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06/05/2025 | FRANCE | N°23TL01939

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 06 mai 2025, 23TL01939


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C..., Mme D... B... épouse C... et la société Groupama Méditerranée ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales à leur verser les sommes globales de 43 861,41 euros pour les époux C... et de 90 023,45 euros pour la société Groupama Méditerranée, en réparation des différents chefs de préjudice subis du fait d'un incendie dans la résidence secondaire des époux C...,

à Banyuls-sur-Mer, qu'ils estiment imputable à une faute du service départemental d'incendie ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., Mme D... B... épouse C... et la société Groupama Méditerranée ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales à leur verser les sommes globales de 43 861,41 euros pour les époux C... et de 90 023,45 euros pour la société Groupama Méditerranée, en réparation des différents chefs de préjudice subis du fait d'un incendie dans la résidence secondaire des époux C..., à Banyuls-sur-Mer, qu'ils estiment imputable à une faute du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales lors d'une première intervention.

Par un jugement n° 2200599 du 30 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 juillet et le 27 décembre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. et Mme C... et la société Groupama Méditerranée, représentés par Me Capsié, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 mai 2023 ;

2°) de condamner le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales à verser à Mme C... les sommes de 18 218,92 euros au titre de son préjudice immobilier et de 1 642,49 euros au titre de son préjudice mobilier, à verser à M. et Mme C... la somme de 24 000 euros au titre de leur préjudice de jouissance, et à verser à la société Groupama Méditerranée les sommes de 84 611,33 euros au titre du préjudice immobilier et de 5 412,21 euros au titre du préjudice mobilier ;

3°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales la somme de 7 393,64 euros au titre de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales a commis une faute en ne procédant pas à une reconnaissance " au toucher " du conduit de cheminée ainsi qu'à une trouée de conduit et en n'ayant pas fait usage d'une caméra thermique, en méconnaissance des prévisions du règlement d'instruction et de manœuvre ainsi que de la doctrine d'intervention " BSP 118.2 relatif aux règles d'engagement spécifique " ;

- le second incendie est la conséquence directe du premier feu ;

- aucune faute tenant au comportement de M. C... ne peut sérieusement être retenue, il incombait au service départemental d'incendie et de secours de faire appel, au besoin, aux forces de l'ordre pour mener à bien leur intervention ;

- le préjudice immobilier sera réparé par le versement à Mme C... d'une somme de 18 218,92 euros, et à la société Groupama Méditerranée, de 84 611,33 euros, correspondant au plafond de la garantie versée ;

- le préjudice mobilier sera réparé par le versement à Mme C... d'une somme de 1 642,49 euros et de 5 412,21 euros à la société Groupama Méditerranée ;

- le préjudice de jouissance subi par les époux C... sera réparé par l'allocation d'une somme forfaitaire de 1 000 euros par mois à compter du mois de mars 2020 jusqu'à l'intervention de la décision à intervenir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2023, le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales, représenté par Me Pontier, conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce que l'indemnisation sollicitée par les appelants soit ramenée à de plus justes proportions ;

3°) à la mise à la charge des époux C... et de la société Groupama Méditerranée de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité lors de sa première intervention au domicile des époux C..., dès lors notamment que la configuration des lieux rendait impossible la reconnaissance au toucher du conduit dans la chambre du troisième étage et que les diligences accomplies par les sapeurs-pompiers étaient conformes aux préconisations du règlement d'instruction et de manœuvre et adaptées à l'importance du feu ;

- à titre subsidiaire, sa responsabilité doit être écartée du fait de l'absence de lien entre les deux incendies, le second résultant d'un vice de construction et d'une possible cause électrique ou d'un rallumage de feu par M. C... ;

- il n'y a pas davantage de lien de causalité entre la faute alléguée des sapeurs-pompiers et le second incendie dès lors qu'une reconnaissance au toucher n'aurait pas permis, compte tenu du vice de construction et de la configuration des lieux, d'identifier un point chaud ;

- il doit également être tenu compte de plusieurs fautes des victimes, tenant à une absence de ramonage réglementaire des conduits de cheminée, un brûlage à domicile de déchets verts, une non-conformité du conduit de cheminée et au comportement de M. C..., qui s'est opposé au bon déroulement des opérations ;

- à titre infiniment subsidiaire, les conclusions indemnitaires doivent être rejetées dès lors que les préjudices allégués se rapportent à une construction érigée en toute illégalité, ou à tout le moins ramenées à de plus justes proportions dès lors que les préjudices sont surévalués et insuffisamment justifiés.

Par ordonnance du 16 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 29 décembre 2023.

La cour a été informée, le 28 décembre 2023, du décès de Mme C... survenu le 20 décembre 2023.

Par une lettre du 2 juillet 2024, les ayants-droits de Mme C... ont été invités à reprendre l'instance.

