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22/01/2008 | FRANCE | N°06VE01681

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 22 janvier 2008, 06VE01681


Vu l'ordonnance en date du 11 juillet 2006, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 31 juillet 2006, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Karin X, demeurant ..., par la SELARL Lancian ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris le 4 juillet 2006, présentée pour Mme Karin X, demeurant ..., par la SELARL Lancian ; <

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Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement ...

Vu l'ordonnance en date du 11 juillet 2006, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 31 juillet 2006, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Karin X, demeurant ..., par la SELARL Lancian ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris le 4 juillet 2006, présentée pour Mme Karin X, demeurant ..., par la SELARL Lancian ;

Mme X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502852 en date du 4 mai 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2000, et qui ont été mises en recouvrement le 31 juillet 2003 et le 31 août 2003 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

Elle soutient qu'à la suite d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 1998, 1999 et 2000, il a été mis à sa charge, au titre de l'année 2000, des impositions supplémentaires d'un montant de 124 520 euros pour l'impôt sur le revenu, et 10 750 euros au titre de contributions sociales ; que, pour refuser la décharge, le tribunal a considéré qu'elle avait en France le centre de ses intérêts économiques, dans la mesure où elle y disposait de comptes bancaires, y louait un appartement, et y détenait des participations dans plusieurs sociétés ; que le jugement est insuffisamment motivé sur ce point, dans la mesure où il ne répond pas à différents arguments avancés par la requérante, et tenant à la nature de ses activités, au fait qu'elle a bien été imposée en Allemagne sur le revenu et que l'imposition française s'ajoute à l'imposition allemande, ce qui lui ouvre d'ailleurs la possibilité de faire jouer le mécanisme prévu à l'article 25 de la convention franco-allemande ; que, sur le bien-fondé de l'imposition, c'est à tort que le tribunal a considéré qu'elle avait en France son domicile fiscal au sens des articles 4 A et 4 B du code général des impôts ; qu'en effet, s'agissant du critère personnel, elle résidait en Allemagne en 2000, qu'elle y acquitté 25 166,99 euros d'impôt sur le revenu, et que, contrairement à ce que soutient l'administration, la déclaration de ses revenus en Allemagne n'est intervenue qu'avec un retard limité, lié à sa séparation d'avec le père de son enfant ; que l'appartement et la ligne téléphonique dont elle a continué à disposer en France ne démontrent pas qu'elle y résidait, et que cet appartement était en fait occupé par son ancien compagnon et leur fille, et que ce dernier réglait les loyers et les charges, et prenait en charge leur fille ; que cet appartement n'était donc pas le lieu de résidence habituelle de la famille ; que la requérante avait au contraire quitté définitivement son compagnon et sa fille pour retourner vivre chez son père en Allemagne ; que, s'agissant du critère professionnel, son activité consiste à créer des concepts ludo-éducatifs pour les enfants, peut être exercée n'importe où, et qu'il n'y a aucun lien entre son lieu de résidence et l'adresse de ses clients ; que les royalties perçues en 2000 correspondent à des travaux effectués antérieurement ; qu'au cours de l'année 2000, l'essentiel de son activité professionnelle s'est déroulée en Hongrie ; que, s'agissant du critère économique, le fait qu'elle ait conservé un patrimoine en France ne permet en rien de préjuger de son domicile fiscal ; que sa participation dans la SCI du Golfe était « dormante », et qu'elle n'a pris aucune part active à la gestion de cette société ; que, s'agissant des autres sociétés, elle n'en a jamais été gérante, dirigeante ou mandataire social, sauf dans le cas de la société holding CLK, crée le 4 mai 2000, et les statuts de deux autres sociétés créées la même année, FLAM et THE GATES mentionnent pour Mme X une adresse en Allemagne ; que, s'agissant de la société Next Lab, elle n'en a jamais été actionnaire à 100 % ; sur les pénalités, que la majoration de 80 % qui lui a été appliquée en application de l'article 1728 du code général des impôts n'était pas justifiée, dès lors qu'elle était régulièrement imposée sur le revenu en Allemagne, et qu'elle avait informé l'administration par un courrier du 4 décembre 2001 qu'elle résidait en Allemagne ; que cette sanction est contraire à l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;
…………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention franco-allemande du 21 juillet 1959 modifiée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2008 :
- le rapport de M. Morri, premier conseiller ;
- les observations de Me Lancian, pour Mme X ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions aux fins de non-lieu à statuer :

