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17/07/2025 | FRANCE | N°23TL01057

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 17 juillet 2025, 23TL01057


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.



Par un jugement n° 2003655 du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un dégrèvement d'un montant tota

l de 437 755 euros prononcé en cours d'instance et rejeté le surplus de sa demande.



Procé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement n° 2003655 du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un dégrèvement d'un montant total de 437 755 euros prononcé en cours d'instance et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires complémentaires, enregistrés les 5 mai, 7 juin et 6 décembre 2023 et le 19 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Guillerm, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 mars 2023 du tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce qu'il a été privé de la possibilité de se faire assister par un conseil durant les opérations de contrôle ;

- il n'a pas davantage répondu au moyen contestant la requalification en revenus de capitaux mobiliers des traitements et salaires déclarés ;

- l'avis d'examen de sa situation fiscale personnelle n'a pas été notifié à la dernière adresse connue de l'administration ;

- il a été en conséquence privé d'un débat oral et contradictoire ;

- l'administration aurait dû tenir compte de sommes qu'il a acquittées pour le compte de ses sociétés et qui doivent venir en déduction des sommes versées sur ses comptes bancaires ;

- elle ne démontre pas que les revenus qu'il a déclarés dans la catégorie des traitements et salaires constituaient des distributions occultes ;

- les articles 54 bis et 54 quater du code général des impôts ne sont pas applicables et leur méconnaissance ne permet pas de faire application du c de l'article 111 du code général des impôts.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 6 novembre et 20 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant sont inopérants ou ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 2 février 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 2019-793 QPC du 28 juin 2019 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon ;

- les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Guillerm pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, à l'issue d'un examen de sa situation fiscale personnelle et dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au titre des années 2014 et 2015. Par un jugement du 6 mars 2023, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un dégrèvement d'un montant total de 437 755 euros prononcé en cours d'instance et rejeté le surplus de sa demande. Il fait appel de ce jugement, en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Devant le tribunal administratif de Montpellier, M. A... a notamment soulevé le moyen tiré de ce que l'administration ne démontrait pas que les revenus qu'il avait déclarés dans la catégorie des traitements et salaires constituaient des distributions occultes, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Le tribunal administratif a omis de statuer sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le second moyen relatif à la régularité du jugement attaqué, ce dernier doit être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A....

3. Il y a lieu d'évoquer dans cette mesure et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montpellier.

Sur l'étendue du litige :

4. Il résulte de l'instruction que le dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et de contributions sociales auxquelles M. A... avait été assujetti au titre des années 2014 et 2015, prononcé le 21 septembre 2020, postérieurement à l'introduction de la demande de première instance, par le directeur de contrôle fiscal Sud-Pyrénées, et auquel le jugement fait référence, s'est élevé à la somme totale de 558 535 euros. Les conclusions relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Dès lors que le tribunal a limité le non-lieu à statuer qu'il a prononcé à la somme de 437 755 euros, il y a lieu d'étendre la constatation de ce non-lieu à statuer à concurrence de la somme complémentaire de 120 780 euros.

Sur le surplus des conclusions en décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / L'avis informe le contribuable que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié peut être consultée sur le site internet de l'administration fiscale ou lui être remise sur simple demande (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient en principe à l'administration fiscale de notifier l'avis qu'elles prévoient à la dernière adresse qui lui a été communiquée par le contribuable aux fins d'y recevoir ses courriers.

