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03/12/2024 | FRANCE | N°22TL21992

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 03 décembre 2024, 22TL21992


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par une première requête, enregistrée sous le n° 2001775, d'annuler l'arrêté du 21 avril 2020 par lequel le président de l'université d'Avignon a défini le cadrage de l'adaptation des modalités de contrôle des connaissances et des mises en situation professionnelle au titre de l'année universitaire 2019-2020 dans le cadre de la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19. Par une deuxième requête, enregistrée sou

s le n° 2002072, M. B... a demandé au tribunal d'annuler la décision par laquelle le prés...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes, par une première requête, enregistrée sous le n° 2001775, d'annuler l'arrêté du 21 avril 2020 par lequel le président de l'université d'Avignon a défini le cadrage de l'adaptation des modalités de contrôle des connaissances et des mises en situation professionnelle au titre de l'année universitaire 2019-2020 dans le cadre de la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19. Par une deuxième requête, enregistrée sous le n° 2002072, M. B... a demandé au tribunal d'annuler la décision par laquelle le président de l'université d'Avignon a implicitement refusé d'abroger l'arrêté du 12 avril 2020 ainsi que les décisions individuelles prises, ou qui seront prises, en application de cet arrêté et, notamment, les délibérations des jurys de toutes les formations de l'université à compter de l'année universitaire 2019-2020 ainsi que les inscriptions administratives et pédagogiques des étudiants de l'université d'Avignon au titre de l'année 2019-2020 admis à passer à l'année supérieure dans tout établissement public d'enseignement supérieur pour toutes les années universitaires depuis l'année 2020-2021. Enfin, par une troisième requête, enregistrée sous le n° 2002074, M. B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les délibérations des différents jurys relevant de l'unité de formation et de recherche " droit, économie et gestion " pour l'année universitaire 2019-2020 et, par voie de conséquence, toutes les décisions individuelles en résultant, notamment les inscriptions administratives ou pédagogiques au titre des années supérieures et, s'agissant des étudiants inscrits au sein de l'université d'Avignon pendant l'année universitaire 2019-2020, d'annuler également les délibérations des différents jurys des formations relevant de cette unité de formation et de recherche adoptées en cours d'instance et, par voie de conséquence, toutes les décisions individuelles en résultant, notamment les inscriptions administratives ou pédagogiques dans les années supérieures.

Par un jugement rendu le 12 juillet 2022 sous les n° 2001775 - 2002072 - 2002074, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 16 septembre 2022 et 7 novembre 2024 ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Lemoine, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 juillet 2022 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler, d'une part, l'arrêté du président de l'université d'Avignon du 21 avril 2020 définissant le cadrage de l'adaptation des modalités de contrôle des connaissances et des mises en situation professionnelle au titre de l'année universitaire 2019-2020 dans le cadre de la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19, d'autre part, la décision par laquelle cette même autorité a implicitement rejeté sa demande tendant à l'abrogation de ce même arrêté et, enfin, toutes les décisions individuelles adoptées pendant ou depuis l'année universitaire 2019-2020 sur le fondement de cet arrêté, notamment toutes les délibérations des jurys de l'ensemble des formations de l'université d'Avignon adoptées au cours de la même période ainsi que, s'agissant des étudiants inscrits au sein de l'université d'Avignon depuis l'année 2019-2020 et admis à passer à l'année supérieure, toutes les inscriptions administratives et pédagogiques au sein de tout établissement public d'enseignement supérieur ou, au moins, au sein de l'université d'Avignon ; à titre subsidiaire, d'annuler seulement l'ensemble des délibérations des différents jurys des formations relevant de l'unité de formation et de recherche " droit, économie et gestion " qui ont été prises pendant ou depuis l'année universitaire 2019-2010 ainsi que, par voie de conséquence, l'ensemble des décisions individuelles en résultant, notamment les inscriptions administratives ou pédagogiques opérées au titre des années supérieures ;

3°) de mettre à la charge de l'université d'Avignon une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- le jugement attaqué vise un moyen, non soulevé devant le tribunal, tiré de ce que les mesures d'adaptation en litige n'ont pas été portées à la connaissance des candidats au moins deux semaines avant le début des épreuves en méconnaissance de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-351 du 27 mars 2020, ce qui nécessitait de reporter les dates des examens ;

- le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité en s'abstenant de communiquer le mémoire, enregistré le 14 février 2022 avant minuit dans le cadre de l'instance n° 2002072 et en omettant de se prononcer sur les nouveaux moyens contenus dans ce mémoire alors que l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction le 14 février 2022 ne mentionnait aucune heure de sorte que l'instruction est réputée close à la date indiquée à partir de minuit ;

- c'est à tort que le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur l'instance n° 2002072 alors que l'arrêté en litige n'avait pas cessé de produire ses effets à la date à laquelle il a statué et qu'il continue de produire des effets dans le calcul des moyennes obtenues par les étudiants inscrits au sein de l'université d'Avignon au titre de l'année 2019-2020 et aussi longtemps qu'ils continueront d'y poursuivre leurs études pour l'obtention d'un diplôme, en particulier, du fait des redoublements, des interruptions d'études et des années d'interruption ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté, au point 16 du jugement attaqué, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre les candidats en se fondant sur la difficulté à prendre en compte, de manière réglementaire, la diversité des situations et des incidents susceptibles d'affecter le parcours de formation des étudiants alors que ces difficultés ont été prises en compte dans le cadre de l'arrêté ultérieur n° 2020-04-SES par lequel le président de l'université d'Avignon a établi très précisément, pour chaque formation, unité d'enseignement et élément constitutif d'unité d'enseignement, les matières qui feront l'objet d'une évaluation de celles qui n'en feront pas l'objet ; par suite la prétendue difficulté retenue par le tribunal ne correspond pas aux faits établis ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté, au point 16 du jugement attaqué, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement tout en relevant que certains étudiants pourraient, à la marge, ne pas tirer le même bénéfice du dispositif mis en place en leur faveur alors que les candidats inscrits au sein d'une même formation se trouvent dans une situation identique au regard du règlement des examens et doivent, dès lors, être traités de manière égale ; or, le dispositif du " 10/20 améliorable " porte atteinte au principe d'égalité dès lors qu'il a pour effet d'aboutir à ce que des étudiants ayant obtenu de meilleures notes aux évaluations organisées obtiennent une moyenne générale du semestre inférieure à celle d'autres étudiants de la même promotion ayant obtenu des notes inférieures aux épreuves ;

