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23/01/2025 | FRANCE | N°23TL00196

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 23 janvier 2025, 23TL00196


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.

Par une ordonnance n° 462171 du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a transmis, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, sa demande au tribunal administratif de Montpellier

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Par un jugement n° 2023949 du 21 novembre 2022, le tribunal administratif de Montp...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015.

Par une ordonnance n° 462171 du 4 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a transmis, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, sa demande au tribunal administratif de Montpellier.

Par un jugement n° 2023949 du 21 novembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Juette, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 novembre 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les sommes figurant sur son compte courant d'associé dans la société Eduniversal correspondent à des primes exceptionnelles et d'intéressement, imposables, tant au regard de l'article 82 du code général des impôts que de la doctrine administrative, dans la catégorie des traitements et salaires et non de celle des revenus de capitaux mobiliers ;

- les sommes litigieuses n'ayant été encaissées qu'en 2016, elles ne pouvaient, sauf à méconnaître l'article 156 du code général des impôts et la doctrine administrative, être soumises à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2015 ;

- l'application de la majoration pour manquement délibéré n'est pas justifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2023, le ministre chargé des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 20 juin 2024 a prononcé la clôture de l'instruction à la même date en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chalbos,

- les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est le président et directeur général de la société Eduniversal, qui exerce une activité de conseil en orientation scolaire, universitaire et professionnelle, et qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2016. À l'issue des opérations de contrôle, l'administration fiscale a informé M. A..., par une proposition de rectification du 26 septembre 2017, de son intention de mettre à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2015, à raison de sommes inscrites au crédit de ses comptes courants d'associé dans la société précitée, regardées par le service comme des revenus de capitaux mobiliers. Ces impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement le 28 novembre 2018 et contestées en vain par M. A.... Ce dernier fait appel du jugement du 21 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les impositions supplémentaires :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 79 du code général des impôts : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu (...) ". Aux termes de l'article 82 du même code : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme des revenus distribués : / (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés (...) ". Les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus et ne sont alors imposables que dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

4. Il résulte de l'instruction que le service a constaté, lors des opérations de vérification de comptabilité de la société Eduniversal, que les deux comptes courants d'associé détenus par M. A... avaient été crédités, au 30 septembre 2015, de sommes pour un total de 131 346,50 euros, en provenance du compte " autres charges à payer ", lequel a été débité du même montant le même jour, un tel jeu d'écritures ayant eu pour effet de solder les comptes courants d'associé de M. A..., jusqu'alors débiteurs. En application des dispositions citées au point 3, l'administration fiscale a considéré que ces sommes étaient réputées constituer des revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Pour renverser cette présomption, M. A... soutient que les sommes litigieuses correspondent à des primes exceptionnelles et d'intéressement, imposables dans la catégorie des traitements et salaires, et produit à l'appui de ses dires deux procès-verbaux de délibérations des 13 juin et 24 septembre 2014 par lesquelles le conseil d'administration a, pour la première, décidé de lui verser une prime exceptionnelle de 62 500 euros au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2013, et pour la seconde, approuvé le montant d'une prime exceptionnelle de 60 000 euros et d'une prime d'intéressement de 1 % du chiffre d'affaires susceptibles de lui être versées à l'issue de l'exercice clos le 30 septembre 2015. Ces délibérations, qui n'indiquent pas avec précision et certitude la date de versement des primes dont s'agit, ne peuvent toutefois être rapprochées des sommes inscrites au crédit des comptes courants d'associé de M. A..., faute, d'une part, de justifier de la correspondance des montants en cause, et faute, d'autre part et surtout, de produire les bulletins de paie correspondants aux sommes créditées sur ses comptes courants, dont les mentions permettraient de justifier de leur nature de primes. En outre, ni les primes évoquées dans les délibérations produites par M. A..., ni les sommes regardées comme des revenus distribués par le service, ne peuvent être rapprochées des montants de 52 424,82 euros, 47 750,80 euros et 40 000 euros provisionnés sur le compte " autres charges à payer ". Il s'ensuit que M. A... n'établit pas la nature alléguée des sommes figurant au crédit de ses comptes courants d'associé et ne renverse pas la présomption de revenus distribués qui s'y attache. L'administration était donc fondée à imposer ces sommes sur le fondement des dispositions précitées.

5. En second lieu, aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Aux termes de l'article 156 du même article : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, sont celles qui, au cours de cette année, ont été mises à la disposition du contribuable, soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant sur lequel l'intéressé a opéré, ou aurait pu, en droit ou en fait, opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre. Les revenus mentionnés au point 4 sont ainsi présumés distribués à la date de clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si le contribuable ou l'administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date.

6. Ainsi que cela a été dit, les sommes litigieuses ont été inscrites aux comptes courants de M. A... le 30 septembre 2015. L'appelant n'apporte aucun élément tendant à établir que le prélèvement de ces sommes sur ses comptes aurait été, au vu de la situation de la société Eduniversal, impossible juridiquement ou financièrement. Il résulte d'ailleurs de l'instruction qu'il a pu procéder à des prélèvements sur ses comptes courants d'associé au cours de l'exercice 2015. L'appelant n'établit pas davantage que la distribution des sommes en cause aurait été, en fait, postérieure à 2015. N'est en particulier pas de nature à constituer une telle preuve la circonstance que les sommes litigieuses n'aient pas été versées sur ses comptes bancaires personnels au cours de l'année 2015, ni celle selon laquelle le total des revenus encaissés sur ses comptes personnels en 2015 ne diffèrerait que de 3 324 euros avec ses revenus déclarés au titre de la même année. Il ne peut davantage utilement se prévaloir de la politique de versement des primes de la société Eduniversal pour soutenir que l'inscription des sommes au crédit de ses comptes courants d'associé, dont la nature alléguée de primes n'a au demeurant pas pu être démontrée, n'emporterait pas leur mise à disposition. Il s'ensuit que l'appelant, qui a eu la disposition des sommes litigieuses au cours de l'année 2015 du fait de leur inscription au crédit de ses comptes courants d'associé, n'est pas fondé à soutenir que l'administration fiscale aurait méconnu les dispositions de l'article 156 du code général des impôts en imposant les revenus correspondants au titre de l'année 2015.

S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

7. Les réponses ministérielles n° 43870, publiée le 2 avril 1978, n° 24563, publiée le 10 mars 1980, et n° 25893, publiée le 7 avril 1980, de même que les doctrines administratives référencées au paragraphe n° 80 du BOI-IR-BASE-10-10-10-40, publiée le 12 septembre 2012, et au paragraphe 10 du BOI-RSA-CHAMP-20-30-10-10, publiée le 17 février 2017, ne comportent, en tout état de cause, aucune interprétation différente de la loi fiscale dont l'appelant pourrait utilement se prévaloir.

En ce qui concerne les pénalités :

8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

9. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 7 de leur jugement, le moyen repris en appel par M. A..., sans élément nouveau, tiré de ce que l'application de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1759 du code général des impôts serait injustifiée.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Chalbos, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2025.

La rapporteure,

C. Chalbos

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 23TL00196


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00196
Date de la décision : 23/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: Mme Camille Chalbos
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : STRATÉYS CONTENTIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-23;23tl00196 ?
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