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03/12/2024 | FRANCE | N°22TL21738

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 3ème chambre, 03 décembre 2024, 22TL21738


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée unipersonnelle SPR Bâtiment et Industrie a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser, à titre principal, la somme de 256 196,62 euros hors taxes au titre de différentes indemnités qu'elle estime lui être dues dans le cadre de l'établissement du décompte général et définitif du marché de travaux portant sur le lot n° 14 " peinture " du marché de travau

x de construction d'un nouvel hôpital. À titre subsidiaire, la société SPR Bâtiment et Indus...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle SPR Bâtiment et Industrie a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser, à titre principal, la somme de 256 196,62 euros hors taxes au titre de différentes indemnités qu'elle estime lui être dues dans le cadre de l'établissement du décompte général et définitif du marché de travaux portant sur le lot n° 14 " peinture " du marché de travaux de construction d'un nouvel hôpital. À titre subsidiaire, la société SPR Bâtiment et Industrie a demandé au tribunal de condamner solidairement ou in solidum les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud et Otéis à lui verser la somme de 46 616,70 euros au titre des travaux de reprise engagés pour remédier aux dégradations causées à ses ouvrages. Cette société a également demandé au tribunal de condamner solidairement ou in solidum le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet et les sociétés Jean-Paul Viguier et associés, Egis Bâtiments Sud, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment, Groupe Vinet et Tunzini Sud-Ouest à lui payer la somme de 118 422,27 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'allongement du délai d'exécution du marché.

Par un jugement n° 1904320 du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à reverser à la société SPR Bâtiment et Industrie la somme de 141 000 euros, assortie des intérêts contractuels et de leur capitalisation, au titre de pénalités de retard indûment appliquées et rejeté le surplus des conclusions des parties. Par ce même jugement, le tribunal a mis les frais et honoraires de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 34 426,61 euros toutes taxes comprises, à la charge définitive de la société SPR Bâtiment et Industrie et du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet chacun pour moitié.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 3 août 2022 et les 22 septembre et 24 octobre 2023, le centre hospitalier universitaire Castres-Mazamet, représenté par Me Hourcabie, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du 9 juin 2022 du tribunal administratif de Toulouse la condamnant à reverser à la société SPR Bâtiment et Industrie une somme de 141 000 euros au titre de pénalités de retard indûment appliquées et mettant à sa charge pour moitié les frais et honoraires de l'expertise ;

2°) de mettre à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

Sur la régularité du jugement attaqué : la minute du jugement ne comporte pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de la société SPR Bâtiment et Industrie devant le tribunal :

- c'est à tort que le tribunal a écarté les fins de non-recevoir tirées de ce que, d'une part le mémoire en réclamation présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie ne contenait pas l'énoncé d'un différend, d'autre part, le délai de six mois prévu par l'article 50-32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux pour saisir le tribunal était expiré et, enfin, la demande était irrecevable en application du délai raisonnable d'un an ;

- la lettre de la société SPR Bâtiment et Industrie en date du 5 juillet 2011 ne comporte aucune indication ni précision quant aux montants réclamés et contestés s'agissant des travaux supplémentaires de sorte que cette lettre ne saurait être regardée comme un mémoire en réclamation au sens de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux dans sa version applicable au litige, ce qui rendait la demande de cette société irrecevable ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le silence gardé sur le mémoire en réclamation présenté par une lettre du 5 juillet 2011 remise en mains propres contre récépissé le 7 juillet suivant a fait naître une décision implicite de rejet et la société SPR Bâtiment et Industrie disposait, en vertu de l'article 50.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux dans sa version applicable au litige, d'un délai de six mois pour saisir le tribunal à compter de la naissance de cette décision implicite ; le décompte général du marché étant devenu intangible et définitif à la date de saisine du tribunal, la société SPR Bâtiment et Industrie n'était pas recevable à contester ce décompte ;

- en tout état de cause, à supposer que le délai de six mois, prévu à l'article 50.31 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, ne commence à courir qu'à compter de l'intervention d'une décision explicite de rejet, la lettre du centre hospitalier du 16 janvier 2012 adressée à la société doit être regardée comme une décision expresse confirmant la décision implicite de rejet intervenue le 8 octobre 2011 ;

- la demande de la société SPR Bâtiment et Industrie est également tardive, ce qui la rend irrecevable, en application du délai raisonnable d'un an consacré par la décision rendue par le Conseil d'État le 13 juillet 2016 sous le n° 387763 ; or, la société, dont le mémoire en réclamation a été implicitement rejeté le 8 octobre 2011, puis explicitement rejeté par une décision du 16 janvier 2012, n'a formé devant le tribunal administratif un référé tendant à la désignation d'un expert judiciaire que le 9 octobre 2015, soit plus de quatre ans après avoir été destinataire d'une décision implicite rejetant sa demande à objet pécuniaire ; en outre, cette société a attendu le 26 juillet 2019, soit plus de 18 mois après la remise du rapport final de l'expert, intervenue le 31 janvier 2018, pour saisir le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la condamnation du maître de l'ouvrage à lui verser différentes indemnités en règlement du solde du marché.

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale : c'est à tort que le tribunal a fait application, pour l'écarter, de l'exception de prescription quadriennale alors que la demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie, qui tendait à l'annulation d'une décision à objet purement pécuniaire, était soumise au délai raisonnable d'un an.

En ce qui concerne les pénalités de retard :

- c'est à tort que le tribunal a jugé que les pénalités de retard, d'un montant de 141 000 euros, devaient être restituées à la société SPR Bâtiment et Industrie alors, d'une part, que leur bien-fondé a été reconnu par l'expert judiciaire et, d'autre part, que cette société s'est abstenue de les contester tant dans le cadre de son mémoire en réclamation que dans le cadre de son courrier du 5 juillet 2011 adressé au maître d'ouvrage ;

- les retards de la société SPR Bâtiment et Industrie dans l'exécution de ses prestations ont été constatés par les nombreux comptes-rendus de réunions de chantier, notamment les comptes-rendus n°s 190, 191, 192, 193, 194 et 196 ; il était également fondé à appliquer des pénalités pour absences aux réunions et visites de chantier, la société SPR Bâtiment et Industrie n'ayant pas participé aux réunions de chantier n°s 101 à 104, 106, 107 et 131 et aux visites de chantier n°s 137, 139, 140 et 143, ainsi que cela résulte des comptes-rendus n°s 193 et 194 ;

- contrairement à ce que soutient la société SPR Bâtiment et Industrie, le calendrier général d'exécution des travaux qui a été annexé à l'acte d'engagement et les calendriers détaillés d'exécution des travaux, tels qu'ils ont été successivement modifiés par ordres de service, constituent des pièces contractuelles auxquelles elle ne pouvait déroger de façon discrétionnaire ; par suite, les dépassements des délais d'exécution prévus par ces calendriers, constatés à plusieurs reprises par le titulaire de la mission " ordonnancement, pilotage, coordination " dans le cadre de nombreux comptes-rendus de réunions de chantier et retenus par l'expert judiciaire, justifiaient pleinement l'application de pénalités de retard, en application des articles 4.7.2 et 4.7.3 du cahier des clauses administratives particulières du marché.