- c'est à tort que le tribunal a jugé, au point 16 du jugement attaqué, que la communication d'informations erronées aux jurys issues du système d'information de l'université d'Avignon ne portait pas atteinte au principe d'égalité de traitement alors que les erreurs de paramétrage produites par ce système d'information ont porté atteinte à l'exercice de leur compétence et à leur souveraineté ;

- c'est à tort qu'au point 17 du jugement attaqué, le tribunal a écarté le moyen tiré de ce que les modifications apportées au règlement général des études en licence, master et licence professionnelle au titre de l'année universitaire 2019-2020 ne répondent pas à la nécessité de lutter contre l'épidémie de covid-19 alors que l'arrêté en litige ne se borne pas à neutraliser des épreuves mais neutralise des notes afin d'augmenter artificiellement les moyennes des étudiants en mettant en œuvre le dispositif dit du " 10/20 améliorable ", notamment en ce qui concerne les étudiants ayant obtenu des notes inférieures à 10 sur 20 aux évaluations, y compris celles organisées avant le confinement ;

- le tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit en jugeant, au point 18 du jugement attaqué, que les adaptations pouvant être apportées aux épreuves des examens ou concours ne présentaient pas de caractère limitatif, en méconnaissance de l'alinéa 2 de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-351 du 27 mars 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19, lequel n'emploie pas l'adverbe " notamment " ;

- c'est à tort qu'aux points 19 et 20 du jugement attaqué, le tribunal a jugé que les jurys pouvaient déroger aux notes-seuils et à l'absence de compensation alors que, par principe, ces notes seuils ne peuvent être instituées pour l'obtention du diplôme de licence et que le dispositif dit du " 10/20 améliorable " constitue un dispositif distinct auquel étaient soumis l'ensemble des jurys de licence comme ceux de master et que ce dispositif était invocable par l'ensemble des étudiants sur le fondement de l'arrêté en litige ;

- c'est au prix d'une erreur d'interprétation des textes applicables qu'au point 20 du jugement attaqué, le tribunal a écarté le moyen tiré de ce que le dispositif dit du " 10/20 améliorable " portait atteinte à la compétence du jury et à sa souveraineté en interprétant l'article 2 de l'ordonnance du 27 mars 2020 précitée comme autorisant les établissements à déroger à l'alinéa 4 de l'article 18 de l'arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence alors, d'une part, que cette ordonnance n'a pas pour objet d'autoriser les universités à s'affranchir du principe selon lequel " le jury délibère souverainement à partir de l'ensemble des résultats obtenus par l'étudiant " institué par cet article 18 et, d'autre part, que la liste des adaptations autorisées par cette ordonnance se limite à la nature des épreuves, à leur nombre, à leur contenu, à leur coefficient et, enfin, à leurs conditions d'organisation ;

- le tribunal s'est prononcé, au point 21 du jugement, sur un moyen dont il n'était pas saisi tiré de ce que le délai de prévenance des étudiants de deux semaines n'aurait pas été respecté alors qu'il a seulement entendu, dans le cadre de ses écritures, défendre l'idée selon laquelle il aurait été plus judicieux et davantage conforme à l'intérêt général de se donner le temps de la réflexion sur le dispositif dit du " 10/20 améliorable " et, le cas échéant, reporter à la marge la date des épreuves initialement prévue ;

- le tribunal a écarté, au point 22 du jugement attaqué, le moyen tiré du détournement de pouvoir en se bornant à répondre au seul argument tiré de ce que, postérieurement à l'arrêté en litige, la liste des personnalités extérieures appelées à siéger au sein de la commission de la formation et de la vie universitaire (CFVU) proposée par le président de l'université a été approuvée lors de la réunion de cette instance organisée, le 26 mai 2020, après le confinement en s'abstenant de répondre aux cinq autres arguments qu'il a développés au soutien de son moyen qui étaient de nature à établir la réalité de ce détournement de pouvoir.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté en litige :

- l'arrêté en litige est entaché d'une double incompétence de son signataire :

* d'une part, le président de l'université d'Avignon, auquel la commission de la formation et de la vie universitaire n'avait délégué aucune compétence, ni sur le fondement de l'alinéa 1er de l'article 3 de l'ordonnance n° 2020-347, ni sur le fondement de l'alinéa 1er de l'ordonnance n° 2020-351, était incompétent pour se substituer à la commission de la formation et de la vie universitaire en l'absence de démonstration de l'impossibilité avérée de réunir cette instance, en présentiel, dans le respect des règles de distanciation, ou de manière dématérialisée, et de délibérer dans des délais compatibles avec la continuité du service ;

* d'autre part, le vice-président de la commission de la formation et de la vie universitaire était incompétent pour se substituer à la fois au président de l'université et à cette commission en vue de modifier le document de cadrage des modalités de contrôle des connaissances le 29 avril 2020, document dont la réalité est établie mais qui n'a pas été publié de sorte que les modifications apportées par le vice-président de cette instance n'ont pas été portées à la connaissance des étudiants et des enseignants ; par suite, le document de cadrage des modalités de contrôle des connaissances modifié par le vice-président de la commission de la formation et de la vie universitaire le 29 avril 2020 doit également être annulé pour incompétence de son auteur ;

