Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2007, présentée pour la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE, représentée par son directeur général, dont le siège est situé 17/19, avenue de Flandres à Paris (75954), par la SELARL BVK avocat au barreau de Versailles ; la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0304035 du 5 mars 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'a que partiellement accueilli ses conclusions tendant à la condamnation du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise à lui rembourser le montant des prestations servies à Mme A à la suite de l'accident dont celle-ci a été victime dans la nuit du 25 au 26 septembre 1999 ;
2°) de condamner le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise à lui verser :
- la somme de 9 534,31 euros correspondant aux arrérages échus du 1er mars 2002 au 31 mars 2007 de la pension d'invalidité, majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2003, date de sa première demande, avec capitalisation ;
- la somme de 58 080,33 euros correspondant aux arrérages échus du 1er mars 2002 au 31 mars 2007 de la majoration tierce personne dont est assortie la pension d'invalidité, majorée des intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2003, avec capitalisation ;
- les arrérages à échoir de ces deux pensions au fur et à mesure de leur échéance, majorés des intérêts au taux légal à compter de chaque échéance, avec capitalisation, à moins que le centre hospitalier ne préfère se libérer de son obligation par le paiement immédiat du capital représentatif, soit la somme de 148 099,49 euros ;
3°) de mettre à la charge du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise le versement de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le tribunal administratif a méconnu le principe selon lequel le préjudice d'une victime doit être réparé en tous ses éléments ; que, s'agissant du préjudice professionnel subi par Mme A, les premiers juges ont, à tort, pris en compte uniquement le montant des indemnités journalières versées entre le 25 septembre 1999 et le 28 février 2002, alors que la perte de revenus s'est poursuivie au-delà de cette date comme en témoigne le versement de la pension d'invalidité ; qu'en outre, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les frais futurs présentant un caractère certain doivent être remboursés ; que tel est le cas des arrérages de la pension d'invalidité versés par la caisse requérante au fur et à mesure de leur échéance ; qu'enfin, eu égard à l'état de complète dépendance dans lequel se trouve Mme A, c'est également à tort que le tribunal a rejeté la demande d'indemnisation au titre de la tierce personne au motif que la victime ne justifiait pas avoir exposé des dépenses de cette nature et qu'il n'y avait pas lieu de retenir ce chef de préjudice pour l'avenir, compte tenu du maintien de la victime dans un service de soins de long séjour ;
...........................................................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de l'action sociale ;
Vu le code civil ;
Vu l'arrêté du 11 décembre 2008 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 octobre 2009 :
- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public,
- et les observations de Me Vareiro, substituant Me Vercken de Vreuschmen, pour la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et de Me Stefaniak, substituant Me Creissen, pour les consorts A ;
Considérant que Mme Sylvie A, alors âgée de 35 ans, a cherché à mettre fin à ses jours dans la nuit du 25 au 26 septembre 1999, lors de son hospitalisation au Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise ; que, malgré les soins de réanimation qui lui ont été aussitôt administrés en raison d'un arrêt cardiorespiratoire, elle a été plongée dans un coma neurovégétatif ; que M. A, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de tuteur de son épouse ainsi que le fils et la mère de cette dernière ont recherché, devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, la responsabilité du centre hospitalier en vue d'obtenir la condamnation de cet établissement à réparer les divers préjudices résultant de l'accident susmentionné ; que, par jugement du 5 mars 2007, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que le centre hospitalier avait commis des fautes de nature à engager sa responsabilité et, après avoir évalué à la somme de 627 510,91 euros le préjudice corporel de Mme Sylvie A, a condamné cet établissement à verser une indemnité de 354 583 euros à cette dernière ainsi que les sommes de 208 806,18 euros et de 64 121,73 euros respectivement à la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise et à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE ; que le tribunal administratif a également accordé, d'une part à M. A, époux de la victime et à M. C, fils de cette dernière, la somme de 15 000 euros chacun et, d'autre part, à Mme D, mère de Mme Sylvie A, la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice personnel subi par chacun d'eux ; que la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE relève appel du jugement susmentionné en faisant valoir que le tribunal n'avait pas procédé à la réparation intégrale du préjudice subi par Mme Sylvie A ; que la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise demande le remboursement du montant intégral des dépenses d'hospitalisation au fur et à mesure de leur prise en charge, alors que le tribunal administratif ne lui a accordé que le remboursement des prestations déjà servies ; qu'enfin, les consorts A sollicitent une indemnisation plus importante des divers chefs de préjudices qu'ils subissent ; que Mme Sylvie A est décédée le 10 janvier 2009, en cours d'instance ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise aux conclusions de la requête de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et aux conclusions présentées par les consorts A :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après. / Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel. / Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (...) ;