En ce qui concerne les frais et honoraires de l'expertise : c'est à tort que les premiers juges ont mis à sa charge, pour moitié, les frais et honoraires de l'expertise taxés et liquidés à la somme de 34 426,61 euros.

Sur l'appel incident présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie :

- cet appel incident, qui tend à l'indemnisation des travaux supplémentaires, des travaux de reprise et des préjudices liés à l'allongement de la durée du chantier, est irrecevable dès lors qu'il porte sur un litige distinct, son appel ne tendant qu'à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement attaqué ;

- s'agissant de l'indemnisation des préjudices dont se prévaut la société SPR Bâtiment et Industrie du fait de l'allongement des délais d'exécution du chantier, il ne saurait être tenu pour responsable des manquements de la maîtrise d'œuvre et des autres sociétés intervenantes à leurs propres obligations contractuelles.

Par des mémoires en défense, enregistré les 19 mai, 2 octobre et 5 décembre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société par actions simplifiée unipersonnelle SPR Bâtiment et Industrie, représentée par Me Marquet, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet ;

2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué :

- d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a, d'une part, rejeté ses demandes tendant à l'indemnisation de travaux supplémentaires et des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'allongement des délais d'exécution du marché et, d'autre part, laissé les frais et honoraires de l'expertise à sa charge définitive pour moitié ;

- de condamner le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à lui verser une indemnité globale de 73 540,76 euros hors taxes au titre du solde du marché, majorée de la taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts au taux moratoires ou, à défaut, au taux légal, à compter du 24 janvier 2011, date de la transmission du décompte ou à, défaut, à compter du 1er juin 2011, date de la contestation du décompte général et de mettre à sa charge définitive l'intégralité des frais et honoraires de l'expertise liquidés et taxés à la somme de 34 426,61 euros ;

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour ne condamnerait pas le maître de l'ouvrage à l'indemniser des frais engagés pour remettre en état ses ouvrages dégradés par les autres intervenants sur le chantier, de condamner solidairement ou in solidum les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud et Otéis à lui verser une indemnité de 46 616,70 euros hors taxes, cette somme devant être assortie de la taxe sur la valeur ajoutée au taux applicable et des intérêts moratoires à compter du 24 janvier 2011 ;

- de condamner solidairement ou in solidum le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet et les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment, Groupe Vinet et Tunzini Sud-Ouest à lui verser une indemnité de 118 422,27 euros hors taxes en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait l'allongement des délais d'exécution du marché, cette somme devant être assortie des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées par le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet :

- conformément à l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, elle a régulièrement saisi le maître de l'ouvrage d'un mémoire en réclamation par une lettre du 5 juillet 2011 comportant une contestation des pénalités qui lui ont été appliquées en leur principe ainsi que l'exposé de sa demande d'indemnisation des préjudices résultant de l'allongement de la durée d'exécution du chantier ;

- le délai de six mois dont dispose le titulaire du marché pour saisir le tribunal en application de l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ne lui est pas opposable en l'absence de décision du maître de l'ouvrage rejetant expressément la réclamation formée contre le décompte général du marché ; la lettre du 16 janvier 2012 dont se prévaut le maître de l'ouvrage, qui se borne à l'informer qu'il est procédé au règlement des sommes inscrites dans le décompte général, ne saurait être regardée comme une décision confirmative de la décision implicite de rejet qui serait intervenue le 8 octobre 2011 ;

- le maître de l'ouvrage ne peut utilement se prévaloir du délai raisonnable d'un an institué par la décision d'Assemblée n° 387763 du Conseil d'État du 13 juillet 2016, lequel est inapplicable à la contestation des mesures prises pour l'exécution d'un contrat, le recours de plein contentieux tendant au paiement d'une créance contractuelle née de l'exécution d'un marché public n'étant soumis qu'aux seuls délais institués par le cahier des clauses administratives générales et aux règles de la prescription quadriennale instituée par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- elle a établi son projet de décompte final incluant sa réclamation du 24 janvier 2011 et interrompu le cours de la prescription quadriennale en saisissant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, en vue d'obtenir la désignation d'un expert, le 9 octobre 2015 ; en tout état de cause, le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet ne s'est nullement opposé à cette mesure d'expertise.

En ce qui concerne les pénalités de retard :

- c'est à bon droit que le tribunal a jugé que ces pénalités n'étaient pas fondées ;

- aucune pénalité ne peut lui être appliquée au titre du délai global d'exécution dès lors que les travaux ont été livrés dans les délais prorogés par le maître de l'ouvrage ; les retards qui lui sont reprochés ne portent pas sur le chemin critique du chantier et se limitent à des tâches intermédiaires limitées ; en outre, ces retards sont imputables à d'autres facteurs, notamment, les reports significatifs de son intervention, les retards accumulés par les sociétés devant intervenir avant elle sur le chantier ou encore l'important dégât des eaux survenu en novembre 2008 ; elle n'a eu de cesse de s'opposer aux modifications de calendrier qui lui ont été imposées à l'origine d'une désorganisation du chantier ;

- la société Del Tedesco Bâtiment, qui a fait l'objet de pénalités intermédiaires au même titre qu'elle, en a obtenu le remboursement par le tribunal administratif de Toulouse ;

- aucun retard n'est susceptible d'être retenu dès lors que le calendrier initial d'exécution des travaux initial est rapidement devenu caduc et qu'aucun autre calendrier ne peut lui être contractuellement opposé ; en application de l'article 4.4 du cahier des clauses administratives générales, la modification du délai global d'exécution du marché tous corps d'état devait donner lieu à un accord des entrepreneurs intéressés.

