Vu le recours, enregistré en télécopie le 5 août 2005 et en original le 9 août 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présenté par le MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE ; le ministre demande à la cour :
1° d'annuler le jugement n° 0205251, 0206276, 0300309 et 0303761 du 12 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé les arrêtés du préfet de la Seine-Saint-Denis en date des 21 août 2002, 15 octobre 2002, 21 novembre 2002 et le titre de perception émis le 27 novembre 2002 à l'encontre de la société GDF ;
2° de rejeter la demande de la société GDF devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
Il soutient que, en premier lieu, le jugement attaqué ayant été motivé par le fait que le préfet n'avait pas apporté toute la démonstration permettant d'imputer l'obligation de remise en état du site au dernier exploitant, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise aurait pu, pour une bonne administration de la justice, attendre les résultats du rapport du collège d'experts qu'il avait missionné pour recueillir tous les éléments permettant de déterminer l'origine de la pollution au niveau du piézomètre FT81 ; que, en deuxième lieu, il ressort des visas de l'arrêté du 21 août 2002 que les mesures imposées à la société GDF reposaient principalement sur le rapport du 22 janvier 2002 établi par le service technique des installations classées ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé à tort sur le contenu de la lettre de notification et sur le premier considérant de l'arrêté du 21 août 2002 pour considérer que ce dernier se basait sur les conclusions d'un rapport de GRS Valtech d'octobre 2001 non contradictoire et non communiqué à la société GDF ; que, en troisième lieu, il n'est pas contesté que la société GDF a été informée de l'existence et de la teneur du rapport GRS Valtech dès le 28 mars 2002, date à laquelle le préfet l'a avisée de son intention d'édicter un arrêté de prescriptions complémentaires ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles 34-1, 18, 10 et 11 du décret du 21 septembre 1977 que cette communication pouvait se limiter à l'indication de la nature des prescriptions proposées par l'inspecteur des installations classées sans nécessairement comporter les motifs ayant conduit à les retenir ni le rapport complet du 22 janvier 2002 ; que, en dernier lieu, tant les dispositions du décret du 21 septembre 1977 précité que celles de l'article L. 512-7 du code de l'environnement imposent à la société GDF, exploitant d'une installation classée, la remise en état de son site lors de la cessation d'activité ; que la remise en état doit être telle qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; qu'il résulte des textes et de la jurisprudence que préfet a le pouvoir d'enjoindre à un exploitant de réaliser des études sur la pollution des sols, de mettre en place un réseau de surveillance et d'élaborer des propositions de réhabilitation du site ; qu'en l'espèce, il ressort des conclusions du rapport établi par Me Biseau à la suite de l'expertise ordonnée le 14 janvier 2002 par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise qu'aucune investigation ni aucune opération de dépollution n'a été entreprise sur les parcelles constituant les îlots D et E ; qu'ainsi, le préfet était fondé à imposer à la société GDF, en sa qualité de dernier exploitant, des opérations de pompage des hydrocarbures flottants se trouvant au niveau du piézomètre FT81 dès lors que ce piézomètre est à proximité d'une parcelle sur laquelle la société a exercé une activité de stockage de fuel ; que le préfet peut, en application des dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'environnement, imposer des prescriptions complémentaires à la société GDF en raison de la persistance des nuisances créées par son activité passée ; qu'en outre, les opérations de pompage imposées ont une portée strictement limitée ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2008 :
- le rapport de M. Morri, premier conseiller ;
- les observations de Me Gutierrez, substituant Me Lefèvre, pour Gaz de France ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aucune disposition du code de justice administrative ou aucun principe n'imposait au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, s'il estimait l'affaire en état d'être jugée, de s'abstenir de statuer tant que l'expert qui avait été désigné par le juge des référés n'avait pas rendu son rapport ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité pour ce motif ;
Sur le bien-fondé des décisions contestées :
Considérant que Gaz de France (GDF) a exploité, de 1912 à 1965, une usine à gaz sur le site du Cornillon situé à Saint-Denis ; qu'au sud de ce terrain a été ultérieurement instaurée une zone d'aménagement concertée sur laquelle se trouvait l'îlot E, propriété de la société Sidec ; que, suite à la découverte d'une pollution de la nappe phréatique dans le secteur du Cornillon, la société Total solvants, dernière propriétaire de l'ancienne raffinerie des Hydrocarbures de Saint-Denis (HSD), située à environ 600 mètres au sud-est de la parcelle, a implanté sur l'îlot E le « piézomètre FT 81 », qui faisait partie d'un ensemble de forages destinés à comprendre l'origine de cette pollution et son lien éventuel avec la raffinerie ; que sont apparus à la surface de ce forage divers types d'hydrocarbures, dont le service technique d'inspection des installations classées a, dans un rapport du 22 janvier 2002, recommandé le pompage préalablement à toute construction sur la parcelle ;
