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19/01/2010 | FRANCE | N°06VE02127

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 19 janvier 2010, 06VE02127


Vu I, la requête, enregistrée sous le n° 06VE02127, le 19 septembre 2006 en télécopie et le 20 septembre 2006 en original, au greffe de la Cour, présentée pour la société NOVOREST INGENIERIE, dont le siège social est 68/70 rue du Général Gallieni à Montreuil (93100), par Me Ben Zenou ; la société NOVOREST INGENIERIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403244 du 13 juillet 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à payer au Centre hospitalier de Versailles une somme correspondant à la moitié du préjudice que celui-ci aura

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Vu I, la requête, enregistrée sous le n° 06VE02127, le 19 septembre 2006 en télécopie et le 20 septembre 2006 en original, au greffe de la Cour, présentée pour la société NOVOREST INGENIERIE, dont le siège social est 68/70 rue du Général Gallieni à Montreuil (93100), par Me Ben Zenou ; la société NOVOREST INGENIERIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403244 du 13 juillet 2006 en tant que le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée à payer au Centre hospitalier de Versailles une somme correspondant à la moitié du préjudice que celui-ci aurait subi du fait du retard dans la livraison de l'ouvrage et, à titre subsidiaire, de remettre cette somme à la charge du Centre hospitalier et de condamner, in solidum, la société Chapelle et compagnie, la SA Bureau Veritas, Mme A et Betom ingénierie à la garantir de toutes condamnations qui seraient mises à sa charge de ce chef et de lui donner acte de ce qu'elle se réserve le droit de contester d'autres dispositions du jugement du tribunal, notamment concernant les désordres affectant les revêtements de sol ainsi que le partage de responsabilité fixé pour ces désordres ;

2°) de condamner le Centre hospitalier de Versailles ou tout intimé succombant, à savoir la société Nouvelle Issy Décor, la SA Charbonnel, la SA Aathex, la SAS Amica, la SARL PLG Cuisine pro, la SA Le froid sec, Me Carrasset-Marillier, mandateur liquidateur de la SA Le froid sec et la SARL Delfau-Sodire, à lui verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est entaché d'omission à statuer en ce qu'il a retenu sa responsabilité dans les retards et écarté celle des autres membres de l'équipe de maîtrise d'oeuvre sans se prononcer sur les moyens invoqués par les défendeurs ; que la demande du Centre hospitalier est irrecevable dès lors que les travaux ont été achevés le 15 mai 2002, dans le délai contractuel d'exécution, reporté au 30 juin 2002 ;

Elle soutient, à titre subsidiaire, que l'expert a outrepassé les limites de sa mission en se prononçant sur des questions strictement juridiques et que la nullité de son rapport devra, en conséquence, être prononcée ; que sa responsabilité ne saurait être engagée en sa qualité de maître d'oeuvre, dès lors qu'elle n'était soumise qu'à une simple obligation de moyen et non de résultat ; que le retard dont s'agit est imputable au maître d'ouvrage lui-même, qui a signé plusieurs ordres de service aux fins de prorogation du délai du chantier ; que la responsabilité de l'hôpital est donc pleine et entière ;

Elle soutient en outre que, s'agissant des travaux de chape, un retard de trois mois et demi aurait dû être imputé à la société Chapelle et compagnie, par les premiers juges ; que, s'agissant de la couverture du patio, les retards sont imputables à Mme A, au Betom ingénierie, à la SA Bureau Veritas et au Centre hospitalier ; que les difficultés rencontrées pour la reprise d'une poutre en façade sont imputables à Mme A ; que la mise à disposition tardive du gaz dans les cuisines, à l'origine d'une partie du retard d'exécution des travaux, est imputable au Betom ingénierie, au bureau Veritas et, éventuellement, à l'entreprise chargée du réseau gaz, RAS ;

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Vu II, la requête, enregistrée sous le n° 06VE02137, le 20 septembre 2006 au greffe de la Cour, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES, dont le siège est 1, rue Richaud à Versailles (78000), par Me Jeancolas ; le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES demande à la Cour :

1°) d'annuler partiellement le jugement n° 0403244 du 13 juillet 2006 en ce que le Tribunal administratif de Versailles lui a laissé la charge de la moitié du préjudice subi à raison du retard dans la livraison de l'ouvrage et en tant qu'il concerne les désordres liés aux sols ;