- les points 1.C.a) et 1.C.b) de l'arrêté en litige, qui instaurent le dispositif du " 10/20 améliorable ", lequel aboutit à neutraliser une large part des notes ou moyennes inférieures à 10 obtenues par les étudiants lors d'évaluations organisées avant le début du confinement ou pendant le confinement et, partant, à augmenter artificiellement leurs notes dès lors que seules les moyennes supérieures à 10/20 sont conservées, méconnaissent l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-351 du 27 mars 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19 dès lors que :

* les modifications ainsi apportées aux examens ne sont pas justifiées par la nécessité de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 ;

* elles excèdent les adaptations autorisées par ces dispositions et celles de la circulaire intitulée " diversifier les modalités d'examen " dès lors que le dispositif du " 10/20 améliorable " revient non pas à neutraliser des épreuves ou des enseignements de manière générale et impersonnelle formation par formation pour l'ensemble des étudiants composant une promotion comme le permet l'alinéa 2 de l'article 2 de l'ordonnance précitée mais à neutraliser certaines notes ou moyennes de manière individuelle et conditionnelle au bénéfice de certains étudiants, y compris postérieurement à la tenue d'évaluations avant le début du confinement lié à la crise sanitaire ;

* elles doivent être portées à la connaissance des candidats au moins deux semaines avant le début des épreuves de sorte que ce délai de prévenance de deux semaines aurait dû conduire à un report des épreuves ;

- les points 1.C.a) et 1.C.b) de l'arrêté en litige portent atteinte à la compétence et à la souveraineté des jurys prévues à l'article 18 de l'arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence et par la circulaire n° 2000-033 du 1er mars 2000 relative à l'organisation des examens dans les établissements publics de l'enseignement supérieur ;

- les points 1.C.a) et 1.C.b) de l'arrêté en litige portent atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats rappelé par l'alinéa 2 de l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-351 du 27 mars 2020 précitée dès lors que le dispositif dit du " 10/20 améliorable " aboutit à des discriminations à l'égard des étudiants les plus méritants qui ne sont justifiées par aucun motif d'intérêt général ;

- les délibérations individuelles des jurys de toutes les formations de l'université d'Avignon sont entachées d'inexactitude matérielle en raison de la formule mathématique erronée utilisée par le système d'information de l'université d'Avignon pour le calcul des moyennes pour l'année universitaire 2019-2020 ;

- l'arrêté en litige, qui a été édicté à des fins politiques, est entaché de détournement de pouvoir dès lors que le président de l'université d'Avignon, après avoir échoué à trois reprises à obtenir l'approbation de la liste des quatre personnalités extérieures qu'il a désignées pour siéger au sein de la commission de la formation et de la vie universitaire et s'assurer d'une majorité stable au sein de cette instance, a fini par obtenir, le 26 mai 2020, l'approbation de cette liste en acceptant de mettre en œuvre le dispositif dit du " 10/20 améliorable " revendiqué par le syndicat étudiant UNEF ; en contrepartie, ce syndicat étudiant, pourtant minoritaire, a obtenu la désignation d'un vice-président étudiant issu de sa liste au sein du conseil académique grâce à la majorité dont dispose le président de l'université au sein de cette instance, alors même que la liste majoritaire d'étudiants est celle de l'association " Inter'Asso Avignon " ; le détournement de pouvoir ainsi caractérisé est conforté par le faisceau d'indices suivant :

* l'arrêté en litige a été édicté par le président de l'université lui-même en excédant ses compétences afin de donner satisfaction à la revendication du " 10/20 améliorable " ;

* l'arrêté en litige a été immédiatement édicté à la suite de la publication d'un article dans la presse quotidienne régionale ;

* le service juridique de l'université n'a disposé que d'un délai d'une demi-journée pour analyser l'arrêté en litige pourtant long et très confus ;

* alors même que le syndicat étudiant UNEF est minoritaire au sein de l'établissement, le président de l'université a permis la nomination d'un vice-président issu de ce syndicat au sein du conseil académique grâce à la majorité dont il dispose au sein de cette instance ;

- c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sans tenir compte ni de la circonstance selon laquelle il n'a pas présenté de conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à l'endroit de l'université d'Avignon et ni de l'équité alors qu'il a dédié une large part de son temps à alerter le président de l'université sur les importantes difficultés juridiques et pédagogiques attachées à l'application du " 10/20 améliorable " tout en se consacrant, dans des conditions matérielles difficiles, à la préparation de cours et de supports afin d'assurer la continuité pédagogique de ses enseignements.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2023, l'université d'Avignon, représentée par Me Vendé, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'appelant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la recevabilité des demandes de première instance :

- M. B... ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir dans le cadre des trois instances qu'il a engagées devant le tribunal, l'arrêté du 21 avril 2020 se bornant à définir le cadre de la future adaptation des modalités de contrôle des connaissances pour l'année universitaire 2019-2020, laquelle a donné lieu à un arrêté distinct du 4 mai 2020 ;

- M. B... ne dispose pas d'un intérêt à agir contre des décisions individuelles prises à l'égard de personnes qui ne sont pas parties à l'instance ;

- les conclusions à fin d'annulation des décisions individuelles prises par voie de conséquence de l'arrêté en litige sont irrecevables en l'absence de production de ces décisions attaquées et d'impossibilité justifiée de les produire ;

- les conclusions à fin d'annulation contenues dans la demande n° 2002074 tendant à ce que l'arrêté en litige et les décisions individuelles subséquentes soient annulés " par voie de conséquence " de l'annulation de la décision implicite refusant son abrogation sont irrecevables dès lors que l'annulation d'une décision refusant d'abroger un acte réglementaire entraîne, tout au plus, le prononcé d'une injonction tendant à ce que l'administration abroge cet acte, laquelle ne vaut que pour l'avenir, contrairement à une annulation ;

- M. B... n'est pas recevable à demander l'annulation par voie de conséquence des décisions individuelles prises au titre des années universitaires ultérieures alors que l'arrêté en litige ne concerne que l'année 2019-2020 et que les décisions individuelles qu'il conteste sont devenues définitives et qu'elles n'ont pas été prises en application ou pour l'application de cet arrêté.

