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07/06/2005 | FRANCE | N°03VE02415

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 07 juin 2005, 03VE02415


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la société BERIM ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administ

rative d'appel de Paris le 13 juin 2003, présentée pour la société B...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour la société BERIM ;

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris le 13 juin 2003, présentée pour la société BERIM, dont le siège social est 149 avenue Jean Lolive à Pantin (93500), par la Selarl Caron, Faugeras, Fournier ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9604856 du 14 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamnée, d'une part, solidairement avec M. X et la société GES, à verser à la commune de Trappes une somme de 257 284 €, d'autre part, à garantir, avec la société GES, M. X à hauteur de 92,5 % des condamnations prononcées à son encontre et, enfin, à supporter la charge des frais d'expertise à hauteur de 7,5 % ;

2°) de rejeter la demande de la commune de Trappes en tant qu'elle est dirigée envers elle ;

3°) subsidiairement, de limiter sa responsabilité à hauteur de 7,5 % des conséquences dommageables des désordres et de condamner la société GES et M. X à la garantir du surplus ;

4°) de l'exempter de la charge des frais d'expertise ;

5°) de condamner la commune de Trappes à lui verser une somme de 3 000 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la demande de la commune de Trappes, non motivée et non chiffrée, était irrecevable ; que les désordres ayant affecté les tribunes télescopiques de la halle culturelle dite La Merise ne relevaient pas de la garantie décennale mais de la garantie biennale, instituée par l'article 1792-3 du code civil, dont le délai était expiré à la date d'enregistrement de la demande ; que sa responsabilité ne pouvait être retenue dès lors qu'elle n'avait pas participé au choix du prototype ; qu'à supposer que sa responsabilité puisse être retenue, elle ne saurait excéder 7,5 % des conséquences dommageables des désordres, ainsi que l'indiquait l'expert, et que, d'ailleurs, les premiers juges en ont décidé pour la charge des frais d'expertise ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2005 :

- le rapport de M. Dacre-Wright, président ;

- les observations de Me Dumoulin pour la société BERIM, Me Brizon pour la société GES et Me Beaupoil pour la commune de Trappes ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de l'appel de la société BERIM :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement n° 9604856 du 14 mars 2003 du tribunal administratif de Versailles a été notifié à la société BERIM le 14 avril 2003 ; que la requête de cette société, enregistrée au greffe de la Cour le 13 juin 2003 dans le délai d'appel de deux mois, n'est pas tardive ;

Sur la recevabilité de la demande introductive d'instance de la commune de Trappes :

Considérant, d'une part, que si la société BERIM soutient que la demande introductive d'instance de la commune de Trappes n'indiquait pas qu'elle entendait fonder son action sur les principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges sur ce point ;

Considérant, d'autre part, que la commune de Trappes, dans sa demande introductive d'instance, concluait à la condamnation des constructeurs à lui verser 1 F à parfaire à dire d'expert ; qu'après le dépôt du rapport de l'expert, la commune a précisé, dans un mémoire enregistré le 26 septembre 2002, le montant de l'indemnité demandée par elle aux constructeurs ; que, par suite, la société BERIM n'est pas fondée à prétendre que, faute d'avoir été chiffrées, les conclusions présentées au nom de la commune de Trappes devant le tribunal administratif auraient été irrecevables ;

Considérant, enfin, qu'il résulte des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil que la responsabilité décennale des constructeurs peut être recherchée par le maître d'ouvrage pour des dommages survenus sur des éléments dissociables de l'ouvrage s'ils rendent celui-ci impropre à sa destination ; que si les gradins télescopiques destinés à permettre l'utilisation de la salle polyvalente dite Halle culturelle de La Merise en salle de spectacle constituent des éléments dissociables de ce bâtiment, objet du marché de travaux publics passé par le Syndicat d'agglomération nouvelle de Saint-Quentin-en Yvelines puis transféré à la commune de Trappes, il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal administratif de Versailles, qu'ils sont affectés de désordres tels que leur utilisation, en dépit des modifications apportées, est très difficile, que certaines parties sont dangereuses pour le public et que leur remplacement par un équipement mieux conçu est ainsi nécessaire ; qu'il s'en déduit que, ces gradins télescopiques ne pouvant être déployés normalement et sans risque pour les usagers, la salle polyvalente dont il s'agit ne peut servir de salle de spectacle conformément à sa destination ; qu'en conséquence, les désordres les affectant relèvent de la garantie décennale ; que, dès lors, la société BERIM, la société Albingia, la société Bureau Veritas, la société GES et le cabinet d'architecture X Architecture ne peuvent utilement soutenir que les désordres en cause relèvent de la seule garantie biennale de bon fonctionnement et que, le délai de cette garantie étant expiré à la date de l'enregistrement de la demande introductive d'instance de la commune de Trappes, cette demande était tardive et donc irrecevable ;

Sur l'appel principal :

Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, les désordres affectant les gradins télescopiques de la Halle culturelle de La Merise relèvent de la responsabilité décennale des constructeurs ; que, par suite, la société BERIM n'est pas fondée à soutenir que seule la garantie biennale de bon fonctionnement aurait pu trouver à s'appliquer ;

