Vu I) l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme Y... Y, demeurant ..., par Me X... ;
Vu la requête, enregistrée le 24 novembre 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, sous le n°03PA04362, présentée pour M. et Mme Y qui demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0104541-0301517 en date du 18 septembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté les demandes de M. Z tendant, d'une part, à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998 par avis de mise en recouvrement du 14 septembre 2000, d'autre part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1996, 1997 et 1998 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer les décharges demandées ;
3) de condamner l'Etat à leur payer la somme de 5 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que c'est à cause de nombreux vols qu'ils n'ont pas été en mesure de déposer leurs déclarations dans les délais ; que la procédure d'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux des années 1996 et 1997 est irrégulière ; que la notification de redressement du 20 novembre 1998 est insuffisamment motivée tant en ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux que la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle ne mentionne pas le fondement légal des chefs de redressement ni leurs modalités de détermination ; qu'une telle irrégularité doit être qualifiée de substantielle au regard de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ; que la procédure d'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1998 est irrégulière, faute pour l'administration d'établir l'envoi d'une mise en demeure de souscrire les déclarations ; que la notification de redressement du 3 mars 2000 n'est pas suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ; que les modalités de détermination des bases imposables ne sont pas indiquées et que le fondement textuel des redressements n'est pas mentionné ; qu'en n'indiquant pas dans la notification du 3 mars 2000 les conséquences de la vérification de comptabilité sur les exercices 1996 et 1997, le vérificateur n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 49 du livre des procédures fiscales ; que le montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible a été évalué de façon arbitraire à 110 000 F ; que le vérificateur, pour déterminer les bénéfices des années 1996, 1997 et 1998, a minoré les charges d'exploitation ; que les pénalités mises en recouvrement au titre des bénéfices industriels et commerciaux des années 1996 et 1997 n'ont pas été motivées ; qu'il en est de même de celles appliquées aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée notifiés le 20 novembre 1998 ; que l'application , pour ces rappels, du taux de 40 % prévu au 3ème de l'article 1728 du code général des impôts n'est pas justifiée ; que ce taux n'est pas davantage justifié en ce qui concerne les redressements notifiés le 3 mars 2000 ; à titre accessoire, que l'application de l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code constitue une sanction et non pas la simple réparation de préjudice financier subi par le Trésor ; qu'elle doit être motivée ; qu'il est demandé de limiter les intérêts de retard au minimum correspondant à la réalité matérielle du préjudice subi par le Trésor public ;
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Vu II) l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004, portant création d'une Cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R. 221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme Y... Y, demeurant ..., par Me Z... ;
Vu la requête, enregistrée le 16 juillet 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris sous le n°04PA02516 , présentée pour M. et Mme Y qui demandent à la Cour :
1) d'annuler le jugement n°0304669 en date du 29 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1996 et 1997 ;
2) de condamner l'Etat à leur payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que la procédure d'évaluation d'office mise en oeuvre a été irrégulière ; que les notifications de redressement en matière de taxe sur la valeur ajoutée et de bénéfices industriels et commerciaux ne sont pas suffisamment motivées ; que le service n'a pas retenu, à tort, la taxe sur la valeur ajoutée déductible déclarée ; que les dispositions de l'article L. 73-2 du livre des procédures fiscales ne peuvent pas fonder l'imposition d'office des bénéfices industriels et commerciaux ; que l'évaluation faite par le service du montant des charges d'exploitation est insuffisante ; que les pénalités mises en recouvrement tant en matière de bénéfices industriels et commerciaux que de taxe sur la valeur ajoutée ne sont pas suffisamment motivées ; que faute d'avoir adressé une mise en demeure de déposer la déclaration en matière de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration ne pouvait pas appliquer la pénalité de l'article 1728-3° du code général des impôts ; que l'application de l'intérêt de retard prévue par l'article 1727 de ce code correspond à une sanction ; que, dès lors, elle doit être motivée dans la notification de redressement afin que le juge dispose de la plénitude du pouvoir juridictionnel ; que le taux d'intérêt fixé par cet article 1727 revêt les caractéristiques d'une sanction relevant de la matière pénale ; que le taux de 9 % apparaît manifestement excessif par rapport au taux existant chez les prêteurs privés et, s'il était maintenu, constituerait un enrichissement sans cause pour le Trésor public ; qu'il est demandé que les intérêts de retard établis en l'espèce soient limités au montant de l'intérêt légal ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2005 :