2°) de condamner in solidum la société Novorest ingénierie, Betom ingénierie, les sociétés SNID et PLG Cuisine pro à lui verser une somme de 779 976,38 euros assortie des intérêts de droit ainsi que la capitalisation de ces intérêts en réparation du préjudice subi par les désordres et la ruine des sols ;

3°) de condamner, in solidum, la société Novorest ingénierie, Betom ingénierie, Mme A EURL d'architecture et la SA Bureau Veritas à lui verser la somme de 179 990,64 euros assortie des intérêts de droit ainsi que la capitalisation de ces intérêts en réparation du préjudice subi à raison des retards de livraison des installations ;

4°) de condamner les parties mentionnées au 2°) ainsi que les sociétés SNID et PLG cuisine pro à lui payer, d'une part, les dépens et notamment les frais d'expertise, d'autre part, la somme de 12 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer s'agissant du quantum de sa demande et est insuffisamment motivé au regard des prétendues fautes qu'il aurait commises ; qu'une erreur de droit a été commise dès lors que les premiers juges ne pouvaient s'en tenir au coût du même sol plastique alors que celui-ci était impropre à son utilisation en cuisine collective ; que le montant de la réparation fixé par le tribunal est erroné en ce qu'il correspond au remplacement partiel des sols alors que ceux-ci devaient être complètement reconstruits et qu'il n'est pas tenu compte de l'externalisation de la production des repas pendant les travaux ni des coûts de dépose, de repose ou de remplacement des installations et ouvrages existants ; qu'une erreur de droit et d'appréciation a également été commise en ce que le jugement a écarté la garantie décennale au profit de la seule responsabilité contractuelle des constructeurs, au motif que les réserves exprimées lors de la réception des travaux excluaient la responsabilité décennale ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 janvier 2010 :

- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- les observations de Me Ben Zenou pour la société NOVOREST INGENIERIE et de Me Jeancolas pour le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES ;

- et les observations de Me Vallet substituant Me Guy-Vienot pour la SA Bureau Veritas et de Me Frenkian-Sampic pour la société PLG Cuisine Pro ;

Considérant que les requêtes n° 0602127 et n° 0602137, présentées respectivement par la société NOVOREST INGENIERIE et par le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES-HOPITAL ANDRE MIGNOT, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que, par un marché signé en mars 1999, le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES a confié à un groupement composé par la société NOVOREST INGENIERIE, le bureau d'études Betom ingénierie et Mme A-EURL d'architecture, dont le mandataire était la société NOVOREST INGENIERIE, la maîtrise d'oeuvre d'un projet portant sur la réhabilitation et la restructuration de la cuisine centrale et du restaurant de l'hôpital André Mignot ainsi que sur l'extension du restaurant du personnel ; que, par un acte d'engagement du 28 juin 2000, le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES a confié à la société SNID la réalisation du lot n° A05 revêtements de sols synthétiques et revêtements de murs (faïence) ; que le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES demande l'annulation du jugement du 13 juillet 2006 du Tribunal administratif de Versailles en tant que celui-ci a retenu sa responsabilité à hauteur de la moitié du préjudice qu'il a subi à raison du retard dans la livraison de l'ouvrage et n'a pas retenu le montant de 779 976,38 euros sollicité en réparation des désordres et de la ruine des sols de la cuisine centrale ; que la société NOVOREST INGENIERIE demande également l'annulation partielle dudit jugement, en tant qu'il a été mis à sa charge la moitié du préjudice susmentionné ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que, s'agissant du retard dans la livraison de l'ouvrage, les premiers juges ont retenu un retard de 13,75 mois imputable tant à la société NOVOREST INGENIERIE qu'au CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES et, s'agissant du désordre relatif au revêtement du sol de la cuisine, se sont prononcés sur le quantum de la demande de l'hôpital, en évaluant le préjudice subi par celui-ci, sur la base d'un revêtement identique à celui qui était prévu par le marché ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission à statuer ;

Considérant, en second lieu, que le jugement attaqué mentionne que le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES a lui-même prorogé les délais par six décisions successives, non seulement à l'égard des entreprises mais également à l'égard du maître d'oeuvre et a motivé le partage des responsabilités entre le maître d'oeuvre et le maître d'ouvrage par le fait que ce dernier n'avait pas infligé de pénalités de retard aux entreprises concernées et avait payé celles-ci avec retard ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit, dès lors, être écarté ;

