Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 25 avril 2022 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.
Par un jugement n° 2204929 du 20 avril 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre et 26 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Rostin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 avril 2023 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) d'annuler la décision du 25 avril 2022 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " ou de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier, dès lors que le tribunal n'a pas communiqué au préfet le mémoire en réplique qu'il avait présenté le 15 mars 2023 et n'a pas pris en compte les éléments nouveaux qu'il contenait ;
- la décision attaquée est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation et de celle de ses enfants ;
- elle est entachée d'erreurs de droit, dès lors que le préfet lui oppose à tort l'absence de présentation d'un visa de long séjour et l'absence de qualification, d'expérience particulière et significative et de diplôme en rapport avec l'emploi envisagé ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.
Par une ordonnance du 27 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 novembre 2023.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 août 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 1er avril 2021 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Lafon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité ghanéenne, fait appel du jugement du 20 avril 2023 du tribunal administratif de Toulouse qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 avril 2022 par laquelle le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) ". La circonstance que le mémoire de M. B..., enregistré le 15 mars 2023 devant le tribunal administratif, n'a pas été communiqué au préfet de la Haute-Garonne n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à l'égard du requérant et ne saurait, dès lors, être utilement invoqué par lui. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments soulevés, n'ont pas examiné et pris en compte les éléments contenus dans ce mémoire. Il en résulte que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, la décision attaquée, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent, notamment des éléments précis concernant la situation de M. B..., est suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Garonne ne s'est pas livré à un examen particulier de l'ensemble de la situation de M. B... avant de prendre la décision contestée.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". Il ressort des mentions de la décision attaquée que le préfet de la Haute-Garonne ne s'est pas tenu à l'absence de visa de long séjour pour rejeter sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par ailleurs, il pouvait à bon droit opposer, dans le cadre de l'examen de l'ensemble de la situation de l'intéressé et des caractéristiques de l'emploi concerné, la circonstance que l'appelant ne détenait pas une qualification, une expérience particulière et significative et un diplôme en rapport avec cet emploi. M. B... n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'en lui opposant ces conditions, le préfet aurait commis une erreur de droit.
6. En quatrième lieu, M. B..., qui est né le 1er février 1996, déclare être entré en France le 10 septembre 2017. Il est père de deux enfants, nés le 20 septembre 2018 et le 15 janvier 2022, qui résident sur le territoire national avec leur mère, ressortissante nigériane, dont il est séparé. Par un jugement du 1er février 2021, la juge aux affaires familiales au tribunal judiciaire de Toulouse a, s'agissant du premier enfant, constaté l'exercice en commun de l'autorité parentale par les deux parents, fixé la résidence habituelle de cet enfant chez la mère, accordé à M. B... un droit d'accueil et dispensé ce dernier, compte tenu de son impécuniosité, de contribution aux frais d'entretien et d'éducation, tout en mettant à sa charge la moitié des frais de crèche. En se bornant à produire des photographies non datées et non probantes, des attestations de proches établies pour les besoins de la cause, un " certificat de présence " établi le 1er juin 2022 par la directrice de l'école où est scolarisé son fils aîné et le témoignage d'un intervenant social relatant, le 18 janvier 2023, la qualité des liens noués avec ses enfants, à l'égard desquels il exerce conjointement l'autorité parentale, l'appelant, qui ne justifie pas avoir exercé son droit de visite, n'établit pas entretenir, à la date de la décision attaquée, des relations suivies avec ces derniers et participer à ce titre à leur éducation. En outre, les justificatifs d'achats d'articles pour enfants qu'il verse au dossier ne couvrent, à l'exclusion de ceux qui sont postérieurs à la décision attaquée, que les périodes de mai à décembre 2019 et d'avril 2021 à janvier 2022 et se limitent, pour cette seconde période, à cinq factures pour un montant total de 819 euros. Dans ces conditions et même en tenant compte de sa situation financière, il doit être regardé comme ne contribuant pas effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants à la date de la décision attaquée. Par ailleurs, M. B... n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où réside notamment sa mère. Dans l'ensemble de ces conditions, alors même que l'intéressé justifie d'une demande d'autorisation de travail, établie le 20 avril 2021 pour un emploi d'aide carreleur dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps plein, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En cinquième lieu, il résulte des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que M. B... ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants. Celui-ci n'est donc pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de ces derniers n'aurait pas été suffisamment pris en compte.
8. En sixième lieu, M. B..., s'il bénéficie d'une promesse d'embauche en qualité d'aide carreleur, ne justifie ni de qualifications ou de diplômes en rapport avec cette activité professionnelle, ni d'une expérience particulière pour ce type de poste. En outre, il n'est pas établi que ce métier connaîtrait une grave pénurie de main d'œuvre. Enfin, M. B... n'établit, en tout état de cause, aucun risque de subir personnellement des persécutions en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions et compte tenu des circonstances évoquées au point 6 du présent arrêt, les éléments apportés par M. B... ne sauraient, à eux seuls, révéler l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur ce point doit être écarté.
9. En dernier lieu, aucune des circonstances évoquées précédemment n'est de nature à faire regarder la décision attaquée comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, où siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Fougères, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 avril 2025.
Le rapporteur,
N. Lafon
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL02295