provoqué par le coma anoxique profond dans lequel elle a été plongée ; qu'en revanche, c'est à tort que le tribunal administratif n'a accordé aucune indemnisation au titre de la perte de revenus pendant la période d'incapacité temporaire totale du 6 juin 2001 au 4 avril 2007, date de sa consolidation ; qu'elle venait d'obtenir les diplômes permettant l'accès à la profession d'éducateur-animateur et a subi une perte de revenus pendant cette période de 70 mois qui peut être évaluée à la somme de 70 375,90 euros ; que si la perte de revenus n'était pas admise, il conviendrait de retenir l'existence d'une perte de chance d'occuper un emploi rémunérateur pendant cette période ; que Mlle A venait d'obtenir les diplômes permettant l'accès à la profession d'éducateur-animateur et a subi une perte de revenus pendant la période susmentionnée de 70 mois, qui peut être évaluée à la somme de 70 375,90 euros ; que si la perte de revenus n'était pas admise, il conviendrait de retenir l'existence d'une perte de chance d'occuper un emploi rémunérateur pendant cette période et d'accorder alors la somme de 50 000 euros ; qu'en outre, le préjudice professionnel est constitué par la perte de chance d'exercer une profession rémunérée et, à ce titre, l'indemnisation peut s'établir à la somme de 500 000 euros calculée sur la base d'un salaire moyen de 1 903 euros et de l'euro de rente pour un sujet féminin âgé de 24 ans ; que, depuis le 5 juillet 2002, Mlle A est hospitalisée en centre médicalisé huit heures par jour cinq jours par semaine et se trouve à son domicile en dehors de ces périodes ; qu'en accordant une somme de 84 000 euros au titre de la tierce personne jusqu'au jour du jugement et une rente annuelle de 30 000 euros à compter du jour du jugement, le tribunal administratif a pris en considération, de façon erronée, l'allocation accordée par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) alors que cette allocation ne présente pas un caractère indemnitaire et, en outre, n'a pas tenu compte des besoins réels de Mlle A et du coût effectif de la tierce personne ; qu'en ce qui concerne les dépenses relatives à l'auxiliaire de vie, il y a lieu d'accorder à Mlle A la somme de 44 082,80 euros au titre des frais échus du 5 juillet 2002 au 5 août 2008 et une rente annuelle de 7 951,50 euros ; qu'en ce qui concerne les dépenses relatives à l'assistance d'une tierce personne, il y a lieu d'accorder à Mlle A, soit une indemnité sous forme d'un capital s'élevant à la somme de 2 819 684,39 euros, soit une somme de 482 067,48 euros au titre des frais échus du 5 juillet 2002 au 5 août 2008 et une rente annuelle de 86 955,21 euros ; que la rente devra être revalorisée et s'établir à la somme de 115 820,01 euros, dans l'hypothèse où Mlle A ferait le choix de vivre à domicile et renoncerait au régime de l'hospitalisation de jour en centre médicalisé ; que les pièces produites permettent d'évaluer à la somme de 128 909,20 euros les dépenses d'aménagement de l'habitation ; que si le tribunal administratif a évalué de façon satisfaisante à la somme de 32 000 euros les troubles subis par Mlle A dans ses conditions d'existence pendant la période d'incapacité temporaire totale qui a duré 70 mois, il a, en revanche, sous-estimé le préjudice résultant d'une incapacité permanente partielle dont le taux est fixé à 80 % ; que la somme de 370 000 euros accordée à ce titre doit être portée à 800 000 euros ; que le pretium doloris, évalué à 6/7 par l'expert, justifie une indemnité de 60 000 euros ; qu'au titre de la réparation du préjudice esthétique, du préjudice d'agrément et des préjudices sexuel et d'établissement, la victime est fondée à demander des indemnités s'élevant respectivement à 50 000 euros, 100 000 euros et 150 000 euros ;
......................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2010 :
- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public,
- et les observations de Me Missirili-Monneret, substituant Me Becam, pour Mlle A, de Me Boizard, pour le centre hospitalier d'Arpajon et de Me Bonixe, pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;
Considérant que Mlle Amélie A, née le 1er mars 1983, qui souffrait de malaises s'accompagnant notamment de pertes de connaissance, a été hospitalisée au centre hospitalier d'Arpajon les 3 et 4 août 1999 ; qu'elle a été de nouveau admise dans cet établissement les 13 et 14 avril 2001, en raison de malaises répétés depuis trois semaines ; qu'après un nouveau malaise le 4 juin 2001, Mlle A, victime d'une perte de connaissance dans la soirée du 5 juin 2001, a été transportée au service des urgences du centre hospitalier d'Arpajon qui n'a pas constaté d'anomalies dans les résultats des examens pratiqués et a conclu à une crise d'épilepsie ; qu'elle n'a pu rester en observation dans cet établissement en l'absence de place et a été transférée, dans la nuit du 5 au 6 juin 2001, à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière qui l'a autorisée à regagner son domicile ; que, revenue au domicile familial, Mlle A a alors été victime d'une grave syncope qui s'est accompagnée d'un arrêt cardio-circulatoire ; que si l'intervention du service d'aide médicale urgente a permis une récupération de l'activité cardiaque, elle est restée dans un coma anoxique profond dont elle n'est sortie qu'après le 20 août 2001 et qui a entraîné d'importantes séquelles neuropsychiques ; que son père, M. A, désigné en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire par jugement du Tribunal d'instance d'Etampes du 22 novembre 2001, agissant pour le compte de sa fille, a recherché, devant le Tribunal administratif de Versailles, la responsabilité du centre hospitalier d'Arpajon, dans lequel cette dernière s'est rendue à diverses reprises ainsi que celle de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, en raison de son admission au service des urgences du groupe hospitalier de la Pitié-Salpêtrière dans la nuit du 5 au 6 juin 2001 ; que le tribunal administratif, estimant que les deux établissements susmentionnés avaient commis des fautes de nature à engager leur responsabilité, les a condamnés à réparer le préjudice subi par Mlle A par jugement du 19 juin 2008 ; que M. A, qui considère que l'indemnisation accordée à sa fille est insuffisante, interjette appel du jugement au nom de cette dernière ; que, par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier d'Arpajon et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris présentent des conclusions tendant, à titre principal, à leur mise hors de cause et, à titre subsidiaire, à la diminution de la part de responsabilité retenue à leur charge ;
Sur la responsabilité du centre hospitalier d'Arpajon et de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris :
Considérant que le centre hospitalier d'Arpajon et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, dont relève le groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, font valoir qu'ils n'ont commis aucune faute de nature à engager leur responsabilité à l'égard de Mlle A et soutiennent, subsidiairement, que, dans l'hypothèse où une faute leur serait imputée, celle-ci ne pourrait avoir concouru à la réalisation du préjudice que dans de faibles proportions ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et, notamment, des rapports de l'expert désigné par ordonnances du juge des référés du Tribunal administratif de Versailles et du juge des référés du Tribunal de grande instance d'Evry en date du 31 mai 2002, du 7 février 2006 et du 19 mai 2006 que, lors de son admission au centre hospitalier d'Arpajon le 13 avril 2001, Mlle A avait été victime de malaises à répétition au cours des trois semaines précédentes, dont un le matin même de son hospitalisation ; que cet établissement, dans lequel Mlle A avait été admise deux jours les 3 et 4 août 1999 pour des symptômes identiques, a alors procédé à divers examens et, notamment, à un électrocardiogramme qui a été considéré comme normal ; que le service a diagnostiqué une crise d'angoisse et de spasmophilie ; qu'il résulte toutefois de l'instruction et, notamment, des rapports susmentionnés de l'expert et d'un certificat établi le 3 juillet 2001 par le chef du service de réanimation du centre hospitalier Sud-Francilien que l'électrocardiogramme pratiqué le 13 avril 2001 présentait les caractéristiques du syndrome du QT long congénital sous la forme de Romano-Ward ; que l'électrocardiogramme effectué le 5 juin 2001, alors que Mlle A venait d'être victime d'une syncope, révélait également, selon l'expert, l'existence de cette maladie ; qu'en admettant même que l'ambiguïté des symptômes que présentait Mlle A lors de son hospitalisation des 3 et 4 août 1999 n'ait pas permis au praticien qui l'a examinée d'envisager une maladie cardiaque, le centre hospitalier d'Arpajon n'est pas fondé à invoquer une difficulté particulière de diagnostic lorsqu'elle a été à nouveau hospitalisée les 13 et 14 avril 2001 puis le 5 juin 2001, dès lors que l'établissement était informé de la fréquence et de la gravité des malaises, allant jusqu'à la syncope, que la patiente a été victime d'un nouveau malaise lorsqu'elle se trouvait encore dans le service dans la soirée du 5 juin 2001 et que chacun des deux électrocardiogrammes permettait d'évoquer le syndrome du QT long, bien qu'il s'agisse d'une maladie rare ; qu'en dépit de ces éléments, l'équipe médicale, qui pourtant ne pouvait ignorer les antécédents de l'intéressée, caractérisés par une persistance des malaises allant jusqu'à la perte de connaissance, a maintenu ses conclusions en faveur de crises convulsives et d'épilepsie sans procéder à des investigations complémentaires ; qu'en portant ainsi un diagnostic erroné et en ne prenant pas toutes les dispositions nécessaires pour permettre à Mlle A d'être hospitalisée sur place, au moins en observation, afin d'assurer un suivi médical adapté à son état, les