Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société France Neige a demandé devant le tribunal administratif de Montpellier, avant-dire droit, d'enjoindre à la commune du Barcarès de produire la délibération du 2 novembre 2021 fixant les redevances d'occupation des chalets mis à la disposition d'exploitants dans le cadre du marché de Noël 2021/2022, de communiquer l'ensemble des conventions conclues avec les exploitants ainsi que l'ensemble des quittances éditées pour le recouvrement des loyers dus au titre de ces conventions, et d'annuler l'avis de sommes à payer n° 10100 émis le 4 février 2022 par le maire de la commune du Barcarès pour le recouvrement de la somme de 62 960,40 euros.
Par un jugement n° 2204286 du 25 avril 2024, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée le 29 mai 2024 sous le n° 24TL01358, la société France Neige, représentée par Me Nivet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 avril 2024 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) avant-dire droit, d'enjoindre à la commune du Barcarès de produire la délibération du 2 novembre 2021 du conseil municipal du Barcarès fixant les tarifs d'occupation des chalets composant le village de Noël pour l'année 2021 / 2022, ainsi que l'ensemble des conventions conclues avec les exploitants dans ce cadre et les quittances éditées pour le recouvrement des loyers dus au titre de ces conventions ;
3°) d'annuler l'avis de sommes à payer n° 10100 émis le 4 février 2022 par le maire de la commune du Barcarès pour le recouvrement de la somme de 62 960,40 euros ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société soutient que :
- ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint, avant-dire droit, sur le fondement de l'article R. 611-10 du code de justice administrative, à la commune du Barcarès de produire la délibération du 2 novembre 2021 du conseil municipal du Barcarès, l'ensemble des conventions conclues avec les exploitants du village de Noël et des quittances des loyers dus au titre des conventions, sont justifiées par le fait que ces documents sont communicables, comme l'a estimé la commission d'accès aux documents administratifs dans son avis du 7 juillet 2022 ;
- le titre exécutoire en litige est irrégulier faute d'indiquer suffisamment les bases de liquidation de la créance dont il poursuit le recouvrement ;
- le titre exécutoire est entaché d'illégalité par voie de conséquence de l'irrégularité de la convention d'occupation du domaine public signée, au nom de la commune, par une autorité incompétente ;
- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle a toujours contesté le fait que la commune a indûment doublé le montant des redevances domaniales mises à sa charge au seul motif que deux containers auraient été mis à sa disposition au lieu d'un ;
- le titre exécutoire est entaché d'illégalité interne, du fait de la rupture d'égalité devant les charges publiques et du détournement de pouvoir dont se trouve entachée la fixation des redevances domaniales ; en effet, alors que, depuis plusieurs années, elle participe au village de Noël à Barcarès, et que, pour l'année 2021/ 2022, il lui avait été demandé initialement le paiement, qu'elle avait accepté, d'une redevance de 33 000 euros hors taxes, quelques jours plus tard, la commune l'a informée de ce que le montant de cette redevance serait finalement de 66 240 euros hors taxes ; la société a appris qu'à l'exception de certains d'entre eux, les autres exploitants avaient refusé de s'acquitter de cette augmentation brutale, mais avaient été autorisés à continuer à exploiter leurs chalets, en contrepartie du paiement d'une partie du prix en espèces ; cette pratique a entraîné la mise en examen du maire du Barcarès et son placement en détention provisoire, à la suite d'une plainte déposée par l'association Anticor ; malgré les demandes de la société appelante, la commune refuse toujours de prouver que l'ensemble des participants au marché de Noël ont payé leurs redevances ; la commune n'a pas établi avoir mis en œuvre des procédures de recouvrement des redevances domaniales auprès d'autres exploitants du marché de Noël.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2024, la commune du Barcarès, représentée par Me Enckell conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société France Neige une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 29 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 novembre 2024 à 12h00.
II - Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2024, sous le n° 24TL01953, la société France Neige, représentée par Me Nivet demande à la cour :
1°) de surseoir à l'exécution du jugement du 25 avril 2024 du tribunal administratif de Montpellier en application des dispositions des articles R. 811-16 et R. 811-17 du code de justice administrative ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
La société soutient que les conditions d'octroi du sursis à exécution de ce jugement sont remplies dès lors qu'elle justifie, dans sa requête au fond, de moyens sérieux présentés à l'encontre de l'avis de sommes à payer n° 10100 émis le 4 février 2022 par le maire de la commune du Barcarès pour le recouvrement de la somme de 62 960,40 euros, et que l'exécution du jugement aurait des conséquences difficilement réparables à son égard.