Par une lettre du 27 août 2024, le conseil des parties appelantes a répondu à la cour que seule la société Groupama Méditerranée entendait poursuivre l'instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code civil ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté du 1er février 1978 approuvant le règlement d'instruction et de manœuvre des sapeurs-pompiers communaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chalbos,

- les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique,

- et les observations de Me Eskenasy représentant le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales.

Considérant ce qui suit :

1. Le 23 février 2019, un incendie de cheminée s'est déclaré dans la résidence secondaire de Mme C..., située à Banyuls-sur-Mer (Pyrénées-Orientales), alors que son époux faisait brûler des végétaux dans la cheminée du premier étage. Alertés par le voisinage, les sapeurs-pompiers, qui sont intervenus sur place entre 17 h 30 et 19 h 30, ont pu maîtriser le feu. Le 24 février 2019, à 00 h 55, ils ont de nouveau été appelés par un voisin en raison d'un nouvel incendie dans la maison des époux C.... Maîtrisé par les sapeurs-pompiers, l'incendie a néanmoins causé d'importants dégâts au troisième étage de la maison. Estimant que ce second incendie constituait une reprise du premier, imputable à une surveillance insuffisante des sapeurs-pompiers lors de leur première intervention, les époux C... et leur assureur subrogé ont adressé une demande indemnitaire préalable au service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales, reçue le 11 octobre 2021, laquelle est restée sans réponse, faisant naître une décision implicite de rejet. Ils font appel du jugement du 30 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la condamnation du service départemental d'incendie et de secours à réparer les préjudices causés par ce second incendie.

Sur le désistement d'instance :

2. Il résulte de l'instruction que, par une lettre du 27 août 2024, le conseil des époux C... et de la société Groupama Méditerranée a indiqué à la cour que, à la suite du décès de Mme C..., ses héritiers n'entendaient pas reprendre l'instance à leur compte et que, dans ces conditions, seule Groupama Méditerranée entendait poursuivre l'instance engagée. Les ayants-droits de Mme C... et M. C... doivent ainsi être regardés comme s'étant désistés de leur instance. Ce désistement étant pur et simple, rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur l'appel de la société Groupama Méditerranée :

En ce qui concerne la faute commise par le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales :

3. Aux termes de l'article L. 1424-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa version applicable au litige : " Les services d'incendie et de secours sont chargés de la prévention, de la protection et de la lutte contre les incendies. / (...) Dans le cadre de leurs compétences, ils exercent les missions suivantes : / (...) 3° La protection des personnes, des biens et de l'environnement ; / 4° Les secours d'urgence aux personnes victimes d'accidents, de sinistres ou de catastrophes ainsi que leur évacuation ".

4. Il résulte de ces dispositions que la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours est susceptible d'être engagée dans l'hypothèse d'une faute commise dans le fonctionnement du service ou dans la gestion des moyens humains ou matériels mis en œuvre pour lutter contre un incendie ayant contribué à l'aggravation des conséquences dommageables de celui-ci. À ce titre, il incombe aux services de secours et de lutte contre l'incendie de prendre toute mesure de vérification et de contrôle destinée à prévenir, postérieurement à leur intervention, le risque d'une reprise du feu.

5. Aux termes du point 6 " Visite du conduit " de la partie E " Extinction du feu de cheminée " du règlement d'intervention et de manœuvre des sapeurs-pompiers communaux, approuvé par l'arrêté du 1er février 1978 alors en vigueur : " Elle doit être faite aussi souvent qu'il est nécessaire pour opérer l'extinction ; poser les mains (...) sur le mur pour suivre le conduit et juger de la chaleur (...) ; surveiller, après extinction, le refroidissement des parois. (...) Surveiller particulièrement (...) tout ce qui touche au conduit, notamment placards (...). Le feu peut être considéré comme éteint lorsqu'il n'y a plus de chute de matières en ignition et que le refroidissement des parois extérieures du conduit se généralise ". La responsabilité d'un service d'incendie et de secours est susceptible d'être engagée en cas de méconnaissance des règles d'engagement résultant de ce règlement.