médecins concernés ont commis une faute médicale de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier d'Arpajon ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mlle A a été transférée dans un contexte d'urgence à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière dans la nuit du 5 au 6 juin 2001 ; que, pour s'exonérer de sa responsabilité, l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris fait valoir qu'à l'occasion de ce transfert, le praticien du centre hospitalier d'Arpajon a indiqué par écrit, dans un courrier de recommandation remis au service des urgences de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, qu'il concluait à des crises d'épilepsie ; que, toutefois, le nouvel électrocardiogramme qui a été alors réalisé présentait également, comme les précédents, la forme caractéristique du syndrome du QT long congénital, ainsi que le relève l'expert dans ses deux rapports susmentionnés ; que le praticien du service des urgences a cependant confirmé le diagnostic porté par le centre hospitalier d'Arpajon, commettant ainsi, à son tour, une erreur de diagnostic ; qu'en outre, il n'a pas jugé utile de placer Mlle A en observation pour la nuit et a autorisé son retour à domicile, alors que celle-ci avait été orientée vers l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière par le premier établissement hospitalier dans lequel elle s'était rendue après une grave perte de connaissance survenue dans la soirée du 5 juin 2001, qu'elle avait été victime d'un nouveau malaise immédiatement avant son transfert et que le service ne pouvait ignorer, au moins en interrogeant les parents, que les pertes de connaissance survenaient désormais à un rythme accéléré et selon une intensité accrue ; que l'erreur de diagnostic et le renvoi de Mlle A à son domicile, dans ces circonstances, constituent un manquement dans la prise en charge médicale de Mlle A de nature, également, à engager la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que si le syndrome du QT long congénital avait été identifié au mois d'avril 2001 ou même le 5 juin 2001, soit au centre hospitalier d'Arpajon, soit à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière, la grave syncope survenue le 6 juin à 5 heures aurait été évitée grâce à un traitement approprié qui aurait pu être mis en place dès l'établissement du diagnostic ; qu'en outre, en se trouvant à son domicile alors qu'elle aurait dû être hospitalisée dans la nuit du 5 au 6 juin 2001, Mlle A a été privée de la présence sur place de l'équipe médicale dont l'intervention immédiate aurait permis d'empêcher le coma anoxique consécutif à l'arrêt cardiaque ; qu'ainsi, les fautes relevées à l'encontre des deux établissements hospitaliers ont concouru à la réalisation de l'entier dommage et non, comme ils le soutiennent, à une fraction seulement du préjudice, en invoquant, à l'encontre de deux praticiens libéraux, les négligences dont ces derniers auraient également fait preuve ; qu'en tout état de cause, le juge administratif n'a pas à se prononcer sur l'éventuelle part de responsabilité des médecins libéraux ;
Considérant, enfin, que si le service de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière qui a accueilli Mlle A a commis une erreur de diagnostic dans l'interprétation de l'électrocardiogramme réalisé dans la nuit du 5 au 6 juin 2001 et a négligé la gravité des symptômes présentés par l'intéressée, en s'abstenant de la garder en observation, en milieu hospitalier, il est constant que cette dernière s'était rendue à trois reprises au centre hospitalier d'Arpajon, en août 1999 puis en avril et juin 2001 et que ce dernier a persisté dans son erreur de diagnostic tout en sachant, par le dossier de la jeune patiente, que les malaises s'aggravaient en intensité et en périodicité ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en mettant à la charge du centre hospitalier d'Arpajon les deux tiers du préjudice indemnisable et en fixant au tiers la part de responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris qui est donc fondée à demander, dans cette mesure, la réformation du jugement attaqué ;
Sur l'évaluation du préjudice :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 portant financement de la sécurité sociale pour 2007, le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste du préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste du préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;
Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode sus-décrite, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;
Sur le préjudice à caractère patrimonial de Mlle A :
En ce qui concerne les dépenses de santé :