Considérant que la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE invoque, dans sa requête, le caractère erroné de l'évaluation, par le tribunal, du préjudice professionnel subi par Mme Sylvie A à la suite de l'accident susmentionné du 26 septembre 1999 et conteste le refus, opposé par les premiers juges, d'accorder une indemnisation au titre des dépenses liées à l'assistance d'une tierce personne ; que le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise soutient que, dès lors que les consorts A n'ont pas contesté la solution retenue par le tribunal administratif à l'égard de ces deux postes de préjudices, la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE ne justifie pas d'un intérêt personnel et direct lui donnant qualité pour faire valoir en appel les droits de la victime, au regard des deux postes de préjudices susmentionnés ;
Considérant, toutefois, qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire exercé par un organisme de sécurité sociale, doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice concerné et d'allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ; qu'ainsi, dès lors que c'est par subrogation aux droits de la victime que les organismes d'assurance maladie exercent contre le tiers responsable du dommage une action en remboursement des prestations qu'ils lui ont servies, et eu égard au lien indissociable établi par les dispositions précitées de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale entre la détermination des droits de la victime d'un accident et celle des droits des organismes susmentionnés auxquels elle est affiliée, le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise n'est pas fondé à opposer aux conclusions de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE une fin de non-recevoir tirée de l'absence d'intérêt à agir ;
Considérant, en deuxième lieu, que les consorts A demandent la réformation du jugement du 5 mars 2007 en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions tendant à la réparation de la totalité des conséquences dommageables résultant, pour Mme Sylvie A, du coma neurovégétatif dans lequel elle s'est trouvée à la suite de sa tentative de suicide dans la nuit du 25 au 26 septembre 1999 ; qu'eu égard à l'interdépendance entre les droits de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et ceux de Mme Sylvie A, les conclusions tendant à une indemnisation plus élevée des divers chefs de préjudices subis par cette dernière ne soulèvent pas un litige distinct de l'appel principal de la caisse ; que, par suite, les conclusions présentées par les consorts A après l'expiration du délai de recours contre le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 5 mars 2007 sont recevables ;
Considérant, enfin, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. Rodolphe A a agi en qualité de tuteur de Mme Sylvie A lorsqu'il a saisi le tribunal administratif d'une demande tendant à la condamnation du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise à réparer le préjudice subi par son épouse et lorsqu'il a présenté à la Cour des conclusions tendant à une augmentation de l'indemnité accordée par les premiers juges ; qu'à la suite du décès de Mme Sylvie A survenu le 10 janvier 2009, en cours d'instance, M. Rodolphe A et M. David C, fils de Mme Sylvie A, ont produit un acte notarié établi le 26 mai 2009 par Me Salus, notaire à Lamorlaye (Oise), dont il résulte qu'ils sont les héritiers de Mme Sylvie A ; que, dès lors, ils ont qualité pour reprendre l'instance engagée pour le compte de Mme Sylvie A de son vivant ;
Sur la responsabilité du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise :
Considérant que Mme Sylvie A, qui souffrait de troubles dépressifs chroniques et était suivie par un médecin psychiatre du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise depuis plusieurs mois, a été admise le 21 septembre 1999 dans cet établissement et a tenté de se suicider par pendaison avec la ceinture d'une robe de chambre, en s'enfermant dans la salle-de-bains de sa chambre, dans la nuit du 25 au 26 septembre suivant ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de son hospitalisation, Mme Sylvie A a été prise en charge par le service de cardiologie et non par le service de psychiatrie du centre hospitalier, alors que le praticien qui l'avait examinée venait de constater une réapparition de la symptomatologie dépressive avec, notamment, angoisse et idéation morbide et que l'intéressée avait tenté à deux reprises de se donner la mort, à l'âge de 15 ans puis de 29 ans ; qu'il résulte des constatations des deux experts successivement désignés par le tribunal administratif que Mme A a présenté, au cours de son hospitalisation, la persistance d'une angoisse importante ainsi que des pleurs fréquents et a exprimé à plusieurs reprises et de façon insistante des idées suicidaires ; qu'en dépit du risque de suicide auquel elle était exposée et que le centre hospitalier ne pouvait ignorer compte tenu de ses antécédents, elle a été maintenue dans un service de cardiologie au lieu d'être transférée dans le service de psychiatrie où elle aurait bénéficié d'un accueil dans un environnement protégé et de la mise en oeuvre d'un traitement et d'une surveillance mieux adaptés à son état ; que la circonstance que l'intéressée ait eu une ceinture à sa disposition et ait été en mesure de se pendre au porte-manteau de la salle-de-bains dans laquelle elle s'était enfermée révèle, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, une erreur dans le choix du service hospitalier le mieux à même de soigner son état dépressif ainsi qu'un défaut de surveillance constitutif d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service, de nature à engager la responsabilité de l'établissement hospitalier ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par les consorts A, l'établissement hospitalier n'est pas fondé, par la voie de l'appel incident, à contester sa responsabilité ;