Par une ordonnance du 29 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 novembre 2024 à 12h00.
Par deux courriers du 26 novembre 2024, les parties ont été informées sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative de ce que la cour était susceptible de se fonder sur le moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions tendant, avant-dire droit, à ce que la cour enjoigne à la commune du Barcarès de produire la délibération du 2 novembre 2021 fixant les tarifs d'occupation du village de Noël pour l'année 2021 / 2022, dès lors que cette délibération a été produite en première instance par la commune en annexe de son mémoire en défense du 12 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Nivet, représentant la société France Neige.
Considérant ce qui suit :
1. A l'occasion de l'organisation du village de Noël pour l'année 2021/2022 par la commune du Barcarès, celle-ci a conclu avec la société France Neige une convention de location d'un chalet en vue de lui permettre l'exploitation d'un espace de restauration. Le 4 février 2022, un avis de sommes à payer a été émis à l'encontre de la société France Neige pour le recouvrement de la somme de 62 960,40 euros. La société France Neige a demandé devant le tribunal administratif de Montpellier, avant-dire droit, d'enjoindre à la commune du Barcarès de produire la délibération du 2 novembre 2021 fixant les tarifs d'occupation du village de Noël pour l'année 2021/2022, l'ensemble des conventions conclues avec les exploitants à l'occasion de cette manifestation, ainsi que l'ensemble des quittances éditées concernant les redevances dues au titre de ces conventions. Enfin, la société France Neige a demandé au tribunal l'annulation de l'avis de sommes à payer émis à son encontre pour le recouvrement de la somme de 62 960,40 euros.
2. Par un jugement n° 2204286 du 25 avril 2024, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ces demandes.
3. La société France Neige relève appel de ce jugement et en demande le sursis à exécution.
4. Les requêtes précitées n° 24TL01358 et n° 24TL01953 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la requête au fond :
En ce qui concerne les conclusions tendant à ce que la cour enjoigne à la commune de produire la délibération du 2 novembre 2021, les conventions d'occupation du domaine public signées avec les autres commerçants et les quittances éditées pour le recouvrement des redevances d'occupation :
S'agissant de la délibération du 2 novembre 2021 :
5. Compte tenu de ce que la délibération du 2 novembre 2021 du conseil municipal du Barcarès, fixant les tarifs d'occupation du village de Noël pour l'année 2021/2022, a été produite en première instance en annexe au mémoire en défense du 12 octobre 2023 de la commune, les conclusions présentées par la société appelante tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de produire cette délibération sont, ainsi qu'en ont été informées les parties par le courrier susvisé du 26 novembre 2024, irrecevables et ne peuvent être que rejetées.