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

- le jugement attaqué est régulier et les autres moyens soulevés par l'appelant au titre de cette cause juridique ont trait à son bien-fondé et non à sa régularité ;

- les développements de la requête tenant à la présentation erronée d'un moyen dans les visas du jugement ne constituent pas un moyen de régularité de nature à conduire à son annulation, les premiers juges s'étant bornés à requalifier ce moyen ; en tout état de cause, l'argument selon lequel il eût été plus judicieux de reporter la date des examens ne constitue pas un moyen ;

- le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à chacun des arguments soulevés, a répondu aux moyens tirés du défaut de publication de la modification du document de cadrage et du détournement de pouvoir ;

- l'instruction ayant été close avec effet immédiat le 14 février 2022 en application de l'alinéa 4 de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, le tribunal n'était pas tenu de communiquer le mémoire produit le même jour par M. B... ; en outre, il n'est pas démontré que ce mémoire contenait des moyens nouveaux ;

- l'arrêté en litige ayant cessé de produire ses effets à la date du jugement attaqué, les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le président de l'université a refusé de l'abroger ont perdu leur objet et c'est à bon droit que le tribunal a jugé qu'il n'avait pas lieu d'y statuer.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté en litige :

- contrairement à ce que soutient l'appelant, le document de cadrage en litige n'a fait l'objet d'aucune modification ; à supposer que l'arrêté en litige ait été modifié, une telle modification aurait implicitement retiré la décision initiale ;

- l'arrêté en litige n'est pas entaché d'incompétence de son auteur ;

- les adaptations apportées aux modalités de contrôle des connaissances au titre de l'année universitaire 2019-2020 sont strictement nécessaires à la lutte contre les conséquences liées à l'épidémie de covid-19 et respectent les exigences prévues par l'article 2 de l'ordonnance n° 2020-351 du 17 mars 2020 précitée dès lors, d'une part, que seuls les enseignements pour lesquels les notes n'étaient pas représentatives du niveau de l'étudiant ont été neutralisés afin de ne pas pénaliser les étudiants, d'autre part, que les notes obtenues avant le confinement qu'elles soient supérieures, égales ou inférieures à 10 sur 20 ont été intégralement conservées et, enfin, que la circulaire du 13 mars 2020 autorise la neutralisation de certains enseignements mais proscrit la neutralisation pure et simple d'un semestre entier ;

- l'arrêté en litige ne créé aucune rupture d'égalité de traitement entre les étudiants ;

- en contestant l'information donnée aux candidats sur les adaptations apportées aux modalités de contrôle des connaissances, M. B... entend, en réalité, contester la date du début des épreuves, circonstance sans lien avec la légalité de l'arrêté en litige ;

- contrairement à ce que soutient l'appelant, l'arrêté en litige n'instaure pas de dispositif du " 10/20 améliorable " dès lors que si l'évaluation s'est déroulée intégralement avant le confinement et est représentative, la note obtenue est reportée telle quelle, qu'elle soit inférieure, supérieure ou égale à 10 ;

- afin de garantir le principe d'évaluation des connaissances et compétences acquises par un étudiant, la circulaire du 13 mars 2020 interdit aux établissements, d'une part, de procéder à la neutralisation pure et simple d'un semestre et, d'autre part, de prendre des décisions qui contreviendraient aux conditions dans lesquelles l'accréditation des diplômes nationaux a été autorisée telles que la décision de ne pas évaluer les connaissances et compétences acquises par un étudiant par la validation d'un semestre ou l'attribution d'une note automatique ; pour autant, dans le contexte de la crise sanitaire, cette circulaire autorise, à titre exceptionnel, la neutralisation de certains enseignements ;

- la seule circonstance que l'arrêté en litige conduise, dans certaines hypothèses, à écarter certaines notes, ne permet pas d'en inférer qu'il instaure un dispositif de validation ou d'attribution automatique de notes comme le soutient l'appelant qui se prévaut d'un jugement rendu par le tribunal administratif de Paris dont les faits ne sont pas transposables à la présente affaire ; en revanche, cette décision juge que les dispositions de l'ordonnance n° 2020-351 donnent une grande latitude aux établissements pour déterminer les adaptations qui peuvent être apportées aux modalités d'organisation des examens et concours eu égard à la situation particulière créée par l'état d'urgence sanitaire ;

- comme le reconnaît lui-même l'appelant, le dispositif en litige ne conduit pas uniquement à neutraliser les notes intérieures à 10 sur 20, il a pour objet d'écarter les notes qui ne sont pas représentatives du niveau de l'étudiant afin d'assurer la notation la plus juste possible en dépit des circonstances particulières liées à la crise sanitaire ; les cas dont se prévaut l'appelant ne sont pas représentatifs ;

- le dispositif en litige a pour but de pallier les effets du confinement et, notamment, ceux de la fracture numérique, sur les notes des étudiants en opérant une conciliation entre l'obligation de contrôle des connaissances et aptitudes des étudiants et la diversité des situations exceptionnellement rencontrées dans le contexte lié à l'épidémie de covid-19 ;

- l'arrêté en litige ne porte pas atteinte à la compétence et à la souveraineté du jury lequel exerce ses prérogatives dans le respect des modalités de contrôle des connaissances instituées au sein de l'établissement pour la validation des unités d'enseignement (UE) et les éléments constitutifs d'unité d'enseignement (ECUE) ;

- l'arrêté en litige ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement entre les candidats : les situations dont se prévaut l'appelant ne sont pas comparables dès lors que ces étudiants, qui ne disposent pas du même nombre d'unités d'enseignement évaluées, sont placés dans des situations différentes ; en outre, la circonstance, au demeurant non établie, selon laquelle les jurys auraient été destinataires de documents de travail erronés issus du système d'information de l'université n'est pas, à elle-seule, de nature à caractériser une atteinte au principe d'égalité de traitement ;

