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14/03/2008 | FRANCE | N°06VE00659

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Formation plénière, 14 mars 2008, 06VE00659


Vu la requête, enregistrée le 24 mars 2006 en télécopie et le 29 mars 2006 en original au greffe de la cour, présentée pour la société 3 A INVESTISSEMENT, dont le siège social est situé 17, rue des Aulnayes à Taverny (95150), représentée par sa gérante, par Me Cassin ; la société 3 A INVESTISSEMENT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202366 en date du 19 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 11 mars 2002 par lequel le maire de la commune de Bessanc

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Vu la requête, enregistrée le 24 mars 2006 en télécopie et le 29 mars 2006 en original au greffe de la cour, présentée pour la société 3 A INVESTISSEMENT, dont le siège social est situé 17, rue des Aulnayes à Taverny (95150), représentée par sa gérante, par Me Cassin ; la société 3 A INVESTISSEMENT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202366 en date du 19 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 11 mars 2002 par lequel le maire de la commune de Bessancourt a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison individuelle située au 2 bis avenue de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 11 mars 2002 par lequel le maire de la commune de Bessancourt a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

3°) de condamner la commune de Bessancourt à lui verser une somme de 3 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'arrêté attaqué a été pris en violation de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ; qu'en effet, par cette décision, le maire a implicitement mais nécessairement retiré le certificat d'urbanisme positif délivré le 15 mai 2001, qui indiquait que le lot B avait une surface hors oeuvre nette susceptible d'être édifiée de 180 m² ; que ce certificat a créé des droits à son profit ; que le maire ne pouvait refuser le permis de construire sans que la société ait été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales ; que le certificat d'urbanisme du 15 mai 2001 ne pouvait être retiré implicitement passé le délai de quatre mois ; que du fait de l'abrogation, par l'article 13 de la loi du 13 décembre 2000, de l'article L. 111-5 du code de l'urbanisme, elle est fondée à exciper de l'illégalité de l'article UG 5 du plan d'occupation des sols ; qu'une demande de permis de construire portant sur un terrain issu d'une division ne peut s'apprécier qu'au regard des caractéristiques de la partie divisée, indépendamment de celles du reliquat et de son caractère ou non bâti ; que dans le cadre du plan d'occupation des sols, la commune n'a pas édicté de simples prescriptions relatives à l'utilisation des sols, mais a bien entendu instituer une véritable limitation du droit des propriétaires de terrains à disposer de leur bien, puisque les divisions d'un terrain participent du droit d'abusus inhérent au droit de propriété ; qu'en tout état de cause, l'article UG 5 exige, pour les terrains non bâtis résultant de la division d'une unité foncière, une superficie de 600 m² et une largeur de façade de 16 m minimum pour être constructible, ce qui est le cas en l'espèce ; que cet article ne subordonne pas la délivrance d'un permis de construire sur un lot non bâti à la condition que le lot bâti résiduel conserve lui-même une superficie minimale ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2008 :

- le rapport de Mme Jarreau, premier conseiller ;
- les observations de Me Ferracci, substituant Me Cassin, pour la société 3 A INVESTISSEMENT et de Me Etienne, substituant Me Ghaye, pour la commune de Bessancourt ;
- et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;


Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2002 :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le 15 mai 2001, le maire de la commune de Bessancourt (Val-d'Oise) a délivré à la société 3 A INVESTISSEMENT deux certificats d'urbanisme relatifs à chacun des lots issus de la division d'un terrain de 968 m², l'un, bâti, d'une surface de 368 m² et l'autre, non bâti, d'une surface de 600 m² ; que le certificat relatif à ce second lot fait état d'une possibilité de construire une surface hors oeuvre nette de 180 m² ; que par l'arrêté du 11 mars 2002, le maire de la commune de Bessancourt a refusé de délivrer à la société 3 A INVESTISSEMENT un permis de construire relatif à une maison individuelle sur le lot non bâti issu de la division, au motif de l'incompatibilité du projet avec l'article UG 5 du règlement du plan d'occupation des sols ; que la société 3 A INVESTISSEMENT fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 11 mars 2002 ;