Sur le rapport d'expertise :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que, contrairement à l'allégation de la société NOVOREST INGENIERIE, l'expertise judiciaire ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Versailles se soit déroulée dans des conditions irrégulières ; qu'en tout état de cause, le rapport d'expertise en date du 26 octobre 2005 pouvait être retenu à titre d'information par les premiers juges, dès lors qu'il avait été versé au dossier et soumis, de ce fait, au débat contradictoire des parties ; qu'en outre, la société NOVOREST INGENIERIE a eu la possibilité de discuter les constatations faites par l'expert devant le tribunal ; que, par suite, les moyens tirés de l'irrégularité et de la nullité de ce rapport ne peuvent qu'être écartés ;

Sur les conclusions du CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES tendant à la mise en oeuvre de la garantie décennale :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 41.6 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché en cause : Lorsque la réception est assortie de réserves, l'entrepreneur doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par la personne responsable du marché ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 26 du cahier des clauses administratives particulières relatif à l'achèvement de la mission, La mission du maître d'oeuvre s'achève à la fin du délai de garantie de parfait achèvement (prévue à l'article 44.1 2ème alinéa du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux) ou après prolongation de ce délai si les réserves signalées lors de la réception ne sont pas toutes levées à la fin de cette période. Dans cette hypothèse, l'achèvement de la mission intervient lors de la levée de la dernière réserve ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les procès-verbaux de réception des travaux dont s'agit ont été établis le 26 novembre 2002, avec effet au 30 juin 2002, sous réserve qu'il soit remédié aux imperfections et malfaçons avant le 12 décembre 2002 ; que ces réserves n'ont pu être levées dans les délais impartis pour les désordres affectant le revêtement de sol de la cuisine centrale ; que, dans ces conditions, les relations contractuelles entre le maître d'ouvrage et les intervenants à l'acte de construire ont été maintenues tant que les réserves exprimées lors de la réception du 26 novembre 2002 n'étaient pas levées ; qu'il suit de là que les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit en estimant que seule la responsabilité contractuelle des constructeurs pouvait être recherchée par le centre hospitalier à raison des désordres en cause ;

Sur les retards dans la livraison de l'ouvrage :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 23 du cahier des clauses administratives particulières relatif au suivi de l'exécution des travaux : Conformément aux dispositions de l'article 1.5 du présent CCAP, la direction de l'exécution des travaux incombe au maître d'oeuvre qui est l'unique responsable du contrôle de l'exécution des ouvrages et qui est l'unique interlocuteur des entrepreneurs. Il est tenu de faire respecter par l'entreprise l'ensemble des stipulations du marché de travaux et ne peut y apporter aucune modification ; que, dans le cadre du marché de travaux dont s'agit, la société NOVOREST INGENIERIE était le mandataire commun du groupement de maîtrise d'oeuvre susmentionné et était chargée d'assurer, outre ses missions de mandataire, celle de directeur des travaux et d'organisation, pilotage et coordination des travaux (OPC) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si l'ordre de service n° 01 en date du 4 juillet 2000, établi par le maître d'ouvrage, prévoyait un délai global d'exécution des travaux incluant une période de préparation de 8,5 mois, ce délai a été prolongé à plusieurs reprises par le maître d'ouvrage ; que le rapport d'expertise évalue à 13,75 mois le retard pris dans l'exécution des travaux et précise que ces retards, dus, s'agissant de la cuisine centrale, à la non-prise en compte d'un différentiel de niveau ayant nécessité la réalisation d'une chape de 300 m2 et à l'indisponibilité du réseau de gaz jusqu'en mai 2001 et, s'agissant du restaurant, à l'absence de mise en place d'ouvrages provisoires dans l'attente d'une mise au point de la verrière et de la charpente de cet ouvrage, sont exclusivement imputables, à hauteur de 11,75 mois, à la société NOVOREST INGENIERIE en charge de la direction des travaux et du pilotage du chantier ; que, si la société NOVOREST INGENIERIE évalue à 1,5 mois le retard du chantier dû à la démobilisation des entreprises confrontées à des retards de paiement, ce retard n'est pas établi par les pièces du dossier ; qu'il suit de là que la société NOVOREST INGENIERIE ne justifie ni qu'elle a fait les diligences qui lui incombaient en vue de l'achèvement des travaux dans les délais prévus ni que le retard constaté ne lui serait pas imputable en tout ou partie ; que le centre hospitalier est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges l'ont déclaré responsable pour moitié des retards en cause ; qu'il y a lieu de laisser à la charge de la société NOVOREST INGENIERIE la totalité du préjudice en résultant ;

