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26/12/2024 | FRANCE | N°21TL04595

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 2ème chambre, 26 décembre 2024, 21TL04595


Vu la procédure suivante :



Par un arrêt avant-dire-droit du 12 octobre 2023, la cour administrative d'appel de Toulouse a annulé le jugement n°2000507, 2000508, 2000638, 2000639 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier (article 1er), sursis à statuer sur les conclusions de la requête de Mme C... B... jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois courant à compter de la notification de l'arrêt, imparti à la commune de Sorède pour produire une décision de l'autorité environnementale portant dispense d'étude d'impact (article 2) et réserv

jusqu'en fin d'instance tous droits, moyens et conclusions des parties sur...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant-dire-droit du 12 octobre 2023, la cour administrative d'appel de Toulouse a annulé le jugement n°2000507, 2000508, 2000638, 2000639 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier (article 1er), sursis à statuer sur les conclusions de la requête de Mme C... B... jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois courant à compter de la notification de l'arrêt, imparti à la commune de Sorède pour produire une décision de l'autorité environnementale portant dispense d'étude d'impact (article 2) et réservé jusqu'en fin d'instance tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'a pas été expressément statué par l'arrêt (article 3).

Par une décision n° 490030 du 17 juin 2024, le Conseil d'Etat n'a pas admis le pourvoi de Mme B... à l'encontre de cet arrêt.

Par des mémoires, enregistrés le 19 février 2024, le 5 mai 2024, le 30 juillet 2024 et le 18 septembre 2024, Mme B..., représentée par Me Chaboussou, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de déclarer nulle et non avenue la décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024, ou à titre subsidiaire, de l'annuler ;

2°) d'annuler ou de réformer le jugement n°2000507, 2000508, 2000638, 2000639 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier ;

3°) d'annuler l'arrêté préfectoral n° PREF/DCL/BCLUE/2019-0001 du 18 décembre 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement urbain " Le Village ER5 " ;

4°) d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2019 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré cessibles au profit de la commune de Sorède les parcelles de terrains désignées dans l'état parcellaire annexé à l'arrêté nécessaires au projet d'aménagement urbain " Le Village ER5 " sous forme d'une greffe urbaine ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat et de la commune de Sorède une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024 prise au nom du préfet de région, qui aurait dû se dessaisir au profit de la mission régionale de l'autorité environnementale, doit être regardée comme inexistante eu égard au conflit d'intérêt qui l'entache ;

- une décision tacite de soumission à l'étude d'impact étant née le 25 février 2024, les arrêtés contestés sont intervenus à l'issue d'une procédure irrégulière à défaut d'étude d'impact ;

- le signataire de cette décision ne disposait pas d'une délégation de signature régulière du préfet de région ou d'une subdélégation justifiée ;

- cette décision procède au retrait illégal de la décision tacite de soumission à l'étude d'impact née le 25 février 2024 et n'est pas motivée sur ce point ;

- le délai de sept jours imparti à l'agence régionale de santé pour émettre un avis était trop court ;

- le dossier déposé pour un examen au cas par cas est entaché d'insuffisances, erroné ou défaillant sur plusieurs points, ce qui a faussé l'appréciation donnée ;

- la décision de dispense d'étude d'impact est entachée d'erreur d'appréciation ;

- les moyens réservés par la cour doivent être accueillis ;

- à supposer légale la décision de dispense d'étude d'impact, la procédure reste irrégulière dès lors que cette décision ne figurait pas dans le dossier d'enquête publique ;

- il appartenait au préfet des Pyrénées-Orientales de prendre une nouvelle décision prenant en compte l'existence de la décision de dispense d'étude d'impact ;

- il n'existe pas de recours préalable obligatoire dans le cas de décision de dispense d'étude d'impact.

Par un mémoire en production de pièces, enregistré le 7 mars 2024, la commune de Sorède a produit une décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024.

Par un mémoire enregistré le 20 mars 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que la décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024 a eu pour effet de régulariser le vice de procédure relevé au point 10 de l'arrêt avant dire droit seul susceptible de fonder l'annulation de l'arrêté contesté.