Sur le préjudice subi par Mme A :
Sur les droits à réparation de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE, de la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise et de M. A et M. C, héritiers de Mme A :
Considérant qu'il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode d'indemnisation prévue par les dispositions précitées de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;
En ce qui concerne le préjudice à caractère patrimonial :
Considérant, en premier lieu, qu'au titre des dépenses de santé, la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise a justifié qu'elle avait supporté des débours s'élevant à la somme non contestée de 276 728,81 euros ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme A a perçu, au titre des pertes de revenus entre le 25 septembre 1999 et le 28 février 2002, des indemnités journalières d'un montant de 17 579,09 euros qui lui ont été servies par la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise ; que M. A et M. C ont établi qu'elle avait subi, à concurrence de 4 583 euros, une perte de salaire non compensée par les indemnités journalières susmentionnées ; qu'elle a été admise, à compter du 1er mars 2002, au bénéfice d'une pension d'invalidité au titre de laquelle la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE lui a versé, jusqu'au 31 janvier 2009, des arrérages d'un montant total de 12 182,90 euros ; que, compte tenu du salaire annuel de 8 976,05 euros que percevait Mme A en 1999, dont il a été justifié, l'octroi de la pension d'invalidité n'a pas totalement compensé la perte de traitement sur la période du 1er mars 2002 au 10 janvier 2009, qui s'élève à la somme de 49 153,40 euros ; que si le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise soutient que Mme A n'était plus en mesure, pour raisons de santé, d'exercer une activité professionnelle en septembre 1999, lors de son hospitalisation, ses allégations ne sont assorties d'aucun commencement de justification d'ordre médical et ne sont nullement corroborées par les observations des deux experts désignés par le tribunal administratif ; que le dossier ne comporte aucun élément permettant de conclure que les troubles dépressifs dont souffrait Mme A, qui n'était alors âgée que de 35 ans, étaient de nature à faire obstacle à la reprise de son activité professionnelle après la mise en oeuvre d'un traitement approprié ; que, dès lors, le centre hospitalier n'est pas fondé à contester l'existence du préjudice résultant d'une perte de revenus ;
Considérant, en troisième lieu, que l'état de Mme A a nécessité l'aide constante d'une tierce personne, en raison du coma neurovégétatif dans lequel elle s'est trouvée jusqu'à son décès ; que, dès lors que la pension d'invalidité versée à Mme A par la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE comportait une majoration pour tierce personne, il y a lieu de prendre en compte les dépenses correspondantes dont il a été justifié, soit la somme de 80 259,80 euros ; qu'ayant été prise en charge dans un établissement de soins de long séjour, la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise a supporté les frais d'hospitalisation au titre des dépenses de santé, ainsi qu'il a été dit ci-dessus ; que si M. A et M. C se prévalent d'un droit à indemnisation de Mme A au titre des frais d'assistance d'une tierce personne, il est constant qu'ils n'ont pas engagé de tels frais dès lors que les dépenses d'hébergement au sein de l'unité de soins de long séjour ont été supportées par le département du Val-d'Oise, au titre de l'aide sociale ; qu'en admettant même qu'une participation aux frais d'hébergement ait été demandée à la victime, comme l'indiquent de façon imprécise ses ayants droit dans leur mémoire enregistré le 29 mai 2009, ils n'établissent et n'allèguent d'ailleurs pas que cette participation aurait été supérieure aux arrérages de la rente d'invalidité correspondant à la majoration pour tierce personne ; que, par suite, le coût de l'assistance d'une tierce personne doit être fixé, en l'espèce, à la somme susmentionnée de 80 259,80 euros ;
Considérant, en dernier lieu, que la personne qui a demandé en première instance la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel, en invoquant le cas échéant des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur et que ses prétentions demeurent dans la limite du montant total de l'indemnité chiffrée en première instance, augmentée le cas échéant des éléments nouveaux apparus postérieurement au jugement, sous réserve des règles qui gouvernent la recevabilité des demandes fondées sur une cause juridique nouvelle ; qu'en vertu de ce principe, M. A est recevable à demander, pour la première fois en appel, le remboursement des frais d'obsèques, qui se sont élevés à la somme de 3 758,42 euros, ainsi qu'il en est justifié ;
En ce qui concerne le préjudice à caractère personnel :