- la formule mathématique utilisée par le système d'information pour le calcul des moyennes de l'année universitaire 2019-2020 n'est pas erronée, la moyenne générale du diplôme de licence restant calculée sur la base de la moyenne simple des moyennes obtenues au titre de chaque année d'études ;

- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

En ce qui concerne les conséquences manifestement excessives s'attachant à une annulation éventuelle de l'arrêté en litige :

- en application du principe de sécurité juridique, l'éventuelle annulation de l'arrêté en litige ne saurait conduire à une annulation systématique de l'ensemble des délibérations des jurys et des inscriptions administratives et pédagogiques eu égard aux conséquences manifestement excessives s'attachant à une telle annulation sur la situation de très nombreux étudiants ayant poursuivi leur cursus universitaire de bonne foi ;

- seules les délibérations de jury dont le sens serait affecté par une éventuelle illégalité de l'arrêté en litige devraient, le cas échéant, être annulées ;

- les inscriptions administratives et pédagogiques des étudiants de l'université d'Avignon au titre d'années universitaires ultérieures au sein de la même université ou d'autres établissements publics d'enseignement supérieur ne constituent pas des actes directement pris en application des délibérations des jurys de l'université ;

- en outre, une annulation par voie de conséquence ne peut être prononcée que si les décisions en cause ne sont pas devenues définitives.

Par une ordonnance du 16 octobre 2024, la clôture d'instruction a été fixée, au 7 novembre 2024, à 12 heures.

Par un courrier du 13 novembre 2024, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen tiré de ce que l'arrêté en litige ayant cessé de produire ses effets avant l'introduction de la requête d'appel, les conclusions tendant à l'annulation du refus implicite de l'abroger ont perdu leur objet, et sont par suite irrecevables.

Des observations en réponse à ce moyen d'ordre public, présentées pour M. B..., ont été enregistrées le 18 novembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- l'ordonnance n° 2020-347 du 27 mars 2020 ;

- l'ordonnance n° 2020-351 du 27 mars 2020 ;

- l'arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme El Gani-Laclautre,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- les observations de Me Reilles, représentant l'université d'Avignon.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 21 avril 2020, pris sur le fondement de l'ordonnance du 27 mars 2020, relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19, le président de l'université d'Avignon a défini le cadrage de l'adaptation des modalités de contrôle des connaissances et des mises en situation professionnelle au titre de l'année universitaire 2019-2020. M. B..., maître de conférences au sein de l'université d'Avignon, a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler cet arrêté du 21 avril 2020. M. B... a également demandé au tribunal d'annuler la décision par laquelle le président de l'université d'Avignon a implicitement refusé d'abroger cet arrêté, ainsi que les décisions individuelles prises, ou qui seront prises, en application de cet arrêté, et notamment les délibérations des jurys de toutes les formations de l'université à compter de l'année universitaire 2019-2020 ainsi que les inscriptions administratives et pédagogiques des étudiants admis dans une année supérieure dans tout établissement public d'enseignement supérieur pour toutes les années universitaires depuis l'année 2020-2021. Enfin, M. B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les délibérations des différents jurys relevant de l'unité de formation et de recherche " droit, économie et gestion " pour l'année universitaire 2019- 2020 et, par voie de conséquence, toutes les décisions individuelles en résultant, notamment les inscriptions administratives ou pédagogiques au titre des années supérieures et, s'agissant des étudiants inscrits au sein de l'université d'Avignon pendant l'année universitaire 2019-2020, dans une formation relevant de l'unité de formation et de recherche de " droit, économie, gestion ", les délibérations des jurys des formations relevant de cette unité adoptées en cours d'instance et, par voie de conséquence, d'annuler toutes les décisions individuelles en résultant, notamment les inscriptions administratives ou pédagogiques au titre des années supérieures. M. B... relève appel du jugement du 12 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Sur l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation du refus implicite d'abroger l'arrêté du 21 avril 2020 :

2. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un acte réglementaire illégal réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de procéder à l'abrogation de cet acte afin que cessent les atteintes illégales que son maintien en vigueur porte à l'ordre juridique. Il s'ensuit que lorsque l'acte réglementaire dont l'abrogation est demandée cesse de recevoir application avant que le juge, saisi d'un recours pour excès de pouvoir contre le refus de l'abroger, ait statué, ce recours perd son objet.

3. L'arrêté du président de l'université d'Avignon du 21 avril 2020 dont M. B... a demandé l'abrogation a pour seul objet, en application des dispositions de l'ordonnance du 27 mars 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19, de définir le cadrage de l'adaptation des modalités de contrôle des connaissances au titre de l'année universitaire 2019-2020 rendue nécessaire par la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19. Dès lors que cet arrêté avait, par principe, une durée d'application strictement limitée à la période de crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19, laquelle a pris fin le 10 juillet 2020, et que, de surcroît, il ressort des pièces du dossier que de nouvelles modalités de contrôle des connaissances ont été postérieurement édictées pour l'année universitaire 2020-2021, l'arrêté dont l'abrogation avait été demandée par M. B... a, de plein droit, cessé d'être applicable à la fin de l'année universitaire à laquelle il se rapportait, alors même que cet arrêté continuerait à produire des effets indirects ou induits postérieurement à l'année universitaire 2019-2020, notamment à l'égard des étudiants concernés par les modalités de contrôle des connaissances dérogatoires instituées par cet arrêté qui ont poursuivi leur parcours universitaire. Dans ces conditions, si des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en litige conservent un objet, celles tendant à l'annulation du refus implicite de l'abroger, enregistrées au greffe de la cour le 16 septembre 2022, sont irrecevables comme ayant perdu leur objet avant l'introduction de la requête d'appel et doivent, par suite, être rejetées.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. En premier lieu, les moyens par lesquels M. B... entend contester le raisonnement suivi par les premiers juges aux points 16, 17, 18, 19 et 20 de leur décision ne se rapportent pas à la régularité du jugement attaqué mais à son bien-fondé et sont, dès lors, inopérants.

