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03/12/2024 | FRANCE | N°23TL00021

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 03 décembre 2024, 23TL00021


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 1er juin 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Espira-de-l'Agly a prononcé le déclassement du stade municipal situé sur la parcelle cadastrée section ..., rue Thiers.



Par un jugement n° 2104079 du 3 novembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



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ar une requête, enregistrée le 4 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Joubes, demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 1er juin 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune d'Espira-de-l'Agly a prononcé le déclassement du stade municipal situé sur la parcelle cadastrée section ..., rue Thiers.

Par un jugement n° 2104079 du 3 novembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Joubes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 novembre 2022 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune d'Espira-de-l'Agly du 1er juin 2021 portant déclassement de la parcelle cadastré section AL n° 410 ;

3°) de mettre à la charge de cette commune la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération contestée est entachée d'irrégularité dès lors que la procédure à l'issue de laquelle elle a été adoptée méconnaît les dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ; dès lors que la convocation adressée aux conseillers municipaux ne prévoyait pas, dans son ordre du jour, la désaffectation de la parcelle sur laquelle était situé l'ancien stade municipal, le conseil municipal ne pouvait pas se prononcer sur cette affaire ;

- cette délibération est irrégulière dès lors que le temps de parole dont il a disposé pour s'exprimer sur cette affaire, et qui a été limité à trois minutes, a été insuffisant pour qu'il puisse exprimer son point de vue sur le déclassement du stade municipal ; le droit à l'expression des conseillers municipaux a ainsi été méconnu ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques dès lors que le stade, objet du déclassement, était toujours affecté à l'usage du public ; il a cessé d'être utilisé uniquement pendant la période de crise exceptionnelle et temporaire liée à l'épidémie de Covid.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 août 2024, la commune d'Espira-de-l'Agly, représentée par Me Pons-Serradeil, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, la requête est irrecevable dès lors qu'elle méconnaît les dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- à titre subsidiaire, la délibération attaquée est régulière dès lors que la convocation adressée aux conseillers municipaux comprenait un point n° 6, relatif " au déclassement de l'ancien stade municipal du domaine public ", de sorte que la désaffectation de ce bien était nécessairement incluse dans l'examen de la question du déclassement ;

- le droit d'expression de M. A... n'a pas été méconnu au cours de la séance du conseil municipal dès lors que ce dernier a décidé, lui-même, de ne plus intervenir et de quitter la séance;

- la délibération attaquée ne méconnaît pas les dispositions de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques dès lors que l'ancien stade municipal était déjà désaffecté à la date de la délibération.

Par une ordonnance du 6 août 2024, la clôture de l'instruction a été fixée le 3 septembre 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces de ces deux dossiers.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Beltrami,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Diaz, représentant M. A... et de Me Pons Serradeil représentant la commune d'Espira-de-l'Agly.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est un élu de l'opposition du conseil municipal de la commune d'Espira-de-l'Agly (Pyrénées-Orientales). Il a demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de la délibération du 1er juin 2021 par laquelle le conseil municipal de cette commune a prononcé le déclassement du stade municipal situé sur la parcelle cadastrée section AL n° 410, rue Thiers. M. A... relève appel du jugement du 3 novembre 2022 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. (...). ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Un bien d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1, qui n'est plus affecté à un service public ou à l'usage direct du public, ne fait plus partie du domaine public à compter de l'intervention de l'acte administratif constatant son déclassement. " A la différence du déclassement qui exige un acte formel de la collectivité propriétaire de ce bien, la désaffectation d'un bien du domaine public résulte d'un état de fait.