En ce qui concerne son appel incident contre le maître de l'ouvrage et son appel provoqué contre les autres participants à l'opération de construction :

S'agissant de la recevabilité de ses appels incident et provoqué :

- contrairement à ce que soutiennent les sociétés Groupe Vinet, Egis Bâtiments Sud et Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, son appel provoqué est recevable et ne constitue pas un litige distinct dès lors que sa situation est susceptible d'être aggravée s'il est fait droit à l'appel principal ;

- contrairement à ce que soutient la société Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, ses appels provoqué et incident ne sont pas tardifs ;

- l'exception de prescription fondée sur l'article 2224 du code civil, opposée par les sociétés Groupe Vinet et Egis Bâtiments Sud, doit être écartée.

S'agissant de l'indemnisation des travaux supplémentaires :

- c'est à tort que le tribunal n'a que partiellement fait droit à cette demande alors qu'elle a exécuté des travaux sur la base de devis acceptés par le maître de l'ouvrage, certes sans ordre de service, mais qui ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage et qui résultent des modifications apportées au projet par le maître de l'ouvrage dans les conditions suivantes :

* 1 080 euros hors taxes au titre des travaux de reprise des peintures sur des blocs-portes suivant un devis n° 11.08.10.05661 ;

* 720 euros hors taxes au titre des travaux de reprise des peintures dans trois chambres destinées aux personnes à mobilité réduite suivant un devis n° 11.08.10.05660 ;

* 15 170 ,70 euros hors taxes au titre des travaux de pose et de fourniture de protections complémentaires des murs contre les chocs en polychlorure de vinyle de type " décochoc " suivant un devis n° 11.08.10.05659 ;

- elle justifie, par la production de constats d'huissier, la réalité des dégradations causées aux peintures qu'elle a appliquées et qui ne sont pas de son fait ;

- les autres constructeurs, en particulier la société Otéis, en charge de la mission " ordonnancement, pilotage, coordination ", sont à l'origine de ces dégradations dont ils doivent répondre ; ils ne peuvent utilement se prévaloir de l'article 8.10 du cahier des clauses administratives particulières du marché qu'elle a conclu avec le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet selon lequel l'entreprise a la garde de ses ouvrages jusqu'à leur réception ;

- elle est également fondée à obtenir une indemnité de 2 240 euros hors taxes au titre de la révision des prix et de la restitution de la retenue de garantie d'un montant de 7 713,36 euros hors taxes ;

S'agissant de l'indemnisation des préjudices résultant de l'allongement de la durée du marché :

- la durée du chantier a été allongée en raison, premièrement, des modifications du calendrier détaillé d'exécution des travaux à l'origine d'un recalage de ses interventions, deuxièmement, des retards d'exécution et des défaillances imputables à d'autres intervenants, troisièmement, des défaillances de la maîtrise d'œuvre, notamment, des dysfonctionnements de la cellule de synthèse animée par la société Egis Bâtiments Sud et d'un manque d'effectifs mis en place par la maîtrise d'œuvre pour assurer la direction des travaux et les opérations préalables à la réception des travaux, quatrièmement, de la survenance d'un dégât des eaux le 5 novembre 2008 alors que les cloisons en plaques de plâtre étaient en cours de pose et, enfin, cinquièmement des contradictions et des approximations dans la coordination et la planification des travaux assurée par la société Otéis ;

- en sa qualité de titulaire d'un lot de finition impliquant une intervention en fin de chantier, elle a indéniablement subi des retards fautifs imputables à la fois à la maîtrise d'œuvre, au titulaire de la mission " ordonnancement, pilotage, coordination ", à la maîtrise d'ouvrage et aux autres corps d'état devant précéder ses travaux dont les défaillances portent en-elles au moins pour partie, son préjudice ;

- en raison de ces difficultés d'exécution, elle a été contrainte de maintenir ses effectifs sur le chantier jusqu'au mois d'octobre 2010 et de s'adapter aux demandes du maître de l'ouvrage ce qui a conduit, en phase 1, à avancer son intervention sur les locaux techniques, en phase 2, à ajourner ses travaux, ce qui a conduit à une absence de production, au maintien de son encadrement et à une perte de rentabilité, en phase 3, à subir un surcoût salarial en raison des modifications incessantes de la planification des travaux associée à une compression de son délai d'intervention et, enfin, en phase 4, à des surcoûts d'encadrement en raison de l'allongement de la durée du chantier au-delà des prévisions contractuelles ; en outre, elle a été contrainte de reprendre ses ouvrages qui ont été dégradés par certaines sociétés ;

- le rapport d'expertise établi par M. C... dans une autre instance retient la responsabilité du maître de l'ouvrage en raison de ses prises de décision trop tardives, en particulier durant la phase de synthèse, et d'un manque de réactivité pour gérer les conflits qui se sont élevés durant les phases de préparation, d'études d'exécution, de synthèse et de travaux ;

- elle est fondée à engager solidairement la responsabilité du maître de l'ouvrage et celle des autres constructeurs, sur le terrain quasi-délictuel, dont les défaillances respectives ont contribué aux préjudices qu'elle a subis du fait de l'allongement de la durée du chantier et à obtenir une indemnité de 118 422,27 euros hors taxes à ce titre ;

S'agissant des frais et honoraires de l'expertise :

- c'est à tort que le tribunal a laissé ces frais à sa charge pour moitié sans préciser les circonstances particulières de l'affaire justifiant qu'ils soient partagés entre les parties ;

- le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet ayant la qualité de partie perdante devant le tribunal, l'intégralité des frais et honoraires de l'expertise aurait dû être mise à sa charge ; à titre subsidiaire, le jugement attaqué sera confirmé en tant qu'il a jugé que seule la moitié des dépens devait rester à sa charge.

En ce qui concerne l'appel incident sur appel provoqué présenté par les sociétés Egis Bâtiments Sud et Groupe Vinet :

- ces sociétés qui n'ont fait l'objet d'aucune condamnation en première instance, ne disposent pas d'un intérêt pour agir et ne sont, de surcroît, pas recevables à critiquer les seuls motifs du jugement attaqué en tant qu'il écarte l'exception de prescription qu'elles ont opposée devant le tribunal ;

- ces sociétés ne se sont pas prévalues de la prescription instituée par l'article 2224 du code civil devant le tribunal de sorte qu'elles doivent être regardées comme ayant implicitement renoncé à s'en prévaloir ; en tout état de cause, la prescription quinquennale n'est pas acquise dès lors qu'elle n'a eu connaissance des faits précis lui permettant d'agir contre ces constructeurs qu'à compter de la remise du rapport d'expertise.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 juin et 8 septembre 2023, la société par actions simplifiée Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, anciennement dénommée DV Construction, représentée par Me Delavoye, demande à la cour :