- le rapport de Mme BRIN, président assesseur ;
- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées de M. et Mme Y concernent des impositions identiques ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décisions en date du 22 octobre 2004 postérieures à l'introduction de la requête n°03VE04362, le directeur des services fiscaux de l'Essonne a, d'une part, accordé à M. et Mme Y la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1996 et 1997 et, d'autre part, prononcé le dégrèvement à concurrence d'une somme de 5 018,92 euros des pénalités ayant assorti les rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à M. Y au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998 ; que les conclusions de la requête n°03VE04362 de M. et Mme Y relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur le surplus des conclusions de la requête n°03VE04362 :
En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1997 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination . Cette notification est interruptive de prescription . ;
Considérant que, s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, la notification de redressement en date du 20 novembre 1998 adressée à M. Z indique les motifs de droit et de fait du recours par l'administration à la procédure de taxation d'office pour les années 1996 et 1997 ; qu'elle précise le montant de la taxe sur la valeur ajoutée à payer au titre de chacune de ces années qui est déterminé à partir des montants respectifs de la taxe collectée, de la taxe déductible, de la taxe acquittée sur acomptes ; que ces modalités de détermination de la taxe sur la valeur ajoutée à payer, alors même que le montant de la taxe déductible est évalué forfaitairement, sont suffisantes et satisfont aux exigences de l'article L. 76 précité ;
En ce qui concerne les impositions relatives à l'année 1998 :
Considérant, en premier lieu, qu'en produisant la copie de l'avis de réception par M. et Mme Y, en date du 19 octobre 1999, du pli contenant la mise en demeure de déposer la déclaration de résultats de l'année 1998, l'administration établit le bien-fondé du recours à l'évaluation d'office du bénéfice industriel et commercial de M. Y prévu par l'article L. 73-1° du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en deuxième lieu, que la notification de redressement du 3 mars 2000, qui calcule le montant hors taxe et toute taxe de chaque produit et charge de l'exercice 1998, contient les modalités de détermination du montant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée et de celui de la taxe déductible ; qu'aucune comptabilité ni aucun état du stock à l'ouverture et à la clôture de cet exercice n'ayant été présentés au vérificateur, les requérants ne peuvent utilement soutenir que cette notification, qui tient compte de ce défaut de présentation, n'indique pas la méthode d'évaluation des stocks ; que, par ailleurs, en l'espèce, la citation d'aucune disposition particulière du code général des impôts ne s'imposait à l'administration ; que, dans ces conditions, la notification du 3 mars 2000 répond aux prescriptions des dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en troisième lieu, que les impositions litigieuses résultant de la mise en oeuvre d'une procédure régulière d'imposition d'office, il appartient aux contribuables, en vertu des articles L.193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve du caractère exagéré des bases retenues par l'administration ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'en se bornant à alléguer que le montant des charges déductibles de l'exercice 1998 a été évalué à 80 % des produits, alors qu'en réalité, il l'a été à partir des justifications produites par les contribuables au cours des investigations sur place, ces derniers ne démontrent pas le caractère exagéré des bases retenues en matière de bénéfice industriel et commercial ; que, par ailleurs, la production devant la Cour de simples tableaux qui auraient été établis à partir de factures, alors que la comptabilité et l'ensemble des pièces comptables n'ont pas été présentés lors des opérations de vérification de comptabilité, ne suffit pas à justifier du caractère exagéré des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;
En ce qui concerne les pénalités appliquées aux droits de l'année 1998, seules restant en litige :