Considérant que les frais médicaux et d'hospitalisation ne peuvent être pris en compte dans l'évaluation du préjudice corporel qu'à la condition d'être directement en relation avec la faute commise par le centre hospitalier ; que si la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne a demandé en première instance le remboursement, d'une part, d'une somme de 198 525,25 euros au titre des frais d'hospitalisation et, d'autre part, d'une somme de 17 962,50 euros correspondant à des frais médicaux et pharmaceutiques, de transport et d'appareillage, le tribunal administratif a constaté que cette dernière somme ne faisait l'objet d'aucun commencement de justification et a rejeté, sur ce point, la demande de la caisse, limitant la condamnation des deux établissements hospitaliers au remboursement des dépenses d'hospitalisation, soit la somme susmentionnée de 198 525,25 euros ; que, toutefois, la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne justifie en appel, par la production d'un relevé de débours, qu'elle a assumé la charge de frais médicaux et pharmaceutiques et de frais de transport s'élevant respectivement à 943,85 euros et à 13 548,39 euros ; qu'il résulte des termes de l'attestation d'imputabilité établie par un médecin conseil que ces dépenses sont la conséquence directe des fautes commises par les deux établissements ; qu'au titre des dépenses de santé qu'elle a supportées, la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne est donc fondée à demander que la somme mise à la charge du centre hospitalier d'Arpajon et de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris soit portée de 198 525,25 euros à 213 017,49 euros ; que cette somme devra être répartie entre ces deux établissements selon les proportions mentionnées ci-dessus ;
Considérant que Mlle A conserve de graves séquelles neuropsychologiques entraînant des dépenses futures de santé que la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne devra prendre en charge ; qu'eu égard aux séquelles dont Mlle A reste atteinte et aux indications contenues dans l'attestation du médecin conseil en date du 13 mars 2009, les dépenses futures dont fait état la caisse présentent un caractère certain ; que cette dernière peut donc prétendre, pour l'avenir, au remboursement de ces dépenses au fur et à mesure de leur engagement, sur présentation des pièces justificatives ;
En ce qui concerne les pertes de revenus :
Considérant que la période d'incapacité temporaire totale s'est étendue du 6 juin 2001 au 4 avril 2007, date de la consolidation ; que si M. Patrick A soutient que sa fille était en mesure d'occuper un emploi dès cette époque, en faisant valoir qu'elle venait d'obtenir un diplôme d'animateur de centres de vacances et de loisirs, il est constant que Mlle A n'a subi aucune perte de revenus pendant cette période et ne peut donc prétendre à une indemnisation à ce titre ;
En ce qui concerne l'incidence professionnelle du dommage :
Considérant qu'il ne saurait être contesté que Mlle A, âgée de 18 ans à la date de l'accident, titulaire du brevet d'aptitude aux fonctions d'animateur, pouvait espérer soit poursuivre ses études, soit exercer, en rapport avec sa formation, une activité professionnelle qui ne présente pas un caractère purement saisonnier, contrairement à ce qui est soutenu ; que les lésions neurologiques dont elle est atteinte depuis le 6 juin 2001 lui ont fait perdre toutes chances de réaliser son projet professionnel ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en lui accordant, à ce titre, une indemnité de 130 000 euros ;
En ce qui concerne les frais liés au handicap :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'incapacité permanente partielle dont reste atteinte Mlle A a été fixée par l'expert à 80 % ; que son état de santé impose l'aide constante d'une tierce personne pour permettre la réalisation des actes de la vie courante et assurer la surveillance de l'intéressée ; que, depuis le 5 juillet 2002, elle est prise en charge dans un établissement médicalisé accueillant de jeunes handicapés, à raison de cinq jours par semaine huit heures par jour et retourne au domicile familial chaque soir et chaque fin de semaine ; qu'eu égard aux modalités de son maintien à domicile décrites ci-dessus, il sera fait une juste appréciation du préjudice résultant de la nécessité d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne en attribuant à Mlle A, depuis le 5 juillet 2002, une rente versée par trimestres échus dont le montant annuel, fixé à 24 000 euros, devra être revalorisé par la suite, par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ; que le versement de la rente sera maintenu tant que l'hébergement de Mlle A sera assuré au domicile familial et que l'intéressée bénéficiera uniquement d'un accueil de jour dans un établissement médicalisé ;