6. Il résulte de l'instruction que l'avis d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du 12 septembre 2016 a été envoyé au 200 avenue de Saint Maur à Montpellier, adresse communiquée à l'administration fiscale par M. A..., dans le cadre de la souscription de la déclaration d'ensemble de ses revenus de l'année 2014, déposée le 19 janvier 2016. L'appelant produit toutefois la copie de la déclaration d'ensemble de ses revenus de l'année 2015, qui fait état d'un changement d'adresse au 1er février 2016, sur laquelle est apposé un cachet dateur de l'accueil du service des impôts des particuliers " Millénaire " mentionnant un dépôt le 3 mars 2016. Néanmoins, cette mention doit être regardée comme étant entachée d'une erreur matérielle, dès lors que cette date est antérieure au début de la campagne déclarative relative aux revenus de l'année 2015, que la déclaration en cause est datée du 2 mars 2017 et que la copie produite par l'administration comporte un second tampon du service des impôts des particuliers de Montpellier faisant référence au 6 mars 2017. Ainsi, ce document n'établit pas que M. A... avait informé l'administration d'un changement d'adresse à la date de l'avis d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle. Il en est de même de la production d'attestations du 27 décembre 2016 et du 7 avril 2022 indiquant que l'intéressé était titulaire d'un contrat d'électricité pour ce nouveau logement et que le bail concernant son ancien logement n'a pas été renouvelé après le 31 janvier 2016 ou d'une lettre non signée du 8 juin 2016, qui, bien que mentionnant un changement d'adresse, est dépourvue de preuve de réception par l'administration et qui fait référence à l'agent vérificateur, lequel était censé ne pas être connu de M. A... à cette date. Enfin, la production d'un avis de taxe d'habitation de l'année 2016, qui a été envoyé à l'adresse initialement communiquée par l'intéressé, d'avis de taxe d'habitation postérieurs à l'année 2016, d'un courrier du 3 juillet 2017 relatif à l'exercice d'un droit de communication auprès du régime social des indépendants et de plusieurs actes de recouvrement, également postérieurs à 2016, ne saurait révéler que l'administration fiscale avait été informée d'un changement d'adresse à la date de l'avis du 12 septembre 2016. Tel est également le cas, en tout état de cause, d'un courrier de la police nationale qui a été envoyé à M. A... le 26 avril 2017, de procès-verbaux de réquisition judiciaire ne mentionnant d'ailleurs pas l'adresse de l'intéressé pour ceux qui sont antérieurs à 2017 et d'un extrait d'un procès-verbal d'audition de son ancienne épouse, se bornant à faire référence au fait qu'il aurait déclaré une nouvelle adresse aux services fiscaux depuis 2016. Dans ces conditions, l'adresse à laquelle l'avis du 12 septembre 2016 a été envoyé doit être regardée comme la dernière qui a été déclarée à l'administration fiscale par M. A.... Il résulte également de l'instruction que le pli recommandé contenant cet avis a été présenté à cette adresse le 13 septembre 2016 et que son destinataire a été régulièrement avisé de la mise en instance de ce pli au bureau de poste dont dépendait le domicile correspondant. Ainsi, alors d'ailleurs qu'un nouvel envoi a été opéré à la même adresse le 14 novembre 2016 et que le pli a été également retourné au service, après avoir été présenté le 15 novembre, avec la mention " pli avisé et non réclamé ", la notification de l'avis du 12 septembre 2016 doit être regardée comme régulière. Par suite, M. A..., alors même qu'il n'a pas effectivement pris connaissance des plis le contenant, doit être regardé comme ayant été régulièrement informé de l'engagement de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle dont il a fait l'objet et, compte tenu des mentions de l'avis, de la faculté qu'il avait de se faire assister, à cette occasion, par un conseil de son choix.

7. En deuxième lieu, le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la proposition de rectification qui, selon l'article L. 48 du même livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir. Pour apprécier si le vérificateur a satisfait à la condition d'engager, préalablement à l'envoi d'une proposition de rectification, un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir, il convient de prendre en considération l'ensemble des échanges intervenus pendant toute la durée du contrôle, depuis la date d'envoi de l'avis de vérification jusqu'à la date d'envoi de la proposition de rectification. Le caractère oral d'un tel débat n'est pas exigé à peine d'irrégularité de la procédure.

8. Il résulte de l'instruction que le service a envoyé à M. A... plusieurs propositions d'entretien, dont deux étaient antérieures au mois de mars 2017, au 200 avenue de Saint Maur à Montpellier. Les courriers correspondants lui ont été retournés revêtus de le mention " pli avisé et non réclamé ". Un entretien a toutefois pu être organisé le 10 août 2017. À cette occasion, le service a notamment présenté les discordances relevées entre les revenus déclarés par M. A... et les éléments figurant sur les relevés bancaires, ainsi que les points qu'il envisageait de retenir. L'intéressé a notamment précisé qu'il apporterait les justificatifs permettant d'établir le caractère non imposable des sommes en cause après la réception de la proposition de rectification, laquelle a été adressée le 31 août 2017. Dès lors que M. A... n'établit pas que cette rencontre était insuffisante, dans les circonstances de l'espèce, pour lui permettre de dialoguer avec le service et que l'absence de dialogue dont il se plaint résulte de la transmission tardive de sa nouvelle adresse, qui a elle-même retardé la délivrance effective des informations prévues aux deuxième et troisième alinéa de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé de dialogue contradictoire.

