La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/02/2006 | FRANCE | N°05VE01147

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 09 février 2006, 05VE01147


Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2005, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503802 du 3 mai 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 26 avril 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Bertrand X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que c'est à tort que le magistrat délégué a, par le jugement attaqué retenu q

ue l'arrêté prononçant la reconduite à la frontière de M. X portait une atteinte dispropor...

Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2005, présentée par le PREFET DU VAL-D'OISE ; le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503802 du 3 mai 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 26 avril 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Bertrand X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que c'est à tort que le magistrat délégué a, par le jugement attaqué retenu que l'arrêté prononçant la reconduite à la frontière de M. X portait une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à mener une vie familiale normale et méconnaissait ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que ses deux enfants et leur mère vivent en Suisse ; qu'il n'établit pas la réalité et l'ancienneté d'une vie maritale en France ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2006 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner , commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( . . . ) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que M. X, ressortissant camerounais, reconnaît qu'il est entré en France en septembre 2002 avec un passeport revêtu d'un visa touristique qui expirait le 9 octobre 2002 ; que d'ailleurs l'ordonnance d'assignation à résidence du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance en date du 27 avril 2005 a, après avoir constaté que M. X était en possession d'un passeport en cours de validité, ordonné la remise de ce passeport aux services de police ; qu'ainsi, il se trouvait dans la situation d'un étranger qui se maintenait sur le territoire français à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; que, dès lors, la décision de reconduire l'intéressé à la frontière ne pouvait être prise sur le fondement des dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers dès lors que M. X n'a pas accompli de démarches pour obtenir la délivrance d'un titre de séjour ;

Considérant, toutefois, que lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point ;

Considérant qu'en l'espèce, l'arrêté prononçant la reconduite à la frontière de M. X, motivé par l'irrégularité du séjour de l'intéressé, trouve son fondement légal dans les dispositions du 2° de l'article L. 511-1 qui peuvent être substituées à celles du 3° du même article dès lors, en premier lieu, que, s'étant maintenu sur le territoire français au delà de la durée de validité de son visa sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré et se trouvait dans la situation où, en application du 2° de l'article L. 511-1, le préfet pouvait décider qu'il serait reconduit à la frontière, en deuxième lieu, que cette substitution de base légale n'a pas pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté de reconduite à la frontière du PREFET DU VAL-D'OISE au motif qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que les deux enfants de M. X, nés en 1999 et 2002 résident en Suisse avec leur mère ; que si M. X soutient qu'il vit maritalement avec une personne résidant en France avec laquelle il va avoir un enfant, il ne l'établit pas ; qu'ainsi, même si son père et certains membres de sa famille sont de nationalité française et résident en France, l'arrêté de reconduite à la frontière ne saurait, dans ces conditions, porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; que c'est donc à tort que le premier juge s'est fondé sur les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté en date du 26 avril 2005 par lequel le PREFET DU VAL-D'OISE a décidé de reconduire M. X à la frontière ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au juge d'appel, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant, en premier lieu, que si M. X soutenait en première instance que l'arrêté litigieux aurait été incompétemment signé, il ressort des pièces versées au dossier que M.Gavory, directeur du cabinet du PREFET DU VAL-D'OISE, avait reçu délégation en vertu de l'arrêté n° 04-128 en date du 3 septembre 2004, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le Val-d'Oise du 7 septembre 2004, pour signer tout arrêté de reconduite à la frontière et toute décision fixant le pays de renvoi ; que le moyen doit par suite être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté attaqué, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est dès lors suffisamment motivé ;

Considérant, enfin, que si M. X soutient que l'arrêté litigieux méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux termes duquel : « sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celle qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus », il ne ressort pas toutefois des pièces du dossier, alors que M. X possède des attaches familiales au Cameroun, que le PREFET DU VAL-D'OISE aurait méconnu les dispositions susvisées ni qu'il aurait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 26 avril 2005 prononçant la reconduite à la frontière de M. X ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du 3 mai 2005 du magistrat délégué parle président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande de M. X présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

N°05VE01147

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE01147
Date de la décision : 09/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-02-09;05ve01147 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award