En ce qui concerne le moyen tiré du retrait illégal d'un acte créateur de droits :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux certificats d'urbanisme délivrés à la société 3 A INVESTISSEMENT : « Le certificat d'urbanisme indique les dispositions d'urbanisme et les limitations administratives au droit de propriété et le régime des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus./ Lorsque la demande précise l'opération projetée, en indiquant notamment la destination des bâtiments projetés et leur superficie de plancher hors oeuvre, le certificat d'urbanisme précise si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération./ Lorsque toute demande d'autorisation pourrait, du seul fait de la localisation du terrain, être refusée en fonction des dispositions d'urbanisme et, notamment, des règles générales d'urbanisme, la réponse à la demande de certificat d'urbanisme est négative./ Dans le cas où la constructibilité du terrain ou la possibilité de réaliser une opération déterminée est subordonnée à l'avis ou à l'accord des services, autorités ou commissions relevant du ministre chargé des monuments historiques ou des sites, le certificat d'urbanisme en fait expressément la réserve./ Si la demande formulée en vue de réaliser l'opération projetée sur le terrain, notamment la demande de permis de construire prévue à l'article L. 421-1 est déposée dans le délai d'un an à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme et respecte les dispositions d'urbanisme mentionnées par ledit certificat, celles-ci ne peuvent être remises en cause. Il en est de même du régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que des limitations administratives au droit de propriété applicables au terrain, à l'exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de certificat d'urbanisme relative au lot non bâti déposée le 20 février 2001 par la société 3 A INVESTISSEMENT ne se référait pas à une opération de construction déterminée, en application du deuxième alinéa de l'article L. 410-1 précité, mais a été présentée sur le fondement du premier alinéa de ce même article ; que le certificat d'urbanisme délivré le 15 mai 2001 précisait expressément que l'objet de la demande dont le maire avait été saisi était une « demande d'informations générales (article L. 410-1 a du code de l'urbanisme) » ; que le certificat mentionnait également de manière expresse que : « le demandeur est avisé que l'utilisation effective de la surface hors oeuvre nette disponible n'est possible que si ce projet respecte les servitudes d'utilité publique et les règles d'urbanisme applicables à l'îlot de propriété ou à la partie qui en serait détachée » ; que dans ces conditions, le certificat d'urbanisme litigieux n'a pu, malgré l'indication d'une surface hors oeuvre nette susceptible d'être édifiée, faire naître aucun droit à la construction de cette surface au profit de son titulaire ; qu'ainsi la société 3 A INVESTISSEMENT n'est pas fondée à soutenir qu'en rejetant le 11 mars 2002 sa demande de permis de construire, le maire de Bessancourt a implicitement retiré une décision créatrice de droits ; qu'elle n'est dès lors pas non plus fondée à soutenir que le maire de Bessancourt était tenu, avant de prendre l'arrêté litigieux, de mettre la société 3 A INVESTISSEMENT à même de présenter ses observations, afin que soit respectée la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, ni que cet arrêté serait entaché d'illégalité du fait qu'il est intervenu plus de quatre mois après la délivrance du certificat d'urbanisme précité ;

En ce qui concerne l'application de l'article UG 5 du plan d'occupation des sols de la commune de Bessancourt :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-19 du code de l'urbanisme : « Les plans d'occupation des sols approuvés avant l'entrée en vigueur de la loi nº 2000-1208 du 13 décembre 2000 précitée ont les mêmes effets que les plans locaux d'urbanisme. Ils sont soumis au régime juridique des plans locaux d'urbanisme défini par les articles L. 123-1-1 à L. 123-18. Les dispositions de l'article L. 123-1, dans leur rédaction antérieure à cette loi, leur demeurent applicables » ; qu'en vertu de l'article L.123-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 décembre 2000, les règlements des plans d'occupation des sols doivent notamment définir, en fonction des situations locales, les règles concernant le droit d'implanter des constructions, leur destination et leur nature ; qu'aux termes du 2° de l'article R. 123-21 pris pour l'application de ces dispositions, le règlement peut : « a) Edicter les prescriptions relatives à l'accès, à la desserte, à l'équipement en réseaux divers et, le cas échéant, aux dimensions et à la surface des terrains (…) » ;

