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17/12/2024 | FRANCE | N°23TL02026

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 17 décembre 2024, 23TL02026


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 20 avril 2023 par lequel le préfet de l'Hérault a retiré le titre de séjour portant la mention " citoyen de l'Union européenne " dont il était titulaire, lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire fra

nçais pendant une durée d'un an.



Par un jugement n° 2302319 du 9 juillet 2023, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 20 avril 2023 par lequel le préfet de l'Hérault a retiré le titre de séjour portant la mention " citoyen de l'Union européenne " dont il était titulaire, lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2302319 du 9 juillet 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision portant retrait de titre de séjour contenue dans l'arrêté du préfet de l'Hérault du 20 avril 2023 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 août 2023, M. A..., représenté par Me Bourret-Mendel, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 9 juillet 2023 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an contenues dans l'arrêté du préfet de l'Hérault du 20 avril 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

- elle méconnaît l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il dispose de garanties de représentation.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- elle méconnaît l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 août 2024, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête de l'appelant.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 29 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 novembre 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme El Gani-Laclautre a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1982, déclare être entré en France au cours de l'année 2018. Le 20 décembre 2021, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité citoyen de l'Union européenne en présentant une carte d'identité italienne. Le 20 mai 2022, il a obtenu un titre de séjour portant la mention " citoyen de l'Union européenne ", valable du 20 décembre 2021 au 19 décembre 2022 dont il a sollicité le renouvellement le 12 août 2022. Le 19 avril 2023, M. A... a été convoqué par les services de police dans le cadre d'une commission rogatoire et placé en garde à vue pour des faits d'association de malfaiteurs. Par un arrêté du 20 avril 2023, le préfet de l'Hérault a retiré le titre de séjour portant la mention " citoyen de l'Union européenne " dont M. A... était titulaire, a refusé à ce dernier la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un jugement du 9 juillet 2023, le tribunal administratif de Montpellier a, à la demande de M. A..., annulé la décision portant retrait de titre de séjour contenue dans l'arrêté du 20 avril 2023 et rejeté le surplus des conclusions de la demande. M. A... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications ".

3. M. A... se prévaut de sa présence en France depuis l'année 2018, de son insertion professionnelle et du suivi médical dont il y bénéfice. Toutefois, par ces seuls éléments généraux, M. A... ne justifie pas de la nature, de l'ancienneté et de la stabilité des liens qu'il aurait développés en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. Au contraire, il ressort des pièces du dossier qu'il vit en France de manière précaire et isolée et n'y justifie pas d'une insertion sociale solide ni des liens qu'il y aurait noués. Par ailleurs, l'intéressé, qui se déclare célibataire et sans enfant, dispose d'attaches familiales au Maroc, attestées par la présence de son père et de ses frères ainsi qu'il l'a déclaré lors de son audition par les services de police. Dans ces conditions, compte tenu des conditions d'entrée et de séjour de M. A... sur le territoire français, le préfet de l'Hérault n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis et n'a, dès lors, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, aux termes du 1°, du 3° et du 6° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...) / 6° L'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois a méconnu les dispositions de l'article L. 5221-5 du code du travail ". La décision en litige vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicables à la situation de M. A... ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, et mentionne l'ensemble des éléments relatifs à la situation administrative, personnelle et familiale de l'intéressé. Elle précise, d'une part, que M. A... ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français, d'autre part, qu'il a déclaré travailler en qualité d'employé polyvalent sans disposer ni d'une autorisation de travail ni d'un titre de séjour en méconnaissance de l'article L. 5221-5 du code du travail et, enfin, que son titre de séjour lui est retiré en raison d'une fraude documentaire et qu'il ne peut en obtenir le renouvellement en raison de l'inauthenticité de la carte d'identité italienne présentée à l'appui de sa demande de titre de séjour en qualité de citoyen de l'Union européenne. La décision portant obligation de quitter le territoire français, fondée sur les dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ayant été prise sur le fondement d'une décision relative au séjour elle-même motivée, elle n'avait dès lors pas à faire l'objet d'une motivation distincte. En outre, celle édictée sur le fondement des dispositions du 1° et du 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de la motivation exhaustive de l'arrêté en litige, que le préfet de l'Hérault se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle de M. A....

