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03/03/2005 | FRANCE | N°03VE04736

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 03 mars 2005, 03VE04736


Vu les ordonnances en date du 16 août 2004, enregistrées au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par lesquelles le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles les requêtes présentées pour la COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DE CERGY-PONTOISE, dont le siège est Hôtel

d'Agglomération, parvis de la Préfecture BP 309 à Cergy-Pontoi...

Vu les ordonnances en date du 16 août 2004, enregistrées au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par lesquelles le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles les requêtes présentées pour la COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DE CERGY-PONTOISE, dont le siège est Hôtel d'Agglomération, parvis de la Préfecture BP 309 à Cergy-Pontoise Cedex (95027), par Me Symchowicz ;

Vu 1°), sous le n°03VE04736, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 22 décembre 2003 et 6 février 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par lesquels la COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DE CERGY-PONTOISE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0103591 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 16 octobre 2003 complété par l'ordonnance en rectification d'erreur matérielle en date du 12 novembre 2003 annulant la décision du 1er octobre 1993 par laquelle le président du Syndicat d'agglomération nouvelle de Cergy-Pontoise a décidé de signer l'avenant n°1 au contrat d'affermage conclu en avril 1971, relatif à la production et à la distribution collective de chaleur ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par Mme Marie-Thérèse X, M. Claude Y et l'Association des abonnés au chauffage urbain de Cergy-Pontoise, ainsi que l'intervention de M. André Remy ;

3°) de condamner solidairement Mme Marie-Thérèse X, M. Claude Y, l'Association des abonnés au chauffage urbain de Cergy-Pontoise et M. André Remy à lui verser la somme de 5 000 Euros, augmentée de la taxe sur la valeur ajoutée au taux applicable, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a entaché son jugement d'une double erreur de droit en considérant que, d'une part, l'avenant n°1 constituait un nouveau contrat, alors qu'il a seulement pour effet d'en modifier l'économie dans les limites autorisées par l'article L. 1411-2 du code général des collectivités territoriales et que, d'autre part, les dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 étaient applicables à sa passation, alors que l'avenant litigieux a été conclu avec un délégataire pressenti au sens de l'article 47 de cette loi ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°93-122 du 29 janvier 1993 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2005 :

- le rapport de M. Bresse, premier conseiller ;

- les observations de Me Letellier pour la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes nos 03VE04736 et 04VE00493 sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 03VE04736 :

Sur l'intervention de la Société de Distribution de Chaleur de Cergy-Pontoise :

Considérant que la personne qui, devant le tribunal administratif, est régulièrement intervenue en défense à un recours pour excès de pouvoir n'est recevable à interjeter appel du jugement rendu sur ce recours contrairement aux conclusions de son intervention que lorsqu'elle aurait eu qualité soit pour introduire elle-même le recours soit, à défaut d'intervention de sa part, pour former tierce opposition au jugement faisant droit audit recours ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du président du Syndicat d'agglomération nouvelle de Cergy-Pontoise en date du 1er octobre 1993, approuvant la signature d'un avenant n° 1 conclu avec la Société de Distribution de Chaleur de Cergy-Pontoise (SDCCP) ; que cette société est intervenue en défense en première instance ; qu'en sa qualité de cocontractante, signataire de l'avenant n° 1, l'annulation de la décision du 1er octobre 1993 préjudicie à ses droits ; qu'à défaut d'intervention de sa part, la SDCCP aurait été recevable à former tierce opposition contre le jugement attaqué ; qu'elle avait, par suite, qualité pour interjeter appel de ce jugement ; qu'il suit de là que son intervention devant la Cour, doit être regardée en réalité comme une requête en appel, dont il ressort des pièces du dossier qu'elle a été présentée postérieurement à l'expiration du délai d'appel, et doit être, par suite, rejetée comme irrecevable ;