Considérant que, par arrêté en date du 21 août 2002, le préfet de la Seine-Saint-Denis a imposé à la société GDF, en sa qualité de dernier exploitant des installations industrielles dans l'enceinte desquelles se trouvait l'îlot E, de procéder au pompage des hydrocarbures flottants découverts dans le piézomètre FT81 installé sur ledit terrain ; que, par arrêté préfectoral en date du 15 octobre 2002, Gaz de France a été mis en demeure de se conformer à l'ensemble des conditions de l'arrêté du 21 août 2002, dans un délai maximal de huit jours ; que, par arrêté en date du 21 novembre 2002, suivi d'un titre de perception d'un montant correspondant émis le 27 novembre 2002, le préfet de la Seine-Saint-Denis a engagé à l'encontre de la société Gaz de France la procédure de consignation prévue à l'article L. 514-1-1-1° du code de l'environnement, pour une somme de 17 940 euros, correspondant aux travaux à engager pour le pompage et le traitement desdits hydrocarbures flottants ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions de la loi du 19 juillet 1976 modifiée, reprises aux articles L. 511-1 et suivants du code de l'environnement, que l'obligation de remise en état du site est applicable aux installations de la nature de celles soumises à autorisation en application du titre 1er du livre V du code de l'environnement alors même qu'elles auraient cessé d'être exploitées avant l'entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 1976, dès lors que ces installations demeurent susceptibles de présenter les dangers ou inconvénients énumérés à l'article L. 511-1 de ce code, ou que leur état est susceptible de faire obstacle à leur usage futur dans les conditions déterminées à l'article L. 512-17 du même code, créé par la loi du 30 juillet 2003 ; que, dans cette hypothèse, l'obligation de remise en état du site imposée par l'article 34-I du décret du 21 septembre 1977 modifié pèse sur l'ancien exploitant ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit ; que lorsque l'exploitant ou son ayant droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l'exonère de ses obligations que si le cessionnaire s'est substitué à lui en qualité d'exploitant ;
Considérant, toutefois, qu'aucune de ces dispositions n'a pour objet ou pour effet d'imposer à l'exploitant, dans le cadre de la remise en état du site, de remédier à des dommages ou des nuisances dépourvus de tout lien avec l'exploitation ; qu'il existait, depuis de nombreuses années, des interrogations sur l'origine de la pollution de la nappe phréatique dans le secteur du Cornillon, et notamment des hydrocarbures apparus dans le piézomètre FT 81 ; que si l'administration disposait d'éléments contradictoires sur l'origine de cette pollution, elle ne démontrait, ni même ne soutenait, que cette pollution était en lien avec l'exploitation du site de surface par GDF ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal de la séance du conseil départemental d'hygiène du 2 mai 2002, que la décision de prescrire le pompage à GDF était fondée sur la seule qualité d'exploitante de cette société ;
Considérant par ailleurs que si l'administration a fait valoir, devant le tribunal et devant la cour, que GDF a exercé dans les années 1950 une activité de stockage de fuel sur le terrain, il ne résulte pas de l'instruction que cette activité ait été à l'origine de la pollution constatée ; que postérieurement à la décision contestée, les résultats de l'expertise contradictoire ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ont au contraire mis en évidence le fait que ces hydrocarbures étaient sans lien avec cette exploitation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet, en se fondant uniquement sur la qualité de dernier exploitant de GDF pour lui ordonner des mesures visant à faire cesser des nuisances sans lien direct avec l'exploitation du site, a commis une erreur de droit ; que par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur ce motif pour annuler les décisions contestées et prononcer la décharge des montants en litige ;
Considérant par ailleurs que le tribunal ayant annulé à bon droit les décisions litigieuses pour le motif précédemment énoncé, l'autre motif du jugement, tiré du caractère irrégulier de la procédure suivie, est surabondant ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à la société GDF la somme de 15 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE est rejetée.
Article 2 : Le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'AMENAGEMENT DURABLES versera à la société GDF une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 05VE01535