Considérant qu'aux termes de l'article UG 5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Bessancourt approuvé par une délibération de son conseil municipal du 22 mai 1992 et sur lequel, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le maire s'est fondé pour prendre l'arrêté litigieux : « Terrains non bâtis (…) : les lots résultant de la division d'une unité foncière doivent, pour être constructibles, avoir une superficie de 600 m² et une largeur de façade de 16 m minimum.(…) Terrains bâtis : (…) La division d'un terrain bâti aboutissant à la création d'un ou plusieurs lots constructibles doit satisfaire aux conditions suivantes : chaque lot, non bâti, doit respecter les règles imposées aux lots résultant de la division des terrains non bâtis. Chaque lot bâti doit être issu d'une division n'aboutissant pas à la création d'au moins un lot bâti de superficie inférieure à la norme de division des terrains non bâtis (…) » ; que la société 3 A INVESTISSEMENT soutient que cet article était illégal du fait de l'entrée en vigueur de l'article 13 de la loi du 13 décembre 2000 ;

Considérant, il est vrai, que l'article 13 de la loi du 13 décembre 2000 a abrogé l'article
L. 111-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 75-1328 du 31 décembre 1975 modifiée, laquelle était applicable à la date d'approbation du plan d'occupation des sols de la commune et prévoyait que la constructibilité d'un terrain issu d'une division devait être examinée au regard de la constructibilité résiduelle de l'unité foncière initiale ; qu'il ressort toutefois des termes précités de l'article L. 123-19 du code de l'urbanisme, issu de cette même loi du 13 décembre 2000, qu'en abrogeant cette disposition, le législateur n'a pas entendu remettre en cause les dispositions des plans d'occupation des sols déjà approuvés ; qu'ainsi la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 a eu pour effet de rendre illégal l'article UG 5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Bessancourt ;

Considérant que les auteurs du plan d'occupation des sols, en prévoyant qu'en cas de division parcellaire d'un terrain bâti aboutissant à la création d'un lot constructible, le lot bâti également créé ne doit pas être d'une superficie inférieure à la norme de division des terrains non bâtis, n'ont pas excédé les limites de l'habilitation à édicter des prescriptions relatives aux dimensions et à la surface des terrains qu'ils tenaient des dispositions précitées des articles L. 123-1 et R. 123-21 du code de l'urbanisme et n'ont pas porté une atteinte excessive au droit de propriété ; qu'ainsi la société 3 A INVESTISSEMENT n'est pas fondée à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de l'article UG 5 précité et à soutenir que le maire de Bessancourt était tenu d'écarter cet article avant de statuer sur sa demande de permis de construire ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article UG 5 que la division d'un terrain bâti en vue de la création d'un lot constructible ne doit pas aboutir à la création d'un lot bâti d'une superficie inférieure à 600 m² ; qu'ainsi en refusant le permis de construire sollicité au motif qu'après la division, le lot bâti présentait une superficie inférieure à 600 m², le maire de Bessancourt n'a pas commis d'erreur de droit, mais a fait au contraire une stricte application de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société 3 A INVESTISSEMENT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Bessancourt, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à verser à la société 3 A INVESTISSEMENT la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de condamner la société 3 A INVESTISSEMENT à payer à la commune de Bessancourt une somme de 1 500 € au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;




D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société 3 A INVESTISSEMENT est rejetée.

Article 2 : La société 3 A INVESTISSEMENT versera à la commune de Bessancourt une somme de 1 500 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par la commune de Bessancourt sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

06VE00659 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Formation plénière
Numéro d'arrêt : 06VE00659
Date de la décision : 14/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BELAVAL
Rapporteur ?: Mme Brigitte JARREAU
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : CASSIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-03-14;06ve00659 ?
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