S'agissant du surplus des conclusions avant-dire droit :
6. Il résulte de l'instruction que l'avis de sommes à payer n° 10100 en litige, émis le 4 février 2022 par le maire de la commune du Barcarès pour le recouvrement de la somme de 62 960,40 euros, est conforme aux tarifs votés par le conseil municipal par la délibération précitée du 2 novembre 2021 et aux stipulations de la convention d'occupation signée entre la commune du Barcarès et la société France Neige. A cet égard, la délibération prévoyait que la redevance d'occupation d'un chalet situé en zone 1 " Extrémités " était de 33 120 euros hors taxes tandis que la convention d'occupation stipulait, conformément à cette délibération, que la redevance d'occupation s'élevait à 66 240 euros pour la mise à disposition de deux chalets. Ainsi, l'avis de sommes à payer en litige ne poursuit que l'exécution de la délibération du 2 novembre 2021 et de la convention d'occupation. Par ailleurs, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que la convention d'occupation signée entre la commune et la société France Neige est conforme, comme les conventions signées avec les autres exploitants du marché de Noël, à un modèle-type établi sur le fondement de la délibération précitée du 2 novembre 2021. Dans ces conditions, les moyens invoqués par la société appelante, tirés de la rupture d'égalité dans la fixation et dans l'encaissement des redevances domaniales entre les différents participants du village de Noël pour l'année 2021/2022 et du détournement de pouvoir dont se trouverait entachée la fixation des redevances domaniales, sont sans incidence sur le bien-fondé de l'avis de sommes à payer en litige. Dans ces conditions, alors même que la commission d'accès aux documents administratifs, dans son avis du 7 juillet 2022, a estimé que " toutes les conventions d'occupation du domaine public conclues par la commune avec les exploitants du village de Noël 2021/2022, ainsi que " toutes les quittances de loyers acquittées ou non se rattachant à ces conventions " étaient des documents administratifs communicables, les conclusions présentées à titre principal par la société France Neige, tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune du Barcarès de produire ces documents, doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions de la société France Neige tendant à l'annulation de l'avis de sommes à payer du 4 février 2022 :
7. En premier lieu, aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ". Ainsi, tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur. En l'espèce, ainsi que l'ont considéré à bon droit les premiers juges, si le titre en litige porte la seule mention " solde occupation container 1 et 2 VN-04/02/22 ", il résulte de l'instruction que, selon la convention signée par la société appelante avec la commune, deux containers n° 1 et n° 2 ont été mis à sa disposition pour une surface de 222 m² en contrepartie d'une redevance de 66 240 euros hors taxes, soit 79 488 euros toutes taxes comprises, dont le paiement était prévu en quatre versements. Dans ces conditions, et alors au demeurant que la société France Neige ne conteste pas que le montant restant dû par elle correspond bien à celui qui lui a été réclamé, le titre exécutoire en litige comporte une indication suffisante des bases de liquidation.
8. En deuxième lieu, la convention conclue entre la société France Neige et la commune a été signée par Mme Cécile Imbo, conseillère municipale, qui bénéficiait, par arrêté du maire du Barcarès du 11 juin 2020, affiché et transmis en préfecture le même jour, d'une délégation de signature relative " ...aux contrats et baux du domaine public et privé de la commune hors occupations du domaine public liées aux activités économiques ". Ces dispositions permettaient néanmoins à Mme A... signe la convention d'occupation destinée à permettre à la société France Neige d'exercer une activité commerciale pendant la période correspondant au marché de Noël. Dans ces conditions, la société France Neige n'est pas fondée à soutenir que le titre exécutoire en litige est illégal à raison de l'irrégularité de la signature de la convention d'occupation domaniale.
9. En troisième lieu, ainsi qu'il est dit au point 6 du présent arrêt, les moyens invoqués par la société appelante tirés de la rupture d'égalité dans la fixation et dans l'encaissement des redevances domaniales entre les différents participants du village de Noël pour l'année 2021/ 2022, et du détournement de pouvoir dont se trouverait entachée la fixation de ces redevances domaniales, sont inopérants à l'encontre de l'avis de sommes à payer qui ne poursuit que l'exécution de la convention d'occupation, elle-même fondée sur la délibération du 2 novembre 2021 dont la légalité n'a pas été contestée.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la société France Neige n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.
Sur la requête n° 24TL01953 :
11. Compte tenu du fait qu'il est statué, par le présent arrêt, sur le bien-fondé des conclusions de la société France Neige tendant à l'annulation du jugement n° 2204286 du 25 avril 2024 du tribunal administratif de Montpellier, il n'y a plus lieu, pour la cour, de statuer sur les conclusions de la requête, enregistrée sous le n° 24TL01953, tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué.
Sur les frais liés au litige :
12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société France Neige la somme que demande la commune du Barcarès au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. De plus, les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de même nature présentées par la société France Neige et d'ailleurs mal dirigées contre l'Etat.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 24TL01358 de la société France Neige est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions, présentées dans la requête n° 24TL01953, tendant au sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 25 avril 2024.
Article 3 : Les conclusions de la commune du Barcarès et de la société France Neige présentées dans la requête n° 24TL01953, relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société France Neige et à la commune du Barcarès.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Faïck, président,
M. Bentolila, président-assesseur,
Mme Beltrami, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2024.
Le rapporteur,
P. Bentolila
La greffière,
C. Lanoux
Le président,
F. Faïck
La greffière
Cynthia La
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° s 24TL01358, 24TL01953 2