5. En deuxième lieu, il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Nîmes, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties au soutien de leurs moyens, a expressément répondu, au point 22 du jugement attaqué, au moyen tiré du détournement de pouvoir qui entacherait l'arrêté en litige. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé sur ce point.

6. En troisième et dernier lieu, en visant et en répondant, au point 21 du jugement attaqué, au moyen tiré de ce que, d'une part, le délai de prévenance de deux semaines institué par l'article 2 de l'ordonnance du 27 mars 2020, selon lequel les adaptations aux modalités de contrôle des connaissances doivent être portées à la connaissance des candidats par tout moyen dans un délai qui ne peut être inférieur à deux semaines avant le début des épreuves, n'avait pas été méconnu et, d'autre part, au moyen tiré de ce que la nécessité de reporter les épreuves des examens au-delà du délai de deux semaines n'était pas davantage établie, le tribunal n'a fait qu'exercer son office en requalifiant, sans se méprendre sur leur portée, les écritures de M. B... afin de leur donner un effet utile. Par suite, le tribunal n'a pas entaché sur ce point son jugement d'irrégularité. En tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance du délai de prévenance de deux semaines, qui a été écarté au fond par le tribunal, affecte l'opposabilité de l'arrêté en litige et se trouve, dès lors, sans incidence sur sa légalité.

Sur la légalité des décisions en litige :

En ce qui concerne le cadre juridique applicable au litige :

7. D'une part, aux termes du huitième alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'éducation : " Les aptitudes et l'acquisition des connaissances sont appréciées, soit par un contrôle continu et régulier, soit par un examen terminal, soit par ces deux modes de contrôle combinés. Les modalités de ce contrôle tiennent compte des contraintes spécifiques des étudiants accueillis au titre de la formation continue. (...). Elles doivent être arrêtées dans chaque établissement au plus tard à la fin du premier mois de l'année d'enseignement et elles ne peuvent être modifiées en cours d'année ". Aux termes de l'article L. 712-6-1 du même code : " I.- La commission de la formation et de la vie universitaire du conseil académique est consultée sur les programmes de formation des composantes. / Elle adopte : (...) 2° Les règles relatives aux examens ; / 3° Les règles d'évaluation des enseignements (...) ".

8. D'autre part, aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 27 mars 2020 relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19 : " Sauf mentions contraires, les dispositions de la présente ordonnance sont applicables du 12 mars au 31 décembre 2020 à toutes les modalités d'accès aux formations de l'enseignement supérieur et de délivrance des diplômes de l'enseignement supérieur, y compris le baccalauréat, et à toutes les voies d'accès aux corps, cadres d'emplois, grades et emplois de la fonction publique. / Elles ne sont mises en œuvre que dans la mesure où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation ". Aux termes de l'article 2 de cette même ordonnance : " (...) les autorités compétentes pour la détermination des modalités d'accès aux formations de l'enseignement supérieur dispensées par les établissements relevant des livres IV et VII du code de l'éducation ainsi que pour la détermination des modalités de délivrance des diplômes de l'enseignement supérieur, y compris le baccalauréat, peuvent apporter à ces modalités les adaptations nécessaires à leur mise en œuvre. S'agissant des épreuves des examens ou concours, ces adaptations peuvent porter, dans le respect du principe d'égalité de traitement des candidats, sur leur nature, leur nombre, leur contenu, leur coefficient ou leurs conditions d'organisation, qui peut notamment s'effectuer de manière dématérialisée. / Les adaptations apportées en application du présent article sont portées à la connaissance des candidats par tout moyen dans un délai qui ne peut être inférieur à deux semaines avant le début des épreuves ". Aux termes du premier alinéa de l'article 3 de la même ordonnance : " Lorsque l'autorité compétente mentionnée au premier alinéa de l'article 2 est un organe collégial d'un établissement et qu'il peut délibérer dans des délais compatibles avec la continuité du service, cet organe collégial peut décider de déléguer au chef d'établissement sa compétence pour apporter les adaptations mentionnées au même article. / Lorsque cet organe collégial ne peut délibérer dans des délais compatibles avec la continuité du service, les adaptations mentionnées à cet article sont arrêtées par le chef d'établissement. Ce dernier en informe alors, par tout moyen et dans les meilleurs délais, l'organe collégial compétent".

9. Enfin, aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 27 mars 2020 adaptant le droit applicable au fonctionnement des établissements publics et des instances collégiales administratives pendant l'état d'urgence sanitaire : " Le conseil d'administration ou tout organe délibérant en tenant lieu ainsi que toute instance collégiale disposant d'un pouvoir de décision d'un établissement public (...) ou de tout autre organisme chargé de la gestion d'un service public administratif peut (...) en vue de l'adoption de mesures présentant un caractère d'urgence, déléguer certains de ses pouvoirs, selon le cas, au président-directeur général, au directeur général ou à la personne exerçant des fonctions comparables, nonobstant toute disposition contraire des statuts de cet établissement, groupement ou organisme. (...) / En cas d'impossibilité avérée de tenir les réunions, y compris de manière dématérialisée, d'un des organes et instances mentionnés à l'alinéa précédent, son président ou, en cas d'empêchement de celui-ci, l'un de ses membres désigné par l'autorité de tutelle peut en exercer les compétences afin d'adopter des mesures présentant un caractère d'urgence jusqu'à ce que cette instance puisse de nouveau être réunie et au plus tard jusqu'à l'expiration du délai prévu à l'article 1er (...) ".

10. Les dispositions de l'ordonnance du 27 mars 2020 ont pour objet, par dérogation aux dispositions législatives applicables, d'autoriser des adaptations des épreuves des examens et des concours postérieurement au début de l'année académique ou du concours à la condition que ces adaptations soient portées à la connaissance des candidats par tout moyen dans un délai qui ne peut être inférieur à deux semaines avant le début des épreuves concernées. Les mesures rendues possibles par cette ordonnance ne peuvent être mises en œuvre que dans la mesure où elles sont nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.