Considérant qu'aux termes du 1er de l'article 1728 du code général des impôts : Lorsqu'une personne physique ou morale (...) tenue de souscrire une déclaration (...) comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts ..., taxes (...) établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration (...) dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration (...) déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 % ;. qu'aux termes du 3 du même article 1728 : La majoration visée au 1 est portée à 40 % lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai ;
Considérant, en premier lieu, que, malgré la mise en demeure afférente à la souscription de la déclaration de résultats de l'exercice 1998, dont les contribuables ont accusé réception le 19 octobre 1999, ainsi qu'il a été dit, ces derniers n'ont pas déposé ladite déclaration ; que, par suite, l'application de la majoration au taux de 40%, prévu par le 3 de l'article 1728 précité du code général des impôts, au montant des droits d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. et Mme Y, qui a été motivée dans la notification de redressement du 3 mars 2000, est régulière ;
Considérant, en second lieu, que si l'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier d'une pénalité en en modifiant le fondement juridique, c'est à la condition que la substitution de base légale ainsi opérée ne prive le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi et que l'administration invoque, au soutien de sa demande de substitution de base légale, des faits qu'elle avait retenus pour motiver la pénalité initialement appliquée ; qu'il résulte des termes mêmes de la notification du 3 mars 2000, qui est , contrairement à ce que soutiennent les requérants, suffisamment motivée sur ce point, que, pour assujettir en matière de taxe sur la valeur ajoutée M. Z à des pénalités au taux de 40%, l'administration s'est fondée sur le défaut de souscription de la déclaration CA 12 malgré l'envoi d'une mise en demeure ; qu'à défaut de pouvoir établir la réception par le contribuable de ladite mise en demeure, l'administration, pour demander devant la Cour l'application de la majoration de 10 % prévue au 1 de l'article 1728 précité du code général des impôts, se fonde sur l'absence de dépôt de la déclaration ; que la carence relevée dans la notification de redressement est de nature à justifier légalement l'application de cette majoration au taux de 10 % demandée par le ministre par voie de substitution de base légale et qui a été mise en oeuvre par la décision susmentionnée du 22 octobre 2004 prononçant le dégrèvement correspondant ;
En ce qui concerne l'application des intérêts de retard restant en litige :
Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions (...) ; qu'aux termes de l'article 1729 du même code : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard vidé à l'article 1727 (...) ;
Considérant que l'intérêt de retard vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'il s'ensuit que l'administration n'est pas tenue de motiver l'application des intérêts de retard et que les conclusions de M. et Mme Y tendant à la réduction de leur taux ne sauraient être accueillies ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté les conclusions de la demande de M. Y relatives aux taxes, impositions et pénalités restant en litige ;
Sur la requête n°04VE02516 :
Considérant que la requête susvisée est dirigée contre le jugement en date du 29 avril 2004 qui rejette la demande introduite le 22 novembre 2003 par M. et Mme Y et tendant à la décharge des seules cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1996 et 1997 ; que, par suite, les conclusions de cette requête relatives aux compléments de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998 ainsi qu'aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu relatives à l'année 1998 ne sont pas recevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant que, par ailleurs, comme il vient d'être dit précédemment, les conclusions en décharge relatives aux cotisations d'impôt sur le revenu établies au titre des années 1996 et 1997 sont devenues sans objet ; que, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur cette partie des conclusions de la requête ;
Sur les conclusions des deux requêtes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dites dispositions, de condamner l'Etat à payer à M. et Mme Y une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Il n`y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requêtes n°03VE04362 et 04VE02516 tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme Y ont été assujettie au titre des années 1996 et 1997.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 03VE04362 à concurrence de la somme de 5 018,92 euros en ce qui concerne les pénalités ayant assorti les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à M. Y au titre de la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1998.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme Y une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes n° 03VE04362 et 04VE02516 de M. et Mme Y est rejeté.
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