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13/12/2005 | FRANCE | N°04VE03289

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4eme chambre, 13 décembre 2005, 04VE03289


Vu le recours, enregistré le 20 septembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0400038 en date du 6 juillet 2004 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il prononce la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sut le revenu assignées à M. et Mme X au titre de l'année 1996,

2°) de remettre à la charge de M. et Mme X ces impositions supplémentaires ;

Il soutient que le tribunal adminis

tratif a commis une erreur de droit en estimant que la procédure d'imposition d...

Vu le recours, enregistré le 20 septembre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0400038 en date du 6 juillet 2004 du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il prononce la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sut le revenu assignées à M. et Mme X au titre de l'année 1996,

2°) de remettre à la charge de M. et Mme X ces impositions supplémentaires ;

Il soutient que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en estimant que la procédure d'imposition de M. et Mme X était irrégulière à défaut de communication des pièces dont les contribuables avaient sollicité copie ; que l'information des contribuables a été complète et la garantie offerte par la jurisprudence a été respectée ; que le service n'avait à produire que les seuls documents ayant servi à fonder le redressement ; que la remise en cause de la déduction pour investissement prévue à l'article 238 bis HA du code général des impôts reposait sur deux fondements : le défaut de réalisation de l'investissement en 1996, compte tenu de la livraison du navire en 1997, et l'impossibilité de bénéficier du régime transitoire d'imputation des déficits institué par l'article 156 I 1° bis du même code ; que les pièces sollicitées n'ont pas servi à fonder le redressement relatif à la date de réalisation de l'investissement ; que, par suite, un refus a pu être opposé à la demande, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition ; qu'il appartiendra à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de rejeter les autres moyens soulevés par les contribuables en première instance ; que l'irrégularité de la procédure suivie à l'encontre de la copropriété est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie à l'encontre d'un copropriétaire ; que cette dernière procédure n'est affectée ni par l'absence d'envoi des avis de vérification adressés à la copropriété, ni par l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs, incompétente pour statuer sur une question de droit ;

…………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novembre 2005 :

- le rapport de M. Evrard, président-assesseur ;

- les observations de Me de Foucher pour M. et Mme X ;

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Vu la note en délibéré présentée le 30 novembre 2005 pour M. et Mme X ;

Considérant que par un jugement du 6 juillet 2004, le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme X au titre des années 1996 et 1997, au motif que l'administration avait irrégulièrement refusé de communiquer aux contribuables, qui en avaient fait la demande, des pièces et documents recueillis par le vérificateur auprès de tiers, par l'exercice du droit de communication, et qui ont été utilisés pour fonder les redressements litigieux ; que par le présent recours, le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE relève appel de ce jugement en tant seulement qu'il prononce la décharge des suppléments d'impôts au titre de l'année 1996 ;

Considérant que M. et Mme X ont acquis des parts de la copropriété de navire Greenbird, ayant pour objet l'acquisition, le financement et l'exploitation dans les départements d'outre-mer d'un navire d'une valeur de 28.000.000 F ; qu'après une vérification de comptabilité de la copropriété, l'administration a exercé auprès du constructeur du navire, la société OCEA, et auprès du promoteur de l'opération d'investissement, la société Réalisation industrielles et économiques, son droit de communication, puis a opéré un contrôle sur pièces du dossier de chacun des quirataires, notamment de M. et Mme X ; qu'à l'issue de ce contrôle elle a remis en cause, d'une part, la déduction fiscale pratiquée en 1996 par chaque contribuable au prorata de ses parts, sur le fondement de l'article 238 bis HA du code général des impôts, et, d'autre part, sur le fondement de l'article 156-I-1° du code général des impôts, la déduction des déficits industriels et commerciaux pratiquée, en 1997, par chaque contribuable sur son revenu global ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une notification de redressements a été adressée à M. et Mme X le 15 décembre 1999, à laquelle était jointe une copie de la notification de redressements adressée à la copropriété de navire, ainsi qu'une copie de la réponse de l'administration aux observations de la copropriété, accompagnée de seize documents annexés ; qu'après avoir présenté des observations et reçu la réponse du vérificateur à leurs observations, les contribuables ont demandé la communication de la copie des demandes formulées par l'administration auprès de tiers et de plusieurs documents énumérés et mentionnés dans la notification de redressements adressée à la copropriété ou la réponse aux observations de cette dernière ; que l'administration n'ayant pas donné suite à cette demande, le tribunal administratif de Versailles, saisi par les contribuables, a estimé que le refus de communication aux contribuables de la copie de la facture pro forma n° 95 00 30 du 9 novembre 1995, de la copie des écritures du compte ouvert au nom de la société R.E.I., promoteur, dans les écritures de la société OCEA, constructeur du navire, au 31 décembre 1996 et de la copie des pièces comptables recueillies auprès de la société OCEA entachait d'irrégularité la procédure d'imposition et justifiait que les contribuables soient déchargés des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils avaient été assujettis au titre des années 1996 et 1997 ;

Considérant que l'administration est tenue de communiquer au contribuable qui le demande avant la mise en recouvrement des impositions les documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux redressements en litige ;

Considérant, d'une part, que les pièces dont la communication a été refusée ont été utilisées par la vérificatrice pour apprécier le droit à déduction des déficits industriels et commerciaux, ouvert par les dispositions dérogatoires de l'article 156 I. 1° bis du code général des impôts et ont, ainsi, servi de fondement aux seuls redressements notifiés au titre de l'année 1997 ;