1°) de rejeter l'appel provoqué présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie à son encontre et de confirmer le jugement attaqué ;

2°) par la voie de l'appel provoqué, de condamner in solidum le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud et Otéis à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre au bénéfice de la société SPR Bâtiment et Industrie ;

3°) de mettre à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie ou de toute partie perdante une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- à titre principal, l'appel provoqué présenté à son encontre par la société SPR Bâtiment et Industrie est triplement irrecevable dès lors, d'une part, qu'il constitue un litige distinct de l'appel principal dont l'objet se limite aux pénalités de retard appliquées par le maître de l'ouvrage à cette société, d'autre part, qu'il est tardif en ce qu'il a été introduit plus de deux mois après la notification du jugement attaqué et, enfin, que la situation de cette société ne saurait être aggravée s'il était fait droit à l'appel principal ;

- à titre subsidiaire, la société SPR Bâtiment et Industrie, qui entend engager sa responsabilité quasi-délictuelle ne démontre ni l'existence d'une faute de sa part ni l'existence d'un préjudice direct et certain causé par cette faute ;

- elle n'a commis aucune faute à l'origine de l'allongement de la durée d'exécution du marché allégué ;

- le préjudice allégué par la société SPR Bâtiment et Industrie n'est pas établi ainsi que l'a relevé M. B... dans son rapport d'expertise du 30 janvier 2018 ; cette société n'ayant pas produit les pièces complémentaires demandées par l'expert ;

- à titre très subsidiaire, elle est fondée à appeler le maître de l'ouvrage, la maîtrise d'œuvre et le titulaire de la mission " ordonnancement - pilotage - coordination " à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2023, la société par actions simplifiée Groupe Vinet, représentée par Me Gillet, demande à la cour :

1°) de la mettre hors de cause et de rejeter l'appel provoqué présenté à son encontre par la société SPR Bâtiment et Industrie ;

2°) à titre subsidiaire, de limiter sa condamnation à l'égard de la société SPR Bâtiment et Industrie à la somme de 4 638,33 euros ;

3°) à titre subsidiaire, d'une part, par la voie de l'appel incident sur appel provoqué de la société SPR Bâtiment et Industrie, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté au fond la demande formée par la société SPR Bâtiment et Industrie et de la rejeter comme atteinte par la prescription quinquennale et, d'autre part, par la voie de l'appel provoqué, de condamner solidairement ou in solidum le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet et les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment et Tunzini Sud-Ouest à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre excédant la somme de 4 638,33 euros ;

4°) de mettre à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie ou de toute autre partie une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, l'appel provoqué présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie est irrecevable dès lors, premièrement, qu'il porte sur un litige distinct de l'appel principal, lequel concerne exclusivement l'application de pénalités, deuxièmement, qu'il est tardif, troisièmement, que la situation de cette société ne peut pas être aggravée par l'admission de l'appel principal et, enfin, quatrièmement, que l'appel en garantie par lequel cette société demande à être relevée et garantie au titre des pénalités de retard est nouveau en appel ;

- à titre subsidiaire, l'action exercée par la société SPR Bâtiment et Industrie est prescrite en application de l'article 2224 du code civil : le délai de prescription ayant commencé à courir à compter du 24 janvier 2011, date à laquelle cette société a adressé son projet de décompte final au maître de l'ouvrage en y incluant un mémoire en réclamation tendant, d'une part, à l'indemnisation de travaux modificatifs, de travaux supplémentaires, des travaux de reprise des dégradations subies par ses ouvrages et, d'autre part, à la révision des prix ; en outre, la demande tendant à ce que les opérations d'expertise conduites par M. B... lui soient étendues a été présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie le 23 mai 2016, soit postérieurement à l'expiration du délai de prescription quinquennale ;

- contrairement à ce que soutient la société SPR Bâtiment et Industrie, elle n'a nullement entendu, même tacitement, renoncer au bénéfice de l'exception de prescription quinquennale ;

- à supposer que la société SPR Bâtiment et Industrie, qui n'invoque aucun fondement juridique à l'appui de son appel provoqué, ait entendu engager sa responsabilité sur le fondement quasi-délictuel, elle n'a commis aucune faute à l'origine de l'allongement du délai d'exécution du marché : dans son rapport du 31 janvier 2018, l'expert judiciaire impute le retard d'exécution, principalement, à la société Otéis et, accessoirement, au groupement de maîtrise d'œuvre ; les dommages matériels causés par le dégât des eaux survenu au mois de novembre 2008 lui sont totalement étrangers dès lors qu'elle n'a ni signé le protocole d'accord destiné à régler ce sinistre, ni participé aux travaux de remise en état destinés à y remédier ; en outre, le préjudice et lien de causalité entre la faute et le préjudice allégué ne sont pas établis ;

- à titre très subsidiaire, sa condamnation devra être limitée à la somme de 4 638,33 euros correspondant à un retard de trois semaines sur les six mois de retard allégués ;

- à titre infiniment subsidiaire, elle est fondée à appeler le centre hospitalier intercommunal Castres-Mazamet et les sociétés Tunzini Sud-Ouest, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment, Egis Bâtiments Sud et Jean-Paul Viguier à la garantir de toute condamnation excédant la somme de 4 638,33 euros au titre des fautes contractuelles, délictuelles ou quasi-délictuelles commises dans l'exécution de leurs missions respectives.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2023, la société anonyme Del Tedesco Bâtiment, représentée par Me Leridon, demande à la cour :

1°) de rejeter l'appel provoqué présenté à son encontre par la société SPR Bâtiment et Industrie ;

2°) à titre subsidiaire, d'une part, par la voie de l'appel incident sur appel provoqué de la société SPR Bâtiment et Industrie, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté au fond la demande formée par la société SPR Bâtiment et Industrie et de la rejeter comme atteinte par la prescription quinquennale et, d'autre part, par la voie de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud , Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Groupe Vinet et Tunzini Sud-Ouest à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie ou de toute autre partie une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, l'appel provoqué présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie est irrecevable dès lors, d'une part, qu'il porte sur un litige distinct de l'appel principal et, d'autre part, que la situation de cette société ne peut pas être aggravée par l'admission de l'appel principal ;

- à titre subsidiaire, l'action exercée par la société SPR Bâtiment et Industrie est prescrite en application de l'article 2224 du code civil : le délai de prescription ayant commencé à courir à compter du 24 janvier 2011, date à laquelle cette société a adressé son projet de décompte final au maître de l'ouvrage en y incluant un mémoire en réclamation, ce délai expirait le 24 janvier 2016 ; or, ce n'est que le 23 mai 2016 que la société SPR Bâtiment et Industrie a demandé à ce que les opérations d'expertise conduites par M. B... lui soient étendues ;