Par des mémoires en défense enregistrés les 1er juillet et 29 août 2024, la commune de Sorède, représentée par Me Vigo, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme B... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen nouveau tiré de l'incompétence du préfet de région en tant qu'auteur de la décision de dispense d'étude d'impact doit être écarté ; il n'est pas susceptible d'entraîner, en tout état de cause, l'inexistence de cette décision ;

- il en est de même du moyen de l'absence de nouvelle délégation de signature du préfet de région au directeur de la DREAL qui manque en fait ;

- la décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024 pouvait légalement procéder au retrait de la décision implicite née le 25 février 2024 qui aurait soumis le projet à étude d'impact dès lors que celle-ci n'était pas devenue définitive ;

- le délai de sept jours laissé à l'agence régionale de santé pour émettre son avis n'est pas irrégulier ;

- le dossier déposé pour un examen au cas par cas n'est pas entaché d'insuffisances ou d'erreurs ;

- les erreurs de plume qui affectent la décision sont sans incidence sur sa légalité ; il en est notamment ainsi de celle concernant la superficie du projet ;

- la décision de dispense d'étude d'impact n'est pas entachée d'erreur d'appréciation en ce qu'elle estime que le projet n'est pas susceptible d'entraîner des impacts notables sur l'environnement ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas recevables au regard du caractère définitif de l'arrêt avant dire droit ;

- les conclusions tendant à l'annulation de la décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024 sont irrecevables, à défaut de dépôt du recours préalable obligatoire prévu par les dispositions de l'article R. 122-3-1 du code de l'environnement devant le préfet de région avant le 7 mai 2024.

Par ordonnance du 19 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 11 octobre 2024.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, par un avis en date du 29 novembre 2024, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés de l'irrecevabilité des conclusions de Mme B... tendant, d'une part, à ce que soit déclarée nulle et non avenue la décision de dispense d'étude d'impact de l'autorité environnementale en date du 7 mars 2024, ou à titre subsidiaire, à son annulation, cette décision constituant un acte préparatoire, d'autre part, à l'annulation ou la réformation du jugement n°2000507, 2000508, 2000638, 2000639 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier qui a déjà été annulé par l'arrêt avant-dire-droit du 12 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret, présidente de chambre,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Chaboussou, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 18 décembre 2019, le préfet des Pyrénées-Orientales a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement urbain " le village ER 5 " sous forme d'une greffe urbaine sur le territoire de la commune de Sorède puis, par arrêté du 19 décembre 2019, cette même autorité a déclaré cessibles au profit de la commune de Sorède les parcelles de terrains nécessaires à ce projet, dont cinq parcelles ... appartenant à Mme B.... A la suite de l'appel formé par Mme B..., la présente cour, après avoir annulé pour irrégularité le jugement n°2000507, 2000508, 2000638, 2000639 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier, a sursis à statuer dans l'attente de la production par la commune de Sorède d'une décision de l'autorité environnementale portant dispense d'étude d'impact pour examiner les moyens sur lesquels il n'avait pas été statué, par un arrêt avant-dire-droit du 12 octobre 2023 devenu définitif après la décision de non admission en cassation rendue par le Conseil d'Etat le 17 juin 2024.

2. L'arrêt avant-dire-droit du 12 octobre 2023 a retenu que le projet devait être soumis à la procédure d'examen au " cas par cas ", en application des dispositions des articles L. 122-1 et R. 122-2 du code de l'environnement. Pour régulariser la procédure préalable à la déclaration d'utilité publique, la commune de Sorède a déposé, auprès des services de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, un formulaire de demande d'examen au cas par cas afin d'examiner la nécessité de réaliser une étude d'impact concernant le projet d'aménagement urbain " le village ER 5 ". Une décision de dispense d'étude d'impact après examen au cas par cas, prise sur le fondement du IV de l'article R. 122-3-1 du code de l'environnement en vigueur depuis le 1er août 2021, a été rendue le 7 mars 2024, au nom du préfet de la région Occitanie, dont Mme B... conteste la régularité.