Considérant qu'eu égard au coma neurovégétatif irréversible dans lequel s'est trouvée Mme A, l'expert a évalué l'incapacité permanente à 100 % ; que, compte tenu de son état, elle a souffert d'infections pulmonaire et urinaire et a présenté des myoclonies post-anoxiques ; que Mme A a été privée de toute activité relationnelle ; que les premiers juges ont fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence subis par Mme A en évaluant ce chef de préjudice, incluant le préjudice d'agrément, à la somme de 300 000 euros, qui n'est pas excessive et ne doit donner lieu à aucun abattement, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier dans le dernier état de ses écritures ; que les souffrances physiques et morales endurées et le préjudice esthétique doivent être réparés par une indemnité s'élevant, au total, à la somme de 80 000 euros ; qu'en revanche, dès lors que l'incapacité permanente de 100 % résultant du coma neurovégétatif n'a pas été précédée d'une incapacité temporaire partielle et qu'il ne résulte d'aucune pièce du dossier que les souffrances endurées auraient présenté un caractère évolutif, les héritiers de Mme A ne sauraient prétendre à l'indemnisation d'un déficit fonctionnel temporaire et d'un préjudice qui résulterait de douleurs physiques à caractère temporaire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise doit être condamné à verser à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et à la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise les sommes respectives de 92 442,70 euros et de 294 307,90 euros ; que l'indemnité due par cet établissement à M. A et à M. C, en leur qualité d'héritiers de Mme A, s'établit à la somme totale de 437 494,82 euros ; que, dès lors, le jugement attaqué doit être réformé en tant qu'il a accordé à chacune des caisses susmentionnées les sommes de 64 121,73 euros et de 208 806,18 euros et à Mme A, de son vivant, la somme de 354 583 euros ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant, d'une part, que la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 92 442,70 euros à compter du 12 septembre 2003, date de sa première demande devant le tribunal administratif ; qu'elle a demandé la capitalisation des intérêts par un mémoire enregistré au tribunal administratif le 17 septembre 2004 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Considérant, d'autre part, que la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise a droit aux intérêts au taux légal de la somme de 294 307,90 euros à compter du 6 juillet 2004, date de sa première demande devant le tribunal administratif ;
Considérant, enfin, que M. A et à M. C ont droit aux intérêts au taux légal de la somme de 437 494,82 euros à compter du 24 février 2003, date de réception de leur réclamation préalable par le centre hospitalier ; qu'ils ont demandé, par un mémoire enregistré le 27 novembre 2007, la capitalisation des intérêts ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Sur les autres conclusions de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et de la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) ; qu'aux termes de l'article 1 de l'arrêté du 11 décembre 2008 susvisé : Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 955 euros et à 95 euros à compter du 1er janvier 2009 ; qu'il y a lieu de mettre à la charge du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise l'indemnité forfaitaire prévue par ces dispositions, soit, en l'espèce, 955 euros, au profit de la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et de la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise ;
Sur le préjudice subi par M. Rodolphe A, M. David C et Mme D :
Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient fait une évaluation insuffisante du préjudice personnel subi par M. A, M. C et Mme D, du fait de l'état dans lequel s'est trouvée Mme Sylvie A à la suite de sa tentative de suicide, en fixant ce préjudice à la somme de 15 000 euros pour l'époux de Mme A et pour son fils et à la somme de 5 000 euros pour sa mère ;
Considérant, d'autre part, qu'il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par l'époux, le fils et la mère de Mme A, du fait du décès de cette dernière le 10 janvier 2009, en accordant les sommes de 12 000 euros, 5 000 euros et 4 000 euros respectivement à M. A, M. C et Mme D, y compris tous intérêts et intérêts des intérêts échus au jour de la présente décision ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise le versement, d'une part, aux consorts A, de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens et, d'autre part, à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et à la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise de la somme de 1 000 euros chacune qu'elles demandent au même titre ;
DECIDE :
Article 1er : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise est condamné à verser à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE la somme de 92 442,70 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2003. Les intérêts échus le 17 septembre 2004 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 2 : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise est condamné à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise la somme de 294 307,90 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2004.
Article 3 : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise est condamné à verser à M. Rodolphe A et à M. David C, héritiers de Mme Sylvie A, la somme de 437 494,82 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 24 février 2003. Les intérêts échus à la date du 27 novembre 2007 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise est condamné à verser, en réparation de leur propre préjudice :
- la somme de 27 000 euros à M. Rodolphe A ;
- la somme de 20 000 euros à M. David C ;
- la somme de 9 000 euros à Mme Simone D.
Article 5 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 5 juillet 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise versera à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE, d'une part, et à la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise, d'autre part, une indemnité forfaitaire de gestion de 955 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 7 : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise versera à la CAISSE REGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE-DE-FRANCE et à la Caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 8 : Le Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise versera à M. Rodolphe A, à M. David C et à Mme D la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 9 : Le surplus des conclusions des consorts A et les conclusions du Centre hospitalier de Beaumont-sur-Oise sont rejetés.
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N° 07VE00960 2