En ce qui concerne la légalité des décisions en litige :

11. En premier lieu, d'une part, à supposer une telle modification intervenue le 29 avril 2020 comme l'allègue M. B..., le moyen tiré de ce que le vice-président de la commission de la formation et de la vie universitaire était incompétent pour se substituer à la fois au président de l'université de l'Avignon et à cette commission, en vue de modifier le document de cadrage des modalités de contrôle des connaissance, est inopérant dès lors que seule l'annulation de l'arrêté du président de l'université d'Avignon du 21 avril 2020 est demandée par l'appelant. Un tel moyen, fondé sur une circonstance postérieure à l'arrêté en litige, ne critique pas utilement la légalité de celui-ci et ne peut, dès lors, qu'être écarté. D'autre part, le moyen tiré de ce que le président de l'université d'Avignon ne disposait d'aucune compétence déléguée par la commission de la formation et de la vie universitaire pour prendre l'arrêté en litige du 21 avril 2020 doit être écarté par adoption des motifs circonstanciés retenus par le tribunal aux points 5 à 8 et 10 à 11 du jugement attaqué.

12. En deuxième lieu, aux termes du point C de l'arrêté en litige : " Pour les Licence, Licence professionnelle et Master, les UE et ÉCUE des semestres pairs sont soit " évalués ", soit " non évalués ". Les paragraphes ci-dessous définissent les notions d'enseignements " évalués ", " non évalués ", les modalités de validation de semestre et de l'année, les modalités de progression vers l'année supérieure et les conditions d'accès à la seconde chance. / a) Les enseignements " évalués " / Les UE ou ÉCUE sont dits " évalués " lorsque : / - des notes ont été obtenues avant le confinement (ces dernières, pouvant être inférieures, supérieures ou égales à 10), / - des notes supérieures ou égales à 10 ont été obtenues pendant et/ou après le confinement. / Deux cas peuvent se présenter : / • Cas 1 : Si l'évaluation s'est déroulée intégralement avant le confinement, la note est reportée telle quelle. C'est le cas lorsqu'au moins une évaluation représentative a eu lieu avant le confinement et qu'aucune autre évaluation ne sera effectuée pour cette UE (ou cet ECUE) pendant et/ou après le confinement pour l'ensemble des étudiants. / • Cas 2 : Si l'évaluation s'est déroulée avant, et/ou pendant et/ou après le confinement : / 1. Si l'étudiant a obtenu une ou plusieurs notes supérieures ou égales à 10 pendant et/ou après le confinement lors d'évaluations à distance / - La moyenne de l'UE/ÉCUE est reportée si elle est supérieure ou égale à 10. / - Dans le cas contraire, l'UE ou l'ÉCUE est dit " non évalué ". / 2. Si l'étudiant n'a pas obtenu de notes pendant et/ou après le confinement ou a obtenu des notes inférieures à 10 / - L'autorité compétente prendra en compte les notes supérieures ou égales à 10 obtenues avant confinement s'il les juge significatives. / - Dans le cas contraire, l'UE ou l'ÉCUE est dit " non évalué ". / b) Les enseignements " non évalués " / Un enseignement est déclaré " non évalué " : / - Quand un étudiant a obtenu une note inférieure à 10 lors d'évaluations à distance, pendant ou après le confinement. / En absence de notes avant, pendant et/ou après le confinement. / En absence de notes durant le confinement et lorsque la ou les notes obtenues avant celui-ci n'est pas jugée ou ne sont pas jugées suffisamment significative(s) pour assurer à elle(s) seule(s) une évaluation juste. / Les enseignements " non évalués " ne participent pas : / - Au calcul de la moyenne d'une UE pour un ÉCUE. / - Au calcul de la moyenne du semestre pour une UE ".

13. D'une part, il ressort des dispositions du point C a) de l'arrêté en litige que les enseignements sont considérés comme évalués dès lors que des notes ont été obtenues avant le confinement quel qu'en soit le quantum, ces notes pouvant être inférieures, supérieures ou égales à 10. En particulier, ces dispositions prévoient expressément qu'une note est reportée telle quelle lorsque l'évaluation s'est déroulée intégralement avant le confinement, notamment lorsqu'au moins une évaluation représentative du niveau de l'étudiant été réalisée avant le confinement et que l'enseignement concerné ne donnera lieu à aucune autre évaluation pour l'ensemble des étudiants, que ce soit pendant ou après le confinement.

14. D'autre part, il ressort de ces mêmes dispositions que les adaptations aux modalités de contrôle des connaissances les plus importantes portent sur les enseignements dont l'évaluation s'est déroulée à la fois avant, pendant et après le confinement, cas dans lesquels la " fracture numérique " pouvant exister entre les étudiants et les difficultés techniques ou d'organisation rencontrées le cas échéant pour suivre ou assurer des enseignements à distance sont de nature à affecter la continuité pédagogique. Une telle situation justifie l'instauration de mesures d'adaptation aux modalités de contrôle des connaissances dans le respect du principe fondamental du contrôle des résultats des étudiants et de l'égalité de traitement entre les candidats. Dans cette hypothèse, en application des dispositions du point C de l'arrêté en litige, l'enseignement est considéré comme " évalué " si l'étudiant a obtenu une ou plusieurs notes supérieures ou égales à 10 pendant le confinement et ou/après le confinement dans le cadre d'évaluations à distance et, dans le cas contraire, l'enseignement est dit " non évalué ". De même, si l'étudiant n'a pas obtenu de notes pendant et/ou après le confinement ou s'il a obtenu des notes inférieures à 10, les notes supérieures ou égales à 10 obtenues avant le confinement seront prises en compte si elles sont jugées significatives par l'autorité compétente. Dans le cas contraire, l'enseignement est considéré comme " non évalué ".