- elle n'a commis aucune faute à l'origine de l'allongement du délai d'exécution du marché ; aucun des rapports d'expertise ne lui impute les retards à l'origine de l'allongement du délai d'exécution du marché ; au contraire, elle a également été victime de la désorganisation du chantier ainsi que cela résulte du rapport d'expertise établi par M. B... le 12 avril 2016 ;

- les préjudices allégués ne sont pas établis ;

- la société Otéis, en charge de la mission " ordonnancement - pilotage - coordination ", est responsable de la désorganisation du chantier et des dérapages du délai d'exécution du marché à l'origine des surcoûts dont se prévaut la société SPR Bâtiment et Industrie ; ces difficultés sont également imputables aux défaillances de la maîtrise d'œuvre dans l'animation, l'organisation et les travaux de la cellule en charge de la synthèse ;

- elle est fondée à appeler en garantie les sociétés Otéis, Jean Paul Viguier, Egis Sud-Ouest, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Tunzini Sud-Ouest et Groupe Vinet à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 août et 3 novembre 2023, la société par actions simplifiée à associé unique Egis Bâtiments Sud, anciennement dénommée OTH Sud-Ouest, Iosis Bâtiments Sud-Ouest, puis Egis Bâtiments Sud-Ouest, représentée par Me Boudet, demande à la cour :

1°) de rejeter l'appel provoqué présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie ainsi que toute conclusion à fin de condamnation présentée à encontre ;

2°) par la voie de l'appel provoqué, de condamner in solidum le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, les sociétés Jean-Paul Viguier et Associés, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest et Groupe Vinet à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

3°) de mettre à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie ou, à défaut, de toute partie perdante, une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- à titre principal, l'appel provoqué présenté à son encontre par la société SPR Bâtiment et Industrie est irrecevable dès lors, d'une part, qu'il porte sur un litige distinct et, d'autre part, que la situation de cette société n'est pas susceptible d'être aggravée par l'admission de l'appel présenté par le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet ;

- à titre subsidiaire, les conclusions indemnitaires présentées par la société SPR Bâtiment et Industrie par la voie de l'appel provoqué sont prescrites en application de l'article 2224 du code civil ;

- à titre très subsidiaire, les conclusions de la société SPR Bâtiment et Industrie tendant à l'indemnisation des travaux de reprise des dégradations et des préjudices liés à l'allongement de la durée d'exécution du marché doivent être rejetées au fond en l'absence de faute , de lien de causalité entre la faute , le préjudice et de preuve de la réalité du préjudice allégué ;

- les retards pris par la société SPR Bâtiment et Industrie dans l'exécution de ses propres prestations constitue une faute de la victime de nature à l'exonérer de sa responsabilité : les retards d'exécution imputables à cette société et qui ont donné lieu à l'application de pénalités de retard ont joué un rôle causal dans la durée d'exécution des travaux ; à titre subsidiaire, un partage de responsabilité à hauteur de 50 % entre la société SPR Bâtiment et Industrie et toute autre partie succombante s'impose ;

- à titre infiniment subsidiaire, elle est fondée à appeler en garantie le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet et les autres intervenants à l'opération.

La requête a été communiquée aux sociétés par actions simplifiées Jean-Paul Viguier, Otéis et Tunzini Sud-Ouest, lesquelles n'ont pas produit d'observations en dépit de la mise en demeure qui leur adressée, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, par des lettres du 22 mai 2023.

Par une ordonnance du 7 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 5 décembre 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux approuvé par le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme El Gani-Laclautre ;

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique ;

- les observations de Me Roukha, substituant Me Hourcabie, représentant le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, de Me Rivielle, représentant la société SPR Bâtiment et Industrie, de Me Boudet, représentant la société Egis Bâtiments Sud, de Me Riverot, substituant Me Delavallade, représentant la société Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest.

Considérant ce qui suit :

1. Au cours de l'année 2000, le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet (CHICM) a entrepris de faire construire un nouvel hôpital de court séjour regroupant des activités de médecine, de chirurgie et d'obstétrique autour d'un plateau technique à Castres (Tarn), ainsi qu'une unité de psychiatrie. Par un acte d'engagement conclu le 6 février 2003, la maîtrise d'œuvre du projet a été confiée à un groupement solidaire composé de la société Jean-Paul Viguier, architecte et mandataire du groupement, et de la société Egis Bâtiments Sud, bureau d'études techniques anciennement dénommé société OTH Sud-Ouest, puis société Iosis Sud-Ouest, puis Société Egis Bâtiments Sud-Ouest. La conduite d'opération a été confiée à la direction départementale de l'équipement du Tarn. La mission " ordonnancement, pilotage et coordination " a été confiée à la société Otéis, venant aux droits de la société Coplan Sud-Ouest, puis de la société Grontmij. Les travaux ont été divisés en 37 lots. Le lot n° 1 " fondations - gros-œuvre " a été attribué à la société Bouygues Bâtiment Sud-Ouest, le lot n° 7b " blocs-portes " a été confié à la société Del Tedesco Bâtiment, le lot n° 12 " revêtements - sols souples " a été attribué à la société Groupe Vinet et, enfin, les lots n° 15 " plomberie sanitaire " et n° 16 " chauffage - ventilation - conditionnement - désenfumage - gestion technique centralisée " ont été confiés à un groupement composé des sociétés Tunzini Sud-Ouest et Promosanit. Par un acte d'engagement conclu le 3 octobre 2006, le lot n° 14 " peinture " a été attribué à la société SPR Bâtiment et Industrie.

2. Le démarrage des travaux, prévus pour une durée de 33 mois, incluant une période de préparation de six mois, a été fixé au 2 novembre 2006. La réception des travaux de peinture confiés à la société SPR Bâtiment et Industrie a été prononcée le 4 octobre 2010 par un ordre de service n° 48 du 8 octobre 2010. La société SPR Bâtiment et Industrie a établi son projet de décompte le 24 janvier 2011, arrêté à la somme totale de 2 152 642,60 euros hors taxes, ce montant incluant le règlement de travaux supplémentaires, de travaux de peinture destinés à reprendre des dégradations causées à ses propres ouvrages, ainsi qu'une indemnité de 373 321,06 euros hors taxes au titre des préjudices liés à l'allongement de la durée du marché. Par un ordre de service n° 14/051 du 19 mai 2011, la maîtrise d'œuvre a notifié à la société SPR Bâtiment et Industrie le décompte général de son marché comportant, pour cette dernière, un solde négatif de 22 990,81 euros toutes taxes comprises.