6. En troisième et dernier lieu, aux termes des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes des dispositions de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage d'éloigner un étranger du territoire national, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences exceptionnelles sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait une éventuelle interruption des traitements suivis en France. Dans ce cadre, et dès lors qu'elle dispose d'éléments d'informations suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie qu'elle prévoit des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, l'autorité préfectorale doit, lorsqu'elle envisage de prendre une telle mesure à son égard, saisir le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et l'intégration ou le médecin de l'Office pour avis dans les conditions prévues par les dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. M. A... indique souffrir d'une spondylarthrite ankylosante sévère, diagnostiquée en 2018, nécessitant des biothérapies avec un suivi strict régulier. Il soutient qu'il était muni de son dossier médical lors de son placement en garde à vue, de sorte que l'autorité préfectorale disposait des justificatifs l'informant de la gravité de sa pathologie. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'appelant aurait porté à la connaissance de l'autorité préfectorale, dans des termes suffisamment précis, des éléments susceptibles d'établir que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. À cet égard, interrogé par les services de police sur son état de santé lors de son audition en date du 19 avril 2023, l'intéressé a seulement déclaré avoir des problèmes de dos et bénéficier d'injections pour traiter sa douleur. En outre, M. A... ne produit pas, y compris devant la cour, des éléments précis et circonstanciés de nature à établir qu'il serait dans l'impossibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, l'intéressé se bornant à faire état, en des termes généraux, de son tableau clinique et du traitement médical dont il fait l'objet en France, sans produire d'éléments relatifs à la disponibilité des soins que nécessite son état de santé au Maroc. En outre, M. A..., qui indique résider en France depuis l'année 2018, n'établit ni même n'allègue avoir été dans l'impossibilité de déposer une demande de titre de séjour pour raisons de santé. Par suite, en faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français, le préfet de l'Hérault n'a ni fait une inexacte application des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur la situation personnelle de l'intéressé.

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

9. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) / 2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; (...) / 7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ; / 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l'article L. 142-1, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5 ".

10. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a indument obtenu, grâce à la complicité d'un agent préfectoral poursuivi des chefs de fourniture de faux documents par un agent en charge d'une mission de service public et d'aide irrégulière à l'entrée et au séjour des étrangers, un titre de séjour en qualité de citoyen de l'Union européenne en produisant une carte nationale d'identité italienne, elle-même falsifiée, dont il a fait l'acquisition en 2019. Interrogées par le centre de coopération policière et douanière de Vintimille, les autorités italiennes ont indiqué que l'intéressé était inconnu de leurs banques de données. Il ressort également des pièces du dossier que M. A... a, le 19 avril 2013, été placé en garde à vue dans le cadre d'une procédure pénale ouverte du chef d'association de malfaiteurs. Lors de son audition par les services de police, M. A... a reconnu avoir fait l'acquisition de cette pièce d'identité falsifiée auprès d'un ressortissant algérien à Paris en contrepartie d'un versement, en numéraire, d'une somme de 300 euros et avoir été invité à se présenter en préfecture où il a été personnellement pris en charge par l'agent pénalement mis en cause. Il ressort également des pièces du dossier que M. A... a déclaré, lors de cette même audition, ne pas vouloir déférer à son éloignement, avoir égaré son passeport et ne pas disposer d'une adresse stable. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant frauduleusement demandé et obtenu un titre de séjour et comme présentant un risque de soustraction à son éloignement. Dès lors que pour chacun de ces motifs pris isolément, M. A... pouvait légalement faire l'objet d'un refus de départ volontaire, le préfet de l'Hérault, qui n'a commis aucune erreur d'appréciation quant à l'étendue des garanties de représentation de l'intéressé, a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". L'article L. 612-10 du même code dispose que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

12. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. En revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen le conduisant à apprécier les conséquences de la mesure d'interdiction de retour sur la situation personnelle de l'étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 612-6, il incombe seulement au juge de l'excès de pouvoir de s'assurer que l'autorité compétente n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

13. Dès lors que M. A... a fait l'objet d'un refus de délai de départ volontaire, le préfet de l'Hérault était légalement fondé à prononcer une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français en application des dispositions précitées de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si M. A... se prévaut de la gravité de sa pathologie, cet élément ne permet toutefois pas de le faire regarder comme justifiant de circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une interdiction de retour alors qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que l'interruption de son traitement serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité de nature à engager son pronostic vital à brève échéance ni qu'il ne serait pas en mesure de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que M. A... vit en France de manière précaire et isolée et a, ainsi qu'il a été dit, indiqué ne pas vouloir déférer à son éloignement lors de son audition par les services de police. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été interpellé et placé en garde à vue pour des faits d'association de malfaiteurs. Dès lors, d'une part, que M. A... fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, d'autre part, que sa situation ne fait pas apparaître de motifs humanitaires particuliers et, enfin, que sa présence sur le territoire français peut être regardée comme constitutive d'une menace pour l'ordre public eu égard à la détention d'un titre d'identité italien falsifié et à l'obtention indue d'un titre de séjour auprès du service des étrangers de la préfecture, le préfet de l'Hérault n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Pour les mêmes motifs et compte tenu des conditions d'entrée et de séjour de M. A... sur le territoire français, l'autorité préfectorale n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français contenues dans l'arrêté du préfet de l'Hérault du 20 avril 2023. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE:

Article 1 : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Faïck, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2024.

La rapporteure,

N. El Gani-LaclautreLe président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL02026


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL02026
Date de la décision : 17/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Faïck
Rapporteur ?: Mme Nadia El Gani-Laclautre
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : BOURRET MENDEL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-17;23tl02026 ?
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