15. Les dispositions en litige dont la teneur vient d'être rappelée n'ont ni pour objet ni pour effet de remettre en cause les évaluations intégralement réalisées avant le confinement dès lors qu'elles sont représentatives du niveau des étudiants et ne donnent pas lieu à une évaluation ultérieure. Par suite, contrairement à ce que soutient l'appelant, ces dispositions ne conduisent pas à neutraliser, par principe, les notes ou moyennes inférieures à 10 obtenues par les étudiants dans le cadre des évaluations réalisées avant la période du confinement. De même, les dispositions en litige ne conduisent nullement attribuer, par principe, aux étudiants une note de 10 afin de compenser les enseignements neutralisés. Au contraire, en conditionnant le report de notes obtenues pendant le confinement ou à distance, et après le confinement, à une double condition tenant au caractère significatif des évaluations réalisées et à l'obtention d'une note supérieure ou égale à 10, les dispositions en litige doivent être regardées comme instaurant des mesures d'adaptation aux modalités de contrôle des connaissances proportionnées et adaptées pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 dans le respect du principe de l'évaluation sincère des étudiants. Par suite, le président de l'université d'Avignon n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 2 de l'ordonnance du 27 mars 2020, relative à l'organisation des examens et concours pendant la crise sanitaire née de l'épidémie de covid-19, en édictant les mesures d'adaptation en litige.

16. En troisième lieu, d'une part, sous réserve des dispositions dérogatoires instaurées par l'ordonnance du 27 mars 2020, les modalités de contrôle des connaissances des étudiants sont arrêtées au sein de chaque établissement, la commission de la formation et de la vie universitaire adoptant les règles relatives aux examens ainsi que les règles d'évaluation des enseignements, conformément aux dispositions citées au point 7 des articles L. 613-1 et L. 712-6-1 du code de l'éducation. Par suite, M. B... ne peut utilement se prévaloir de ce que l'arrêté en litige méconnaîtrait la compétence des jurys, laquelle ne s'étend pas à l'édiction des règles relatives aux modalités de contrôle des connaissances des étudiants.

17. D'autre part, aux termes de l'article 18 de l'arrêté du 30 juillet 2018 relatif au diplôme national de licence dont les dispositions rejoignent au demeurant celles de la circulaire du ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie n° 2000-033 du 1er mars 2000 : " (...) Le jury délibère souverainement à partir de l'ensemble des résultats obtenus par l'étudiant ". Dès lors que, ainsi qu'il a été dit aux points 13 à 15, les modalités de contrôle des connaissances instaurées par l'arrêté en litige, pour faire face aux conséquences liées à la propagation de l'épidémie de covid-19, sont conditionnées aux évaluations des enseignements assurées sous l'autorité des jurys, et à l'appréciation du caractère significatif des notes obtenues par les étudiants effectuée par ces jurys, l'arrêté en litige ne porte pas atteinte à la souveraineté des jurys, laquelle doit s'exercer, ainsi qu'il a été dit au point précédent, dans la limite fixée par le cadrage des modalités de contrôle des connaissances en vigueur au sein de l'établissement.

18. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les adaptations aux modalités de contrôle des connaissances instaurées par l'arrêté en litige s'appliqueraient de manière différenciée à des étudiants qui seraient placés dans la même situation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité de traitement doit être écarté comme manquant en fait.

19. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces dossier que la formule mathématique utilisée par le système d'information de l'université d'Avignon, pour le calcul des moyennes au titre de l'année universitaire 2019-2020 sur la base des délibérations individuelles des jurys de toutes les formations de l'université d'Avignon, serait erronée. En outre, ces délibérations ne sont pas prises pour l'application ou sur le fondement d'un paramétrage informatique mais reposent sur l'appréciation faite par ces jurys des mérites individuels de chacun des candidats. Par suite, le moyen tiré de l'inexactitude matérielle entachant cette formule mathématique ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté comme inopérant.

20. En sixième et dernier lieu, les pièces du dossier ne font aucunement ressortir que l'arrêté en litige, qui édicte des mesures d'adaptation nécessaires et justifiées aux modalités de contrôle de connaissances dans le cadre de la crise sanitaire, aurait été édicté dans un but autre que celui pour lequel il est intervenu. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

Sur les frais liés au litige de première instance :

21. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". Il résulte de ces dispositions que le versement de frais exposés et non compris dans les dépens n'est pas un droit inconditionnel, qu'il relève de l'appréciation des premiers juges de décider, au regard des circonstances de l'espèce, s'il y lieu de condamner la partie perdante à leur paiement et qu'il appartient au juge d'appel, saisi en ce sens, d'apprécier si ces circonstances pouvaient justifier un rejet de ces conclusions.

22. En l'absence de circonstances particulières justifiant qu'il ne soit pas fait droit à ces conclusions, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en mettant à la charge de M. B..., en sa qualité de partie perdante, une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par l'université d'Avignon et non compris dans les dépens dans le cadre des trois requêtes dont il avait saisi le tribunal.

23. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer d'office sur l'irrecevabilité des conclusions tendant à l'annulation des décisions autres que l'arrêté du président de l'université d'Avignon du 21 avril 2020 ni sur la recevabilité des demandes de l'appelant devant le tribunal, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande n° 2002072 et rejeté ses demandes n° 2001775 et 2002074.

Sur les frais liés au litige :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'université d'Avignon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

25. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'université d'Avignon et non compris dans les dépens.

DÉCIDE:

Article 1 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à l'université d'Avignon une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'université d'Avignon.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Faïck, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.

La rapporteure,

N. El Gani-Laclautre

Le président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL21992


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21992
Date de la décision : 03/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-05-01-01 Enseignement et recherche. - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement. - Enseignement supérieur et grandes écoles. - Universités. - Organisation des études universitaires.


Composition du Tribunal
Président : M. Faïck
Rapporteur ?: Mme Nadia El Gani-Laclautre
Rapporteur public ?: Mme Perrin
Avocat(s) : SCP LEMOINE CLABEAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-03;22tl21992 ?
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