3. La société SPR Bâtiment et Industrie a, le 1er juin 2011, signé et retourné ce décompte assorti de réserves qu'elle a de nouveau consignées dans une lettre du 5 juillet 2011 en réitérant ses demandes tendant au règlement de travaux supplémentaires et à l'indemnisation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de l'allongement du chantier. Le pouvoir adjudicateur a gardé le silence sur les lettres précitées des 1er juin et 5 juillet 2011. Par une décision du 16 janvier 2012, le pouvoir adjudicateur a, d'une part, annulé les pénalités de retard portant sur la remise des dossiers des ouvrages exécutés et, d'autre part, fixé le nouveau solde du marché à la somme de 48 106,81 euros, toutes taxes comprises, dont 21 191,11 euros, toutes taxes comprises, à régler à ses sous-traitants, soit un solde final de 26 915,70 euros, toutes taxes comprises, au crédit de cette société.

4. Le 9 octobre 2015, la société SPR Bâtiment et Industrie a saisi le tribunal administratif de Toulouse d'une demande tendant à la désignation d'un expert. Par une ordonnance rendue le 14 décembre 2015, sous le n° 1504651, le juge des référés du tribunal a désigné un expert au contradictoire du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet chargé d'émettre un avis sur la réalité, l'étendue et l'origine des préjudices que cette société soutenait avoir subis au cours du chantier. Par une ordonnance, rendue le 19 octobre 2016 sous le n° 1602295, les opérations d'expertise ont été étendues à l'ensemble des participants à l'opération. L'expert ayant remis son rapport le 31 janvier 2018, la société SPR Bâtiment et Industrie a saisi le tribunal administratif de Toulouse, le 26 juillet 2019, d'une demande tendant à la condamnation du maître de l'ouvrage à lui verser la somme de 256 196,62 euros hors taxes ou, subsidiairement, la somme de 209 578,92 euros hors taxes ou, plus subsidiairement, celle de 192 608,22 euros hors taxes en règlement du solde de son marché. La société SPR Bâtiment et Industrie a également contesté devant le tribunal les pénalités de retard qui lui ont été appliquées, demandé le règlement de travaux supplémentaires ainsi que la condamnation du maître de l'ouvrage et des sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment, Groupe Vinet et Tunzini Sud-Ouest à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison des frais de remise en état de ses ouvrages dégradés et de l'allongement de la durée du marché.

5. Par un jugement du 9 juin 2022, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à reverser à la société SPR Bâtiment et Industrie la somme de 141 000 euros, assortie des intérêts contractuels et de leur capitalisation, au titre de pénalités de retard indûment appliquées, et rejeté le surplus des conclusions des parties. Par ce même jugement, le tribunal a mis les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 34 426,61 euros toutes taxes comprises, à la charge définitive de cette société et du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet chacun pour moitié. Le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet relève appel de ce jugement en tant seulement que, à ses articles 1er et 2, il le condamne à reverser à la société SPR Bâtiment et Industrie le montant des pénalités de retard et met les frais d'expertise pour moitié à sa charge.

6. Par la voie de l'appel incident, la société SPR Bâtiment et Industrie demande à la cour d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a, d'une part, rejeté ses demandes tendant au règlement du solde du marché, à l'indemnisation de travaux supplémentaires et des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'allongement des délais d'exécution du marché et, d'autre part, mis à sa charge pour moitié les frais et honoraires de l'expertise. À titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, la société SPR Bâtiment et Industrie demande à la cour de condamner solidairement ou in solidum les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiment Sud et Otéis à lui verser une indemnité de 46 616,70 euros hors taxes dans l'hypothèse où il ne serait pas fait droit à son appel incident. Par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, la société SPR Bâtiment et Industrie demande également à la cour de condamner solidairement ou in solidum le centre hospitalier intercommunal de Castres Mazamet et les sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiment Sud, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment, Groupe Vinet et Tunzini Sud-Ouest à lui verser une indemnité de 118 422,27 euros hors taxes en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait l'allongement des délais d'exécution du marché. Par la voie d'appels provoqués, les sociétés Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Groupe Vinet, Del Tedesco Bâtiment et Egis Bâtiments Sud présentent des appels en garantie croisés également dirigés contre le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet à l'exception de la société Del Tedesco Bâtiment qui n'appelle pas en garantie le maître de l'ouvrage. Par la voie d'appels incidents sur l'appel provoqué de la société SPR Bâtiment et Industrie, les sociétés Groupe Vinet et Del Tedesco Bâtiment contestent également le jugement attaqué en tant qu'il a écarté l'exception de prescription quadriennale opposée en défense.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie contre le maître de l'ouvrage devant le tribunal :

7. Aux termes de l'article 13.44 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, dans sa version issue du décret du 21 janvier 1976 applicable au litige : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'œuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est (...) de quarante-cinq jours dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. / Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. / Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas encore fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'œuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 ". Le différend qui survient dans l'établissement d'un décompte général d'un marché constitue un différend entre l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage.

8. Aux termes de l'article 50.22 de ce même cahier : " Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage ". Aux termes de l'article 50.23 du même cahier : " La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage ". L'article 50.30 du même cahier : " 50.31 Si, dans le délai de trois mois à partir de la date de réception, par la personne responsable du marché, de la lettre ou du mémoire de l'entrepreneur mentionné aux 21 et 22 du présent article aucune décision n'a été notifiée à l'entrepreneur, ou si celui-ci n'accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l'entrepreneur peut saisir le tribunal administratif compétent. Il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs de réclamation énoncés dans la lettre ou le mémoire remis à la personne responsable du marché. / 50.32. Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable (...) ".

9. Les stipulations de l'article 13.44 et de l'article 50.22 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ne prévoient pas, à la différence de celles de l'article 50.21 que, en cas de rejet implicite ou exprès du mémoire de réclamation prévu par ces stipulations, l'entreprise saisisse la personne responsable du marché d'un mémoire complémentaire. Quand bien même l'entrepreneur qui n'accepte pas la décision prise par le maître de l'ouvrage sur sa réclamation relative au décompte général ou le rejet implicite de sa demande adresserait à la personne responsable du marché un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus, ce mémoire complémentaire ne pourrait ni suspendre ni interrompre le délai de six mois prévu par l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales, dont le point de départ demeurerait fixé à la date de la notification à l'entrepreneur de la décision prise sur sa réclamation. En conséquence, il appartient à l'entrepreneur qui a contesté le décompte général dans le délai de trente ou de quarante-cinq jours prévu à l'article 13.44 à compter de la notification qui lui en a été faite et qui n'accepte pas la décision qui a été prise sur sa réclamation par le maître de l'ouvrage dans le délai de trois mois prévu à l'article 50.31 ou le refus implicite né du silence gardé par le maître de l'ouvrage au terme de ce délai, de saisir du litige le tribunal administratif compétent dans le délai de six mois prévu à l'article 50.32 à partir de la notification de cette décision.

