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10/07/2008 | FRANCE | N°07VE03118

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 10 juillet 2008, 07VE03118


Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0710476 en date du 2 novembre 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 9 novembre 2007 portant reconduite à la frontière de M. Bacoroba X ;

2°) de rejeter la demande formée par M. X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Il soutient que le

premier juge a commis une double erreur de fait et de droit en retenant la circonst...

Vu la requête, enregistrée le 7 décembre 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0710476 en date du 2 novembre 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 9 novembre 2007 portant reconduite à la frontière de M. Bacoroba X ;

2°) de rejeter la demande formée par M. X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Il soutient que le premier juge a commis une double erreur de fait et de droit en retenant la circonstance que le passeport de M. X étant détenu par la police, M. X devait être regardé comme établissant son entrée régulière en France ; que le passeport de M. X ne comporte aucun visa d'entrée ; que l'arrêté de reconduite à la frontière, suffisamment motivé, a été signé par un sous-préfet ayant reçu une délégation de signature régulière ; que l'état de santé de M. X s'est stabilisé, et des soins adéquats peuvent lui être dispensés au Mali ; que son épouse étant en situation irrégulière, la mesure de reconduite à la frontière ne méconnaît pas les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X possède des attaches familiales au Mali où demeurent sa mère, et cinq frères et soeur ; que le pays de destination n'étant pas mentionné dans l'arrêté, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ; qu'en tout état de cause, M. X n'établit pas encourir des risques en cas de retour au Mali ;

.............................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2008 :

- le rapport de Mme Boret, magistrat désigné,

- les observations de M. X,

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Sur la mesure de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L 511-1-II-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants (...) : Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité » ;

Considérant que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE produit en appel copie du passeport de M. X, lequel est dénué de tout visa d'entrée en France ; que, par suite, la décision de reconduire l'intéressé à la frontière pouvait être prise sur le fondement des dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a retenu le défaut de base légale dont aurait été entachée la mesure de reconduite à la frontière de M. X pour annuler cette décision ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués en première instance et en appel par M. X à l'encontre de la décision annulée en première instance ;

Considérant, en premier lieu, que la décision de reconduite à la frontière a été signée le dimanche 27 octobre 2007 par M. Lamelot, sous-préfet, qui avait reçu délégation du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE par arrêté du 12 septembre 2007 régulièrement publié, pour assurer les permanences de fin de semaine ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige manque en fait et doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que cette décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait applicables à la situation de M. X, qui fondent la décision contestée, laquelle répond ainsi aux exigences de motivation de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «Ne peut faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...)» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. X a été bénéficiaire d'une carte de séjour temporaire à compter du 28 octobre 2003, renouvelée jusqu'au 20 mars 2005, délivrée pour des raisons médicales, le médecin chef du service médical de la préfecture de police de Paris a estimé, le 22 novembre 2004, que l'intéressé pouvait bénéficier au Mali du traitement que son état de santé rendait nécessaire, et dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'en outre, les pièces produites par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE établissent que de tels soins d'entretien peuvent être dispensés dans le pays dont le requérant est originaire ; que, dès lors, M. X ne peut valablement soutenir qu'il remplit les conditions posées par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) » ;

Considérant que M. X fait valoir qu'entré sur le territoire français en 2000, ses attaches familiales sont désormais en France où il s'est marié ; que toutefois, l'épouse du requérant est en situation irrégulière, et la mère ainsi que les frères et soeurs de M. X résident au Mali ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce et, notamment, des conditions de son séjour en France, le refus de titre de séjour opposé à l'intéressé n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise la décision attaquée ; que, par suite, la décision du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur le pays de destination :

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière de M. X doit être regardé comme fixant le Mali comme pays de reconduite ; que si M. X fait valoir qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, il se borne à faire état de considérations d'ordre général sans préciser ni justifier les risques qu'il courrait personnellement en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le Mali, pays dont il a la nationalité, comme pays de destination, méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé sa décision du 28 octobre 2007 ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du 2 novembre 2007 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07VE03118
Date de la décision : 10/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle BORET
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : ABECASSIS CONTINI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-07-10;07ve03118 ?
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