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31/03/2005 | FRANCE | N°02VE00027

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 31 mars 2005, 02VE00027


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER représenté par Me Pignot ;
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Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER représenté par Me Pignot ;

Vu ladite requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris le 3 janvier 2002 pour le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER, représenté par Me PIGNOT ; le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0009996/3 du 6 novembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'a condamné, d'une part, à verser Xla somme de 700.000 francs à Mlle XXX, d'autre part à verser au Trésor la somme de 10.979,50 francs qui correspond à l'avance de l'Etat au titre des frais d'expertise ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise par Mlle Xainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis ;

3°) subsidiairement d'ordonner une contre-expertise ou un complément d'expertise ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mars 2005 :

- le rapport de M. Brumeaux, premier conseiller ;

- les observations de Me Amathieu-Ruckert et Me Vitry, avocats ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le rapport d'expertise du professeur Bloch déposé le 9 avril 1998 s'appuie sur les notes du professeur Y, spécialiste en anesthésie infantile à l'hôpital Robert Debré, qui avait été désigné comme sapiteur à l'issue d'une réunion d'expertise contradictoire qui s'était tenue en présence de toutes les parties le 28 juin 1997 ; qu'il est constant que cet expert a utilisé ces notes et les a annexées à son rapport sans les avoir préalablement communiquées au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER ; qu'ainsi le caractère contradictoire de l'ensemble des opérations d'expertise n'a pas été respecté ; qu'il suit de là que le jugement a été rendu sur une procédure irrégulière et doit être annulé ;

Considérant toutefois que ce rapport d'expertise doit être retenu à titre d'élément d'informations et qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée devant le tribunal administratif ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le Centre hospitalier de Montreuil :

Considérant qu'il ressort de l'instruction que Mlle X n'a pas adressé de réclamation préalable à cet établissement hospitalier pour obtenir une indemnité en réparation du préjudice subi à la suite de son hospitalisation dans cet établissement ; que par suite, faute de liaison du contentieux sur le fond, sa demande tendant à la condamnation de ce centre à lui verser une somme de 700.000 euros est irrecevable ;

Sur les conclusions présentées en appel par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER tendant à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise :

Considérant que la Cour dispose du fait de l'ensemble des données recueillies par l'instruction des éléments suffisants pour statuer sur la demande ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu d'ordonner une nouvelle expertise ;

Sur la responsabilité :

Considérant que Mlle Fabienne X, alors âgée de 11 ans, a été admise à l'hôpital intercommunal de Montreuil le 11 juillet 1992 en raison de violentes douleurs abdominales et de fortes diarrhées ; que cet établissement hospitalier suivait les difficultés de cet enfant fréquemment sujet à de tels troubles de santé ; que l'aggravation de son état et l'absence de résultats des traitements qui lui avaient été antérieurement prescrits ont conduit à son transfert au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER d'Aulnay-sous-Bois le 12 juillet 1992 ; que la confirmation d'une occlusion intestinale a justifié le 13 juillet une intervention chirurgicale d'une durée de neuf heures, au cours de laquelle Mlle X a été affectée d'une insuffisance rénale totale qui a entraîné la perte de ses deux reins ; qu'elle a été le lendemain transférée à l'hôpital Robert Debré dans un service de réanimation ; qu'à la suite de l'ablation des deux reins, Mlle X a subi des hémodialyses trois fois par semaine jusqu'à la transplantation rénale effectuée en novembre 1994 ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que l'état de Mlle X n'était pas dans une phase d'occlusion aiguë lors de son séjour au centre hospitalier intercommunal de Montreuil ; que par suite cet établissement n'a pas commis de faute en prescrivant les traitements usuels pour faire disparaître les douleurs abdominales accompagnées de diarrhées et en décidant le transfert de la patiente dans le service de chirurgie viscérale du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER devant la recrudescence des phénomènes douloureux et l'apparition de vomissements ;

Considérant en revanche que l'insuffisance rénale aiguë dont Mlle X a été victime, ainsi que les autres incidents survenus durant l'intervention chirurgicale rendue nécessaire par l'aggravation de l'occlusion intestinale, résultent d'une évaluation insuffisante de son état physique préopératoire, caractérisé par une rapide perte de poids, et par un état anurique révélant une insuffisance rénale ; que ces manquements sont constitutifs d'une faute de nature à engager la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER, sans que celui-ci puisse se prévaloir d'une faute qui aurait été commise par le centre hospitalier de Montreuil, comme il a été dit ci-dessus ;

Sur le préjudice :

Considérant que le préjudice subi par Mlle X porte sur la perte de ses deux reins, la contrainte de plusieurs hémodialyses hebdomadaires pendant trois ans, les contraintes d'hospitalisation dues à la transplantation rénale effectuée en novembre 1994 et à ses complications et à la nécessité d'une surveillance médicale étroite ;