Considérant que, par une décision en date du 20 décembre 2006, l'administration a accordé à Mme X un dégrèvement de 28 579 euros correspondant à la différence entre le montant des pénalités qui lui avaient été initialement assignées, calculées au taux de 80 %, et celui résultant de l'application du taux de 40 %, résultant de la nouvelle rédaction des dispositions de l'article 1728 du code général des impôts ; qu'ainsi, le ministre est fondé à soutenir que les conclusions de Mme X tendant à la décharge de ces pénalités sont devenues sans objet à concurrence du montant de 28 579 euros ;

Sur la régularité du jugement contesté :

Considérant qu'en rappelant les dispositions pertinentes des articles 4 A et 4 B du code général des impôts, et indiquant les raisons de fait pour lesquelles Mme X devait être regardée comme ayant en France le centre de ses intérêts économiques, et, par suite, son domicile fiscal au sens de ces dispositions, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments de la requérante, a suffisamment motivé sa décision ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement contesté doit en conséquence être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : « Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus » et qu'aux termes de l'article 4B du même code : « Sont considérées comme ayant en France leur domicile fiscal : a) les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal, b) celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire, c) celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme X a, au cours de l'année 2000, perçu l'essentiel de ses revenus à raison de versements effectués par des sociétés immatriculées en France, et dans lesquelles elle détenait des participations ; qu'elle était titulaire en France de cinq comptes bancaires, dont deux sur lesquels elle effectuait régulièrement des opérations ; qu'elle était également propriétaire d'un appartement à Neuilly et titulaire de la ligne téléphonique de cet appartement, même si elle indique, sans le justifier, qu'elle avait cessé d'occuper ledit appartement ;

Considérant que Mme X fait valoir que, dans le même temps, elle aurait transféré sa résidence chez son père en Allemagne ; qu'il est en effet établi qu'elle y a acquitté des impôts au titre des revenus de l'année 2000 ; mais qu'il résulte de l'instruction qu'elle n'a déclaré ses revenus de l'année 2000 auprès des services fiscaux allemand que le 6 juin 2002, alors que son examen de situation fiscale personnelle avait débuté le 18 août 2001 ; que ce n'est que le 6 décembre 2001, en réponse à une mise en demeure, qu'elle a indiqué aux services fiscaux français ne plus résider en France ; qu'elle ne démontre, ni ne soutient, avoir perçu en Allemagne des revenus substantiels au cours de l'année 2000 ;

Considérant, dès lors, que, contrairement à ce qu'elle soutient, Mme X avait bien conservé en France le centre de ses intérêts économiques ; qu'elle n'est ainsi pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a regardée comme ayant en France son domicile fiscal au sens des dispositions des articles 4 A et 4 B du code général des impôts ;

Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article 2 de la convention signée entre la France et la République Fédérale d'Allemagne le 21 juillet 1959 : 4 a) Au sens de la présente convention, on entend par résident d'un Etat contractant toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat est assujettie à l'impôt dans cet Etat en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue. b) Lorsque selon les dispositions de l'alinéa a ci-dessus, une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles énoncées ci-dessous : (aa) cette personne est réputée résidente de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent. Lorsqu'elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ;

Considérant que si Mme X soutient qu'elle devait être considérée comme fiscalement résidente en Allemagne au titre de l'année 2000, il résulte de ce qui précède qu'elle disposait en France, où elle avait conservé un appartement, une ligne téléphonique, et où résidait sa fille, d'un foyer d'habitation permanent au sens de la convention ; qu'à supposer même qu'elle ait également disposé d'un foyer d'habitation permanent en Allemagne, elle devait, eu égard notamment au montant de ses revenus de source française, et à l'absence de toute justification sur le montant des revenus qu'elle aurait perçus en Allemagne, être regardée comme ayant conservé en France les liens personnels et économiques les plus étroits, et, par conséquent, le centre de ses intérêts vitaux ; que, par suite, Mme X avait bien en France sa résidence fiscale au sens de l'article 2 de la convention franco-allemande ;