Sur la recevabilité des conclusions :

3. Si la décision imposant la réalisation d'une évaluation environnementale est, en vertu du IV de l'article R. 122-3-1 du code de l'environnement, un acte faisant grief susceptible d'être déféré au juge de l'excès de pouvoir après exercice d'un recours administratif préalable, tel n'est pas le cas de l'acte par lequel l'autorité de l'Etat compétente en matière d'environnement décide de dispenser d'évaluation environnementale un plan, schéma, programme ou autre document de planification mentionné à l'article L. 122-4 du code de l'environnement. Un tel acte a le caractère d'une mesure préparatoire à l'élaboration de ce plan, schéma, programme ou document, insusceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir, eu égard tant à son objet qu'aux règles particulières prévues au IV de l'article R. 122-3-1 du code de l'environnement pour contester la décision imposant la réalisation d'une évaluation environnementale. La décision de dispense d'évaluation environnementale peut, en revanche, être contestée à l'occasion de l'exercice d'un recours contre la décision approuvant le plan, schéma, programme ou document.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas recevable à solliciter directement l'annulation de la décision de dispense d'étude d'impact rendue le 7 mars 2024 ni que celle-ci soit déclarée " nulle et non avenue ", mais qu'elle peut seulement exciper de son illégalité à l'appui de sa demande d'annulation des arrêtés du préfet des Pyrénées-Orientales des 18 et 19 décembre 2019. Par suite, les conclusions en cause doivent être rejetées comme irrecevables.

5. Par ailleurs, le jugement n°2000507, 2000508, 2000638, 2000639 du 5 octobre 2021 du tribunal administratif de Montpellier ayant déjà été annulé par l'arrêt avant-dire-droit du 12 octobre 2023, ses conclusions tendant à l'annulation dudit jugement sont dépourvues d'objet et doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur l'exception d'illégalité de la décision de dispense d'étude d'impact rendue le 7 mars 2024 :

En ce qui concerne l'autorité qui a pris la décision :

6. En premier lieu, il n'est pas contesté qu'en vertu du 3° du I de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, l'autorité en charge de l'examen au cas par cas prévue au IV du même article est le préfet de la région Occitanie. Si Mme B... soutient qu'il aurait dû s'estimer en situation de conflit d'intérêt et confier le dossier à la mission régionale de l'autorité environnementale de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable de la région Occitanie, par application des dispositions du II de l'article R. 122-24-2 du même code, il est néanmoins constant que cette autorité est distincte de celle ayant pris les arrêtés attaqués des 18 et 19 décembre 2019 qui est le préfet des Pyrénées-Orientales et doit être regardée comme disposant d'une autonomie réelle. Par suite, ce moyen doit être écarté.

7. En second lieu, si la décision de dispense d'étude d'impact rendue le 7 mars 2024 vise à tort une délégation de signature du 25 mai 2020 rendue caduque par la nomination, le 11 janvier 2023, d'un nouveau préfet de région, ce dernier a donné, par un arrêté du 30 janvier 2023 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour, à M. D..., directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de la région Occitanie, délégation pour signer notamment ce type de décisions lorsque le préfet est l'autorité en charge de l'examen au cas par cas. M. A... a lui-même consenti, par arrêté du 15 janvier 2024, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du 18 janvier suivant, des subdélégations notamment à M. E..., qui a signé la décision litigieuse en qualité de chef de la division autorité environnementale Est. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne les vices de procédure :

8. Aux termes du IV de l'article R. 122-3-1 du code de l'environnement, applicable à l'espèce : " -L'autorité chargée de l'examen au cas par cas apprécie, dans un délai de trente-cinq jours à compter de la date de réception du formulaire complet, sur la base des informations fournies par le maître d'ouvrage, si les incidences du projet sur l'environnement et la santé humaine sont notables au regard des critères pertinents énumérés à l'annexe du présent article. Le cas échéant, elle tient compte des résultats disponibles d'autres évaluations pertinentes des incidences sur l'environnement requises au titre d'autres législations applicables. / L'autorité chargée de l'examen au cas par cas peut solliciter un avis du directeur général de l'agence régionale de santé concerné par le projet.( ...)./L'autorité chargée de l'examen au cas par cas indique les motifs qui fondent sa décision au regard des critères pertinents énumérés à l'annexe du présent article, ainsi que des mesures et caractéristiques du projet présentées par le maître d'ouvrage et destinées à éviter ou réduire les effets négatifs notables de celui-ci sur l'environnement et la santé humaine./L'absence de réponse dans le délai mentionné au premier alinéa du présent IV vaut obligation de réaliser une évaluation environnementale. " . Aux termes du I de l'article R 122-3-1 du même code : " Pour les projets relevant d'un examen au cas par cas, en application de l'article R. 122-2, le maître d'ouvrage décrit les caractéristiques de l'ensemble du projet, y compris les éventuels travaux de démolition, ainsi que les incidences notables que son projet est susceptible d'avoir sur l'environnement et la santé humaine. Il décrit également le cas échéant les mesures et les caractéristiques du projet destinées à éviter ou réduire les effets négatifs notables de son projet sur l'environnement ou la santé humaine ".