9. En troisième lieu, en vertu de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, l'administration peut adresser au contribuable une demande de justification " (...) lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés ou excède ces derniers d'au moins 150 000 € (...) ". M. A... ne peut utilement se prévaloir de ce que les revenus portés au crédit de ses comptes bancaires ne représenteraient pas le double des revenus déclarés, dès lors que cette circonstance ne faisait pas obstacle à l'engagement de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle et que l'administration n'a pas fait application des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales.

10. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai (...) ". L'article L. 57 du même livre dispose que : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ".

11. Il résulte de l'instruction que les salaires portés sur la déclaration d'ensemble des revenus de M. A... de l'année 2014, à hauteur de 136 135 euros, n'ont fait l'objet d'aucune imposition. Toutefois, pour calculer les droits dus par le contribuable après contrôle, le vérificateur a, dans la proposition de rectification du 31 août 2017, déduit les droits correspondant aux salaires déclarés, soit 37 373 euros. La seule circonstance que les conséquences financières annexées à la réponse aux observations du contribuable du 10 janvier 2018, qui énonce par ailleurs les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier le maintien des rectifications proposées et pour écarter les arguments soulevés par M. A..., n'ont pas repris cette déduction, n'est pas de nature à entacher cette réponse d'une insuffisance de motivation, alors d'ailleurs que le rehaussement qui en procède est inclus dans le dégrèvement prononcé le 21 septembre 2020.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

12. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'à l'issue du dégrèvement prononcé le 21 septembre 2020, les revenus de capitaux mobiliers pris en compte par l'administration au titre de l'année 2014, initialement fixés à 204 783 euros, ont été ramenés à 51 410 euros. La circonstance que M. A... a mentionné une somme supérieure dans la déclaration d'ensemble de ses revenus de l'année 2014 ne permet pas de remettre en cause l'imposition des revenus de capitaux mobiliers retenue par le service, dès lors que cette somme déclarée dans la catégorie des traitements et salaires n'a, en tout état de cause, fait l'objet d'aucune imposition. Au surplus, l'administration a finalement imposé la somme de 56 200 euros dans cette catégorie. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait commis, à l'occasion du dégrèvement du 21 septembre 2020, des erreurs de calcul sur la base imposable de l'année 2014, conduisant à une variation négative d'impôt en la faveur de M. A... doit être écarté.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". L'article 112 du même code dispose que : " Ne sont pas considérés comme revenus distribués : / (...) / 4° Les sommes mises à la disposition des associés dès lors qu'elles constituent la rémunération d'un prêt, d'un service ou d'une fonction et sont valablement comprises dans les charges déductibles pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) ".

14. Il résulte de l'instruction que, au cours des années en cause, M. A... a reçu, sur ses comptes bancaires, les sommes respectives de 107 610 euros et 276 983 euros provenant de plusieurs sociétés de capitaux dont il était le dirigeant et/ou associé. Le service, après avoir admis que les sommes de 56 200 euros et de 30 139 euros étaient imposables dans la catégorie des traitements et salaires, a considéré que les reliquats de 51 410 euros et de 246 844 euros constituaient des revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en application du c de l'article 111 du code général des impôts.

15. D'une part, M. A..., en se bornant à produire un appel à cotisations sociales en sa qualité de gérant, pour un montant total de 18 803 euros, et trois fiches de paie d'un montant net de 9 700 euros chacune, n'apporte aucun justificatif permettant d'admettre que les versements mentionnés au point précédent, à l'exception des sommes de 56 200 euros et de 30 139 euros admises à ce titre par l'administration fiscale, correspondraient aux traitements et salaires qu'il a portés dans ses déclarations, d'ailleurs déposées tardivement et non prises en compte par l'administration fiscale. Les renseignements obtenus par le service dans le cadre de droits de communication exercés auprès du tribunal de grande instance de Montpellier, des mandataires judiciaires chargés des procédures de liquidation de trois des sociétés en cause et du régime social des indépendants n'ont d'ailleurs pas permis de confirmer le versement des salaires revendiqués par M. A.... L'administration relève également que l'enregistrement des sommes correspondantes dans la comptabilité des sociétés n'est pas établi et qu'elles n'ont pas été déclarées, contrairement aux dispositions des articles 54 bis et 54 quater du code général des impôts. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, qui ont été à bon droit pris en compte pour établir l'existence de rémunérations ou avantages occultes, alors même que les versements en cause ne constitueraient pas des avantages en nature au sens des dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts, c'est à bon droit que les sommes correspondantes ont été imposées, sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, comme des revenus distribués par les sociétés en cause. Enfin, M. A... ne peut utilement contester sa qualité de maître de l'affaire de certaines de ces sociétés, dès lors que les rectifications restant en litige ne sont pas fondées sur cette qualification.

