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17/11/2009 | FRANCE | N°08VE00623

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 17 novembre 2009, 08VE00623


Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2008, présentée pour Mme Santa A, demeurant ..., par Me Lorit ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505303 du 20 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 décembre 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale autorisant l'association Hertford British Hospital Corporation à transférer son contrat de travail à la Société Française de Services - Sodexho ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir

cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros a...

Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2008, présentée pour Mme Santa A, demeurant ..., par Me Lorit ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505303 du 20 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 décembre 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale autorisant l'association Hertford British Hospital Corporation à transférer son contrat de travail à la Société Française de Services - Sodexho ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le ministre ne pouvait légalement retirer la décision de l'inspecteur du travail refusant le transfert de son contrat de travail plus de quatre mois après l'édiction de cette décision ; que la décision attaquée est entachée d'erreur de droit dès lors que, compte tenu tant du caractère global de la mission confiée par la loi aux établissements de santé que des obligations strictes qui pèsent sur eux en matière de lutte contre les infections nosocomiales, l'activité d'entretien ne constitue pas une entité autonome dont l'externalisation serait susceptible d'entraîner l'application de l'article L. 121-12 du code du travail ; que le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a, par jugement du 26 novembre 2004, jugé lesdites dispositions inapplicables à l'opération en cause ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2009 :

- le rapport de M. Huon, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public,

- et les observations de Me Lorit pour Mme A ;

Considérant que l'association Hertford British Hospital Corporation qui exploite l'hôpital franco-britannique de Levallois-Perret (92) a, aux termes d'une convention conclue le 6 avril 2004, confié les prestations de nettoyage de cet établissement à la Société Française de Services - Sodexho et a formé auprès des services de l'inspection du travail une demande d'autorisation de transfert du contrat de travail de Mme A, employée d'entretien, exerçant les fonctions de délégué du personnel et membre du comité d'entreprise ; que, par décision du 29 juin 2004, l'inspectrice du travail de la 19ème section des Hauts-de-Seine a rejeté cette demande ; que, statuant le 28 décembre 2004 sur le recours qui lui avait été présenté le 30 août 2004, le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a annulé ladite décision et autorisé le transfert sollicité aux motifs qu'il s'inscrivait dans le cadre d'un transfert partiel d'entreprise au sens des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail et qu'il n'avait pas de lien avec l'exercice des mandats de l'intéressée ; que Mme A relève appel du jugement du 20 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 28 décembre 2004 ;

Sur la légalité de la décision du 28 décembre 2004 :

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des articles L. 425-1 et L. 436-1 du code du travail, applicables à l'espèce, lorsqu'un délégué du personnel, un membre du comité d'entreprise est compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, par application du deuxième alinéa de l'article L. 122-12 du même code, le transfert de ce salarié doit être soumis à l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail qui s'assure que ce salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire ; qu'aux termes de l'article R. 436-6 du code du travail, dans sa rédaction issue du décret n° 2001-532 du 20 juin 2001, applicable au présent litige : Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. / Ce recours doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur. / Le silence gardé pendant plus de quatre mois sur ce recours vaut décision de rejet (...) ; que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est entachée d'illégalité, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; que sont au nombre des dispositions réglementaires contraires susmentionnées les dispositions précitées de l'article R. 436-6 du code du travail en tant qu'elles confèrent au ministre chargé du travail, saisi d'un recours hiérarchique, la possibilité d'annuler la décision de l'inspecteur du travail dans un délai de quatre mois à compter de la réception de ce recours, son silence à l'expiration de ce délai valant rejet du recours ;

Considérant que la décision de l'inspecteur du travail refusant le transfert du contrat de travail de Mme A, qui a créé des droits au profit de cette dernière et qui a fait l'objet d'un recours hiérarchique reçu par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, le 30 août 2004 pouvait être annulée pour illégalité dans un délai de quatre mois à compter de cette date ; que dès lors, la décision attaquée, prise par le ministre le 28 décembre 2004, soit avant l'expiration de ce délai, n'était pas tardive ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-12 du code du travail, alors en vigueur : (...) S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. ; que ces dispositions, interprétées au regard de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 susvisée, impliquent le maintien des contrats de travail entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique, conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue, au sens de ce texte législatif, une entité économique un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels et incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 6111-1 du code de la santé publique : Les établissements de santé, publics et privés (...) organisent en leur sein la lutte contre les infections nosocomiales et les affections iatrogènes dans les conditions prévues par voie réglementaire (...) ; qu'aux termes de l'article L. 6113-2 du même code : Les établissements de santé, publics ou privés, développent une politique d'évaluation des pratiques professionnelles, des modalités d'organisation des soins et de toute action concourant à une prise en charge globale du malade (...) ; que ni l'exigence de développement d'une politique d'évaluation de l'action concourant à une prise en charge globale du malade , dont les modalités de mise en oeuvre sont laissées au libre choix des établissements de santé, ni les obligations qui pèsent sur ces établissements en matière de lutte contre les infections nosocomiales n'ont pour effet de leur imposer la prise en charge directe d'un service de nettoyage ou de faire regarder chaque établissement comme une entité économique dont aucun service, même confié à un tiers, ne pourrait constituer lui-même une entité distincte ; qu'ainsi, et contrairement à ce que soutient Mme A, l'opération par laquelle l'association Hertford British Hospital Corporation a externalisé les prestations d'entretien qu'elle assurait au sein de l'hôpital franco-britannique ne saurait, par principe, être exclue du champ d'application des dispositions précitées de l'article L. 122-12 du code du travail ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que le service de nettoyage de l'hôpital franco-britannique, dont l'ensemble des personnels et matériels a été transféré à la Société Française de Services - Sodexho, doit être regardé comme constituant une entité économique ayant un objectif propre, dont l'identité s'est conservée et poursuivie ; que, dès lors, le transfert du contrat de travail de Mme A, salariée de ce service, était soumis aux règles fixées par les dispositions précitées de l'article L. 122-12 du code du travail ; qu'à cet égard, l'intéressée ne saurait en tout état de cause se prévaloir du jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Nanterre le 26 novembre 2004 dans le litige opposant le comité d'entreprise de l'hôpital franco-britannique à l'association Hertford British Hospital Corporation dès lors que ce jugement n'est pas, en l'absence d'identité de parties, revêtu de l'autorité de la chose jugée à l'égard du présent litige ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale du 28 décembre 2004 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A la somme que demandent la Société Française de services - Sodexho et l'association Hertford British, en application des dispositions précitées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Société Française de Services - Sodexho et l'association Hertford British Hospital Corporation au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 08VE00623 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE00623
Date de la décision : 17/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: Mme JARREAU
Avocat(s) : LORIT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2009-11-17;08ve00623 ?
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