9. En premier lieu, si la décision de dispense d'étude d'impact rendue le 7 mars 2024 procède au retrait de la décision tacite de soumission à l'étude d'impact, née le 25 février 2024, à l'expiration du délai de 35 jours fixé par les dispositions précitées du IV de l'article R. 122-3-1 du code de l'environnement suivant le dépôt du dossier complet, le 22 janvier 2024, cette décision de retrait a pu légalement intervenir dans un délai de deux mois suivant la naissance de la décision tacite. Par ailleurs, cette décision est suffisamment motivée dès lors qu'elle procède à l'examen des critères pertinents énumérés à l'annexe audit article. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de ce retrait doit être écarté.

10. En deuxième lieu, il ressort des mentions de la décision de dispense d'étude d'impact qu'elle a été rendue le 7 mars 2024 après la saisine de l'agence régionale de santé en date du 14 février 2024, sans que celle-ci ait pu émettre un avis. Toutefois, compte tenu du bref délai de trente-cinq jours imparti à l'autorité en charge de l'examen au cas par cas, cette circonstance n'est pas de nature à entacher la procédure d'irrégularité alors qu'au demeurant cette consultation n'était pas obligatoire et qu'en tout état de cause, la décision expresse de dispense d'étude d'impact est intervenue au terme d'un délai de plus de trois semaines après cette saisine.

11. En troisième lieu, Mme B... soutient que le dossier déposé pour un examen au cas par cas serait entaché d'insuffisances, erroné ou défaillant sur plusieurs points, ce qui aurait faussé l'appréciation donnée. Il ressort des pièces du dossier que le dossier soumis à l'examen au cas par cas se compose de l'imprimé CERFA réglementaire dûment rempli et comporte en annexe une étude réalisée par le bureau CRBe de 93 pages dont le contenu est conforme aux critères pertinents fixés à l'annexe de l'article R. 122-3-1. S'il est vrai que la requérante a relevé que la décision de dispense d'étude d'impact comporte des erreurs matérielles, en ce qu'elle fait référence à une étude du cabinet Barbanson alors qu'il s'agit du bureau CRBe et à une superficie du secteur concerné de 0,78 ha au lieu de 0,87 ha, ces erreurs de plume sont sans incidence sur le bien-fondé de la décision. Mme B... critique le contenu de cette étude du bureau CRBe en ce qu'elle contiendrait des incertitudes sur la présence de commerces au rez-de-chaussée des immeubles d'habitation à construire ou sur la nature du revêtement des rues piétonnes, qu'elle n'étudierait pas les incidences cumulées de ce projet avec d'autres projets situés à proximité, ni les impacts du projet sur les ressources du sol, ni l'impact des terrassements à réaliser, ni ceux sur le ruissellement des sols, sur la biodiversité, l'avifaune, la flore, les coléoptères et insectes ou la santé humaine. Elle indique en outre que n'ont pas été décrites les mesures destinées à éviter ou réduire les effets négatifs notables du projet. Toutefois, cette étude comportait une présentation succincte du projet et de ses alentours avec sa localisation et ses caractéristiques principales, l'état initial de la zone d'études, portant sur les milieux naturels et la biodiversité, l'état des risques majeurs, de l'agriculture et de l'urbanisme, l'alimentation en eau potable, les eaux usées et le cadre de vie, ainsi que l'analyse thématique des incidences et mesures associées concernant la flore, la faune et les habitats, l'impact sur les risques majeurs, l'agriculture, les eaux superficielles et souterraines, qui permettait ainsi à l'autorité environnementale d'apprécier si le projet présentait des caractéristiques et des effets notables sur l'environnement de nature à nécessiter la réalisation d'une étude d'impact, conformément aux prescriptions de l'article R.122-3-1 précité. Par suite, Mme B... n'établit pas que ce dossier, qui ne saurait être similaire à celui d'une étude d'impact, ne mettait pas en mesure l'autorité en charge de l'examen au cas par cas de procéder à un examen rigoureux et de prendre une décision éclairée.