Considérant, en second lieu, qu'il est constant que les retards susrappelés ont entraîné des dépenses supplémentaires pour le maître d'ouvrage qui a dû externaliser le fonctionnement de la cuisine et du restaurant pendant 9 mois, comprenant la prestation de production sous-traitée, l'achat de produits alimentaires en raison de l'impossibilité de toute cuisson au gaz jusqu'au 15 mai 2001, la location d'une tente abritant le self provisoire, de modules préfabriqués pour la vaisselle et le conditionnement des plateaux repas et d'un module congélateur, enfin l'achat de pains de glace en urgence, pour un coût total évalué à 179 990 euros TTC qui doit, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus et de ce que le rapport d'expertise mentionne que chacun de ces postes de dépenses a été justifié par la production de pièces comptables, être mis intégralement à la charge de la société NOVOREST INGENIERIE ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il ne retient sa responsabilité que pour moitié de ce montant ;

En ce qui concerne les désordres affectant le sol de la cuisine centrale :

Considérant, en premier lieu, que le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES invoque la responsabilité conjointe et solidaire de la société NOVOREST INGENIERIE et de l'entreprise SNID dans les désordres affectant le sol de la cuisine centrale de l'hôpital ; qu'il résulte de l'instruction que le lot n° A05 revêtement de sol dont l'entreprise SNID était titulaire, a fait l'objet d'un procès-verbal de réception en date du 26 novembre 2002 avec effet au 30 juin 2002, sous réserve qu'il soit remédié aux imperfections et malfaçons avant le 12 décembre 2002, dès lors qu'avait été constatée une extension des désordres mettant en cause la sécurité du travail et la sécurité alimentaire et énumérés en annexe de procès-verbal ; qu'il est constant que ces réserves n'ont pas été levées dans le délai imparti alors que l'expert avait constaté dans son rapport, faisant notamment référence à un constat d'huissier du 12 juin 2003, que le revêtement de sol a connu très rapidement des dégradations importantes (...) notamment d'importants décollements du revêtement de sol entraînant, par endroit, la ruine de celui-ci ainsi que de nombreuses cloques et déchirures et qu'il mentionnait qu'après investigation, de nombreuses malfaçons d'exécution ont été commises impliquant de refaire le revêtement jusqu'au ragréage compris ;

Considérant, en deuxième lieu, que le cahier des clauses techniques particulières gros oeuvre et second oeuvre en date du 1er décembre 1999, établi par la société NOVOREST INGENIERIE et relatif à la modernisation de la restauration, a prévu expressément l'utilisation du produit Altro X 25 ou similaire comme revêtement sur l'ancien dallage du sol de la cuisine centrale alors que l'avis technique 12/99-1182 consacré à ce produit excluait l'emploi de celui-ci dans les cuisines collectives, pour lesquelles il n'était pas adapté et qu'il appartenait à la société NOVOREST INGENIERIE, qui était investie d'une mission complète, de préconiser un revêtement de sol adapté ; qu'il suit de là que les manquements de cette société à son devoir de conseil et à son obligation de surveillance des travaux engagent sa responsabilité ; que, toutefois, le rapport d'expertise a retenu que les désordres susrappelés avaient également été causés par de nombreuses malfaçons d'exécution commises par la société SNID, à savoir l'épaisseur insuffisante du mortier de ragréage, l'absence de primaire, la soudure de lés discontinue, le revêtement horizontal non soudé à la plinthe, le profilé vertical fixé contre la cloison de façon discontinue et les abouts de plinthe parfois absents ; que, dans ces conditions, la responsabilité de la société SNID doit également être recherchée à raison des malfaçons susénumérées ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont évalué à 70 % la part de responsabilité incombant à cette entreprise, en raison de la pose défectueuse du revêtement de sol, qui lui est imputable, et à 30 %, la part de responsabilité incombant à la société NOVOREST INGENIERIE, mandataire de l'équipe de maîtrise d'oeuvre et responsable de la surveillance des travaux du lot dont s'agit ;

