Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2005 présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0500688 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en tant que ce jugement a annulé son arrêté du 12 janvier 2005 en tant qu'il a fixé le pays à destination duquel X... Shirley X devait être reconduite à la frontière ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par X... Shirley X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise relative à la décision distincte fixant le pays à destination duquel elle devait être reconduite ;
Il soutient que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a relevé l'existence de risques encourus par X... X en cas de retour dans son pays, dans la mesure où tant l'office français de protection des réfugiés et apatrides que la commission de recours des réfugiés lui ont refusé la qualité de réfugiée ; que l'intéressée ne produit pas d'éléments suffisamment probants établissant la réalité de ces risques ; que l'arrêté de reconduite à la frontière partiellement annulé était suffisamment motivé ; que l'arrêté ne méconnaît ni l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 décembre 2005 :
- le rapport de Mme Belle, magistrat délégué ;
- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;
Sur l'appel principal du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de deux procès verbaux dressés par des juges de paix d'Haïti, que le frère et le père de X... X ont été assassinés, respectivement en 2001 et en 2003 ; que l'engagement politique de X... X et de son père, peu important d'ailleurs qu'ils aient appartenu à deux organisations différentes, est établi ; qu'arrivée régulièrement en France suite au décès de son père, l'intéressée a aussitôt demandé l'asile ; que la circonstance qu'elle ait pu faire dresser ces procès-verbaux par des juges de paix n'est nullement de nature à établir, comme l'allègue le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, que X... X soit susceptible de bénéficier de la protection effective des autorités haïtiennes ; que, nonobstant les rejets opposés par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et la commission de recours des réfugiés à sa demande, et le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ne produisant aucun élément sérieux de preuve susceptible d'établir l'erreur qu'aurait commise le premier juge dans son appréciation, X... X doit être regardée comme établissant encourir, en cas de retour en Haïti des risques personnels graves ; que, dès lors, c'est à bon droit que le premier juge s'est fondé sur l'atteinte portée à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS, en tant qu'il fixe Haïti comme pays de destination, pour en prononcer l'annulation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué en date du 6 juin 2005 le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 12 janvier 2005 décidant la reconduite à la frontière de X... X en tant qu'il fixait Haïti comme pays de destination ;
Sur l'appel incident de X... Shirley X ;
Considérant, en premier lieu, que les moyens invoqués par X... Shirley X et tirés des risques qu'elle encourt en retournant en Haïti sont inopérants à l'appui de conclusions dirigées contre la décision ordonnant sa reconduite à la frontière, qui trouve son fondement dans la décision du 28 septembre 2004 du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS lui refusant la délivrance d'un titre de séjour au motif qu'elle n'avait pas obtenu la qualité de réfugiée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que X... Shirley X n'est pas fondée à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS du 12 janvier 2005 décidant sa reconduite à la frontière ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'annulation dudit arrêté, formées par la voie de l'appel incident ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « (…) Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. (…) » ;
Considérant que le sens de la présente décision, qui confirme l'annulation de la décision distincte portant pays de destination mais qui rejette les conclusions de X... X formées par la voie de l'appel incident, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS de délivrer à X... X une autorisation provisoire de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'État à verser X... X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er : La requête du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est rejetée.
Article 2 : L'État versera à X... X la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 3 : L'appel incident de X... X est rejeté ensemble le surplus de sa demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
N°05VE01261
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