Considérant que si la société BERIM soutient qu'elle n'avait pas en charge le lot scénographie mais seulement les lots techniques de structure, de chauffage et climatisation, de plomberie, d'électricité et de courants faibles, cette affirmation, qui supposerait une répartition des lots entre les maîtres d'oeuvre, à savoir le cabinet d'architecture X Architecture et elle-même, n'est pas corroborée par les pièces du dossier, notamment par l'acte d'engagement du 9 octobre 1990 et ses avenants n° 1 et n° 2 ;

Considérant que seules les personnes ayant passé un contrat de louage d'ouvrage avec le maître d'ouvrage peuvent être condamnées envers celui-ci à réparer les conséquences dommageables d'un vice de cet ouvrage imputable à sa conception ou à son exécution ; qu'il suit de là que la société BERIM ne peut se prévaloir des erreurs qui auraient été commises par M. Y, sous-traitant des maîtres d'oeuvre ainsi qu'il résulte de l'acte d'engagement précité, pour s'exonérer de sa responsabilité ;

Considérant que si la société BERIM soutient que sa responsabilité ne peut être engagée à raison des désordres en question, dès lors qu'elle n'a pas participé au choix du prototype de gradins télescopiques, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges sur ce point et tirés de sa qualité de maître d'oeuvre ;

Considérant, toutefois, que, par l'article 2 du jugement attaqué, les premiers juges ont condamné la société BERIM et la société GES à garantir le cabinet d'architecture X Architecture à hauteur de 92,5% des condamnations prononcées à son encontre, retenant ainsi et additionnant les pourcentages de responsabilité dans la survenance des dommages de 85% pour la société GES et de 7,5% pour la société BERIM, préconisés par l'expert et adoptés à bon droit par eux pour le partage de la charge des frais d'expertise, mais sans indiquer explicitement l'étendue de la garantie due par chacune de ces deux sociétés ; qu'il y a lieu, pour supprimer l'ambiguïté qui en résulte sur l'étendue de ces garanties, de les fixer aux pourcentages précités et de réformer en conséquence l'article 2 du jugement attaqué ;

Considérant que les conclusions de la société BERIM tendant à ce que la société GES, qui a réalisé l'installation en cause, et le cabinet d'architecture X Architecture soient condamnés à la garantir des condamnations prononcées à son encontre sont présentées pour la première fois en appel et sont, de ce fait, irrecevables ;

Considérant, enfin, que les conclusions de la société BERIM tendant à ce que la Cour l'exempte de la charge des frais d'expertise ne sont assorties d'aucun moyen de nature à démontrer l'erreur commise par les premiers juges sur ce point ; que, présentées ainsi, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société BERIM est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles n'a pas indiqué explicitement l'étendue de la garantie due respectivement par elle-même et par la société GES au cabinet d'architecture X Architecture ;

Sur les conclusions subsidiaires de la société Albingia :

Considérant que ces conclusions, dirigées contre la commune de Trappes et contre les autres constructeurs, sont fondées sur le contrat d'assurance dommages-ouvrage passé avec la commune ; qu'il n'appartient qu'au juge judiciaire de se prononcer sur de telles conclusions, qui doivent, dès lors, être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur les appels incidents du cabinet d'architecture X Architecture et de la société GES :

Considérant que si le cabinet d'architecture X Architecture et la société GES soutiennent que leur responsabilité ne peut être engagée dans la survenance des désordres ayant affecté les gradins téléscopiques et, subsidiairement, qu'ils doivent être garantis par la société BERIM de toutes condamnations prononcées à leur encontre, ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ; que leurs conclusions tendant à l'annulation du jugement attaqué et au rejet de la demande de la commune de Trappes en tant qu'elle est dirigée contre eux et, subsidiairement, à la réformation de l'article 2 du même jugement relatif à la garantie du cabinet d'architecture notamment par la société BERIM doivent, par suite, être rejetées ;

Sur les appels provoqués :

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions des appels provoqués formés par la société Bureau Veritas et le cabinet d'architecture X Architecture, dont la situation n'est pas aggravée par le présent arrêt, ne sont pas recevables et doivent, en conséquence, être rejetées ;

Considérant qu'il résulte également de ce qui précède que la réformation de l'article 2 du jugement attaqué a pour seul effet d'indiquer explicitement le pourcentage de responsabilité de la société GES dans la survenance des dommages tel qu'il résultait manifestement et à bon droit de ce jugement ; que la situation de la société GES n'étant ainsi pas aggravée par le présent arrêt, ses conclusions d'appel provoqué sont également irrecevables et doivent donc être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société BERIM, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à la commune de Trappes, à la société Albingia, à la société Bateg, à la société Bureau Veritas, à la société GES et au cabinet d'architecture X Architecture, les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de la société BERIM ;

DECIDE :

Article 1er : Le cabinet d'architecture X Architecture sera garanti des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 85% par la société GES et de 7,5% par la société BERIM.

Article 2 : L'article 2 du jugement n° 9604856 du 14 mars 2003 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société BERIM et les conclusions de la commune de Trappes, de la société Albingia, de la société Bateg, de la société Bureau Veritas et du cabinet d'architecture X Architecture sont rejetées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 03VE02415
Date de la décision : 07/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Gildas DACRE-WRIGHT
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-06-07;03ve02415 ?
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