En ce qui concerne le bien-fondé de la décision de dispense d'étude d'impact :

12. La décision de dispense d'étude d'impact, après avoir énoncé la nature du projet et sa localisation au sein d'une zone déjà urbanisée, considère que les impacts potentiels du projet sur l'environnement ne devraient pas être significatifs compte tenu des éléments qu'elle liste. Si Mme B... soutient que le site constitue " un réservoir de biodiversité important pour les oiseaux, les reptiles et les insectes dans un secteur fortement anthropisé/urbanisé par ailleurs ", les éléments qu'elle relève reposent sur des hypothèses non sérieusement étayées quant aux impacts du projet, lequel ne porte, au demeurant, que sur la construction de 34 logements, de hauteur limitée, dans un secteur en dent creuse situé en continuité et à l'ouest du centre du village, comporte la création d'espaces verts et de jardins familiaux, prévoit la préservation et la valorisation des canaux d'irrigation existants et des mesures de gestion économe de l'eau, ainsi que des voies de desserte suffisantes pour absorber la circulation supplémentaire qu'il engendrera. Dans ces conditions, Mme B... n'établit pas que la décision de dispense d'étude d'impact serait entachée d'une erreur d'appréciation.

13. Il résulte de ce qui précède que la décision de dispense d'étude d'impact rendue le 7 mars 2024 a eu pour effet de régulariser le vice de procédure relevé au point 10 de l'arrêt avant-dire-droit. Contrairement à ce que soutient Mme B..., la circonstance que cette décision de dispense d'étude d'impact ne figurait pas dans le dossier soumis à enquête publique n'a pas eu pour effet de vicier de manière substantielle l'appréciation globale que le public a pu porter sur le projet. Il n'était pas non plus nécessaire que le préfet des Pyrénées-Orientales prenne une nouvelle décision à la seule fin de prendre acte de la décision de dispense d'étude d'impact alors qu'en tout état de cause, l'arrêt avant dire droit ne prescrivait pas une telle mesure.

14. Par suite, il y a lieu d'écarter comme inopérant le moyen tiré de ce que l'enquête publique aurait dû être régie par le code de l'environnement. Par ailleurs, en l'absence d'effets négatifs notables sur l'environnement, le moyen tiré de l'absence d'utilité publique du projet doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposé au point 22 de l'arrêt avant-dire-droit et par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que l'absence d'utilité publique du projet entraînerait pour les personnes expropriées une rupture d'égalité devant les charges publiques, doit également être écarté. Il en résulte que l'arrêté du 18 décembre 2019 portant déclaration d'utilité publique n'est pas entaché d'illégalité. Il y a lieu, par voie de conséquence, d'écarter le moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté de cessibilité par la voie de l'exception.

Sur les frais liés au litige :

15. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

16. Il résulte de ces dispositions que le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. La circonstance qu'au vu de la régularisation intervenue en cours d'instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu'elle était illégale et dont il est, par son recours, à l'origine de la régularisation, ne doit pas à elle seule, pour l'application de ces dispositions, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu'il présente à ce titre.

17. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Sorède et par Mme B..., sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Sorède tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à la commune de Sorède et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Dumez-Fauchille, première conseillère,

Mme Bentolila, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe 26 décembre 2024.

La présidente rapporteure,

A. Geslan-Demaret

La première conseillère la plus ancienne,

V. Dumez-FauchilleLa greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21TL04595 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL04595
Date de la décision : 26/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Expropriation pour cause d'utilité publique - Notions générales - Notion d'utilité publique - Existence - Opérations d'aménagement urbain.

Expropriation pour cause d'utilité publique - Règles de procédure contentieuse spéciales - Pouvoirs du juge.

Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Geslan-Demaret
Rapporteur ?: Mme Céline Arquié
Rapporteur public ?: Mme Torelli
Avocat(s) : CHABOUSSOU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-26;21tl04595 ?
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