Considérant, en deuxième lieu, que la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne prend à sa charge les frais d'hospitalisation de jour de Mlle A dans l'établissement spécialisé susmentionné ; que, selon les indications de M. Patrick A lui-même, les dépenses correspondant à l'accueil de sa fille dans la journée, par l'établissement dans lequel elle se rend cinq jours par semaine, sont supportées par le département de la Haute-Garonne au titre de l'aide sociale ; que M. Patrick A demande à la Cour de céans de mettre à la charge du centre hospitalier d'Arpajon et de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris le versement d'une rente viagère permettant de couvrir ces dépenses, dans l'hypothèse où le bénéfice de l'aide sociale viendrait à être supprimé par le département de la Haute-Garonne ; que, toutefois, il s'agit d'un préjudice purement éventuel qui ne saurait ouvrir droit à réparation ;
Considérant, en troisième lieu, que, se fondant sur les conclusions de l'expert qui a mentionné, dans son rapport du 30 mai 2007, la nécessité d'une prise en charge d'aménagements dans la maison familiale, notamment dans le cabinet de toilette, M. Patrick A, en sa qualité d'administrateur légal de Mlle A, réclame à ce titre une somme de 128 909,20 euros correspondant à la différence entre la valeur du logement actuellement occupé et le coût de la construction d'un bien adapté au handicap de sa fille ; que, toutefois, les frais de construction qu'il demande en produisant le devis d'un architecte excèdent les seuls aménagements d'une habitation, rendus nécessaires par le handicap de sa fille ; qu'il ne fournit aucun document et aucun renseignement permettant d'identifier la nature et l'étendue des modifications à apporter au logement familial ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, les conclusions tendant à l'indemnisation de ce chef de préjudice ne peuvent être accueillies ;
Sur le préjudice à caractère personnel de Mlle A :
Considérant qu'il résulte du rapport du médecin expert que la période d'incapacité temporaire totale s'est étendue du 6 juin 2001 au 4 avril 2007 et que Mlle A demeure atteinte d'une incapacité permanente partielle de 80 % ; que le tribunal administratif a fait une juste appréciation des troubles de toute nature subis par cette dernière dans ses conditions d'existence, au titre du déficit fonctionnel temporaire, en lui accordant la somme de 32 000 euros ; qu'eu égard à l'âge de la victime au moment de l'accident et à la gravité des séquelles dont elle reste atteinte, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature dans ses conditions d'existence, incluant le préjudice d'agrément et le préjudice d'établissement, en lui accordant, au titre du déficit fonctionnel permanent, la somme de 400 000 euros ; que les souffrances endurées par Mlle A, évaluées par l'expert à 6 sur une échelle de 1 à 7, et le préjudice esthétique, évalué à 3,5 sur la même échelle, doivent être réparés par une indemnité s'élevant au total, comme l'a jugé le tribunal administratif, à la somme de 30 000 euros ; qu'ainsi, la somme de 432 000 euros accordée par le tribunal administratif au titre de la réparation des préjudices personnels doit être portée à 462 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Patrick A agissant en qualité d'administrateur légal de sa fille Amélie et la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne sont fondés à demander que les indemnités qui leur ont été accordées par le Tribunal administratif de Versailles soient portées aux montants indiqués ci-dessus ; qu'il y aura lieu de déduire de l'indemnité accordée à Mlle A la provision de 100 000 euros versée en application de l'ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Versailles en date du 11 juillet 2004, confirmée par l'ordonnance du président de la Cour de céans du 4 novembre 2004 ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant, d'une part, que Mlle A a droit, comme elle le demande, aux intérêts au taux légal de la somme de 592 000 euros à compter du 20 janvier 2002 ; qu'elle a demandé, par un mémoire enregistré le 4 janvier 2008, la capitalisation des intérêts ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Considérant, d'autre part, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, une rente d'un montant annuel de 24 000 euros est accordée à Mlle A à compter du 5 juillet 2002, en réparation du préjudice résultant de la nécessité d'avoir recours à l'assistance une tierce personne ; que les sommes versées au titre des arrérages échus depuis cette date doivent porter intérêts au taux légal à compter de chaque échéance de ces arrérages, jusqu'aux dates de règlement de ces sommes ; que la capitalisation des intérêts ayant été demandée le 4 janvier 2008, il était dû au moins une année d'intérêts à cette date pour les arrérages échus au 4 janvier 2007 ; que, par suite, il y a lieu d'ordonner la capitalisation au 4 janvier 2008 ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure ;