6. Il résulte de l'instruction que lors de leur première intervention dans la maison des époux C..., les sapeurs-pompiers ont notamment procédé à l'extinction du feu de cheminée, à une ventilation des étages enfumés et à un ramonage des conduits. Il a ensuite été procédé à une reconnaissance visuelle du conduit de cheminée ainsi que, sur certaines portions, à une reconnaissance au toucher. Il résulte cependant de l'instruction et est d'ailleurs constant que seule une reconnaissance visuelle a été effectuée par le chef d'agrès dans la chambre du troisième étage traversée par le conduit de cheminée. Ainsi que le relève l'expert judiciaire dans son rapport, cette absence de reconnaissance " au toucher " sur la totalité du conduit de cheminée constitue une méconnaissance des préconisations du règlement d'intervention et de manœuvre précité. À cet égard, le défendeur ne peut sérieusement soutenir qu'une reconnaissance tactile aurait été impossible dans la chambre du troisième étage du fait du passage du conduit de cheminée dans un placard. La localisation du conduit de cheminée pouvait en effet être déduite en se référant aux autres étages. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que la reconnaissance tactile complète du conduit aurait été rendue impossible par l'opposition de M. C.... Il apparaît dans ces conditions que les sapeurs-pompiers n'ont pas mis en œuvre les diligences nécessaires, en faisant appel, au besoin et si cela était indispensable pour mener à bien leur opération, aux services de police ou de gendarmerie. L'insuffisante reconnaissance du conduit de cheminée est constitutive d'une faute susceptible d'engager la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales.

7. En revanche, et contrairement à ce que soutient la société Groupama Méditerranée, le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales n'a pas méconnu les préconisations du règlement d'intervention et de manœuvre en s'abstenant de procéder à des trouées du conduit de cheminée. En outre, aucune réglementation opposable au service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales ne lui imposait d'avoir recours à une caméra thermique pour la détection des points chauds. Par suite, il ne peut être retenu à son encontre de faute tenant à l'absence d'utilisation d'un tel instrument.

En ce qui concerne le lien de causalité :

8. En premier lieu, il résulte de l'instruction et en particulier du rapport d'expertise judiciaire, lequel concorde avec le rapport de l'investigateur incendie du bureau enquête incendie Méditerranée, que le second incendie qui s'est déclaré au troisième étage de la maison des époux C... a pour origine la combustion d'une gaine annelée contenant des câbles électriques, présente à l'intérieur de la brique creuse de l'une des parois du conduit de cheminée, lequel présentait un défaut d'étanchéité. La source de combustion a été, selon l'hypothèse la plus probable et sur laquelle s'accordent les experts, une escarbille provenant du feu de végétaux ayant causé le premier incendie de cheminée. Le vice de construction précédemment décrit a ensuite permis la rencontre de cette escarbille avec la gaine électrique, et la combustion s'est ensuite propagée sur des tasseaux de bois à proximité et sur lesquels circulait la gaine électrique. Contrairement à ce que fait valoir le service départemental d'incendie et de secours, aucun élément de l'instruction ne permet d'envisager que l'utilisation d'un appareil électrique aurait été à l'origine de l'incendie, lequel s'est déclaré dans un étage inoccupé par les époux C..., une telle hypothèse ayant été exclue tant par l'expert judiciaire que par l'investigateur incendie du bureau enquête incendie Méditerranée. Enfin, s'il est vrai que M. C... a, lors de la première intervention du service départemental d'incendie et de secours, exprimé son intention de rallumer un feu, une telle hypothèse, démentie par les époux C... lors des opérations d'expertise, apparaît peu probable compte tenu du mouillage de l'âtre par les sapeurs-pompiers lors de l'extinction du premier feu de cheminée, ainsi que l'a d'ailleurs relevé l'expert judiciaire dans son rapport. Il s'ensuit que le second incendie constituait bien une reprise du premier feu et qu'il a été causé par un vice de construction, le conduit de cheminée présentant plusieurs graves non-conformités en sus de celles déjà évoquées, de même que par une sécurisation insuffisante de l'installation électrique du troisième étage, propice à la création d'un court-circuit alimenté, sans lesquels l'incendie n'aurait pas connu un tel développement.

9. En outre, si l'incendie a pour origine la non-conformité du conduit de cheminée et de l'installation électrique du troisième étage, l'insuffisante reconnaissance effectuée par les pompiers lors de leur première intervention chez les époux C... a contribué à son développement dès lors que la faute citée au point 6 a empêché la détection d'un point chaud dans le conduit de cheminée traversant la chambre du troisième étage et n'a pas permis d'éviter la reprise d'incendie. Contrairement à ce que soutient le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales, il ne résulte pas de l'instruction que la reconnaissance tactile du conduit n'aurait pas permis d'identifier le point chaud, alors que les trois conduits de cheminée étaient côte à côte dans le mur à inspecter et qu'une reconnaissance attentive du conduit de cheminée à la suite du premier incendie aurait dû porter sur les trois conduits dès lors que ceux-ci étaient communicants.

10. Il résulte de ce qui précède que la reprise d'incendie a pour origine un vice de construction et n'a pas pu être identifiée par le service départemental d'incendie et de secours du fait d'une reconnaissance insuffisante lors de sa première intervention. Il s'ensuit que la faute du service départemental d'incendie et de secours est en lien de causalité avec les dommages subis par les époux C... et est de nature à engager sa responsabilité à hauteur de 50 %.

