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24/10/2024 | FRANCE | N°23TL00249

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, 1ère chambre, 24 octobre 2024, 23TL00249


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.



Par un jugement n° 2026370, 2026371 du 21 novembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier, à qui le dossier a été transféré, a rejeté ses demandes.



Procédure devant la cour :



Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 20 janvier et 11 juillet 2023, M. A..., représenté p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015.

Par un jugement n° 2026370, 2026371 du 21 novembre 2022, le tribunal administratif de Montpellier, à qui le dossier a été transféré, a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 20 janvier et 11 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Crevel puis par Me Rossi-Lefèvre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 novembre 2022 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de prononcer la décharge ou la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la société de fait Duval-Ferreira n'a exercé aucune activité au-delà du 31 décembre 2014 ;

- les encaissements effectués au cours du mois de février 2015 dans les comptes de la société de fait Duval-Ferreira, dont l'activité a cessé le 31 décembre 2014 et alors qu'il n'était plus résident fiscal de France, se rattachent à l'exercice 2014 et la somme de 16 080,06 euros a été imposée au titre de l'année 2014 ;

- la somme de 16 080,06 euros ne peut être imposée au titre des années 2014 et 2015 ;

- sa résidence fiscale ne se situe plus en France, mais en Principauté d'Andorre, depuis le 26 février 2015 ;

- la reconstitution de son chiffre d'affaires à partir des sept douzièmes des revenus déclarés par la société andorrane Xoneo Media SL au titre de l'année 2015 est entachée d'erreur d'analyse et d'appréciation ;

- à titre subsidiaire, le montant de ses recettes est inférieur aux sept douzièmes des revenus déclarés par la société Xoneo Media SL.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 11 mai et 10 août 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'appelant sont inopérants ou ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 10 octobre 2023.

Par une ordonnance du 8 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon,

- et les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... fait appel du jugement du 21 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, au titre des années 2014 et 2015. Les impositions établies au titre de l'année 2015 procèdent de la reconstitution, dans le cadre d'une procédure de taxation d'office, du bénéfice de la société de fait Duval-Ferreira, dont M. A... est associé à hauteur de 50 %, l'administration ayant estimé que son activité de programmation informatique en France s'était poursuivie jusqu'au 24 juillet 2015.

Sur les conclusions en décharge :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus (...) ". L'article 4 B du même code dispose que : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire (...) ". Pour l'application de ces dispositions, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer. Aux termes enfin de l'article 167 du même code : " 1. Le contribuable domicilié en France qui transfère son domicile à l'étranger est passible de l'impôt sur le revenu à raison des revenus dont il a disposé pendant l'année de son départ jusqu'à la date de celui-ci, des bénéfices industriels et commerciaux qu'il a réalisés depuis la fin du dernier exercice taxé, et de tous revenus qu'il a acquis sans en avoir la disposition antérieurement à son départ (...) ".

3. Il résulte de l'instruction, notamment du contenu de la déclaration de revenus souscrite par M. A... le 2 juin 2015 et des informations qu'il a lui-même communiquées lors d'une information judiciaire ouverte à son encontre à la suite d'une plainte déposée le 5 novembre 2014, que l'intéressé a conservé, en 2015, sa résidence en France, à Toulouse (Haute-Garonne), à Fontanes (Lot), puis à Cahors (Lot). Ses relevés bancaires font état, outre de versements mensuels liés à des abonnements de téléphone et d'autoroute et à des cotisations d'assurances et de mutuelle, de nombreuses dépenses de la vie courante réalisées en France en 2015. M. A... ne parvient pas à remettre en cause ces éléments en se bornant à verser au dossier un contrat de bail conclu le 26 février 2015 pour un logement situé à Escaldes-Engordany (Principauté d'Andorre) et un relevé de compte établi à son nom, émanant d'une banque andorrane, révélant différents prélèvements et retraits d'espèces à compter du mois de février 2015, alors même qu'il se déduirait de ces derniers, en les combinant aux débits constatés sur son compte bancaire français, qu'il aurait passé en moyenne quinze jours par mois en Andorre entre le 26 février 2015 et le 24 juillet 2015. Il doit, en conséquence, être regardé comme ayant, au moins jusqu'à cette dernière date, son foyer ou le lieu de son séjour principal en France et, par suite, son domicile fiscal en application du a. du 1 de l'article 4 B du code général des impôts. Il était dès lors passible de l'impôt sur le revenu jusqu'au 24 juillet 2015 en raison de l'ensemble de ses revenus en application de l'article 4 A du même code.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 93 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession (...) ". L'article 93 A du même code dispose que : " I. A compter du 1er janvier 1996 et par dérogation aux dispositions de la première phrase du 1 de l'article 93, le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt peut, sur demande des contribuables soumis au régime de la déclaration contrôlée, être constitué de l'excédent des créances acquises sur les dépenses mentionnées au 1 de l'article 93 et engagées au cours de l'année d'imposition. L'option doit être exercée avant le 1er février de l'année au titre de laquelle l'impôt sur le revenu est établi ; elle s'applique tant qu'elle n'a pas été dénoncée dans les mêmes conditions (...) ". Aux termes enfin de l'article 202 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " 1. Dans le cas de cessation de l'exercice d'une profession non commerciale, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices provenant de l'exercice de cette profession y compris ceux qui proviennent de créances acquises et non encore recouvrées et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi. / Les contribuables doivent, dans un délai de soixante jours déterminé comme il est indiqué ci-après, aviser l'administration de la cessation et lui faire connaître la date à laquelle elle a été ou sera effective, ainsi que, s'il y a lieu, les nom, prénoms et adresse du successeur. / Ce délai de soixante jours commence à courir : a. lorsqu'il s'agit de la cessation de l'exercice d'une profession autre que l'exploitation d'une charge ou d'un office, du jour où la cessation a été effective (...) ".