Considérant, d'autre part, que le redressement notifié au titre de l'année 1996 avait pour seule origine la remise en cause de la déduction pratiquée par les contribuables sur le fondement des dispositions de l'article 238 bis HA du même code, au titre de l'année 1996, alors que le montant de l'investissement productif n'avait été effectivement réalisé qu'en 1997, ainsi qu'il résultait du procès-verbal de recette attestant que le navire Greenbird devait être considéré comme livré à la date du 17 juin 1997 ; que ce procès-verbal figurait en pièce annexe n° XI à la notification de redressements adressée à chaque quirataire ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE soutient à bon droit que les pièces dont la communication a été refusée n'ont pas servi de fondement au redressement relatif à l'année 1996 et qu'en conséquence, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé la décharge des suppléments d'impôts sur le revenu assignés aux contribuables au titre de 1996 ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les requérants devant le tribunal administratif de Versailles ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la vérification de comptabilité de la copropriété :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le redressement relatif à l'année 1996, seul objet du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, a pour origine des informations recueillies par l'administration, auprès de tiers, dans l'exercice de son droit de communication et non pas dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la copropriété du navire ; que, dans cette circonstance, les vices susceptibles d'entacher la régularité de la procédure d'imposition de cette copropriété sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition de chacun des quirataires ;

En ce qui concerne le contrôle fiscal des quirataires :

Considérant, en premier lieu, que les impositions supplémentaires en litige ont été établies à la suite d'un contrôle sur pièces des déclarations des contribuables, dans le cadre de la procédure contradictoire de redressement prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; que, contrairement à ce qui est soutenu, aucune disposition de ce livre n'impose à l'administration de procéder à une vérification de la comptabilité des contribuables ;

Considérant, en second lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les pièces dont la communication a été refusée n'ont pas servi de fondement au redressement notifié au titre de l'année 1996 ; que ce refus est, par suite, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dont les quirataires ont fait l'objet ;

Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales : « La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1° Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon le mode réel d'imposition (…) » ;

Considérant que le désaccord entre les quirataires et l'administration fiscale portait, en ce qui concerne l'année 1996, sur la question de savoir, selon que la date de livraison effective du navire Greenbird par le constructeur était intervenue en 1996 ou en 1997, si les conditions de déduction du coût d'acquisition de ce navire étaient remplies ; qu'un tel litige, même s'il nécessite l'examen des circonstances de fait, porte en réalité sur la qualification juridique à donner aux opérations réalisées au regard des dispositions précitées de l'article 238 bis HA du code général des impôts ; qu'il s'agit d'une question de droit qui échappait à la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, le refus de l'administration de saisir cette commission du désaccord opposant les quirataires et le service ne constitue pas une irrégularité de nature à entacher la procédure d'imposition de ces contribuables ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 238 bis HA du code général des impôts : «Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés ou assujetties à un régime réel d'imposition peuvent déduire de leur résultat imposable une somme égale au montant total des investissements productifs réalisés dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion à l'occasion de la création ou de l'extension d'exploitations appartenant au secteur d'activité de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports et de l'artisanat. La déduction est opérée sur le résultat de l'exercice au cours duquel l'investissement a été réalisé, le déficit éventuel de l'exercice étant reporté dans les conditions prévues aux articles 156 et 209 (…) » ;

Considérant que le navire de pêche Greenbird a été livré le 17 juin 1997 par le chantier naval constructeur du navire, la société OCEA, au promoteur de l'opération d'investissement, la société Réalisation industrielles et économiques, ainsi qu'il résulte du procès-verbal de recette signé par les représentants de ces sociétés ; que, par suite l'investissement productif ouvrant droit à la déduction prévue par les dispositions susmentionnées ne peut être regardé comme ayant été réalisé en 1996 et ne pouvait être porté en déduction du revenu global des contribuables au titre de cette année 1996 ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration a rapporté la quote-part des contribuables dans cet investissement dans les revenus des contribuables soumis à l'impôt au titre de l'année 1996 ;

Sur les conclusions subsidiaires des contribuables :

Considérant qu'il n'appartient pas à la Cour, saisie par l'appel du ministre d'un litige portant sur des suppléments d'impôt sur le revenu dus par les contribuables au titre de l'année 1996, de se prononcer sur un droit à déduction du revenu global de ces contribuables au titre de l'année 1997 ; que, par suite les conclusions subsidiaires présentées à cette fin sont irrecevables et doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'aucun des moyens présentés par les contribuables tendant à la décharge des impositions supplémentaires litigieuses relatives à l'année 1996 n'est fondé ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à demander, d'une part, l'annulation de l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 6 juillet 2004 en tant qu'il a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme X au titre de l'année 1996 et, d'autre part, la remise à la charge de ces contribuables des impositions supplémentaires en litige ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. et Mme X la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 6 juillet 2004 est annulé en tant qu'il prononce la décharge des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu assignées à M. et Mme X au titre de l'année 1996.

Article 2 : L'impôt sur le revenu auquel M. et Mme X ont été assujettis au titre de l'année 1996 est remis intégralement à leur charge.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme X sont rejetées.

N° 04VE03289 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 04VE03289
Date de la décision : 13/12/2005
Sens de l'arrêt : Maintien de l'imposition
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GIPOULON
Rapporteur ?: M. Jean-Paul EVRARD
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : DE FOUCHER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-12-13;04ve03289 ?
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