Considérant, dès lors, que la requérante n'est donc pas fondée à soutenir que les articles 15 et 18 de la convention, qui stipulent que les droits d'auteur et les revenus divers ne peuvent être imposés que dans l'Etat de résidence du contribuable, feraient obstacle à son imposition en France ; que si elle soutient également, sans apporter aucune précision, que l'article 12 de la convention ferait obstacle à l'imposition en France de certains de ses revenus, les justificatifs qu'elle produit, qui sont constitués uniquement d'attestations de tiers, postérieures aux faits en cause, et non assorties d'autres éléments, ne permettent pas de démontrer qu'elle aurait exercé en Allemagne une profession libérale ou une activité assimilée au sens de cet article, et ce d'autant plus qu'elle a soutenu, par ailleurs, avoir exercé l'essentiel de son activité professionnelle en Hongrie au cours de l'année considérée ;

Considérant, ainsi, que Mme X n'est pas davantage fondée à soutenir que la convention franco-allemande du 21 juillet 1959 modifiée ferait obstacle à son imposition en France au titre de l'année 2000 ;


Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités : « 1. Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter un acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti (…) d'une majoration de 10 p. 100. (…) 3. la majoration visée au 1 est portée à : 40 p. 100 lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai ; 80 p. 100 lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une deuxième mise en demeure notifiée dans les mêmes formes que la première » ; que, dans sa rédaction issue de l'ordonnance susmentionnée du 7 décembre 2005 applicable à compter du 1er janvier 2006, la majoration de 40 p. 100 a été maintenue selon les mêmes conditions de mise en oeuvre mais celle de 80 p. 100 ne s'applique plus qu'en cas de découverte d'une activité occulte ;

Considérant que ces dispositions proportionnent la pénalité à la gravité des agissements du contribuable, en prévoyant des taux de majoration différents selon que le défaut de déclaration dans le délai est constaté sans mise en demeure de l'intéressé ou après une mise en demeure infructueuse ; que le juge de l'impôt, après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration, décide, dans chaque cas, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir le taux auquel l'administration s'est arrêtée, soit de lui substituer un taux inférieur parmi ceux prévus par le texte s'il l'estime légalement justifié, soit de ne laisser à la charge du contribuable que les intérêts de retard, s'il estime que ce dernier ne s'est pas abstenu de souscrire une déclaration ou de déposer un acte dans le délai légal ; que le juge dispose, ainsi, d'un pouvoir de pleine juridiction conforme aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales lesquelles n'impliquent pas, alors même que le législateur a retenu un taux unique pour les pénalités en cause, que le juge puisse moduler l'application de cette dernière en substituant un taux inférieur à celui prévu par les textes ; que, dès lors, la requérante ne peut utilement soutenir que les dispositions de l'article 1728 sont incompatibles avec les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que l'administration a adressé à Mme X le 13 août 2001 une première mise en demeure d'avoir à souscrire une déclaration de ses revenus de l'année 2000 ; que si elle a retourné le 6 décembre 2001, au delà du délai de 30 jours, un formulaire de déclaration non rempli portant la mention manuscrite « Sans objet-non résident », ce document, qui ne portait l'indication d'aucun élément sur l'assiette à retenir pour les impositions en cause, ne peut être regardé comme une déclaration de revenus ; que la circonstance que le conseil de la requérante ait fait le 12 septembre 2001 état de ce que sa cliente résidait en Allemagne n'était pas de nature à soustraire la requérante au respect de la mise en demeure qui lui avait été adressée ; que Mme X n'a pas souscrit de déclaration en France dans les trente jours de la seconde mise en demeure qui lui a été adressée le 4 juin 2002 ; que ces faits étaient de nature à entraîner l'application de la pénalité de 40 p. 100 précitée, et que la demande de Mme X tendant à ce que soit substitué à ce taux un taux inférieur parmi ceux mentionnés à l'article 1728 ne peut qu'être rejetée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme X doit être rejetée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme X, à concurrence de la somme de 28 579 euros, en ce qui concerne les pénalités au titre de l'année 2000.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

06VE01681 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE01681
Date de la décision : 22/01/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: M. Johan MORRI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : LANCIAN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-01-22;06ve01681 ?
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