Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2006, présentée pour M. Chrisnel X, demeurant chez Mme Y ..., par Me Persidat ; M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0607714 du 12 septembre 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 août 2006 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière ainsi que la décision fixant le pays de la reconduite ;
2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie et familiale ;
Il soutient que l'auteur de l'arrêté attaqué n'a pas délégation pour signer les arrêtés de reconduite à la frontière ; que cet arrêté n'est pas motivé au sens de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; que c'est à tort que le premier juge a considéré qu'il avait des attaches familiales en Haïti alors que sa mère est décédée depuis 1999, qu'il a été abandonné à la naissance par son père, que sa femme vit maritalement avec une autre personne et qu'il n'a plus de nouvelle de son fils ; que l'arrêté, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, a été pris en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que son retour dans son pays d'origine risquerait d'avoir des conséquences sur sa vie ou son intégrité physique ; que la mesure d'éloignement, contraire aux articles 3 et 8 de la convention précitée, a été prise en commettant un détournement de procédure ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2007 :
- le rapport de M. Bonhomme, magistrat désigné ;
- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « l'autorité administrative compétente peut par arrêté motivée, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants (…) 3° si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait… ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité haïtienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 17 juin 2006, de la décision du 16 juin 2006 du préfet du Val-d'Oise lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 10 octobre 2005, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat, le préfet du Val-d'Oise a donné à M. Gérard ZY, directeur de cabinet, signataire de l'arrêté attaqué, délégation à l'effet de signer tout arrêté de reconduite prévu par les articles L. 511-1 à L. 511-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que toute décision fixant le pays de renvoi ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait, applicables à la situation de M. X, qui fondent la décision de reconduite à la frontière ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; et qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (…) / 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ;
Considérant que M. X fait valoir que sa mère est décédée en 1999 en Haïti et que ses attaches familiales sont désormais en France ; qu'il résulte toutefois des pièces du dossier que M. X compte tenu des liens dont il se prévaut ne justifie pas d'une vie familiale en France alors qu'il n'est pas dépourvu de toute attaches familiales en Haïti, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans et, où réside son fils; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M. X, l'arrêté attaqué qui n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la mesure sur la situation personnelle du requérant, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que cet arrêté aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;
Considérant que si le requérant invoque le climat de violence et d'insécurité qui règne en Haïti, ainsi que des menaces qui auraient été proférées à son encontre, il ne produit cependant aucun élément susceptible d'établir la réalité et la gravité des risques qu'il encourt à titre personnel en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'il n'a d'ailleurs pas déposé de demande d'admission au séjour au titre de l'asile ; que, dans ces conditions, l'arrêté attaqué en tant qu'il fixe le pays de destination de la reconduite n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention précitée ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquences, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;
D E C I D E
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
N°06VE02481
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