5. Il ne résulte pas de l'instruction que la société de fait Duval-Ferreira, qui n'est pas radiée du centre de formalités des entreprises, ait avisé l'administration fiscale de la cessation de son activité au 31 décembre 2014 dans les conditions prescrites par l'article 202 du code général des impôts. En outre, le droit de communication exercé le 6 juillet 2017 auprès du tribunal de grande instance de Toulouse et les relevés de comptes bancaires de la société de fait ont révélé qu'elle a continué à percevoir des revenus issus de régies publicitaires et à régler les salaires de ses associés et les honoraires de son cabinet comptable jusqu'au mois de mai 2015. L'administration a également relevé que MM. Duval et A... n'ont créé que le 24 juillet 2015 la société de droit andorran Xoneo Media SL, qui a pour objet social l'exploitation de plusieurs sites internet et la gestion de la monétisation de ces sites, et que cette société n'a pu, avant cette date, assurer la gestion des sites internet exercée jusqu'alors par la société de fait Duval-Ferreira. Il résulte enfin de ce qui a été dit au point 3 du présent arrêt que M. A... doit être regardé comme ayant son foyer ou le lieu de son séjour principal en France jusqu'au 24 juillet 2015 et que l'activité de programmation informatique avait ainsi conservé ses installations en France jusqu'à cette date. Dans l'ensemble de ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a considéré que la société de fait Duval-Ferreira a poursuivi son activité postérieurement au 31 décembre 2014 et jusqu'au 24 juillet 2015 et que M. A... a été imposé à raison des bénéfices non commerciaux réalisés par cette société au cours de l'année 2015.

6. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article 93 du code général des impôts que le bénéfice non commercial à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est normalement constitué par l'excédent des recettes totales encaissées au cours de l'année d'imposition sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession et effectivement acquittées au cours de cette même année. Toutefois, le bénéfice imposable peut, en vertu de l'article 93 A du code général des impôts, être déterminé, à la demande des intéressés, en tenant compte des créances acquises et des dépenses engagées au cours de l'année d'imposition.

7. Il ne résulte pas de l'instruction que la déclaration de résultats de la société de fait Duval-Ferreira a été établie, pour l'année 2014, non dans le cadre d'une comptabilité de caisse, mais dans celui d'une comptabilité d'engagement, pour laquelle la société aurait opté sur le fondement de l'article 93 A du code général des impôts. L'appelant n'apporte aucun élément permettant d'établir que la somme de 16 080,06 euros, portée au crédit du compte bancaire de la société de fait le 26 février 2015, aurait été acquise au titre de l'année 2014. Il ne justifie pas davantage que cette somme aurait été déclarée et imposée au titre de l'année 2014. Dans ces conditions, alors qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 du présent arrêt que l'activité de cette société n'a pas cessé le 31 décembre 2014, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'encaissement de cette somme, à supposer qu'elle corresponde à une facturation et à une créance acquise en 2014, devait être rattaché à cet exercice et à remettre en cause son intégration dans les recettes imposables de l'année 2015. Pour les mêmes motifs, l'appelant n'est pas davantage fondé à soutenir que la somme de 16 080,06 euros, à bon droit imposée au titre de l'année 2015, devrait en conséquence être retranchée du bénéfice imposable de l'année 2014.

8. En quatrième lieu, le service vérificateur a constaté que le montant des recettes publicitaires encaissées par la société de fait Duval-Ferreira entre le 1er janvier et le 24 juillet 2015, à hauteur de 16 080,06 euros, est sans commune mesure avec celui des recettes déclarées en 2014, de l'ordre de 500 000 euros sur une période de douze mois en 2014. Il a également relevé que les clients habituels de la société n'apparaissaient pas en 2015, alors que le site de téléchargement exploité a connu des conditions de fonctionnement analogues. Le service en a déduit que ses associés ont retardé l'encaissement des recettes publicitaires pour les prendre en compte dans les résultats de la société Xoneo Media SL, qui a enregistré un chiffre d'affaires de 334 176 euros entre la date de sa création et le 31 décembre 2015. Pour reconstituer le chiffre d'affaires de la société de fait Duval-Ferreira jusqu'au 24 juillet 2015, à hauteur de 204 316 euros, l'administration a donc pris en compte la proportion de sept douzièmes de la somme de 350 256 euros, comprenant les recettes enregistrées par la société Xoneo Media SL et la somme de 16 080 euros. En se bornant à soutenir que le chiffre d'affaires déclaré par cette dernière était pertinent pour un semestre d'activité, compte tenu des prévisions de croissance de l'activité, de l'ordre de 670 000 euros sur une année entière, sans étayer son moyen et l'origine de ces projections, et à se prévaloir, à titre subsidiaire, d'une proportion affinée à 204 jours sur 365, M. A..., qui, ainsi qu'il a été dit au point 3, a eu son foyer ou le lieu de son séjour principal en France au moins jusqu'au 24 juillet 2015, ne remet pas efficacement en cause le bien-fondé de la reconstitution opérée.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, où siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Lafon, président-assesseur,

Mme Fougères, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23TL00249 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23TL00249
Date de la décision : 24/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur le revenu - Détermination du revenu imposable.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices non commerciaux - Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. Rey-Bèthbéder
Rapporteur ?: M. Nicolas Lafon
Rapporteur public ?: Mme Restino
Avocat(s) : CREVEL MATHILDE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-24;23tl00249 ?
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