Vu la requête, enregistrée le 20 février 2008, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT, venant aux droits de la SA Boyriven et Roby, dont le siège social est 47 allée des Impressionnistes - immeuble le Gauguin à Villepinte (93240), par Me Polack ; la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0302936 en date du 18 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de la SA Boyriven et Roby tendant à la décharge partielle, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1995 ;
2°) de prononcer la décharge demandée et de faire droit à sa demande tendant au versement des intérêts moratoires y afférents ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme dont le montant sera fixé ultérieurement, correspondant aux frais exposés et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que le remboursement du droit de timbre de 15 euros ;
Elle soutient que l'abandon de créances auquel elle a procédé en 1995, en faveur de la société Fatex, était justifié par un intérêt commercial ; qu'en effet, sa stratégie consistait à pénétrer, par filiale interposée, sur le marché allemand, en y vendant la gamme française de ses produits, ce qui a d'ailleurs permis un accroissement des ventes entre 1995 et 1999 ainsi que du chiffre d'affaires entre 1994 et 2000 ; qu'après changement de dénomination en 2001 et en 2004, elle a poursuivi sa croissance entre les années 2004 et 2007, laquelle a été réalisée également au bénéfice commercial du groupe ; qu'ainsi, en soutenant sa filiale, elle a assuré le débouché de ses propres produits pour un montant total de l'ordre de 13 480 000 F et a conforté le démarrage et le développement du groupe à l'international, avec notamment la création d'un bureau à Shangaï ainsi que l'acquisition d'une filiale en Belgique en 1999 et de filiales en Grande-Bretagne et en Espagne respectivement en 2001 et en 2002 ; que les premiers juges ne peuvent lui opposer la circonstance qu'elle a réalisé une part minoritaire de son chiffre d'affaires avec sa filiale allemande, en 1995 ; qu'elle n'a commis aucun acte anormal de gestion et que l'argument selon lequel cet abandon de créances ne lui aurait pas procuré une contrepartie commerciale immédiate est erroné ; que l'abandon de créances litigieux a permis de réaliser, sur la période 1996-1999, un chiffre d'affaires de 11 443 000 F ; qu'en retenant que l'abandon de créances qu'elle a consenti était supérieur au chiffre d'affaires réalisé avec la filiale et en en déduisant l'absence de contrepartie commerciale immédiate, le tribunal a posé une condition restrictive injustifiée ; qu'elle est fondée à se prévaloir de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 27 novembre 1981 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2008 :
- le rapport de Mme Riou, premier conseiller,
- les observations de Me Polack, pour la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT,
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, tirée du défaut d'intérêt à agir de la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT ;
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...) » ; que les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d'un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages, l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu'un abandon de créances consenti par une entreprise à un tiers constitue un tel acte et qu'elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier qu'elle a bénéficié en retour de contreparties ;
Considérant que la SA Boyriven et Roby, aux droits de laquelle vient la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT, qui exerçait l'activité de commerce de gros de fourniture de sellerie, de carrosserie industrielle et de pièces automobiles, et qui a été absorbée en 2004 par la société Boyriven France, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1995, 1996 et 1997, à l'issue de laquelle des redressements lui ont été notifiés, selon la procédure contradictoire, au titre de l'impôt sur les sociétés, concernant l'exercice clos au 31 décembre 1995 ; qu'il résulte de l'instruction que la SA Boyriven et Roby a acquis, le 7 décembre 1994, la participation détenue par la société Grappin Annat Finance dans la société Fatex, pour un prix de 1 F, ainsi qu'une créance d'un montant de 640 792,16 euros détenue sur cette société pour une somme correspondant à sa valeur nominale ; que la SA Boyriven et Roby a procédé, au titre des exercices 1994 et 1995, à des abandons de créances en faveur de la société Fatex ; que l'administration a réintégré aux résultats de l'exercice 1995, l'abandon de créances consenti à cette société pour un montant de 375 390,46 euros, au motif que le fait, pour une filiale, de supporter à elle seule le coût de la pénétration d'un marché à l'étranger est constitutif d'un acte anormal de gestion ;
Considérant que l'administration soutient, d'une part, qu'au titre de l'exercice 1995, le montant des ventes réalisées avec la société Fatex représentait moins de 1,3 % du chiffre d'affaires global de la SA Boyriven et Roby et que l'abandon de créances consenti par cette dernière représentait un montant supérieur à celui des ventes à sa filiale au titre de l'exercice litigieux ; que, d'autre part, la SA Boyriven et Roby ne justifie ni des difficultés de la société Fatex ni des conséquences qu'auraient pu avoir ces difficultés éventuelles sur ses activités commerciales ; que la société requérante fait valoir que l'abandon de créances dont s'agit a été justifié par un intérêt commercial dès lors que la stratégie de la SA Boyriven et Roby consistait à pénétrer, par filiale interposée, sur le marché allemand, en y vendant sa gamme française de produits et que son soutien à la société Fatex lui a d'ailleurs permis d'assurer le débouché de ses propres produits, pour un montant total de 13 480 000 F et de créer et développer de nouveaux marchés pour l'ensemble du groupe en Chine, en Belgique, en Grande-Bretagne et en Espagne, que ses ventes à la société Fatex, qui étaient nulles en 1991, se sont élevées à 310 485 euros en 1995 et à 527 458 euros en 1999 et que sa filiale a réalisé un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros sur le marché allemand entre 1995 et 1999 alors que l'abandon de créances litigieux ne représentait que 18 % de ses ventes à sa filiale pour cette même période ; que, toutefois, si cette stratégie de développement était profitable à l'ensemble du groupe, la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT ne justifie pas de l'intérêt propre, tant financier que commercial, que la SA Boyriven et Roby aurait retiré de l'aide qu'elle avait consentie à la société Fatex, compte tenu du faible volume d'affaire entretenu avec sa filiale rapporté à son chiffre d'affaires global et de ce que les prétendues difficultés ou besoins de financement de cette dernière ne sont établies par aucune pièce probante en l'absence de production de tout document comptable ; qu'en outre, il résulte du procès-verbal de la réunion du conseil d'administration en date du 12 septembre 1991 de la SA Roby que la politique de restructuration de cette société était essentiellement motivée par un objectif d'amélioration de ses positions de trésorerie ; qu'il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments que les contreparties invoquées par la SA BOYRIVEN DEVELOPPEMENT dont la réalité n'est pas établie ne permettent pas de justifier l'abandon de créances consenti à la société Fatex ; que, par suite, celui-ci ne pouvait être déduit des résultats de la SA Boyriven et Roby au titre de l'exercice clos en 1995 ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le service aurait entendu opposer illégalement à la société requérante, l'existence d'un acte anormal de gestion résultant du seul fait que l'abandon de créances était supérieur au chiffre d'affaires réalisé avec la société Fatex alors qu'il ne s'agissait que d'un élément de l'appréciation portée par l'administration ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA BOYRIVEN DEVELOPPEMENT, venant aux droit de la SA Boyriven et Roby, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de la SA Boyriven et Roby ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS BOYRIVEN DEVELOPPEMENT est rejetée.
N° 08VE00464 2