Considérant, en troisième lieu, que le rapport d'expertise mentionnait, d'une part, qu'avant la réception définitive de l'ouvrage, les dégâts relevés s'étaient généralisés à l'ensemble de la cuisine ; que, d'autre part, il indiquait qu'une simple réfection du revêtement de sol à l'identique n'aurait pas pour effet de garantir le maître de l'ouvrage contre le renouvellement des désordres et préconisait l'emploi d'un matériau adapté aux cuisines collectives ; qu'enfin, l'expert a relevé que le changement du revêtement de sol impliquait la mise en oeuvre de travaux préparatoires et annexes tels que le démontage et le remontage des meubles et instruments de la cuisine ainsi qu'un surcoût dans la préparation des 3 200 repas journaliers, pendant la durée de ces travaux ; que, dans ces conditions, les premiers juges ne pouvaient se borner à retenir le coût mentionné dans un devis de reprise à l'identique, établi le 2 février 2004 à la demande du CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES, qui prévoyait uniquement l'arrachage de l'ancien revêtement, le nettoyage de celui-ci, l'application d'une couche de primaire et d'un enduit de lissage ainsi que la pose d'un revêtement en plastique sur 866 m², pour un montant total de 97 413,48 euros TTC, alors que l'expert a évalué le coût de l'ensemble des travaux, avec un revêtement adapté, ainsi que le surcoût des repas consécutif à ces travaux, à 779 976 euros, compte tenu d'une superficie de la cuisine, non contestée, de 1 850 m² ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande du CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES tendant au versement d'une somme de 779 976 euros et d'annuler le jugement attaqué en ce qu'il a de contraire ; qu'en outre, il n'est pas établi que l'emploi d'une résine en lieu et place d'un revêtement à l'identique aurait eu pour conséquence d'augmenter de manière substantielle le coût des travaux ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'enrichissement sans cause, invoqué par la société NOVOREST INGENIERIE, ne peut qu'être écarté ; que, par suite, et compte tenu du partage de responsabilité ci-dessus défini, la société NOVOREST INGENIERIE et l'entreprise SNID doivent être condamnées à verser au CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES les sommes respectives de 233 992 euros TTC et de 545 983 euros TTC ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES a droit aux intérêts des sommes qui lui sont allouées par le présent arrêt à compter du 29 juin 2004, date de sa demande devant les premiers juges ; qu'à la date du 20 septembre 2006, à laquelle le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES a présenté des conclusions à fin de capitalisation des intérêts, il était dû plus d'une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande, tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur les conclusions d'appel provoqué présentées par la société Chapelle et compagnie, Betom ingénierie, la SA Bureau Veritas et Mme A-Cassignol :

Considérant, en premier lieu, que la mise hors de cause de la société Chapelle et compagnie, de Betom ingénierie, de la SA Bureau Veritas et de Mme A-Cassignol rend leurs conclusions d'appel provoqué sans objet ;

Considérant, en second lieu, que la société Aathex et la société PLG Cuisine Pro n'apportent aucun élément de nature à remettre en cause la part des responsabilités respectives retenues ; qu'ainsi, leurs conclusions d'appel provoqué doivent être rejetées ; qu'en outre, la société Aathex n'est pas recevable à demander une rectification d'erreur matérielle du jugement du tribunal, qui constitue un litige distinct ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative :

Considérant, en premier lieu, que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées présentées par le CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES, la société Chapelle et compagnie, Betom ingénierie, la SA Bureau Veritas et Mme A-Cassignol ;

Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la société NOVOREST INGENIERIE, demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, en troisième lieu, que les conclusions de la société Aathex, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du 13 juillet 2006 du Tribunal administratif de Versailles sont annulés.

Article 2 : La société NOVOREST INGENIERIE est condamnée à verser au CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES les sommes de 179 990 euros TTC au titre des retards dans les délais d'exécution des travaux et de 233 992 euros TTC au titre des désordres affectant la cuisine centrale.

Article 3 : La société SNID est condamnée à payer au CENTRE HOSPITALIER DE VERSAILLES la somme de 545 983 euros TTC, au titre des désordres affectant la cuisine centrale.

Article 4 : Les sommes mentionnées aux articles 2 et 3 ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2004. Les intérêts échus à la date du 20 septembre 2006 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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Nos 06VE02127-06VE02137 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE02127
Date de la décision : 19/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : BEN ZENOU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-01-19;06ve02127 ?
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