Sur la légalité de la décision du 1er octobre 1993 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par Mme X, M. Y et l'Association des abonnés au chauffage urbain de Cergy-Pontoise :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 susvisée actuellement codifié à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : Les délégations de service public des personnes morales de droit public sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat (...) ; qu'aux termes de l'article 40 de cette loi actuellement codifié à l'article L. 1411-2 du même code : Les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée. Celle-ci est déterminée par la collectivité en fonction des prestations demandées au délégataire. Lorsque les installations sont à la charge du délégataire, la convention de délégation tient compte, pour la détermination de sa durée, de la nature et du montant de l'investissement à réaliser et ne peut dans ce cas dépasser la durée normale d'amortissement des installations mises en oeuvre. Une délégation de service ne peut être prolongée que : a) Pour des motifs d'intérêt général. La durée de la prolongation ne peut alors excéder un an ; b) Lorsque le délégataire est contraint, pour la bonne exécution du service public ou l'extension de son champ géographique et à la demande du délégant, de réaliser des investissements matériels non prévus au contrat initial, de nature à modifier l'économie générale de la délégation et qui ne pourraient être amortis pendant la durée de la convention restant à courir que par une augmentation de prix manifestement excessive. (...) Les conventions de délégation de service public ne peuvent contenir de clauses par lesquelles le délégataire prend à sa charge l'exécution de services ou de paiements étrangers à l'objet de la délégation (...) et qu'aux termes de l'article 47 de cette loi actuellement codifié à l'article L. 1411-11 du même code : Les dispositions des articles 38 et 42 à 46 de la présente loi sont applicables aux conventions dont la signature intervient à compter du 31 mars 1993. Elles ne sont pas applicables lorsque, avant la date de la publication de la présente loi, l'autorité habilitée a expressément pressenti un délégataire et que celui-ci a, en contrepartie, engagé des études et des travaux préliminaires ;

Considérant que lorsqu'un avenant bouleverse l'équilibre d'une convention de délégation de service public, il constitue, de ce fait, un nouveau contrat, rendant nécessaire le recours à la procédure de mise en concurrence prévue à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, ce qui exclut l'application des dispositions de l'article L. 1411-2 du même code qui n'autorisent, sous certaines conditions, la passation d'avenants que lorsque ces avenants ont seulement pour effet de modifier l'économie générale du contrat ;

Considérant, en premier lieu, que le Syndicat intercommunal à vocation multiple de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise dont le syndicat d'agglomération nouvelle (SAN) a repris les engagements a conclu, en avril 1971, une convention d'affermage relative à la production et à la distribution collective de chaleur avec un groupement de plusieurs entreprises ; que cette convention, prévue pour une durée de trente ans, confiait au délégataire l'exploitation des ouvrages affermés selon les clauses et les conditions fixées par le cahier des charges annexé à cette convention ; qu'à la suite de l'augmentation importante des prix du pétrole, un avenant n° 6 au cahier des charges était signé le 4 janvier 1984 prévoyant notamment la construction, sous maîtrise d'ouvrage de l'établissement public d'aménagement de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise, d'une chaudière à charbon destinée à assurer la production des trois quarts de l'énergie distribuée, le remboursement de l'emprunt contracté pour sa construction devant être assuré par le bénéfice, résultant pour l'exploitant, de l'utilisation du charbon fourni par le GIE CDF Energie ; qu'il était également prévu que le GIE CDF Energie devait se substituer au SAN pour le remboursement des emprunts, durant les années au titre desquelles l'exploitation du charbon serait déficitaire, par un mécanisme d'avances remboursables par le SAN, durant les années d'exploitation bénéficiaires ; que cependant, après trois années d'exploitation positive, la stabilisation du cours du pétrole a conduit le SAN à réduire l'utilisation de cette chaudière à charbon et à renégocier l'emprunt contracté pour sa construction, ces modifications étant constatées dans un avenant n° 11 au cahier des charges signé le 5 octobre 1990 ; que, toutefois, confronté à la nécessité de prendre en compte les nouvelles normes applicables en matière de valorisation des déchets, au coût élevé du charbon lorrain, à la perspective de fermeture des mines ainsi qu'à l'augmentation régulière de l'avance de trésorerie remboursable du GIE CDF Energie et à l'impasse financière qui en résultait, le président du SAN a, le 1er octobre 1993, décidé de signer avec la SDCCP, qui s'est substituée au délégataire initial, un avenant n° 1 à la convention d'affermage signée en 1971 ; qu'il ressort des pièces du dossier que cet avenant a pour effet d'annuler le cahier des charges annexé à cette convention ainsi que les avenants n° 1 à 12 de ce cahier et de les remplacer par un nouveau cahier des charges annexé à l'avenant litigieux ; que, par ailleurs, l'avenant n° 1 prévoit, d'une part, d'étendre le périmètre géographique de l'affermage et, d'autre part, de prolonger de seize ans la durée de la délégation initiale ; que cet avenant avait également pour objet de mettre à la charge du délégataire les surcoûts inhérents au fonctionnement de la chaudière à charbon dont la réalisation avait été décidée en 1983, le service des annuités de l'emprunt de 30 091 552 F contracté par le délégant pour financer la construction de cette chaudière, ainsi qu'un emprunt total de 32 464 000 F d'une durée de 23 ans destiné à racheter le droit exclusif d'approvisionnement en charbon détenu, en vertu d'une convention annexée à l'avenant n° 6 conclu le 4 janvier 1983, par le GIE CDF Energie ; qu'enfin, cet avenant prévoit une utilisation à court terme de l'énergie calorifique issue de l'incinération des ordures ménagères en cours de mise en place ; que, compte tenu de leur objet, de leur nombre et de leur ampleur, ces modifications ont entraîné un bouleversement de l'économie générale de la convention d'affermage initiale ; que, par suite, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, à bon droit, jugé que l'avenant litigieux constituait un nouveau contrat de délégation de service public entrant dans le champ d'application de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 actuellement codifié à l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'existence d'un bouleversement de l'économie générale de la convention d'affermage signée en 1971 fait obstacle, ainsi qu'il a été dit précédemment, à ce que la requérante puisse se prévaloir des dispositions de l'article L. 1411-2 précitées du code général des collectivités territoriales ;