16. D'autre part, en se bornant à produire, d'une part, une liste de débits qu'il a opérés par carte bancaire en 2014, associée à des factures de gaz ne mentionnant pas leur destinataire, d'autre part, deux listes de chèques qu'il a émis en 2014 et 2015, assorties des copies de ces chèques, de seulement deux factures, de sept attestations de vente non chiffrées et de bulletins de paie établis par deux sociétés dont il était le dirigeant, enfin, des relevés de deux de ses comptes bancaires personnels couvrant l'année 2015 et d'un compte de l'une de ces sociétés, M. A... n'apporte pas d'éléments suffisants pour justifier de ce qu'il aurait supporté des charges pour le compte des sociétés en cause et de ce que ces charges seraient en lien avec les versements dont il a bénéficié. Il en est de même de la production d'un procès-verbal de réquisition relatif à l'encaissement d'un chèque d'un montant de 7 000 euros appartenant à M. A..., dont le destinataire se borne à affirmer que " ce règlement nous a été remis en main propre sur le chantier par le gérant de l'entreprise Pro Construction qui a indiqué ne pas disposer de chéquiers de l'entreprise et qu'il se ferait rembourser cette dépense ". Dans ces conditions, l'administration, qui relève en outre l'absence de comptabilisation correspondante dans les écritures des sociétés concernées, doit être regardée comme établissant que ces dépenses ne peuvent être déduites des crédits constatés sur les comptes bancaires de l'intéressé. C'est, par suite, à bon droit qu'elle a imposé, dans leur totalité, les sommes de 51 410 euros et de 246 844 euros.

17. En dernier lieu, aux termes du 7 de l'article 158 du code général des impôts : " Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : / (...) / 2° Aux revenus distribués mentionnés aux c à e de l'article 111, aux bénéfices ou revenus mentionnés à l'article 123 bis et aux revenus distribués mentionnés à l'article 109 résultant d'une rectification des résultats de la société distributrice (...) ".

18. Par sa décision n° 2019-793 QPC du 28 juin 2019, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution la référence " c " figurant au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, au motif que le législateur a entendu, en adoptant ces dispositions, soumettre à une imposition plus forte certains revenus de capitaux mobiliers distribués dans des conditions irrégulières ou occultes, afin de dissuader de telles opérations, et a ainsi poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. Il a ajouté qu'en opérant une distinction selon que les revenus sont distribués à la suite d'une décision régulière des organes compétents de la société ou que les revenus distribués résultent de décisions occultes ou irrégulières et en soumettant seulement ces derniers à la majoration d'assiette, le législateur a retenu des critères objectifs et rationnels au regard du but poursuivi. Il en a déduit qu'aucune rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques n'existait entre les bénéficiaires de revenus de capitaux mobiliers soumis à cette majoration et les autres bénéficiaires de revenus de capitaux mobiliers. Il a également relevé que la majoration en cause, qui porte sur des revenus de capitaux mobiliers dissimulés, non spontanément déclarés par le contribuable, ne conduit pas à une charge excessive au regard des facultés contributives des contribuables. Par suite, le moyen tiré de ce que la majoration prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts qui s'applique aux revenus distribués mentionnés au c de l'article 111 du même code ferait peser sur le contribuable une imposition revêtant un caractère confiscatoire, portant atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques, doit être en tout état de cause écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander la décharge des impositions restant en litige.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante pour l'essentiel, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2003655 du 6 mars 2023 du tribunal administratif de Montpellier est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A....

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montpellier à concurrence de la somme complémentaire de 120 780 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Occitanie.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2025, où siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Fougères, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 juillet 2025.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL01057 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01057
Date de la décision : 17/07/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Examen de la situation fiscale personnelle (ex VASFE).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Nicolas Lafon
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : GUILLERM

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-07-17;23tl01057 ?
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