10. La procédure de réclamation préalable prévue par l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, notamment le respect du délai de six mois pour saisir le juge du contrat à compter de la notification à l'entrepreneur de la décision prise sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général, résulte des clauses contractuelles auxquelles les parties ont souscrit. Elles ont organisé de la sorte, ainsi qu'elles le pouvaient, des règles particulières de saisine du juge du contrat. Ces stipulations ne prévoient aucune cause d'interruption de ce délai ni d'autres cas de suspension que la saisine du comité consultatif de règlement amiable. Ni la saisine du juge des référés du tribunal administratif aux fins de voir ordonner une expertise, ni le dépôt du rapport d'expertise n'ont pour effet de suspendre le délai de six mois pour saisir le juge du contrat, le juge des référés saisi d'une demande d'expertise n'étant pas le tribunal administratif compétent pour régler le litige mentionné par l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux.

11. Il résulte de l'instruction que le projet de décompte du marché en litige a été notifié à la société SPR Bâtiment et Industrie par un ordre de service n° 14/051 du 19 mai 2011 dont elle a accusé réception le 1er juin 2011 ainsi que cela résulte des mentions apposées par cette société sur cet ordre de service. Il résulte également de l'instruction que par une lettre du même jour, transmise à l'architecte mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, cette société a contesté les pénalités de retard qui lui ont été appliquées par le maître de l'ouvrage ainsi que le refus de ce dernier de lui payer différentes sommes pour le règlement du marché au titre, notamment, de l'indemnisation de travaux supplémentaires et des travaux de reprise des dégradations subies par ses ouvrages au cours du chantier. Par une lettre du 20 juin 2011, l'architecte a informé la société SPR Bâtiment et Industrie de ce que ce litige, qui s'est noué entre le titulaire et le maître de l'ouvrage, relevait des stipulations de l'article 50 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux. Par une lettre du 5 juillet 2011, remise en mains propres contre récépissé le 7 juillet 2011, la société SPR Bâtiment et Industrie a adressé un mémoire en réclamation au maître d'œuvre. En application des stipulations et des principes rappelés aux points 7 à 10, le silence gardé par le maître de l'ouvrage sur cette réclamation pendant un délai de trois mois a fait naître une décision implicite de rejet le 7 octobre 2011 que la société SPR Bâtiment et Industrie pouvait contester devant le tribunal dans un délai de six mois, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal qui a estimé, à tort, que ledit délai ne pouvait courir en l'absence de décision rejetant expressément la réclamation. Au surplus, en application du principe rappelé au point 10, la saisine du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, le 9 octobre 2015, en vue de la désignation d'un expert, laquelle n'équivaut pas à la saisine du juge du contrat, n'a eu aucun effet suspensif sur le délai de six mois dont disposait la société SPR Bâtiment et industrie pour saisir le tribunal, lequel était expiré, en tout état de cause, avant la demande d'expertise.

12. Par suite, en application des stipulations précitées des articles 50.31 et 50.32 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, en ne saisissant pas le tribunal administratif de Toulouse d'une requête au fond dirigée contre le maître de l'ouvrage dans le délai de six mois à compter de la décision de celui-ci rejetant implicitement sa réclamation, la société SPR Bâtiment et Industrie doit être regardée comme ayant accepté le décompte général et définitif du marché. Il s'ensuit que la saisine du tribunal administratif de Toulouse effectuée par la société SPR Bâtiment et Industrie le 26 juillet 2019 seulement était tardive contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.

13. Eu égard aux principes d'unicité et d'intangibilité du décompte, il résulte de ce qui précède que la société SPR Bâtiment et Industrie était seulement fondée à demander que le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet soit condamné à lui verser le solde créditeur figurant sur le décompte définitif, soit la somme de 26 915,70 euros toutes taxes comprises sans que les parties puissent utilement contester les éléments ou le solde de celui-ci, notamment le montant des pénalités de retard, ni réclamer l'une à l'autre, au titre de leurs relations contractuelles, des sommes dont il n'a pas été fait état dans ce décompte, notamment, les frais supplémentaires exposés par la société SPR Bâtiment et Industrie pour remettre en état ses ouvrages dégradés ou encore l'indemnisation des préjudices que cette dernière estime avoir subis du fait de l'allongement de la durée d'exécution du marché. Par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse, après avoir écarté la fin de non-recevoir opposée en défense par le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet tirée de la tardiveté de la demande dont il était saisi, a condamné cet établissement public reverser à la société SPR Bâtiment et Industrie la somme de 141 000 euros correspondant aux pénalités de retard appliquées dans le décompte général du marché devenu définitif. Dès lors, l'article 1er de ce jugement, qui met à la charge du centre hospitalier appelant la somme précitée de 141 000 euros, doit être annulé, et la demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie devant le tribunal administratif de Toulouse doit être rejetée comme irrecevable, en tant qu'elle est dirigée contre le centre hospitalier universitaire de Castres-Mazamet.

En ce qui concerne la dévolution des dépens opérée par le tribunal :

14. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'État. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge du fond, même d'office, de répartir la charge des frais d'expertise entre les parties, en fonction de leur qualité de partie perdante ou de circonstances particulières justifiées.

15. Dès lors que, ainsi qu'il a été dit aux points 11 à 13, la demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie devant le tribunal était irrecevable en tant qu'elle est dirigée contre le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, cette société doit être regardée comme la partie perdante au sens des dispositions précitées de l'article R. 761-1 du code de justice administrative. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que des circonstances particulières justifieraient que les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 34 426,61 euros toutes taxes comprises, soient mis pour moitié à la charge définitive des parties.

16. Dans ces conditions, le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a mis à sa charge définitive pour moitié les frais et honoraires de l'expertise. Dès lors, il y a lieu d'annuler l'article 2 du jugement attaqué et de mettre l'intégralité des frais et honoraires de l'expertise à la charge définitive de la société SPR Bâtiment et Industrie et de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions d'appel incident par lesquelles la société demande à être déchargée de la moitié des dépens mis à sa charge par les premiers juges.

17. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer ni sur les autres fins de non-recevoir opposées en défense ni sur la régularité du jugement attaqué, le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l'a condamné à reverser à la société SPR Bâtiment et Industrie la somme de 141 000 euros, assortie des intérêts au taux contractuel et de leur capitalisation, inscrite à son débit au titre de pénalités de retard et laissé à sa charge définitive les frais et honoraires de l'expertise pour moitié. Dès lors, les articles 1er et 2 du jugement attaqué doivent être annulés et la demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie devant le tribunal doit être rejetée.

Sur l'appel incident présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie à l'encontre du maître de l'ouvrage :

18. Ainsi qu'il a été dit aux points 11 à 13, la demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie devant le tribunal était irrecevable comme tardive en raison du caractère définitif du décompte établi par le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet. Par suite, les conclusions d'appel incident par lesquelles cette société demande la condamnation du maître de l'ouvrage à lui verser le solde du marché ainsi que différentes indemnités au titre de travaux supplémentaires, des travaux de remise en état de ses ouvrages dégradés et des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'allongement de la durée du chantier, qui tendent à contester le décompte définitif, doivent rejetées par voie de conséquence de l'irrecevabilité de sa demande devant le tribunal.

Sur l'appel provoqué présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie à l'encontre des autres participants à l'opération de travaux publics :

19. Dans le cadre d'un litige né de l'exécution de travaux publics, le titulaire du marché peut rechercher la responsabilité quasi-délictuelle des autres participants à la même opération de construction avec lesquels il n'est lié par aucun contrat, notamment s'ils ont commis des fautes qui ont contribué à l'inexécution de ses obligations contractuelles à l'égard du maître d'ouvrage, sans devoir se limiter à cet égard à la violation des règles de l'art ou à la méconnaissance de dispositions législatives et réglementaires. Il peut en particulier rechercher leur responsabilité du fait d'un manquement aux stipulations des contrats qu'ils ont conclus avec le maître d'ouvrage.

20. Un appel provoqué est recevable dès lors que l'appel principal est accueilli, que les conclusions ne soulèvent pas un litige distinct et que la décision rendue sur l'appel principal est susceptible d'aggraver la situation de l'auteur de l'appel provoqué.

21. Les conclusions, enregistrées après l'expiration du délai d'appel, par lesquelles la société SPR Bâtiment et Industrie demande la condamnation des société Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Del Tedesco Bâtiment, Groupe Vinet et Tunzini Sud-Ouest, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle au titre de leur participation à une même opération de construction, constituent des conclusions d'appel provoqué. Ces conclusions, qui portent sur des manquements imputés à ces sociétés dans le cadre de l'exécution de leurs propres contrats, reposent sur une cause juridique distincte et soulèvent ainsi un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel principal, lequel porte sur le bien-fondé des pénalités mises à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie par le centre hospitalier appelant dans le cadre du contrat liant ces derniers. En outre, la décision rendue par le présent arrêt sur l'appel principal présenté par le centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet n'a pas pour effet d'aggraver la situation de la société SPR Bâtiment et Industrie vis-à-vis des autres sociétés intervenantes à l'opération de construction. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'exception de prescription quinquennale ni sur les autres fins de non-recevoir opposées en défense, les conclusions d'appel provoqué présentées par la société SPR Bâtiment et Industrie à l'encontre des sociétés Jean-Paul Viguier, Egis Bâtiments Sud, Otéis, Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Groupe Vinet, Del Tedesco Bâtiment et Tunzini Sud-Ouest, sont irrecevables comme portant sur un litige distinct et ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les appels incidents sur appel provoqué présentés par les sociétés Groupe Vinet et Del Tedesco Bâtiment et sur les appels provoqués croisés présentés par les sociétés Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Groupe Vinet, Del Tedesco Bâtiment et Egis Bâtiments Sud :

22. L'appel provoqué présenté par la société SPR Bâtiment et Industrie à l'encontre des autres participants à l'opération de construction en litige étant irrecevable comme constitutif d'un litige distinct, ainsi qu'il a été dit au point 21, les appels incidents sur appel provoqué présentés par les sociétés Groupe Vinet, Del Tedesco Bâtiment, et les appels provoqués présentés par ces deux sociétés ainsi que par les sociétés Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest et Egis Bâtiments Sud, sont également irrecevables et ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetés, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur autres les fins de non-recevoir opposées par la société SPR Bâtiment et Industrie.

Sur les frais liés au litige :

23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société SPR Bâtiment et Industrie demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

24. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société SPR Bâtiment et Industrie une somme de 1 500 euros à verser, à chacun, au centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, à la société Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, à la société Groupe Vinet, à la société Del Tedesco Bâtiment et à la société Egis Bâtiment Sud.

DÉCIDE:

Article 1 : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1904320 du 9 juin 2022 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par la société SPR Bâtiment et Industrie devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée en tant qu'elle est dirigée contre le centre hospitalier universitaire de Castres-Mazamet.

Article 3 : Les frais et honoraires de l'expertise taxés et liquidés à la somme de 34 426,61 euros toutes taxes comprises par une ordonnance de la vice-présidente du tribunal administratif de Toulouse du 15 mars 2018 sont mis à la charge définitive de la société SPR Bâtiment et Industrie.

Article 4 : Les conclusions de la société SPR Bâtiment et Industrie présentées par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions des sociétés Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, Groupe Vinet, Del Tedesco Bâtiment et Egis Bâtiments Sud présentées par la voie de l'appel incident sur l'appel provoqué et par la voie de l'appel provoqué sont rejetées.

Article 6 : La société SPR Bâtiment et Industrie versera au centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, à la société Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, à la société Groupe Vinet, à la société Del Tedesco Bâtiment et à la société Egis Bâtiment Sud une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier intercommunal de Castres-Mazamet, à la société par actions simplifiée à associé unique SPR Bâtiment et Industrie, à la société par actions simplifiée Jean-Paul Viguier, à la société par actions simplifiée Egis Bâtiments Sud, à la société par actions simplifiée Otéis, à la société par actions simplifiée Bouygues Bâtiment Centre Sud-Ouest, à la société par actions simplifiée Groupe Vinet, à la société anonyme Del Tedesco Bâtiment et à la société par actions simplifiée à associé unique Tunzini Sud-Ouest.

Copie en sera adressée, pour information, à M. A... B..., expert.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Faïck, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2024.

La rapporteure,

N. El Gani-LaclautreLe président,

F. Faïck

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 22TL21738


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