11. En second lieu, il résulte de l'instruction et notamment des diverses attestations versées par le service départemental d'incendie et de secours que lors de la première intervention des sapeurs-pompiers, appelés par le voisinage, M. C..., vraisemblablement inconscient du danger et de l'existence d'un incendie de cheminée, a manifesté à l'égard de l'équipe de secours un comportement hostile, de nature à entraver le bon déroulement des opérations. Il a ainsi tenté de s'opposer à certaines manœuvres des sapeurs-pompiers ainsi que d'obtenir leur départ prématuré, et s'est abstenu de leur indiquer l'emplacement du conduit de cheminée. Une telle faute est de nature à atténuer la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales. Compte tenu d'une telle faute de la victime, il convient d'atténuer la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours précédemment décrite en la ramenant à 25 %.

12. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que les autres fautes des époux C..., à savoir l'absence d'entretien réglementaire de leurs cheminées et le brûlage de déchets verts, auraient eu, eu égard notamment à la nature même des éléments brûlés, une particulière influence sur la survenance des dommages et devraient par suite être retenues pour atténuer la responsabilité du service départemental d'incendie et de secours.

En ce qui concerne les préjudices :

13. Il résulte des dispositions de l'article 1346-4 du code civil et de l'article L. 121-12 du code des assurances que la subrogation a lieu dans la mesure de ce qui a été payé et dans la limite de la créance détenue par l'assuré contre le responsable.

14. Saisi d'un recours subrogatoire exercé par l'assureur subrogé dans les droits de son assuré contre le tiers débiteur, il revient au juge, si les conditions d'engagement de la responsabilité du tiers débiteur sont remplies, de déterminer le droit à réparation de l'assuré, avant de déterminer les droits de l'assureur subrogé, qui ne peuvent excéder le montant de l'indemnité d'assurance qu'il a versée à son assuré. Si le juge retient un partage de responsabilité en raison d'une faute commise par l'assuré, ce partage doit être appliqué à l'assiette constituée par l'évaluation du préjudice subi par l'assuré et non au montant de l'indemnité versée par l'assureur à son assuré.

15. D'une part, il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que le préjudice matériel subi par Mme C... et correspondant à la reprise des désordres causés par l'incendie, lequel comprend également les frais de maîtrise d'œuvre contrairement à ce que fait valoir le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales en défense, doit être évalué à 101 521,25 euros. Compte tenu de la part de responsabilité de ce dernier, le préjudice indemnisable de l'assuré s'élève à 25 380,31 euros.

16. D'autre part, il résulte du rapport d'expertise complémentaire réalisé à la demande de l'assureur des époux C... que le préjudice matériel subi par Mme C..., qui correspond à la valeur de rachat de l'ensemble des éléments mobiliers détruits dans l'incendie, doit être évalué à la somme de 7 055,39 euros. Compte tenu de la part de responsabilité du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales, le préjudice indemnisable de l'assurée s'élève à 1 763,85 euros.

17. Enfin, contrairement à ce que soutient le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales, il ne résulte pas de l'instruction que les chefs de préjudice de l'assurée ainsi évalués se rapporteraient à une construction illégale, ni qu'ils résulteraient de l'irrégularité de sa situation, et ne seraient par suite pas indemnisables du fait du caractère illégitime de la situation de la victime. La société Groupama Méditerranée justifiant avoir versé à Mme C..., en exécution de son contrat d'assurance, la somme globale de 113 319,36 euros en réparation de ses préjudices mobilier et immobilier, elle est fondée, en application des principes rappelés au point 14, à réclamer au service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales la somme globale de 27 144,16 euros, selon le partage de responsabilité retenu par le présent arrêt, appliqué à l'évaluation des préjudices subis par son assuré, lesquels sont constitutifs de l'assiette de ses droits en qualité d'assureur subrogé.

18. Il résulte de tout ce qui précède que la société Groupama Méditerranée est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

19. En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales la somme de 1 500 euros à verser à la société Groupama Méditerranée au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens. Il n'y a en revanche pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales, partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de M. C... et des ayants-droits de Mme C....

Article 2 : Le jugement du 30 mai 2023 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 3 : Le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales est condamné à verser la somme de 27 144,16 euros à la société Groupama Méditerranée.

Article 4 : Le service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales versera à la société Groupama Méditerranée la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la société Groupama Méditerranée et au service départemental d'incendie et de secours des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 10 avril 2025, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Chalbos, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2025.

La rapporteure,

C. Chalbos

Le président,

É. Rey-BèthbéderLe greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL01939


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL01939
Date de la décision : 06/05/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-06-01 Responsabilité de la puissance publique. - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. - Services publics communaux. - Service public de lutte contre l'incendie.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: Mme Camille Chalbos
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : ABEILLE & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-06;23tl01939 ?
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