4. Il ressort des pièces du dossier que la convocation du 27 mai 2021 adressée par le maire de la commune d'Espira-de-l'Agly aux conseillers municipaux en vue de la séance du conseil municipal du 1er juin 2021 à 18H30, mentionnait, au point n° 6 de son ordre du jour, que la réunion porterait sur le déclassement de l'ancien stade municipal du domaine public. Dès lors que la mention dans l'ordre du jour de cette affaire impliquait nécessairement l'examen de la question de la désaffectation de ce bien, elle était suffisante pour permettre aux conseillers municipaux de connaître l'objet de la délibération qu'il leur serait proposé d'adopter. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, au motif que l'ordre du jour adressé aux conseillers municipaux serait imprécis, ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales : " Les conseillers municipaux ont le droit d'exposer en séance du conseil des questions orales ayant trait aux affaires de la commune. Dans les communes de 1 000 habitants et plus, le règlement intérieur fixe la fréquence ainsi que les règles de présentation et d'examen de ces questions. A défaut de règlement intérieur, celles-ci sont fixées par une délibération du conseil municipal. " Aux termes de l'article L. 2121-16 du code général des collectivités territoriales : " Le maire a seul la police de l'assemblée. (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a, au cours de la séance du conseil municipal, disposé de trois minutes pour exprimer son point de vue sur le déclassement de l'ancien stade municipal du domaine public. Alors qu'il ressort du compte-rendu de la séance du 1er juin 2021 que M. A... a pu, dans ce délai de trois minutes, exposer que l'ordre du jour de la séance ne mentionnait pas la question de la désaffectation du stade municipal, que la désaffectation doit être un fait établi et que le stade municipal n'était plus entretenu volontairement par la municipalité pour créer artificiellement une situation de désaffectation, l'appelant ne fait état d'aucun autre argument ou élément qu'il n'aurait pas été en mesure d'exprimer oralement dans ce délai. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation de l'article L. 2121-19 du code général des collectivités territoriales, relatif au droit à la libre expression des conseillers municipaux, doit être écarté.

7. En dernier lieu, en application de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques, cité au point 3, le déclassement d'un bien du domaine public suppose le constat préalable de sa désaffectation qui résulte d'un état de fait.

8. Il ressort des motifs de la délibération attaquée du 1er juin 2021 que le stade municipal situé rue Thiers n'était plus utilisé et donc plus affecté à un service public et à l'usage du public depuis plusieurs mois. La délibération indique également que ses annexes immobilières n'étant plus aux normes et n'étant plus utilisées par les administrés à titre de loisirs, ces équipements avaient perdu leur vocation sportive et récréative. Elle en conclut qu'il résultait de cette situation une désaffectation de fait de ce bien.

9. Pour contester ce constat de la désaffectation de fait de ce stade municipal, l'appelant se borne à produire une pétition d'opposition au projet de déclassement de ce bien en vue de sa vente à un promoteur pour la construction d'un projet immobilier. Mais cette pétition, qui fait état du lien qu'entretient l'ancien stade municipal avec l'histoire et le patrimoine de la commune d'Espira-de-l'Agly, ne comporte aucun élément tendant à démontrer la poursuite de son utilisation effective par les habitants de la commune. A cet égard, l'allégation selon laquelle l'inutilisation de ce bien ne présenterait qu'un caractère temporaire, résultant de la crise sanitaire du Covid, n'est corroborée par aucune pièce ou élément du dossier. Il ressort en revanche des pièces du dossier que la commune disposait, à la date de la délibération attaquée, d'un nouveau stade accueillant le public et les manifestations sportives et de loisirs. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2141-1 du code général de la propriété des personnes publiques ne peut qu'être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 1er juin 2021.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Espira-de-l'Agly, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme réclamée par la commune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Espira-de-l'Agly présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune d'Espira-de-l'Agly.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Faïck, président,

M. Bentolila, président assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.

La rapporteure,

K. Beltrami

Le président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL00021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00021
Date de la décision : 03/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-02-025 Domaine. - Domaine public. - Régime. - Déclassement.


Composition du Tribunal
Président : M. Faïck
Rapporteur ?: Mme Karine Beltrami
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE-KNOEPFFLER -HUOT -PIRET-JOUBES

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-03;23tl00021 ?
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