Considérant, enfin, que la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 213 017,49 euros à compter du 26 février 2008, date de sa première demande devant le tribunal administratif, conformément à ses conclusions ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du centre hospitalier d'Arpajon, au titre des frais exposés par les défendeurs et non compris dans les dépens, le versement à M. Patrick A, en sa qualité d'administrateur légal de Mlle A, d'une somme de 2 000 euros ainsi que le versement, à la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne, de la somme de 666,66 euros ; qu'il y a lieu, en vertu des mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris le versement à M. Patrick A, en sa qualité d'administrateur légal de Mlle A, d'une somme de 1 000 euros ainsi que le versement, à la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne, de la somme de 333,34 euros ;
Considérant, d'autre part, que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, qui n'est pas la partie perdante au regard des conclusions du centre hospitalier d'Arpajon, la somme que demande cet établissement au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;
Considérant, enfin, que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et de mettre à la charge du centre hospitalier d'Arpajon la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le centre hospitalier d'Arpajon est condamné à verser à M. Patrick A, en sa qualité d'administrateur légal de Mlle A :
1) La somme de 394 666, 66 euros dont il y aura lieu de déduire les sommes versées au titre de la provision de 100 000 euros accordée par l'ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Versailles en date du 11 juillet 2004. La somme de 394 666, 66 euros sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2002. Les intérêts échus le 4 janvier 2008 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
2) A compter du 5 juillet 2002, une rente de 16 000 euros par an versée par trimestres échus, dont le montant est revalorisé par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. L'attribution de cette rente sera maintenue tant que l'hébergement de Mlle A sera assuré au domicile familial. Les sommes dues au titre des arrérages échus depuis le 5 juillet 2002 portent intérêts au taux légal à compter de cette date et jusqu'au versement de ces sommes. Les intérêts échus le 4 janvier 2008 sont capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 2 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est condamnée à verser à M. Patrick A, en sa qualité d'administrateur légal de Mlle A :
1) La somme de 197 333,34 euros dont il y aura lieu de déduire les sommes versées au titre de la provision de 100 000 euros accordée par l'ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Versailles en date du 11 juillet 2004. La somme de 197 333,34 euros sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 20 janvier 2002. Les intérêts échus le 4 janvier 2008 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
2) A compter du 5 juillet 2002, une rente de 8 000 euros par an versée par trimestres échus, dont le montant est revalorisé par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. L'attribution de cette rente sera maintenue tant que l'hébergement de Mlle A sera assuré au domicile familial. Les sommes dues au titre des arrérages échus depuis le 5 juillet 2002 portent intérêts au taux légal à compter de cette date et jusqu'au versement de ces sommes. Les intérêts échus le 4 janvier 2008 sont capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 3 : Le centre hospitalier d'Arpajon est condamné à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne :
1) La somme de 142 011,66 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 26 février 2008 ;
2) Les deux tiers des dépenses qu'elle exposera à l'avenir en raison de l'invalidité de Mlle A, au fur et à mesure des débours supportés et sur présentation de justificatifs.
Article 4 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est condamnée à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne :
1) La somme de 71 005,83 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 26 février 2008 ;
2) Le tiers des dépenses qu'elle exposera à l'avenir en raison de l'invalidité de Mlle A, au fur et à mesure des débours supportés et sur présentation de justificatifs.
Article 5 : Le jugement du 19 juin 2008 du TA de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le centre hospitalier d'Arpajon et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris verseront respectivement les sommes de 2 000 euros et de 1 000 euros à M. Patrick A, en sa qualité d'administrateur légal de Mlle A, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le centre hospitalier d'Arpajon et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris verseront respectivement les sommes de 666,66 euros et de 333,34 euros à la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 8 : Le surplus de la requête de Mlle A, le surplus des conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne, le surplus des conclusions de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et les conclusions du centre hospitalier d'Arpajon sont rejetés.
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N° 08VE02696 2