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17/02/2005 | FRANCE | N°03VE02976

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 17 février 2005, 03VE02976


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme José X, demeurant ... ;

Vu la requête, enregistrée le 25 juill

et 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par l...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme José X, demeurant ... ;

Vu la requête, enregistrée le 25 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. et Mme José X demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0205509 du 8 juillet 2003 par laquelle le conseiller délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant ; 1°) à l'annulation de la décision par laquelle la directrice de l'école maternelle des Croizettes de Courdimanche a affecté leurs enfants jumeaux dans deux classes différentes pour l'année scolaire 2002-2003, 2°) à l'annulation de la décision du 3 septembre 2002, par laquelle l'inspecteur d'académie du Val-d'Oise a rejeté leur recours hiérarchique, 3°) à ce que l'Etat soit condamné à leur verser 2000€ au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser 2 969,08 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à verser à l'association Jumeaux et plus la somme de 830,92 euros au même titre ;

Il soutiennent que la décision attaquée n'est pas une mesure d'ordre intérieur ; que la directrice de l'école n'avait pas compétence pour prendre une telle décision contre l'avis des parents ; que les décisions attaquées sont contraires à la Constitution du 4 octobre 1958, à l'article 5 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1989, au préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, à l'article 26 de la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 et à l'article 5 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Vu la déclaration universelle des droits de l'homme ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le décret n°89-122 du 24 février 1989 relatif aux directeurs d'école ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2005 :

- le rapport de M. Blin, président-assesseur ;

- les observations de M. X ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel (...) peuvent, par ordonnance : 4° Rejeter les requêtes (...) qui sont entachées d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance ;(...) ;

Considérant que M. et Mme X sont parents de jumeaux, Mathilde et Jérémy, nés en 1998, qui, en septembre 2001, ont été placés dans la même classe de l'école maternelle des Croizettes de Courdimanche ; que par décision du 2 septembre 2002, la directrice de cette école a affecté chacun des jumeaux dans deux classes distinctes, malgré le souhait exprimé par leurs parents que les deux enfants continuent d'être affectés dans une même classe ; que par décision du 13 septembre 2002, l'inspecteur d'académie du Val-d'Oise a rejeté le recours hiérarchique des requérants ; que l'irrecevabilité de la requête de M. et Mme X tendant à l'annulation de ces décisions ne pouvait en l'espèce être regardée comme manifeste ; qu'il n'appartenait dès lors, qu'au tribunal administratif statuant en formation collégiale, et non au conseiller délégué sur le fondement de l'article R. 222-1 précité du code de justice administrative, de statuer sur la demande de M. et Mme X tendant à l'annulation de ces décisions ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de ce que l'administration avait communiqué au conseiller délégué des documents non communicables, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée pour M. et Mme X devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut les décisions attaquées ont pour objet d'affecter dans des classes différentes des jumeaux âgés de quatre ans, contre la volonté de leurs parents et malgré la production d'un certificat médical émettant un avis réservé sur l'opportunité de séparer les enfants ; que dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard tant à la gémellité, au très jeune âge et à la fragilité avérée des deux enfants, qu'eu égard aux objectifs spécifiques des classes maternelles concernant notamment l'éveil de la personnalité et l'apprentissage de l'autonomie des élèves, les décisions attaquées ne peuvent être regardées comme sans conséquence sur la scolarité des enfants et par suite comme des mesures d'ordre intérieur non susceptibles d'être contestées par la voie du recours pour excès de pouvoir ; que, par suite, la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche doit être rejetée ;

Sur la légalité de la décision du 2 septembre 2002 de la directrice de l'école des Croizettes et de la décision du 13 septembre 2002 de l'inspecteur d'académie du Val d'Oise :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 24 février 1989 relatif aux directeurs d'école : Le directeur d'école (...) répartit les élèves entre les classes et les groupes, après avis du conseil des maîtres ;

Considérant, en premier lieu, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, que les dispositions précitées de l'article 2 du décret du 24 février 1989 permettent aux directeurs d'écoles de répartir les élèves entre les classes même en cas d'avis contraire des parents ; que si dans une réponse ministérielle du 7 octobre 2002, le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche a estimé que, s'agissant de jumeaux, il n'appartient pas au directeur d'imposer une position contre l'avis des parents, sauf si la solution préconisée par eux crée des difficultés avérées de fonctionnement, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de cette réponse qui ne présente pas un caractère réglementaire ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : La loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas ; que les attributions des directeurs d'école relatives à la répartition des élèves entre les classes ne relèvent d'aucune des matières ressortissant au législateur en application de l'article 34 de la constitution du 4 octobre 1958 ; que, dès lors, les dispositions réglementaires précitées qui permettent au directeur de procéder à cette répartition contre l'avis des parents ne méconnaissent pas les dispositions de l'article 5 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

Considérant, en troisième lieu, que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des stipulations de la déclaration universelle des droits de l'homme, qui ne figure pas au nombre des conventions internationales ayant été ratifiées dans les conditions prévues à l'article 55 de la Constitution ;

Considérant, en quatrième lieu, que les stipulations de l'article 28 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que les requérants ne peuvent donc utilement se prévaloir de cet engagement international pour demander l'annulation des décisions attaquées ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la convention relative aux droits de l'enfant : Les Etats parties respectent la responsabilité, le droit et le devoir qu'ont les parents (...) de donner à l'enfant l'orientation et les conseils appropriés à l'exercice des droits que lui reconnaît la présente Convention. ; qu'en tout état de cause, ni les dispositions précitées de l'article 2 du décret du 24 février 1989, ni les décisions attaquées qui ne sont pas relatives à l'orientation des enfants, ne sont contraires aux stipulations précitées de l'article 5 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Considérant, en sixième lieu, que les requérants produisent un certificat médical en date du 4 septembre 2002 d'un médecin d'un centre de protection infantile, selon lequel il était souhaitable que la séparation des jumeaux fût retardée et fût effectuée progressivement en grande section de l'école maternelle ; que, toutefois, il ne résulte pas de cet avis médical peu circonstancié que la séparation des jumeaux en moyenne section aurait des conséquences négatives certaines ; que, par ailleurs et surtout, il ressort de fiches d'évaluation rédigées par les enseignants à l'issue de la première année d'école maternelle que les deux jumeaux jouaient de préférence l'un avec l'autre et que l'un d'entre eux était trop réservé et s'intégrait mal à la vie du groupe d'enfants ; que, dans ces conditions, la directrice de l'école des Croizettes et l'inspecteur d'académie n'ont pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en décidant d'affecter les deux jumeaux Jérémy et Mathilde dans deux classes différentes en moyenne section d'école maternelle ;

Considérant enfin, que les requérants ne peuvent utilement soutenir, en invoquant la méconnaissance du principe d'égalité, que dans un autre département, les jumeaux ne seraient pas séparés contre l'avis de leurs parents ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède M. et Mme X ne sont pas fondés à demander l'annulation des décisions attaquées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. et Mme X, et en tout état de cause à l'association Jumeaux et plus , la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 8 juillet 2003 du conseiller délégué du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le surplus des conclusions de leur requête sont rejetés.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 03VE02976
Date de la décision : 17/02/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre BLIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-02-17;03ve02976 ?
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