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27/03/2007 | FRANCE | N°05VE00376

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 27 mars 2007, 05VE00376


Vu la requête et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles les 4 mars et 8 juillet 2005, présentés pour Mme Marie X, demeurant ..., par la SCP d'avocats Gazagne, Yon, Lévy, avocats au barreau de Versailles ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302352 et n° 0302359 en date du 27 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation,

a/ d'une part, d'une décision implicite de rejet opposée à la demande de titre de séjour qu'elle a adressée au

préfet des Yvelines le 11 février 2003 ;

b/ d'autre part, de la décision du...

Vu la requête et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles les 4 mars et 8 juillet 2005, présentés pour Mme Marie X, demeurant ..., par la SCP d'avocats Gazagne, Yon, Lévy, avocats au barreau de Versailles ; Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302352 et n° 0302359 en date du 27 décembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation,

a/ d'une part, d'une décision implicite de rejet opposée à la demande de titre de séjour qu'elle a adressée au préfet des Yvelines le 11 février 2003 ;

b/ d'autre part, de la décision du 29 janvier 2003 par laquelle le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour et de la décision implicite de rejet opposée au recours gracieux qu'elle a présenté contre cette décision ;

2°) d'annuler la décision du 29 janvier 2003 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de délivrer à Mme X une carte de séjour temporaire dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, en application des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

4° ) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle est entrée en France le 15 septembre 1999 et a bénéficié d'une autorisation de séjour afin d'accompagner sa soeur malade ; que sa soeur est décédée le 16 avril 2002 ; que depuis son arrivée en France, elle s'occupe de sa nièce Ingrid, née en France le 14 janvier 1995 de père inconnu ; que le tuteur légal de l'enfant confirme qu'elle en assure la garde et l'éducation ; que tel était le souhait de sa soeur ; que le conseil de famille a décidé, devant le juge des tutelles, que le lieu de vie de l'enfant était fixé au domicile de la mère, situé à Andrésy ; que le refus de lui délivrer un titre de séjour a été pris en méconnaissance des articles 3-1, 19-1 et 29-1 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ; qu'il viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que sa situation ne lui permet pas de bénéficier d'une mesure de regroupement familial ; qu'elle s'occupait de l'éducation de sa nièce depuis cinq ans lorsqu'est intervenue la décision de refus attaquée ; que son mari, resté au Cameroun, estime lui-même qu'elle doit se préoccuper d'élever sa nièce en France ; que l'autorité administrative a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945, modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2003 :

- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, entrée en France le 15 septembre 1999 en qualité d'accompagnante de sa soeur malade, a obtenu un titre de séjour valable du 23 août 2001 au 22 août 2002 ; qu'elle a assuré à sa nièce Ingrid, née le 14 janvier 1994, son assistance et son soutien pendant la maladie de sa soeur et après le décès de celle-ci, survenu le 16 avril 2002 ; que, par décision du 17 juin 2003, le juge des tutelles du Tribunal d'instance de Poissy a fixé la composition du conseil de famille, dont les membres ont désigné en qualité de tuteur un neveu de la défunte qui, à son tour, a chargé Mme X de prendre en charge l'éducation et l'entretien de la jeune Ingrid en précisant que cette décision était prise dans l'intérêt de l'enfant mineur, née de père inconnu ; qu'il résulte des termes mêmes du procès-verbal du juge des tutelles susmentionné que, si la tante de la jeune Ingrid ne figure pas parmi les membres du conseil de famille, c'est uniquement en raison de sa situation administrative, l'intéressée étant alors dépourvue de titre de séjour ; que cette dernière constitue la parente la plus proche de l'enfant dont elle s'occupe sans interruption depuis son arrivée en France et avec laquelle elle réside au domicile familial à la demande de son tuteur ; que le refus de délivrer un titre de séjour à Mme X a pour effet soit de contraindre l'intéressée à quitter la France de sa propre initiative, comme l'y a invitée le préfet des Yvelines, soit de l'exposer à une mesure de reconduite à la frontière ; que si le préfet des Yvelines fait valoir que Mme X peut laisser sa nièce à la garde de son tuteur, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que ce dernier ne prend effectivement en charge ni l'éducation ni les soins dont a besoin cette enfant, âgée de neuf ans à la date de la décision attaquée ; que la séparation d'avec sa tante, qui prend soin d'elle de façon permanente et lui manifeste de l'affection, aurait pour l'enfant un effet défavorable ; qu'il est donc de l'intérêt supérieur de la jeune Ingrid de ne pas l'éloigner de la cellule familiale qu'elle constitue avec sa tante depuis la maladie puis le décès de sa mère ; que, par suite, le refus de délivrer un titre de séjour à Mme X est, dans les circonstances de l'espèce, contraire aux stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante est fondée, d'une part, à soutenir que c'est tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation des décisions litigieuses et, d'autre part, à demander l'annulation de la décision du préfet des Yvelines en date du 29 janvier 2003 rejetant sa demande de titre de séjour, ensemble la décision implicite du même préfet rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;

Considérant que le présent arrêt implique que le préfet des Yvelines délivre à Mme X, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme X et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 27 décembre 2004 est annulé.

Article 2 : La décision du préfet des Yvelines en date du 29 janvier 2003 rejetant la demande de titre de séjour de Mme X, ensemble la décision implicite rejetant le recours gracieux dirigés contre cette décision sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de délivrer à Mme Marie X, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale ».

Article 4 : L'Etat versera à Mme Marie X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N° 05VE00376 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 05VE00376
Date de la décision : 27/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GIPOULON
Rapporteur ?: Mme Françoise BARNABA
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : LEVY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-03-27;05ve00376 ?
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