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09/02/2006 | FRANCE | N°05VE00886

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 09 février 2006, 05VE00886


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 19 mai 2005, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0409567 en date du 26 avril 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 1er décembre 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. X... en tant qu'il fixe la Côte d'Ivoire comme pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le Tribunal ad

ministratif de Cergy-Pontoise ;

Le préfet soutient que, contrairement à ce qu'a ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 19 mai 2005, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0409567 en date du 26 avril 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 1er décembre 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. X... en tant qu'il fixe la Côte d'Ivoire comme pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Le préfet soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le magistrat délégué, les éléments produits par M. devant le tribunal, un certificat de décès et deux correspondances, ne pouvaient justifier l'annulation de la décision de reconduire l'intéressé en Côte d'Ivoire ; que la situation de M. , notamment son engagement politique, a été examinée successivement par l'office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la commission des recours des réfugiés qui a estimé, le 11 juin 2004, que les déclarations du demandeur d'asile étaient imprécises et peu crédibles ; que les éléments produits sont peu probants, le lien de parenté avec la personne décédée n'étant pas établi, une des lettres ayant été examinée par la commission des recours et la seconde lettre n'ayant qu'une valeur de témoignage ; que l'épouse et les deux enfants de l'intéressé demeurent en Côte d'Ivoire où réside également un de ses frères ; qu'il n'apparaît pas qu'il encourrait des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2006 :

- le rapport de M. Evrard, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Sur l'appel incident formé par M. :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 dans sa rédaction alors en vigueur Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant que M. s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 1er octobre 2004, de la décision du préfet lui refusant la délivrance d'une carte de résident en qualité de réfugié et l'invitant à quitter le territoire national dans un délai d'un mois ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière lorsque le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a pris à son encontre, le 1er décembre 2004, un arrêté de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que si le requérant fait valoir qu'il a établi des liens personnels et affectifs intenses en France où il est intégré et qu'il n'a plus d'attaches dans son pays, il ressort des pièces du dossier que son épouse, ses deux jeunes enfants, ses parents et ses frères demeurent en Côte d'Ivoire ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de son séjour en France, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le droit au respect de sa vie privée et familiale a été méconnu et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Sur l'appel du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée : « ... Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » ;

Considérant que pour annuler l'arrêté du 1er décembre 2004 en tant qu'il ordonne la reconduite à la frontière de M. à destination de la Côte d'Ivoire, pays dont l'intéressé possède la nationalité, le tribunal administratif a estimé que, postérieurement à la décision de la commission des recours du 11 juin 2004 confirmant le refus de reconnaissance de la qualité de réfugié, le requérant avait fait état d'éléments nouveaux de nature à faire obstacle à la reconduite de l'intéressé vers son pays d'origine ;

Considérant toutefois que M. , qui s'est abstenu de demander le réexamen de sa demande d'asile, s'est borné à produire devant le magistrat délégué, d'une part, la copie d'un acte constatant le décès, dans un hôpital ivoirien, le 15 août 2004, d'une personne dont ni les circonstances du décès, ni les liens de parenté avec le requérant ne sont établis, d'autre part, une lettre rédigée le 27 août 2004 par un de ses frères qui évoque tant les élections municipales de 2005 que les événements de novembre 2004 et fait état de menaces pesant sur des membres de la famille , ainsi que la copie d'une correspondance, déjà produite devant la commission des recours des réfugiés, affirmant l'existence de risques pour sa liberté ;

Considérant que les documents produits devant le tribunal par le requérant dont les déclarations écrites et orales devant l'office français de protection des réfugiés et apatrides puis la commission des recours des réfugiés avaient, d'ailleurs, été estimées non concordantes, imprécises et peu crédibles, n'établissent ni la réalité des menaces sur sa vie ou sur sa liberté, ni les risques d'exposition à des traitements inhumains ou dégradants en cas de reconduite dans son pays d'origine ; que, par suite, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que son arrêté du 1er décembre 2004 ne méconnaît pas les dispositions susmentionnées de l'article 27 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 et, par suite, à demander l'annulation du jugement attaqué en tant que, par l'article 1er de ce jugement, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'article 2 de l'arrêté du 1er décembre 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. à destination de la Côte d'Ivoire ;

Considérant que l'exécution du présent arrêt n'implique pas que la Cour enjoigne au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS de délivrer un titre de séjour à M. ; que, par suite, les conclusions présentées à cette fin doivent être rejetées ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 31 mars 2005 est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du 1er décembre 2004 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a fixé la Côte d'Ivoire comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. .

Article 2 : Les conclusions présentées par M. devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise relatives à la décision distincte du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS qui a fixé la Côte d'Ivoire comme pays de destination de sa reconduite à la frontière sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. devant la Cour tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er décembre 2004 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a décidé sa reconduite à la frontière sont rejetées.

N° 05VE00886

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE00886
Date de la décision : 09/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Paul EVRARD
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : ABECCASSIS CONTINI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-02-09;05ve00886 ?
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