Considérant, en troisième lieu, que si la communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise soutient que le SAN, qui aurait pressenti un délégataire, était dispensée de la procédure de publicité prévue à l'article L.1411-1 du code général des collectivités territoriales, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que, bien que la SDCCP ait été en relation contractuelle avec le SAN et lui ait adressé des courriers dans le cadre de la négociation de l'avenant n°1, elle puisse, en l'absence de tout courrier ou document en ce sens émanant du SAN, être regardée comme ayant été expressément pressentie par l'autorité habilitée à conclure l'avenant ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les règles de publicité et de mise en concurrence instituées par l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales étaient inapplicables à la passation de l'avenant litigieux ;

Considérant, enfin, qu'il est constant que le Syndicat d'agglomération nouvelle de Cergy-Pontoise n'a pas suivi la procédure prévue par les dispositions de la loi du 29 janvier 1993 pour conclure l'avenant n° 1 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE, qui vient aux droits du syndicat d'agglomération nouvelle de Cergy-Pontoise, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 1er octobre 1993, par laquelle le président du syndicat a décidé, au terme d'une procédure irrégulière, de signer l'avenant litigieux ;

Sur la requête n° 04VE00493

Considérant que, par le présent arrêt, la Cour se prononce sur le fond de l'affaire ; que la requête susvisée tendant au sursis à exécution du jugement contesté du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise se trouve donc privée d'objet ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant, d'une part, que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE et la SDCCP, qui sont les parties perdantes dans la présente instance, puissent se prévaloir de ces dispositions ; que, d'autre part, s'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SDCCP au titre des dispositions de cet article, il convient d'en faire application pour mettre à la charge de la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE la somme de 500 Euros chacun au titre des frais engagés par Mme X, M. Y et l'Association des abonnés au chauffage urbain de Cergy-Pontoise et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 03VE04736 présentée par la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE, ainsi que les conclusions de la Société de Distribution de Chaleur de Cergy-Pontoise sont rejetées.

Article 2 : La COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE est condamnée à verser, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 500 Euros chacun à Mme Marie-Thérèse X, M. Claude Y et à l'Association des abonnés au chauffage urbain de Cergy-Pontoise.

Article 3 : Les conclusions de Mme Marie-Thérèse X, de M. Claude Y et de l'Association des abonnés au chauffage urbain de Cergy-Pontoise, tendant à la condamnation de la Société de Distribution de Chaleur de Cergy-Pontoise sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 04VE00493 présentée par la COMMUNAUTE D'AGGLOMERATION DE CERGY-PONTOISE.

03VE04736 - 04VE00493 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 03VE04736
Date de la décision : 03/03/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTIN
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : GUILLOU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-03-03;03ve04736 ?
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