Considérant que Mlle X est atteinte d'une incapacité permanente partielle de 30 % ; que les hospitalisations successives qui ont eu lieu de juillet 1992 à novembre 1994 ainsi que les séances de dialyses hebdomadaires subies durant cette période ont considérablement réduit les activités auxquelles un enfant de son âge est susceptible de s'adonner ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature subis dans ses conditions d'existence en les évaluant à 83.847, 56 euros ; que le préjudice résultant des souffrances physiques endurées et le préjudice esthétique peuvent être évalués respectivement à 15.244, 90 euros et à 7.622, 45 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ensemble des préjudices subis par Mlle imputables aux conséquences de l'intervention chirurgicale qu'elle a subie au CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER doit être évalué à 106.714, 31 euros ; qu'en outre, les frais médicaux, résultant des conséquences dommageables de la faute commise par le Centre hospitalier, s'élèvent à 2 236,61 euros ;

Sur les droits de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-saint-Denis :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : Si la responsabilité du tiers est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d 'agrément ;

Considérant que la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis est fondée, sur le fondement des dispositions précitées, à demander le remboursement des frais médicaux qu'elle a exposés par elle au profit de Mlle X et qui résultaient directement des conséquences dommageables de la faute commise par le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER et qui s'élèvent à 2236, 61 euros ;

Considérant qu'aux termes des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, issu de l'article 9-I de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996, en contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement de ses débours, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 5 000 F et d'un montant minimum de 500 F. Cette indemnité est établie et recouvrée par la caisse selon les règles et sous les garanties et sanctions, prévues au chapitre 3 du titre III et aux chapitres 2, 3 et 4 du titre IV du livre 1er ainsi qu'aux chapitres 3 et 4 du titre V du livre II applicables au recouvrement des cotisations de sécurité sociale (...) ; qu'en application de ces dispositions il y a lieu de condamner le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis une indemnité forfaitaire équivalente au tiers de la somme de 2236, 61 euros, soit 745,54 euros ;

Sur les droits de Mlle X :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à verser à Mlle X la somme de 106.714, 31 euros ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER les frais d'expertise liquidés à 1.673,81 euros par une ordonnance de taxation en date du 22 avril 1998 ;

Sur le recours incident formé par Mlle X :

Considérant que Mlle X demande la réformation du jugement en ce qui concerne les indemnités allouées en vue d'obtenir la réparation de tous les préjudices subis par le versement d'une indemnité d'un montant total de 350.000 euros ; que cependant Mlle X n'est pas recevable à former un recours incident à l'encontre d'un jugement qui lui a donné entière satisfaction ; qu'au surplus elle n'allègue pas que l'étendue réelle des préjudices qu'elle a subis n'ait été connue que postérieurement au jugement de première instance ;

Sur l'appel provoqué par Mlle X :

Considérant que les conclusions tendant à la condamnation solidaire du centre hospitalier de Montreuil, qui n'est pas la partie appelante, doit être regardée comme un appel provoqué ; que toutefois ces conclusions, introduites après l'expiration du délai d'appel, ne seraient recevables que si la situation de leur auteur était aggravée par l'admission de l'appel principal ; que l'appel principal du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER étant rejeté, lesdites conclusions sont irrecevables ;

Sur l'intervention de Mme Claudine X :

Considérant que Mme Claudine X, qui n'était pas partie en première instance, n'est pas recevable à intervenir en appel pour la première fois en son nom propre en vue d'obtenir une indemnité destinée à réparer le préjudice personnel qu'elle a subi en raison de l'altération de l'état de santé de sa fille ;

Sur le recours incident présenté par la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis :

Considérant que si la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis demande la condamnation du CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à lui verser, sur le fondement de l'article L. 376-1 précité du code de la sécurité sociale, la somme de 51.159, 80 euros correspondant aux frais d'hospitalisation qu'elle a exposés, de telles conclusions, qui n'avaient toutefois pas été chiffrées devant le tribunal administratif, doivent être regardées comme une demande nouvelle et être rejetées pour ce motif ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions de condamner le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER à verser 3000 euros à Mlle et 1500 euros au centre hospitalier de Montreuil au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées en première instance à ce titre par la CPAM de Seine-Saint-Denis ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 6 novembre 200 est annulé.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER est condamné à verser à Mlle Fabienne X une indemnité de 106.714, 31 euros.

Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER est condamné à verser à la caisse d'assurance maladie (CPAM) de la Seine-Saint-Denis une indemnité de 2.236, 61 euros ainsi que l'indemnité forfaitaire de 745,54 euros destinée à la caisse nationale d'assurance maladie.

Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER est condamné à rembourser à l'Etat la somme de 1.673,81 euros correspondant à la somme qu'il a avancée au titre des frais d'expertise.

Article 5 : Les recours incidents formés par la CPAM de la Seine-Saint-Denis et par Mlle sont rejetés.

Article 6 : L'intervention principale de Mme Claudine X est rejetée.

Article 7 : L'appel provoqué formé par Mlle Fabienne X est rejeté.

Article 8 : Le CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL ROBERT BALLANGER est condamné à verser 3000 euros à Mlle Fabienne X et 1500 euros au Centre hospitalier de Montreuil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 02VE00027
Date de la décision : 31/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : PIGNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-03-31;02ve00027 ?
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