La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2008 | FRANCE | N°07VE02228

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 28 février 2008, 07VE02228


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 août 2007 et 19 septembre 2007, présentés pour M. Karim X, demeurant chez Mlle Joëlle Y ..., par Me Mizrahi ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707854 du 20 juillet 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2007 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour

excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 août 2007 et 19 septembre 2007, présentés pour M. Karim X, demeurant chez Mlle Joëlle Y ..., par Me Mizrahi ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707854 du 20 juillet 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juillet 2007 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou de réexaminer sa situation administrative;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il a reçu la convocation à l'audience deux heures après sa tenue ; qu'il a vécu de 1988 à 1997 en France, date à laquelle il a fait l'objet d'une première reconduite; que l'arrêté de reconduite du 12 juillet 2007 n'est pas suffisamment motivé puisqu'il comporte des formules stéréotypées ; que le préfet a commis une erreur de droit en fondant cet arrêté sur le 2° du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers puisque, ayant fait l'objet d'un refus de titre de séjour le 16 août 2004 confirmé par le préfet le 28 décembre 2004 et s'étant maintenu sur le territoire plus d'un mois après ce refus, il entrait dans le champ d'application du 3° dudit paragraphe II ; que ces dernières dispositions ayant été abrogées à compter du 29 décembre 2006, le préfet devait lui appliquer la nouvelle procédure sur les obligations de quitter le territoire prévue au paragraphe I de l'article L. 511-1 ; que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales puisqu'il n'a plus de liens familiaux en Algérie, étant fils unique abandonné par son père après la naissance et élevé par des nourrices, qu'il est entré en France le 24 août 2003 pour assister sa mère de nationalité française, laquelle, résidant en France depuis 1970, est décédée le 26 mai 2004 d'un cancer des poumons et a y été enterrée, qu'il justifie d'une réelle intégration dans la société française dès lors qu'il y a tissé des liens privés forts et d'une insertion professionnelle dès lors qu'il dispose de promesses d'embauche compte tenu de ses compétences en tant que poseur de fenêtres ;

……………………………………………………………………………………….
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la loi n° 2006-911du 24 juillet 2006 ;

Vu le décret n° 2006-1708 du 23 décembre 2006 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2008 :

- le rapport de Mme Kermorgant, magistrat désigné ;
- les observations de Me Philipon, substituant Me Mizrahi, pour M. X ;
- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;


Connaissance prise de la note en délibéré présentée le 15 février 2008 pour M. X ;


Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a été averti par courrier, expédié à son adresse le 16 juillet 2007, que l'audience au cours de laquelle serait examinée sa demande aurait lieu le 20 juillet 2007 ; qu'eu égard à la brièveté du délai de soixante-douze heures imparti par la loi au président du tribunal administratif ou à son délégué pour statuer sur les recours dirigés contre les décisions de reconduite à la frontière et aux dispositions de l'article R. 776-10 du code de justice administrative selon lesquelles « les parties doivent être averties par tous moyens de la date, de l'heure et du lieu de l'audience », M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été averti de la date de l'audience dans des conditions irrégulières ;

Au fond :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. X comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ainsi, alors même qu'il a été rédigé à l'aide d'un formulaire stéréotypé, il répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article 52 de la loi du 24 juillet 2006 a introduit à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un I qui prévoit que : « L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français (…) » et précise que l'étranger dispose, pour satisfaire à cette obligation d'un délai d'un mois ; que ce même article abroge les 3° et 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui, dans leur rédaction antérieure à la loi du 24 juillet 2006, prévoyaient qu'un étranger pouvait être reconduit à la frontière s'il s'était maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois suivant une décision qui soit avait refusé de lui délivrer un titre de séjour, de renouveler un tel titre ou qui avait retiré le titre dont il bénéficiait, soit avait retiré ou refusé de renouveler un récépissé de demande de carte de séjour ou une autorisation provisoire de séjour précédemment délivrée ; que, conformément à l'article 118 de la loi du 24 juillet 2006, ces dispositions sont entrées en vigueur le 29 décembre 2006, jour de la publication du décret en Conseil d'Etat pris pour leur application ;

Considérant qu'à compter de l'entrée en vigueur de ces dispositions, la nouvelle procédure d'obligation de quitter le territoire français est seule applicable lorsque l'autorité administrative refuse à un étranger, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte ou son autorisation provisoire de séjour ; que, pour les étrangers qui avaient fait l'objet de telles mesures avant la publication du décret du 23 décembre 2006, un arrêté de reconduite à la frontière peut toutefois être pris s'ils entrent par ailleurs dans le champ d'application du 1° ou du 2° de II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006 ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : /(…) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d' un premier titre de séjour régulièrement délivré » ;

Considérant que, pour prononcer le 12 juillet 2007 la reconduite à la frontière de M. X le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur les dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X qui est de nationalité algérienne, est entré en France le 2 septembre 2003 et s'y est maintenu irrégulièrement au-delà de la durée de validité de son visa ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006 ; que, par suite, la circonstance qu'il a fait l'objet d'un refus de délivrance d'un titre de séjour le 16 août 2004, avant la publication du décret du 23 décembre 2006, n'est pas de nature à faire obstacle à ce que le préfet de la Seine-Saint-Denis fonde légalement son arrêté de reconduite à la frontière du 12 juillet 2007 sur les dispositions du 2° du II de l'article L. 511-1 précitées du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : « (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) » ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il est entré sur le territoire en 2003 pour assister sa mère atteinte d'un cancer et décédée en 2004, qu'il n'a plus d'attaches familiales en Algérie, qu'il a séjourné de 1988 et à 1997 en France où il est parfaitement intégré comme en témoignent ses voisins avec lesquels il a tissé des liens privés forts, et où il bénéficie d'une insertion professionnelle dès lors qu'il dispose de promesses d'embauche; que, toutefois, M. XY, âgé de 40 ans à la date de la mesure de reconduite prise à son encontre, est célibataire sans enfant et n'établit ni être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, ni être dans l'impossibilité de pouvoir s'y réinsérer ; que, dans ces conditions, nonobstant les liens privés qu'il aurait noués au cours de son séjour en France et eu égard à la durée et au conditions de séjour de M. X, l'arrêté du 12 juillet 2007 n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée eu égard aux buts en vue desquels il a été pris et n'a méconnu ni les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 28 décembre 1968 ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



D E C I D E
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
N°07VE02228
4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07VE02228
Date de la décision : 28/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Martine KERMORGANT
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : MIZRAHI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-02-28;07ve02228 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award