Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 4 juillet 2023 par lequel la préfète du Gard lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant un an.
Par un jugement n° 2302722 du 26 octobre 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2023, M. B..., représenté par
Me Bochnakian, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes du
26 octobre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 4 juillet 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2024, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 25 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 avril 2024 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le
26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Beltrami, première conseillère,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant arménien né en 1978, est entré en France en 2002, selon ses déclarations, accompagné de sa compagne de nationalité arménienne. Sa demande d'asile a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des
29 mai 2002 et 7 octobre 2004, confirmées par des décisions de la Cour nationale du droit d'asile des 14 mars 2003 et 21 mars 2005. Trois enfants sont nés en France, entre 2002 et 2005, de sa relation avec sa compagne qu'il a épousée le 20 décembre 2008. M. B... a bénéficié d'un titre de séjour valable du 21 mai 2008 au 20 juillet 2009, puis d'une carte de séjour pluriannuelle du 10 octobre 2017 au 9 octobre 2019 au titre de la vie privée et familiale. M. B... a été pénalement condamné à plusieurs reprises, et en dernier lieu le 18 octobre 2018 par le tribunal correctionnel de Nîmes à une peine d'emprisonnement d'un an dont six mois avec sursis, révoqué en 2019, pour menace de mort réitérée commise sur sa conjointe, transport sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D et harcèlement sur cette dernière. Son épouse, qui a demandé le divorce en 2018, a quitté la France avec les trois enfants du couple pour rejoindre les Etats-Unis. M. B... a alors demandé au préfet du Gard de renouveler le titre de séjour dont il était titulaire au titre de la vie privée et familiale. Par un arrêté du 1er octobre 2020, le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé un pays de destination. Les conclusions en annulation dirigées contre cet arrêté ont été rejetées, le 9 mars 2021, par le tribunal administratif de Nîmes dont le jugement a été confirmé par l'arrêt du 28 octobre 2021 de la cour administrative d'appel de Marseille. Le 1er décembre 2021, le préfet du Gard a pris à l'encontre de M. B... un nouvel arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français. A la suite de son interpellation, le 4 juillet 2023, pour avoir fait circuler au-dessus de la maison d'arrêt de Nîmes un drone auquel était attaché un téléphone portable, la préfète du Gard, par un arrêté du 4 juillet 2023, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Saisi d'une requête tendant à l'annulation de cet arrêté, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a, par un jugement du 26 octobre 2023, dont M. B... relève appel, rejeté sa demande.
Sur les conclusions en annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ".
3. Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l'autorité parentale ou son exercice est retiré, ni lorsque l'enfant est majeur. ".
4. M. B... est le père de deux enfants, de nationalité française, nés en France le
16 mai 2021 et le 25 octobre 2022 de sa relation avec une ressortissante française. A la naissance de ses deux enfants, M. B... ne vivait pas de manière habituelle avec leur mère puisque, selon ses propres déclarations, lors de son audition consécutive à son interpellation pour des faits de détention et de transports de stupéfiants commis le lendemain de la naissance de sa fille, il a indiqué être domicilié chez ses parents au 11, rue Charles Montesquieu à Nîmes alors qu'il ressort des pièces du dossier que la mère de ses enfants demeurait au 18 rue de l'Horloge à Nîmes. De plus, il ne justifierait de sa communauté de vie habituelle avec la mère de ses deux enfants qu'au mieux à compter du 1er mars 2023, date de prise d'effet du bail qu'il a contracté avec cette dernière pour un logement situé 7 avenue Georges Pompidou à Nîmes. Par ailleurs, en se bornant à verser, au titre de l'année 2021, une attestation d'un médecin qui fait état de sa présence lors d'une consultation pour sa fille du 16 septembre 2021, une facture d'achat du 29 mars 2021 d'articles pharmaceutiques pour l'allaitement et les soins corporels pour nourrisson et, au titre de l'année 2022, une facture d'achat de chaussures, M. B... ne justifie pas contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants depuis leur naissance alors même qu'il a indiqué, lors de son audition du 17 mai 2021, recevoir régulièrement des sommes d'argent de la part de ses parents. Enfin, M. B... n'établit pas avoir noué des liens particuliers avec ses enfants et, notamment sa fille, alors que le lendemain de la naissance de celle-ci, il s'est rendu à la prison de Perpignan en possession de produits stupéfiants. Compte tenu de ces éléments, M. B... ne peut être regardé comme contribuant effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants depuis leur naissance ou depuis au moins deux ans. Dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la violation de cet article ne peut qu'être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
7. En dernier lieu, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 7 à 10 du jugement attaqué dès lors qu'en appel, M. B... ne fait état d'aucun élément de droit ou de fait nouveau permettant une critique utile de ces motifs.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 4 juillet 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE:
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2025 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2025.
La rapporteure,
K. Beltrami
Le président,
F. Faïck
La greffière,
C. Lanoux
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL02766