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09/03/2006 | FRANCE | N°05VE01509

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 09 mars 2006, 05VE01509


Vu la requête, enregistrée le 9 août 2005, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505907 du 12 juillet 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 8 juillet 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Solofo Niaina ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Le préfet soutient que le magistrat délégué aurait dû procéder à la substituti

on de base légale demandée ; que l'arrêté annulé ne méconnaît pas les stipulations de l'artic...

Vu la requête, enregistrée le 9 août 2005, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505907 du 12 juillet 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 8 juillet 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Solofo Niaina ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Le préfet soutient que le magistrat délégué aurait dû procéder à la substitution de base légale demandée ; que l'arrêté annulé ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où, au jour de l'arrêté, l'intéressé n'était présent en France que depuis une période inférieure à cinq ans et qu'il ne justifie pas ne plus avoir d'attaches dans son pays d'origine ; que son épouse se trouve également en situation irrégulière et que son fils pourrait être scolarisé à Madagascar ; que rien ne s'oppose dès lors à ce que sa vie familiale soit reconstituée dans son pays d'origine ; qu'il ne démontre pas non plus que les membres de sa famille résident effectivement de manière régulière sur le territoire français ni n'établit sa filiation au regard de ceux-ci ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 février 2006 :

- le rapport de M. Brumeaux , magistrat délégué ;

- les observations de Me Rochefort, avocat ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (…) ; 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire et s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois suivant l'expiration de ce titre ; (…).» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité malgache, est entré régulièrement en France le 3 janvier 2001, muni d'un passeport revêtu d'un visa comportant la mention « étudiant » ; qu'il s'est ensuite vu délivrer une carte de séjour valable du 22 janvier 2001 au 21 janvier 2002 ; que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE s'est fondé sur un texte qui ne lui était pas légalement applicable en décidant sa reconduite sur le fondement du 1° de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison d'une entrée prétendument irrégulière ;

Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait du être prononcée ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. , qui n'avait pas demandé le renouvellement de son titre de séjour, se maintenait depuis plus d'un mois sur le territoire français après l'expiration de son titre de séjour ; que, par suite, la circonstance que l'autorité administrative compétente ait pris son arrêté du 8 juillet 2005 sur le fondement non du 4° de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile mais du 1° de l'article L.511-1 du même code n'est pas de nature à entacher d'illégalité cet arrêté ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur une erreur de fait pour en prononcer l'annulation ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. devant le Tribunal administratif de Versailles et devant la cour ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré en France début 2001 à l'âge de 33 ans dans le but d'y suivre un cycle universitaire ; que son épouse, si elle est en situation irrégulière sur le territoire français, a entamé des démarches en février 2004 pour se voir reconnaître la nationalité française par filiation ; que la mère de l'intéressé et son frère résident régulièrement en France et sa soeur est française ; que son fils est scolarisé depuis maintenant quatre ans en France ; que, dans ces conditions, la mesure de reconduite prise à l'encontre de M. X porte au droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été décidée cette mesure et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 8 juillet 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros demandée par M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : La requête du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N°05VE01509

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE01509
Date de la décision : 09/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : ROCHEFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-03-09;05ve01509 ?
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